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TJ PARIS (pôle civ. proxim.), 27 mars 2025

Nature : Décision
Titre : TJ PARIS (pôle civ. proxim.), 27 mars 2025
Pays : France
Juridiction : T.jud. Paris
Demande : 23/02046
Date : 27/03/2025
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 13/02/2023, 27/12/2023
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CERCLAB - DOCUMENT N° 23656

TJ PARIS (pôle civ. proxim.), 27 mars 2025 : RG n° 23/02046

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « Concernant enfin la promesse d’autofinancement et de rentabilité de l’installation, celle-ci doit être formalisée par une mention dans le bon de commande et la preuve de la rentabilité effective ne peut résulter que de l'envoi de la première facture de revenus d’électricité de ERDF.

En l’espèce, le bon de commande signé par M. Y. et Mme X. contient la mention selon laquelle les panneaux ont pour finalité la revente du surplus de l’électricité produite (la case « revente surplus » ayant été cochée), ce dont on peut déduire que leur a été promis le financement de leur propre consommation, le surplus étant destiné à la revente. Aucun élément contenu dans le contrat ne permet toutefois de conclure que le surplus promis couvrirait les mensualités d’emprunt, de sorte qu’aucune tromperie portant sur une promesse d’autofinancement, ne peut, cette dernière n’étant pas établie, avoir été découverte ultérieurement. Cependant, dès lors que la « revente d’énergie » est entrée dans le champ contractuel, il convient de fixer le point de départ de la prescription à la date de la première facture de revente d’énergie, date à laquelle ils ont pu vérifier qu’ils pourraient bien revendre le surplus produit.

La première facture étant datée du 14 mars 2018, l’action être exercée jusqu'au 14 mars 2023 de sorte que l'action introduite par assignation du 13 février 2023 est recevable. »

2/ « En principe, la prescription commence à courir à compter du jour où l'acte irrégulier a été signé. S'agissant de l'action en nullité du contrat de vente pour non-respect des dispositions du code de la consommation, le point de départ du délai est donc le jour de la signature du bon de commande lorsque l’examen de la teneur de la convention permet de constater l’irrégularité.

En l'espèce, le contrat de vente conclu entre M. Y. et Mme X. et Groupe ECO HABITAT a été conclu le 10 juillet 2016. M. Y. et Mme X. soutiennent que ce dernier a été conclu en violation des dispositions du code de la consommation, notamment de ses articles L. 221-5, L. 111-1, R. 111-1, L. 112-1 et L. 612-1. […]

En l’espèce, le bon de commande produit par M. Y. et Mme X. ne reproduit pas les dispositions du code de la consommation. Il est toutefois mentionné, dans les conditions générales de vente, que le contrat est soumis aux dispositions de l’article L. 121-16 du code de la consommation, et que les défendeurs reconnaissent avoir reçu préalablement l’ensemble des informations prévues à l’article L. 121-17 de ce code, concernant notamment les caractéristiques essentielles, le prix du bien objet du contrat ainsi que la date ou le délai auquel le vendeur s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service objet du contrat. Si les dispositions de l’article L. 121-17 précité n’était plus applicable à la date de la conclusion du contrat, force est de constater que M. Y. et Mme X. ont expressément reconnu avoir reçu les informations concernant les caractéristiques essentielles de l’installation, le prix du bien objet du contrat, ainsi que les délais de livraison. La possibilité pour eux de se prévaloir d’un manquement sur ce point est donc prescrite depuis la date de la conclusion du contrat, à laquelle ils ont indiqué avoir reçu ces informations, et à laquelle ils auraient dû avoir connaissance du fait qu’elles ne leur avaient pas été délivrées, si cela n’avait pas été le cas.

S’agissant de l’omission de la mention relative à la possibilité de recourir au médiateur de la consommation et de l’insuffisance des mentions relatives aux modalités de financement, les demandeurs étaient en mesure de vérifier, au jour de la signature du bon de commande, que ces mentions, qu’ils jugent essentielles pour la validité de celui-ci, n’y figuraient pas s’agissant du médiateur de la consommation, étant précisé que le bon de commande est suffisamment précis sur les modalités de financement.

Il sera par ailleurs rappelé qu’en enfermant la prescription dans un délai de cinq ans, le législateur a entendu garantir la sécurité juridique et ne pas permettre que tout acte puisse être remis en cause au-delà. Les requérants bénéficiaient en réalité d’un délai de cinq années à compter de la signature du bon de commande pour consulter un conseiller juridique et prendre la décision d’agir en nullité du contrat de vente s’ils estimaient que ledit contrat était affecté d’une cause de nullité depuis le moment de sa formation, ce qu’ils n’ont pas fait. Ils ne peuvent désormais invoquer à l’appui de leurs prétentions leur propre manque de diligence, quand bien même ils sont effectivement des consommateurs.

En conséquence, le délai pour agir - s’agissant de la méconnaissance des dispositions du code de la consommation – courait à compter du 10 juillet 2016 et a expiré le 10 juillet 2021 à minuit, de sorte que l’action introduite au visa de ces dispositions par assignation en date du 26 janvier 2023 est prescrite. La demande en nullité du contrat de vente pour ce motif est ainsi irrecevable.

