CA VERSAILLES (13e ch.), 4 juin 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 2322
CA VERSAILLES (13e ch.), 4 juin 2009 : RG n° 08/01114
Extrait : « Mais considérant que les parties n'ont pas convenu de soumettre le contrat au droit de la consommation, aucune clause en ce sens ne figurant à l'acte ; que la remarque de la SARL PML sur le fait que Monsieur X. n'a en toute hypothèse pas respecté le délai de rétractation de 7 jours, ne constitue pas une reconnaissance non équivoque de ce que le droit de la Code de la consommation est applicable en l'espèce ; Considérant que l'installation d'une borne Internet à monnayeur a un rapport direct avec l'exploitation d'un café ; que le droit de la consommation n'est donc pas applicable ; que Monsieur X. doit en conséquence être débouté de sa demande en annulation du contrat par application des règles du droit de la consommation sur le démarchage ; que le jugement sera confirmé de ce chef ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
TREIZIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 4 JUIN 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
RG n° 08/01114. Code nac : 53 E. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 décembre 2007 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE - N° chambre : 4 - RG n° 2007F747.
[minute Jurica page 2] LE QUATRE JUIN DEUX MILLE NEUF, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT :
Monsieur X.
exerçant sous l'enseigne « LE BISTROT DES Y. », [adresse], représenté par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués - N° du dossier 20080162, assisté de Maître BATEJAT, avocat au barreau de NANTERRE.
INTIMÉE :
SARL PARTENARIAT MATERIEL LOISIRS « PML »
[adresse], représentée par Maître BINOCHE, avoué - N° du dossier 137/08, assisté de Maître PICHON, avocat au barreau de PARIS.
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 9 avril 2009, Monsieur Jean BESSE, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de : Monsieur Jean BESSE, président, Madame Nicole BOUCLY-GIRERD, conseiller, Madame Annie DABOSVILLE, conseiller, qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute Jurica page 3] Par acte en date du 28 août 2006, Monsieur X., exploitant un bar sous l'enseigne « Le Bistrot des Y. », a conclu un contrat de location d'une borne Internet avec la Société PARTENARIAT MATERIEL LOISIRS (SARL PML), pour une durée de 60 mois, moyennant un loyer de 8 € HT par jour.
Monsieur X. a refusé la livraison du matériel et n'a pas provisionné son compte bancaire si bien que le chèque de 2.880 € remis le jour de la conclusion du contrat n'a pas été payé.
Le 5 février 2007, Monsieur X. a fait assigner la SARL PML en nullité du contrat. Cette dernière a formé une demande reconventionnelle en résiliation du contrat, et paiement de l'indemnité de résiliation.
Par jugement en date du 20 décembre 2007, le Tribunal de commerce de Nanterre a :
- débouté Monsieur X. de sa demande en nullité du contrat,
- prononcé la résiliation du contrat aux torts de Monsieur X.,
- condamné Monsieur X. à payer à la SARL PML la somme de 7.200 € au titre de la clause pénale
- débouté la SARL PML de sa demande en paiement de dommages et intérêts et d'indemnité de procédure.
Monsieur X. a interjeté appel de ce jugement et, par conclusions signifiées le 4 février 2009, demande à la cour :
- de prononcer la nullité du contrat et de débouter la SARL PML de toutes ses prétentions,
- subsidiairement de réduire la clause pénale à 1 euro,
- en toute hypothèse de condamner la SARL PML à lui payer la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts et la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La SARL PML, par conclusions signifiées le 19 novembre 2008, demande à la cour de confirmer le jugement, et y ajoutant, d'ordonner la capitalisation des intérêts, et de condamner Monsieur X. à lui payer la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Sur le démarchage :
[minute jurica page 4] Monsieur X. fonde sa demande en annulation du contrat sur les règles du droit de la consommation en matière de démarchage.
Monsieur X. rappelle que l'article L. 121-22 4° du Code de la consommation exclut de son application les contrats qui « ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation (...) commerciale ». Il estime que tel n'est pas le cas en l'espèce, alors qu'il n'exploite pas un cybercafé, mais que la borne Internet était destinée à être utilisée par sa clientèle habituelle. Il souligne que vis à vis du contrat il se trouvait dans le même état d'ignorance qu'un consommateur. Il note que la SARL PML admet implicitement l'application du droit de la Code de la consommation puisqu'elle lui reproche de ne pas avoir respecté le délai de rétractation de 7 jours édicté par ce code.
Mais considérant que les parties n'ont pas convenu de soumettre le contrat au droit de la consommation, aucune clause en ce sens ne figurant à l'acte ; que la remarque de la SARL PML sur le fait que Monsieur X. n'a en toute hypothèse pas respecté le délai de rétractation de 7 jours, ne constitue pas une reconnaissance non équivoque de ce que le droit de la Code de la consommation est applicable en l'espèce ;
Considérant que l'installation d'une borne Internet à monnayeur a un rapport direct avec l'exploitation d'un café ; que le droit de la consommation n'est donc pas applicable ; que Monsieur X. doit en conséquence être débouté de sa demande en annulation du contrat par application des règles du droit de la consommation sur le démarchage ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;
Sur le vice du consentement :
Monsieur X. demande subsidiairement que le contrat soit annulé pour vice du consentement et fait notamment valoir :
- que le commercial de la SARL PML est venu délibérément lors du service de midi, à une heure où il devait s'occuper de la clientèle et se trouvait dans l'impossibilité matérielle de prêter attention au contrat qu'on lui présentait,
- que le commercial lui a indiqué oralement qu'il disposait à titre exceptionnel « d'un mois d'essai », et qu'il donnerait une réponse définitive après ce délai,
- que ce n'est que lorsqu'il a pu lire attentivement le contrat qu'il a compris qu'il ne lui avait pas été accordé un mois d'essai, mais seulement une franchise de loyers d'un mois, et que s'il voulait renoncer à la location, il devrait verser une « indemnité contractuelle justifiée »,
- que ces manœuvres dolosives l'ont conduit à signer le contrat, ce qu'il n'aurait pas fait si le démarcheur n'avait pas insisté pour qu'il appose une signature sur un contrat qui ne devait pas l'engager de manière définitive mais au contraire lui donner le temps de la réflexion.
