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24305 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Enseignement

Nature : Synthèse
Titre : 24305 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Enseignement
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 24305 (27 septembre 2025)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE CIVIL ET EN DROIT COMMUN

SANCTION DIRECTE DES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS - DROIT POSTÉRIEUR À L’ORDONNANCE DU 10 FÉVRIER 2016 – LOI DE RATIFICATION DU 20 AVRIL 2018 : ARTICLE 1171 DU CODE CIVIL

PRÉSENTATION PAR CONTRAT – ENSEIGNEMENT

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2025)

 

Présentation. La jurisprudence française assimile les élèves à des consommateurs, quel que soit le niveau d’enseignement (primaire, secondaire, supérieur) et les contrats d’enseignement ont donné lieu à un contentieux très abondant dans le cadre consumériste (V. Cerclab n° 6321 à 6324). S’agissant des formations professionnelles, la CJUE a posé ponctuellement une solution inverse en estimant que la finalité du contrat lui donnait une nature professionnelle. En tout état de cause, l’applicabilité de l’art. 1171 vient combler une lacune, un contrat d’enseignement ne pouvant entrer dans le champ d’application de l’art. L. 442-1 C. com.

Rupture anticipée : clause réservant les motifs légitimes et impérieux. Absence de caractère abusif de la clause réservant les cas de force majeure et de motif légitime impérieux, tout en prévoyant une limitation des frais de scolarité restant dus limités à une durée de 90 jours fin de mois, à compter de la réception de la lettre recommandée des parents. TJ Versailles (2e ch.), 16 mai 2025 : RG n° 23/03353 ; Cerclab n° 23922 (contrat d’enseignement dans un collège privé ; N.B. raisonnement exclusivement fondé sur 1171 C. civ.). § Pour d’autres décisions illustrant l’inclusion dans le contrat d’une possibilité de rupture pour force majeure ou motif légitime et impérieux : TJ Paris (proxim.), 3 avril 2025 : RG n° 24/01390 ; Cerclab n° 23786 (résumé ci-dessous).

Notion de motif légitime : liste limitative. Application de la clause d’un contrat de formation d’audioprothésiste, sans discussion de son caractère abusif, stipulant que, « sous réserve qu’il soit à jour des paiements, l’étudiant pourra résilier son engagement en cas de force majeure, ou de motif légitime et impérieux. Les motifs légitimes ou impérieux correspondant ici uniquement aux évènements suivants : l’accident grave de l’étudiant, ou la maladie grave de l’étudiant l’empêchant complétement dans les deux cas de poursuivre sa formation. Dans les deux cas, l’étudiant sera tenu de régler à [l’établissement] le prix au prorata de sa participation à la prépa, avec un règlement minimal de 30 pour cent du prix intégral ». TJ Paris (proxim.), 3 avril 2025 : RG n° 24/01390 ; Cerclab n° 23786 (le jugement précise que « la somme de 30 pour cent peut être retenue par l’établissement, [l’étudiant] ne soutenant pas que les conditions de cet article a créé un déséquilibre, au visa de l’article 1171 du code civil »). § N.B. Cette décision appelle de nombreuses réserves. Tout d’abord, l’art. L. 212-1 prime l’art. 1171 et l’application du droit de la consommation entraîne l’obligation de relever d’office de l’art. R. 632-1 C. consom., obligation que le juge n’a en l’espèce pas respectée. Ensuite, si la clause prévoit effectivement la prise en compte des cas de force majeure et les motifs légitimes, elle n’est pas pour autant à l’abri de la critique, sur au moins trois points : 1/ la clause est subordonnée au fait que l’étudiant soit à jour de ses paiements, ce que l’établissement interprète comme un « paiement entier », alors que pour le tribunal la preuve est rapportée de l’établissement de plusieurs chèques ; or, si le contrat exige effectivement le paiement de la totalité du prix avant exécution, il prive le consommateur de l’exception d’inexécution et tombe sous le coup de l’art. R. 212-1-5° C. consom. ; 2/ les motifs légitimes sont définis par une liste fermée, ce qui est incontestablement abusif, puisque d’autres motifs tout aussi légitimes, voire plus, sont concevables (agression, harcèlement, absence d’enseignants dans des matières essentielles, discriminations, etc.). : 3/ enfin, le montant de 30 pour cent semble élevé surtout s’il est calculé sur le coût d’une formation pluriannuelle).

Notion de motif légitime : illustrations. L’établissement étant tenu d’une obligation accessoire de sécurité de moyens, l’absence de toute surveillance ayant permis l’agression de l’élève par le parent d’un autre constitue un motif légitime justifiant la résiliation du contrat. TJ Versailles (2e ch.), 16 mai 2025 : RG n° 23/03353 ; Cerclab n° 23922 (contrat d’enseignement dans un collège privé ; N.B. raisonnement exclusivement fondé sur 1171 C. civ.).

Formalisme de la faculté de départ anticipé. Certaines décisions évoquent des clauses qui, tout en intégrant la possibilité de mettre fin au contrat pour force majeure ou motif légitime, encadrent cette faculté dans des conditions de temps ou/et de forme.

Pour des décisions appliquant strictement cette clause sans examiner son caractère abusif : TJ Versailles (2e ch.), 16 mai 2025 : RG n° 23/03353 ; Cerclab n° 23922 (clause exigeant une lettre recommandée avec accusé de réception, accompagnée des pièces justificatives du motif invoqué ; envoi initial d’une lettre simple sans justificatifs, suivi de l’envoi tardif d’une lettre conforme à la clause ; l’application d’une limitation des frais à 90 jours à réception de la lettre conduit en l’espèce à la fin de l’année scolaire ; N.B. raisonnement exclusivement fondé sur 1171 C. civ.).