Le point de départ du délai de prescription ainsi fixé au vu des pièces aux débats ne porte donc pas une atteinte au principe d'effectivité des droits du consommateur issus du droit de l'Union européenne qui impose uniquement que les dispositions de droit interne ne rendent pas impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits de l'ordre juridique européen. Or, le point de départ du délai de prescription ainsi fixé au vu des pièces aux débats et la durée du délai de prescription ne portent pas atteinte au principe d'effectivité des droits du consommateur issus du droit de l'obligation de l'Union européenne.

En conséquence, l'action en nullité fondée sur la non-conformité du bon de commande au formalisme du code de la consommation, introduite suivant exploit introductif d’instance délivré le 13 février 2023, soit plus de 5 années après la signature du bon de commande litigieux, est prescrite. »

3/ « La rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d’une installation photovoltaïque au sens de l’article L.111-1 du code de la consommation qu’à la condition que les parties l’aient fait entrer dans le champ contractuel (Civ. 1re, 21, octobre 2020, pourvoi n°18-26.761). En outre, si le vendeur a l’obligation d’informer les acquéreurs sur la production d’électricité de l’installation (1ère chambre civile, 20 décembre 2023 n° 22-14.020), il n’a pas l’obligation de faire figurer sur le bon de commande des engagements sur la rentabilité de l’installation. En tout état de cause, il apparaît impossible pour le vendeur de formuler un engagement de rentabilité économique du contrat sur le long terme.

Il sera en l’espèce constaté qu’outre le fait que M. Y. et Mme X. ne justifient pas de la rentabilité exacte de leur installation comprenant l’économie d’énergie tirée de l’autoconsommation, ils ne justifient pas de ce que le vendeur leur aurait garanti un certain niveau de rentabilité de l’installation. En effet, le bon de commande ne comporte aucune mention relative à une garantie de revenus. Il en résulte que le contrat de vente n’engage nullement la société venderesse à un quelconque degré de rentabilité et que les arguments commerciaux sont sans emport s’ils ne sont pas formalisés dans le contrat qui, seul, lie les parties. M. Y. et Mme X. ne produisent par ailleurs aucun élément objectif permettant d’établir des mensonges du vendeur relatifs à l’autofinancement ou la rentabilité de l’installation lors de la conclusion du contrat.

M. Y. et Mme X. échouent ainsi à établir que la société venderesse se soit intentionnellement livrée à des manœuvres particulières pour convaincre leurs clients autrement que par les promesses verbales de son démarcheur, lesquelles ne suffisent pas à caractériser un dol, étant rappelé que les consommateurs sont précisément protégés de ces talents de persuasion par le délai légal de rétractation. Le dol n’est donc pas constitué sur ce point. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS

PÔLE CIVIL DE PROXIMITÉ

JUGEMENT DU 27 MARS 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/02046 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZJW7.

 

DEMANDEURS :

Madame X.

demeurant [Adresse 2], représentée par Maître Jérémie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI,

Monsieur Y.

demeurant [Adresse 2], représentée par Maître Jérémie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI,

[…]

 

DÉFENDERESSES :

SA DOMOFINANCE

dont le siège social est sis [Adresse 1], représentée par Maître Sébastien MENDES GIL, avocat au barreau de PARIS, vesitaire : #P0173

SELARL AXYME prise en la personne de Maître N. es qualité de mandataire liquidateur de la SAS GROUPE ECO HABITAT

dont le siège social est sis [Adresse 3], non comparante, ni représentée

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Mathilde CLERC, Juge, juge des contentieux de la protection, assistée de Antonio FILARETO, Greffier,

DATE DES DÉBATS : Audience publique du 19 décembre 2024 ; Délibéré le 27 mars 2025

JUGEMENT : réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 27 mars 2025 par Mathilde CLERC, Juge assistée de Antonio FILARETO, Greffier

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 10 juillet 2016, M. Y. et Mme X. ont, après avoir été démarchés à domicile, contracté auprès de la société par actions simplifiée (SAS) Groupe ECO HABITAT une prestation relative à la fourniture et la pose d'une installation photovoltaïque pour un montant total TTC de 39 900 euros, suivant bon de commande n° 4154.

Le même jour, M. Y. et Mme X. ont souscrit une offre de crédit affecté auprès de la société DOMOFINANCE, d'un montant de 39 900 euros, au taux débiteur de 4,54% l'an, remboursable en 120 mensualités de 422,19 euros, hors assurance facultative, d’un montant mensuel de 22,38 euros.

Par jugement du 25 avril 2023, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Groupe ECO HABITAT et désigné la SELARL AXYME prise en la personne de Me N. en qualité de liquidateur.

Par actes de commissaire de justice délivrés les 13 février 2023 et 27 décembre 2023, M. Y. et Mme X. ont fait assigner respectivement la société DOMOFINANCE et la SELARL AXYME prise en la personne de Me N., es qualité de liquidateur de Groupe ECO HABITAT, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté et condamner la société DOMOFINANCE au paiement de diverses sommes d'argent en réparation des dommages qu’elle aurait causé du fait du déblocage fautif des fonds.

L'affaire a été une première fois appelée à l'audience du 12 mai 2023, et a fait l’objet de plusieurs reports aux fins de permettre aux parties de se mettre en état.