- qu'il verse aux débats les attestations de deux clients qui décrivent les conditions dans lesquelles il [minute Jurica page 5] a été harcelé par le représentant de la société jusqu'à ce qu'il signe ce contrat, présenté comme un contrat à l'essai pouvant être résilié à tout moment.
Mais considérant que Monsieur X. reproche au représentant de la société de s'être présenté à son établissement à un moment où il était occupé dans l'urgence et de lui avoir donné des indications erronées ; que le moment choisi pour parvenir à la conclusion d'une affaire ne constitue pas une manœuvre suffisante pour conférer un caractère dolosif à de fausses déclarations ; que Monsieur X. doit être débouté de sa demande en annulation du contrat pour dol ; que le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la résiliation du contrat :
Considérant qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat aux torts de Monsieur X., en raison de son refus de prendre livraison du matériel et de payer les loyers ; que d'ailleurs cette disposition du jugement n'est pas discutée ;
Sur la clause pénale :
Monsieur X. rappelle que le contrat contient une clause pénale qui fixe forfaitairement le préjudice résultant de la résiliation du contrat à une somme égale à la moitié des loyers et soutient qu'il en résulte en l'espèce une indemnisation manifestement excessive. Il estime qu'en l'espèce la résiliation du contrat n'aurait dû causer aucun préjudice à la SARL PML, et fait valoir à ce propos :
- que la SARL PML a acquis le matériel en mai 2006, pour une installation au 1er juin 2006, et avait donc ce matériel en stock,
- qu'informée dès le 4 septembre 2006 de son intention de résilier le contrat, la SARL PML pouvait donner le matériel en location à une autre personne,
- que la SARL PML ne démontre pas le montant de son préjudice, et notamment ne donne aucune indication sur la commission qu'elle prétend avoir versé à son commercial,
- que le matériel a été vendu à la Société Allianthis dès le mois de septembre 2007,
- que la SARL PML est à l'origine de son préjudice pour avoir persisté à chercher à livrer le matériel, malgré le refus qui lui était opposé.
La SARL PML demande que le jugement soit confirmé en ce qu'il a fait application de la clause pénale sans la réduire, car la somme ainsi allouée n'est pas supérieure à son préjudice. Elle fait valoir à ce propos :
- qu'elle a acquis le matériel pour exécuter le contrat signé avec Monsieur X.,
- [minute Jurica page 6] que contrairement à ce qu'il prétend, Monsieur X. n'a pas refusé catégoriquement la livraison du matériel, mais a d'abord tenté de renégocier les termes du contrat et n'a saisi le tribunal que 6 mois après sa signature,
- qu'ainsi elle s'est présentée à trois reprises pour procéder à l'installation du matériel, sans succès,
- qu'outre les frais ainsi engagés, elle a réglé la commission due à son agent commercial,
- que Monsieur X. tente d'égarer la cour en invoquant la facture libellée à l'ordre de la Société Allianthis, car cette facture ne correspond pas à une vente, mais à la cession du contrat à un organisme financier, et n'a eu aucune suite en raison du refus des livraisons.
Considérant que la SARL PML ne démontre pas avoir acquis le matériel pour le mettre à la disposition de Monsieur X., étant observé que le contrat est du 28 août et la tentative de livraison du 4 septembre 2006 ; que si des discussions ont été entreprises au mois de septembre 2006, elles ont définitivement pris fin lors de l'intervention du Conseil de Monsieur X. par lettre recommandée avec avis de réception en date du 11 décembre 2006 ;
Considérant que le préjudice causé par le refus des livraisons par Monsieur X. se trouve limité à l'immobilisation du matériel pendant 4 mois, aux commissions de l'agent commercial, aux frais des livraisons et au gain manqué ; que la clause pénale d'un montant de 7.200 € est manifestement excessive au regard du préjudice effectif, même en tenant compte de l'effet de contrainte à l'exécution que doit conserver une stipulation de cette nature ; qu'il convient d'en réduire le montant à la somme de 3.000 € TTC, en fixant le point de départ des intérêts au jour de l'arrêt ;
Que le jugement doit être réformé en conséquence ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 20 décembre 2007 par le Tribunal de commerce de Nanterre en ce qu'il a débouté Monsieur X. de sa demande en nullité du contrat, prononcé la résiliation du contrat aux torts de Monsieur X.,
débouté la SARL PML de sa demande en paiement de dommages et intérêts et d'indemnité de procédure, et condamné Monsieur X. à payer à la SARL PML une indemnité de résiliation forfaitaire,
Réformant le jugement sur le montant de cette indemnité, condamne Monsieur X. à payer à la SARL PML la somme de 3.000 € TTC, avec les intérêts au taux légal à compter de ce jour,
Dit que les intérêts pourront être capitalisés à compter du 5 juin 2010,
[minute Jurica page 7] Rejette les demandes que les parties forment sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Monsieur X. aux dépens de première instance et d'appel, et accorde aux avoués à la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Jean BESSE, président et par Monsieur Jean-François MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,