A l’audience de plaidoiries du 19 décembre 2024, à laquelle l’affaire a été examinée, M. Y. et Mme X., représentés par leur conseil, s’en sont rapportés à leurs dernières écritures, aux termes desquelles ils sollicitent du juge, au visa de l'article liminaire du code de la consommation, des anciens articles 1109 et 1116 du code civil, de l'article 16 de la loi n°2012-354 du 14 mars 2012 de finance rectificative pour 2012, des articles 221-5 et suivants du code de la consommation, des artciles L 111-1 et R.111-1 du code de la consommation, de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et du décret d’application n°2016-884 du 29 juin 2016, de :

-déclarer leurs demandes recevables,

- prononcer la nullité du contrat de vente,

- prononcer, en conséquence, la nullité du contrat de prêt affecté,

- condamner la société DOMOFINANCE à leur verser les sommes suivantes :

- 39 900 euros correspondant à l’intégralité du prix de vente de l’installation,

- 14 099,29 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par eux en exécution du prêt souscrit ;

- 5 000 euros au titre du préjudice moral subi,

- 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire,

prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la société DOMOFINANCE,En tout état de cause,

débouter la société DOMOFINANCE condamner la société DOMOFINANCE aux dépens de l’instance.A l’appui de leurs demandes principales, ils soutiennent avoir été victimes d’une réticence dolosive portant sur les caractéristiques de l’installation, outre avoir été trompés sur la rentabilité de l'opération et le caractère définitif du contrat qu’ils avaient signé. Ils ajoutent que le vendeur n'aurait pas respecté les dispositions impératives du code de la consommation en omettant de faire figurer, dans le contrat de vente, les caractéristiques de l’installation, le prix et le détail du coût de l’installation, ainsi que les délais et modalités de livraison et de financement. Il n’y aurait par ailleurs pas été fait mention de la possibilité d’avoir recours au médiateur de la consommation.

Ils considèrent que la société DOMOFINANCE a commis une faute en versant les fonds sans procéder préalablement aux vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat était affecté d’irrégularités et sans vérifier l'exécution complète de la prestation.

En réponse à la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée en défense, ils soutiennent que le point de départ du délai de prescription n'est pas fixé au jour de la signature des contrats mais au jour où le titulaire du droit d'agir a connu ou aurait dû connaître les irrégularités et manœuvres dénoncées leur permettant d'agir; que s'agissant de l’action en responsabilité contractuelle, ce point de départ ne peut être fixé à la date de la seule connaissance du dommage mais à celle à laquelle ils ont eu ou auraient dû avoir non seulement connaissance du dommage, dans toute son ampleur, mais également du fait générateur de responsabilité. S'agissant du fait générateur de responsabilité, ils estiment qu'ils ne pouvaient pas avoir connaissance du manquement de la banque à son obligation d'information et d'avertissement sur la régularité du bon de commande puisque cette obligation est précisément faite à celle-ci pour pallier l'ignorance légitime du consommateur en la matière. Ils ajoutent que les irrégularités du bon de commande consistant en des mentions absentes ne peuvent ressortir de la « seule lecture » des documents contractuels, sauf à exiger de l'emprunteur qu'il procède à une analyse approfondie du contrat que seul un professionnel du droit peut réaliser. Ils soulignent que la Cour de cassation a récemment jugé que la reproduction des dispositions du code de la consommation, même lisible, dans le bon de commande, ne permet pas d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat. Ils précisent n’avoir eu connaissance du défaut de rentabilité de leur installation qu’après plusieurs années de production. Enfin, ils considèrent que la prescription doit être écartée par souci d'efficacité et d'effectivité du droit de la consommation. Enfin, sur le fondement de l’article 6-1 de la convention européenne des droits de l’homme, ils font valoir que le principe d’égalité des armes impose de garantir aux parties un droit d’agir ou de se défendre dans les mêmes conditions notamment face à la prescription.

La société DOMOFINANCE, représentée par son conseil, s’en est également rapportée à ses dernières écritures aux termes desquelles elle sollicite du juge de :

A TITRE PRINCIPAL

- DECLARER la demande en nullité du contrat conclu avec la société Groupe ECO HABITAT sur le fondement d’irrégularités formelles irrecevable car prescrite ;

- DECLARER la demande en nullité du contrat conclu avec la société Groupe ECO HABITAT sur le fondement du dol irrecevable car prescrite ;

- DECLARER irrecevables les demandes de M. Y. et Mme X. du fait du remboursement anticipé du contrat de crédit valant reconnaissance de dette ;

- DECLARER en conséquence irrecevables les demandes de M. Y. et Mme X. en nullité du contrat de crédit conclu avec la société DOMOFINANCE et en privation de la créance de la société DOMOFINANCE en restitution du capital prêté; A tout le moins, les REJETER du fait de la prescription de l’action en nullité du contrat conclu avec la société Groupe ECO HABITAT, et REJETER toutes autres demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la société DOMOFINANCE ; A tout le moins, DECLARER irrecevable l’action en responsabilité formée contre la société DOMOFINANCE car prescrite ;

SUBSIDIAIREMENT

- DIRE ET JUGER que la nullité du bon de commande pour une irrégularité formelle n'est pas encourue ;

- subsidiairement, DIRE ET JUGER que M. Y. et Mme X. ont renoncé à se prévaloir d’une irrégularité purement formelle du contrat et a confirmé la nullité relative alléguée ;

- DIRE ET JUGER que le dol allégué n’est nullement établi et que les conditions du prononcé de la nullité de ce chef n’est pas remplie ;

- en conséquence, DECLARER la demande de nullité des contrats irrecevable ; A tout le moins, DEBOUTER M. Y. et Mme X. de leur demande de nullité.

SUBSIDIAIREMENT, EN CAS DE NULLITE DES CONTRATS

- DIRE ET JUGER que M. Y. et Mme X. sont irrecevables à rechercher la responsabilité de la société DOMOFINANCE en raison de l’acquisition de la prescription;

- DIRE ET JUGER que la société DOMOFINANCE n’a commis aucune faute dans la vérification du bon de commande ni dans le versement des fonds prêtés ;

- DIRE ET JUGER, de surcroît, que M. Y. et Mme X. n’établissent pas le préjudice qu’ils auraient subi en lien avec l'éventuelle irrégularité alléguée du bon de commande ou le versement des fonds, et donc avec la faute alléguée à l’encontre de la banque, ce alors même que l’installation fonctionne ;

- DIRE ET JUGER, en conséquence, que les conditions d’engagement de la responsabilité de la banque ne sont pas réunies ;

- DIRE ET JUGER que, du fait de la nullité, M. Y. et Mme X. sont tenus de restituer le capital prêté au prêteur ;

- CONDAMNER, en conséquence, in solidum M. Y. et Mme X. à régler à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la société DOMOFINANCE la somme de 39 900 € en restitution du capital prêté ;

- très subsidiairement ;

o LIMITER la réparation qui serait due par la société DOMOFINANCE eu égard au préjudice effectivement subi par M. Y. et Mme X. à charge pour eux de l’établir et eu égard à leur faute ayant concouru à leur propre préjudice ;

o DIRE ET JUGER que le couple emprunteur reste tenu de restituer l’entier capital à hauteur de 39 900 € et ordonner la compensation des créances réciproques à due concurrence ;

- A titre infiniment subsidiaire, si le Tribunal devait prononcer la nullité des contrats et ne pas ordonner la restitution du capital prêté à charge des emprunteurs,

o CONDAMNER in solidum M. Y. et Mme X. à payer à la société DOMOFINANCE la somme de 39 900 € correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable ;

o Leur ENJOINDRE de restituer, à leurs frais, le matériel installé au liquidateur judiciaire dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d’électricité, et DIRE ET JUGER qu’à défaut de restitution, ils resteront tenus du remboursement du capital prêté ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

- DIRE ET JUGER que les autres griefs formés par M. Y. et Mme X. ne sont pas fondés ;

- DEBOUTER M. Y. et Mme X. de leur demande de dommages et intérêts ;

- DEBOUTER Monsieur et Madame [H] de toutes autres demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la société DOMOFINANCE ;

- ORDONNER le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence ;

- CONDAMNER in solidum M. Y. et Mme X. au paiement à la société DOMOFINANCE de la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l'instance;

Au soutien de l’irrecevabilité qu’elle soulève sur le fondement de l'article 2224 du code civil, elle considère que les demandes en nullité des contrats de vente et de crédit affecté fondées sur la violation des dispositions du code de la consommation sont prescrites en ce qu'elles ont été introduites plus de cinq ans après la signature des contrats, date à laquelle les emprunteurs étaient en mesure de déceler les erreurs alléguées. Elle rappelle à ce titre que « nul n’est censé ignorer la loi ».

Elle soutient encore que les demandes d’annulation fondées sur le dol sont prescrites en ce que d’une part, la rentabilité de l’installation n’est pas entrée dans le champ contractuel, et que, d’autre part, les emprunteurs ne se sont, durant plusieurs années, pas plaints d’un quelconque défaut de rentabilité, s’étant abstenus de formuler la moindre contestation avant l’introduction de l’instance.

Elle soutient que les emprunteurs sont aussi prescrits en leur demande indemnitaire fondée sur la faute dans la libération des fonds en ce qu’ils n’ont pas agi dans les cinq ans de la date du déblocage du fonds, qui est à la date à laquelle l’absence d’achèvement de la prestation s’est nécessairement manifestée. Elle ajoute que les requérants, qu’elle soupçonne de vouloir contourner cette difficulté en soutenant qu’ils ne pouvaient avoir connaissance du dommage que constitue l’absence de rentabilité de l’installation que plusieurs années après son raccordement, ne démontrent aucun lien de causalité directe entre ce prétendu préjudice et l’irrégularité formelle du bon de commande ou l’inachèvement de la prestation.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties et en application de l'article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé à leurs écritures respectives déposées à l'audience du 19 décembre 2024.

Assigné en qualité de liquidateur de Groupe ECO HABITAT par remise de l’acte à personne morale, la SELARL AXYME prise en la personne de Me N. ne s'est ni présentée ni fait représenter à l'audience.

La décision a été mise en délibéré au 27 mars 2025.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le jugement dès lors qu'il est susceptible d'appel sera rendu de manière réputée contradictoire en application de l'article 474 alinéa 1 du code de procédure civile.

Selon l'article 472 du même code, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

 

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription :

Selon l'article 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le point de départ du délai de prescription d'une action commence à courir à compter du moment où son auteur a pris connaissance des faits, ou a décelé les erreurs lui permettant de l'exercer.

Aux termes de l'article 2241 du même code, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

Il ressort des dispositions de l'article 9 du code de procédure civile qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, l'action en nullité du contrat de fourniture et de pose d'une installation photovoltaïque diligentée par M. Y. et Mme X. a un double fondement : le dol et les irrégularités au regard du formalisme imposé par le code de la consommation affectant le bon de commande.

Sur la prescription de l’action en nullité fondée sur le dol :

En application de l’article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l’action en nullité pour dol se prescrit par cinq ans à compter du jour où celui-ci a été découvert. Cette découverte est un fait juridique, qui se prouve donc par tous moyens. Il incombe à la partie qui invoque la prescription de prouver que le demandeur a découvert le dol avant de le dénoncer. Enfin, il appartient au juge qui déclare l’action irrecevable comme prescrite de constater la date de la découverte de l’erreur alléguée.

En l’espèce, M. Y. et Mme X. soutiennent :

- que le Groupe ECO HABITAT a présenté le contrat de vente comme « sans grandes conséquences » et que ce n’est qu’après écoulement du délai de rétractation qu’ils ont compris la portée définitive de leur engagement ;

- avoir été victimes de manœuvres et de mensonges les ayant trompés sur la rentabilité de l'installation et n’avoir découvert que plusieurs années après la conclusion du contrat de vente que les revenus liés à la revente d'électricité ne couvraient pas les mensualités d'emprunt;

- que le Groupe ECO HABITAT se serait rendu coupable d’une réticence dolosive en ne ne faisant pas figurer sur le contrat les caractéristiques de l’installation (marque, modèles des panneaux, modèle et nature de l’onduleur ou des micro-onduleurs), les délais et modalités d’exécution du contrat, ainsi que les modalités de financement.

La banque leur oppose la prescription, rappelant que les emprunteurs ne peuvent avoir découvert une tromperie portant sur la rentabilité postérieurement à la conclusion du contrat, dès lors que le contrat ne contenait aucune promesse de rentabilité ou d’autofinancement.

Sur la portée définitive de l’engagement de M. Y. et Mme X.

Sur le bon de commande présenté comme sans conséquences, M. Y. et Mme X. affirment qu'ils n'ont appris « le caractère définitif du contrat en cause et les modalités de financement » qu'à l'expiration du délai de rétractation.

En l'espèce, le bon de commande est intitulé « bon de commande n° 4154 », contient des « conditions de vente », signée par les « clients ». Il contient l’information selon laquelle l’installation, d’un montant total de 39 900 euros, sera financée via le versement de 120 mensualités de 422,19 euros, le coût total du crédit s’élevant à 50 662,80 euros. M. Y. et Mme X. ont signé le même jour une « offre de contrat de crédit affecté », reproduisant ces mêmes montants. Tous ces éléments ne laissent aucun doute quant au fait que le bon de commande n’était pas « sans grandes conséquences », de sorte que le délai de prescription a pu commencer à courir dès la signature du bon de commande.

De plus, quand bien même M. Y. et Mme X. auraient réellement eu des doutes quant à la portée définitive de leur engagement, la première échéance de prêt a été appelée le 5 février 2017, et, bien qu’impayée, a été régularisée le 7 mars 2017, de sorte qu’à cette date, aucun doute n’était possible quant au fait qu’ils avaient bien contracté avec la société GROUPE ECO HABITAT.

Le point de départ du délai de prescription est donc fixé au 7 mars 2017 de sorte que M. Y. et Mme X. avaient jusqu’au 7 mars 2022 pour agir sur ce fondement. L’action introduite par assignation du 13 février 2023 est donc prescrite.

 

Sur la réticence dolosive :

Concernant la réticence dolosive fondée sur la dissimulation, par la société GROUPE ECO HABITAT de certaines informations telles que les caractéristiques de l’installation (marque, modèles des panneaux, modèle et nature de l’onduleur ou des micro-onduleurs), les délais et modalités d’exécution du contrat, modalités de financement, il convient de rappeler que l’omission des caractéristiques de l’installation ou de mentions relatives aux modalités d’exécution du contrat ne caractérise pas un dol mais relève le cas échéant d’une nullité pour absence de respect des dispositions de l’article L.221-5 du code de la consommation. M. Y. et Mme X. ne justifient, en outre, aucunement que ces omissions ont été intentionnelles ni que ces informations étaient déterminantes de leur consentement.

A toutes fins utiles, il sera constaté que le bon de commande précise les différents éléments de l'installation photovoltaïque (36 panneaux, onduleur), de marque GSE Intégration, permettant aux acquéreurs de faire les recherches complémentaires qui leur apparaissaient nécessaires et de se renseigner éventuellement auprès d'autres fournisseurs, que la livraison et la pose auront lieu dans un délai de 120 jours, et que le coût total, d’un montant de 39 900 euros, serait réglé au moyen d’un crédit dont le coût total s’élevait à 50 662 ,80 euros, divisé en 120 mensualités de 422,19 euros.

Les requérants ne font pas état d'éléments intervenus postérieurement à la signature du contrat de vente qui les auraient éclairés sur les manquements qu'ils invoquent et qui leur aurait fait prendre conscience du fait qu’ils n’auraient pas contracté s’ils en avaient eu connaissance.

 

Sur la tromperie portant sur la rentabilité de l’installation :

Concernant enfin la promesse d’autofinancement et de rentabilité de l’installation, celle-ci doit être formalisée par une mention dans le bon de commande et la preuve de la rentabilité effective ne peut résulter que de l'envoi de la première facture de revenus d’électricité de ERDF.

En l’espèce, le bon de commande signé par M. Y. et Mme X. contient la mention selon laquelle les panneaux ont pour finalité la revente du surplus de l’électricité produite (la case « revente surplus » ayant été cochée), ce dont on peut déduire que leur a été promis le financement de leur propre consommation, le surplus étant destiné à la revente. Aucun élément contenu dans le contrat ne permet toutefois de conclure que le surplus promis couvrirait les mensualités d’emprunt, de sorte qu’aucune tromperie portant sur une promesse d’autofinancement, ne peut, cette dernière n’étant pas établie, avoir été découverte ultérieurement. Cependant, dès lors que la « revente d’énergie » est entrée dans le champ contractuel, il convient de fixer le point de départ de la prescription à la date de la première facture de revente d’énergie, date à laquelle ils ont pu vérifier qu’ils pourraient bien revendre le surplus produit.

La première facture étant datée du 14 mars 2018, l’action être exercée jusqu'au 14 mars 2023 de sorte que l'action introduite par assignation du 13 février 2023 est recevable.

 

Sur la prescription de l’action en nullité sur le fondement de la non-conformité du contrat au formalisme imposé par le code de la consommation :

En principe, la prescription commence à courir à compter du jour où l'acte irrégulier a été signé.

S'agissant de l'action en nullité du contrat de vente pour non-respect des dispositions du code de la consommation, le point de départ du délai est donc le jour de la signature du bon de commande lorsque l’examen de la teneur de la convention permet de constater l’irrégularité.

En l'espèce, le contrat de vente conclu entre M. Y. et Mme X. et Groupe ECO HABITAT a été conclu le 10 juillet 2016. M. Y. et Mme X. soutiennent que ce dernier a été conclu en violation des dispositions du code de la consommation, notamment de ses articles L. 221-5, L. 111-1, R. 111-1, L. 112-1 et L. 612-1.

Aux termes de l’article L. 221-5 du code de la consommation, Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 221-25 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 221-28, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

L’article L. 111-1 du même code dispose qu’avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

L’article R. 111-1 du code de la consommation dispose : « Pour l’application du 4° de l’article L. 111-1, le professionnel communique au consommateur les informations suivantes :

a) Son nom ou sa dénomination sociale, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique ;

b) Les modalités de paiement, de livraison et d’exécution du contrat ainsi que les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations ;

c) S’il y a lieu, l’existence et les modalités d’exercice de la garantie légale de conformité mentionnée aux articles L. 211-4 à L. 211-13 du présent code et de celle des défauts de la chose vendue dans les conditions prévues aux articles 1641 à 1648 et 2232 du code civil ainsi que, le cas échéant, de la garantie commerciale et du service après-vente au sens respectivement des articles L. 211-15 et L. 211-19 du présent code ;

d) S’il y a lieu, la durée du contrat ou, s’il s’agit d’un contrat à durée indéterminée ou à tacite reconduction, les conditions de sa résiliation ;

e) S’il y a lieu, toute interopérabilité pertinente du contenu numérique avec certains matériels ou logiciels dont le professionnel a ou devrait raisonnablement avoir connaissance ainsi que les fonctionnalités du contenu numérique, y compris les mesures de protection technique applicables. »

Aux termes de l’article L. 112-1 du même code, tout vendeur de produit ou tout prestataire de services informe le consommateur, par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre procédé approprié, sur les prix et les conditions particulières de la vente et de l'exécution des services, selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l'économie, après consultation du Conseil national de la consommation.

En l’espèce, le bon de commande produit par M. Y. et Mme X. ne reproduit pas les dispositions du code de la consommation. Il est toutefois mentionné, dans les conditions générales de vente, que le contrat est soumis aux dispositions de l’article L. 121-16 du code de la consommation, et que les défendeurs reconnaissent avoir reçu préalablement l’ensemble des informations prévues à l’article L. 121-17 de ce code, concernant notamment les caractéristiques essentielles, le prix du bien objet du contrat ainsi que la date ou le délai auquel le vendeur s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service objet du contrat.

Si les dispositions de l’article L. 121-17 précité n’était plus applicable à la date de la conclusion du contrat, force est de constater que M. Y. et Mme X. ont expressément reconnu avoir reçu les informations concernant les caractéristiques essentielles de l’installation, le prix du bien objet du contrat, ainsi que les délais de livraison. La possibilité pour eux de se prévaloir d’un manquement sur ce point est donc prescrite depuis la date de la conclusion du contrat, à laquelle ils ont indiqué avoir reçu ces informations, et à laquelle ils auraient dû avoir connaissance du fait qu’elles ne leur avaient pas été délivrées, si cela n’avait pas été le cas.

S’agissant de l’omission de la mention relative à la possibilité de recourir au médiateur de la consommation et de l’insuffisance des mentions relatives aux modalités de financement, les demandeurs étaient en mesure de vérifier, au jour de la signature du bon de commande, que ces mentions, qu’ils jugent essentielles pour la validité de celui-ci, n’y figuraient pas s’agissant du médiateur de la consommation, étant précisé que le bon de commande est suffisamment précis sur les modalités de financement.

Il sera par ailleurs rappelé qu’en enfermant la prescription dans un délai de cinq ans, le législateur a entendu garantir la sécurité juridique et ne pas permettre que tout acte puisse être remis en cause au-delà. Les requérants bénéficiaient en réalité d’un délai de cinq années à compter de la signature du bon de commande pour consulter un conseiller juridique et prendre la décision d’agir en nullité du contrat de vente s’ils estimaient que ledit contrat était affecté d’une cause de nullité depuis le moment de sa formation, ce qu’ils n’ont pas fait. Ils ne peuvent désormais invoquer à l’appui de leurs prétentions leur propre manque de diligence, quand bien même ils sont effectivement des consommateurs.

En conséquence, le délai pour agir - s’agissant de la méconnaissance des dispositions du code de la consommation – courait à compter du 10 juillet 2016 et a expiré le 10 juillet 2021 à minuit, de sorte que l’action introduite au visa de ces dispositions par assignation en date du 26 janvier 2023 est prescrite. La demande en nullité du contrat de vente pour ce motif est ainsi irrecevable.

Le point de départ du délai de prescription ainsi fixé au vu des pièces aux débats ne porte donc pas une atteinte au principe d'effectivité des droits du consommateur issus du droit de l'Union européenne qui impose uniquement que les dispositions de droit interne ne rendent pas impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits de l'ordre juridique européen. Or, le point de départ du délai de prescription ainsi fixé au vu des pièces aux débats et la durée du délai de prescription ne portent pas atteinte au principe d'effectivité des droits du consommateur issus du droit de l'obligation de l'Union européenne.

En conséquence, l'action en nullité fondée sur la non-conformité du bon de commande au formalisme du code de la consommation, introduite suivant exploit introductif d’instance délivré le 13 février 2023, soit plus de 5 années après la signature du bon de commande litigieux, est prescrite.

 

Sur l'action en nullité du contrat de vente fondée sur le dol :

L’article 1116 du code civil, dans sa version applicable au litige, disposait que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.

Le demandeur qui agit sur ce fondement doit dès lors justifier d'une inexécution d'une obligation d'information, devant être illicite et effectuée avec l’intention ou la conscience de tromper, car le dol, fût-il par réticence, suppose toujours un élément intentionnel, ainsi que la preuve du caractère déterminant du dol.

La rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d’une installation photovoltaïque au sens de l’article L.111-1 du code de la consommation qu’à la condition que les parties l’aient fait entrer dans le champ contractuel (Civ. 1re, 21, octobre 2020, pourvoi n°18-26.761).

En outre, si le vendeur a l’obligation d’informer les acquéreurs sur la production d’électricité de l’installation (1ère chambre civile, 20 décembre 2023 n° 22-14.020), il n’a pas l’obligation de faire figurer sur le bon de commande des engagements sur la rentabilité de l’installation. En tout état de cause, il apparaît impossible pour le vendeur de formuler un engagement de rentabilité économique du contrat sur le long terme.

Il sera en l’espèce constaté qu’outre le fait que M. Y. et Mme X. ne justifient pas de la rentabilité exacte de leur installation comprenant l’économie d’énergie tirée de l’autoconsommation, ils ne justifient pas de ce que le vendeur leur aurait garanti un certain niveau de rentabilité de l’installation.

En effet, le bon de commande ne comporte aucune mention relative à une garantie de revenus. Il en résulte que le contrat de vente n’engage nullement la société venderesse à un quelconque degré de rentabilité et que les arguments commerciaux sont sans emport s’ils ne sont pas formalisés dans le contrat qui, seul, lie les parties.

M. Y. et Mme X. ne produisent par ailleurs aucun élément objectif permettant d’établir des mensonges du vendeur relatifs à l’autofinancement ou la rentabilité de l’installation lors de la conclusion du contrat.

M. Y. et Mme X. échouent ainsi à établir que la société venderesse se soit intentionnellement livrée à des manœuvres particulières pour convaincre leurs clients autrement que par les promesses verbales de son démarcheur, lesquelles ne suffisent pas à caractériser un dol, étant rappelé que les consommateurs sont précisément protégés de ces talents de persuasion par le délai légal de rétractation.

Le dol n’est donc pas constitué sur ce point.

La demande d’annulation du contrat de vente sera par conséquent rejetée.

 

Sur l’action en nullité du contrat de crédit :

En application de l’article L.312-55 dudit code, la résolution ou l’annulation d’un contrat de vente entraîne celle du crédit affecté.

En l’espèce, dans la mesure où, d’une part, le contrat de crédit litigieux constitue l'accessoire du contrat de vente, et, d’autre part, la demande en nullité du contrat de crédit affecté n’est pas articulée de manière autonome par rapport à la demande en nullité du contrat principal, l’absence de nullité du contrat principal empêche de prononcer la nullité du contrat de crédit accessoire.

En l'absence de nullité des contrats de vente et de crédit, il n'y a pas lieu à restitution entre les parties.

Les demandes de M. Y. et Mme X. visant à voir priver la société DOMOFINANCE de sa créance de restitution à raison des fautes prétendument commises par elle et à se voir rembourser l'intégralité des sommes qu'ils auraient prétendument versées en exécution du crédit, à savoir l'intégralité du capital prêté et les intérêts conventionnels, sont sans objet.

 

Sur l'action en responsabilité dirigées contre la banque :

La prescription d'une action en responsabilité contractuelle ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

Il est rappelé qu'aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits permettant de l'exercer.

Selon l'article L110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Le point de départ du délai de prescription se situe donc soit au moment de la libération des fonds soit au plus tard en l'absence de connaissance de la date de déblocage des fonds lors du prélèvement de la première échéance.

En l’espèce, M. Y. et Mme X. font grief à la banque d'avoir commis des fautes en débloquant les fonds en ne s'assurant pas de la régularité formelle du contrat ni de son exécution complète.

La société DOMOFINANCE soutient que l'action en responsabilité formée par l’emprunteur est prescrite pour n'avoir pas été engagée dans les cinq ans suivant la date de déblocage des fonds, date à laquelle l’absence d’achèvement de la prestation leur a nécessairement été révélée; elle ajoute que les requérants ne démontrent nullement qu’un préjudice en lien de causalité directe avec le déblocage des fonds en dépit d’irrégularités formelles se serait manifesté postérieurement à la libération des fonds.

La banque produit un historique de compte, dont il résulte que les fonds ont été débloqués le 11 août 2016.

L'exploit introductif ayant été délivré à la société DOMOFINANCE le 13 février 2023, plus de 5 années après la libération des fonds par la banque, l'action en responsabilité fondée sur la faute dans le déblocage des fonds est prescrite.

 

Sur l'action subsidiaire en déchéance du droit aux intérêts contractuels :

En application de l’article L 311-48 du code de la consommation dans sa version applicable en l’espèce, le prêteur qui ne respecte pas certaines exigences du code de la consommation lors de la souscription du crédit est déchu du droit aux intérêts contractuels.

M. Y. et Mme X., qui sollicitent subsidiairement que soit prononcée la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la banque, ont la qualité de demandeurs dans la présente instance et aucune demande en paiement au titre du contrat de crédit affecté n'est formée à leur encontre par la société DOMOFINANCE. Cette dernière oppose la prescription.

Le prononcé de la déchéance du droit aux intérêts contractuels et la demande subséquente de remboursement des intérêts et frais versés constituent des prétentions soumises à la prescription quinquennale, dont le point de départ se situe au jour de l'acceptation de l'offre de crédit, soit en l'espèce, le 10 juillet 2016.

M. Y. et Mme X., qui n’ont assigné la banque que le 13 février 2013, seront donc également déclarés irrecevables à agir en déchéance du droit aux intérêts contractuels du prêteur.

 

Sur les demandes accessoires :

En application de l'article 696 du code de procédure civile, M. Y. et Mme X. qui succombent seront condamnés aux dépens et seront, en conséquence, déboutés de leur demande au titre des frais non répétibles.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, M. Y. et Mme X. seront condamnés à payer à la société DOMOFINANCE une indemnité de 1000 euros.

Selon l'article 514 du code de procédure civile, l'exécution provisoire du jugement est de droit.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats tenus en audience publique, par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort,

DECLARE irrecevable la demande d’annulation du contrat de vente formée par M. Y. et Mme X. dirigées contre la Groupe ECO HABITAT prise en la personne de son liquidateur, sur le fondement d’irrégularités formelles, comme prescrite,

DECLARE irrecevable la demande d’annulation du contrat de vente formée par M. Y. et Mme X. dirigées contre la Groupe ECO HABITAT prise en la personne de son liquidateur, sur le fondement de la réticence dolosive,

DECLARE irrecevable la demande d’annulation du contrat de vente formée par M. Y. et Mme X. dirigées contre la Groupe ECO HABITAT prise en la personne de son liquidateur, sur le fondement du dol quant à la portée définitive de leur engagement,

REJETTE la demande d’annulation du contrat de vente formée par M. Y. et Mme X. dirigées contre la Groupe ECO HABITAT prise en la personne de son liquidateur, sur le fondement du dol portant sur la rentabilité de l’installation,

REJETTE la demande d’annulation du contrat de crédit affecté,

DECLARE les demandes de restitution et les demandes en paiement formées par M. Y. et Mme X. sans objet ;

DECLARE irrecevable la demande de prononcé de la déchéance du droit aux intérêts formée par M. Y. et Mme X. dirigées contre la société DOMOFINANCE, comme prescrite,

DEBOUTE M. Y. et Mme X. de leur demande au titre des frais non répétibles ;

CONDAMNE M. Y. et Mme X. à payer à la société anonyme Cofidis venant aux droits de la société DOMOFINANCE la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. Y. et Mme X. aux dépens;

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 27 mars 2025.

LE GREFFIER        LE JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION