24323 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Location d’immeubles – Bail commercial
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 24323 (30 septembre 2025)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE CIVIL ET EN DROIT COMMUN
SANCTION DIRECTE DES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS - DROIT POSTÉRIEUR À L’ORDONNANCE DU 10 FÉVRIER 2016 – LOI DE RATIFICATION DU 20 AVRIL 2018 : ARTICLE 1171 DU CODE CIVIL
PRÉSENTATION PAR CONTRAT – LOCATION D’IMMEUBLES – BAIL COMMERCIAL
Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2025)
Applicabilité de l’art. 1171 C. civ. Les baux commerciaux bénéficient d’un statut qui règlemente plusieurs points de leur régime, notamment quant à leur renouvellement. Il a toujours été admis que ce statut ne faisait pas obstacle à l’application du droit commun du bail du Code civil, solution au demeurant conforme au nouvel art. 1105 C. civ. Il n’y a donc a priori aucune raison d’écarter la protection offerte par l’art. 1171, laquelle présuppose l’existence d’un contrat d’adhésion, dès lors qu’en tout état de cause l’appréciation de l’existence d’un déséquilibre significatif, nécessairement globale, prendra en compte l’existence de ces règles spéciales. Sur cette question, V. Cerclab n° 6152. § En revanche, pour le cas particulier des résidences-services, où le bail commercial s’inscrit dans une opération de valorisation de son patrimoine par un consommateur, et quand bien même le consommateur occuperait la position de bailleur, c’est l’art. L. 212-1 C. consom. qui devrait prévaloir.
Obligations du preneur : paiement des loyers. Pour une illustration de réduction de la clause pénale. TJ Paris (pôle proxim.), 18 mars 2025 : RG n° 24/02662 ; Cerclab n° 23782 (bail d’un immeuble à usage d’habitation avec une société commerciale ; application et réduction à un euro de la clause pénale, stipulant le versement, outre les frais de recouvrement, de 10 % des sommes dues au bailleur, avec dispense de mise en demeure, sans examen du moyen prétendant que la clause était abusive au regard de l’art. 1171).
Obligations du preneur : entretien et réparation locatives. Les clauses qui mettent à la charge du preneur des obligations d'entretien et de réparations locatives ne peuvent, dès lors qu’elles ne relèvent pas des grosses réparations de l'article 606 du code civil, être qualifiées de clauses abusives en ce qu'elles sont conformes aux dispositions de l'art. R. 145-35 C. com. dans sa version applicable au litige, de l'art. 4 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015 réputant non écrites certaines clauses insérées dans les baux d'habitation et ne créent pas au détriment du preneur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au sens de l'art. 1171 C. civ. CA Caen (2e ch. civ. com.), 14 mars 2024 : RG n° 22/00756 ; Cerclab n° 10776 (bail mixte d’un local commercial avec une partie à usage d’habitation soumise aux règles des baux d'habitation), sur appel de TJ Argentan, 24 février 2022 : Dnd.
Pour le cas d’une résidence-services : absence de preuve du déséquilibre significatif de la clause d’un contrat de résidence services, mettant à la charge du bailleur le financement de travaux de vétusté, en prévoyant une option entre un financement « Cash » ou par déduction des loyers à percevoir, alors au surplus que la clause litigieuse figurant dans un avenant est conforme à celle du contrat initial. TJ Versailles (3e ch.), 30 janvier 2025 : RG n° 23/02907 ; Cerclab n° 23364 (bail consenti à la société exploitant une résidence services ; N.B. jugement ayant au préalable écarté l’existence d’un contrat d’adhésion, solution au demeurant discutable au regard de l’application dans le temps et de l’applicabilité de l’art. L. 212-1 C. consom.).
Obligations du preneur : galeries commerciales. S'il n'appartient pas au juge des référé de réputer non écrite une clause, il peut considérer que le déséquilibre significatif entre les parties créé par une disposition contractuelle constitue un obstacle, au stade des référés, à son applicabilité. TJ Paris (réf.), 5 novembre 2024 : RG n° 23/58452 ; Cerclab n° 23317 (rejet de la demande visant à réputer non écrite la clause du cahier des charges d’une galerie commerciale imposant aux membres de l’association de laisser les vitrines transparentes et interdisant leur occultation, qui concerne tous les copropriétaires de l'association syndicale libre, qui est destinée à favoriser l'animation au sein de cette galerie marchande et qui n’est pas une atteinte à la vie privée).
Responsabilité : clause de non-recours réciproque. La clause de non recours d’un bail commercial librement conclu entre les parties, en vertu de laquelle les parties tout comme leur assureur ont réciproquement accepté de renoncer à engager un quelconque recours direct ou subrogatif, l'un envers l'autre notamment sur le fondement des articles qui permettent d'engager la responsabilité de l'un d'eux en raison de la survenance d'un incendie et des dommages qui pourraient en résulter, ne porte pas atteinte à l'obligation de délivrance du bailleur et n'apparaît donc pas comme clause abusive dont la validité pourrait être contestée. CA Pau (2e ch. sect. 1), 27 février 2024 : RG n° 22/02373 ; arrêt n° 24/718 ; Cerclab n° 10731 (bail commercial), confirmant TJ Bayonne, 18 juillet 2022 : Dnd.
Renouvellement : charge des frais de délaissement. L'art. L. 145-57 C. com. pose le principe de la prise en charge de l'ensemble des frais de la procédure par la partie qui exerce son droit d'option ; ces dispositions font supporter par la partie qui en est responsable les conséquences du délaissement soudain de son cocontractant ; elles sont ainsi la contrepartie de la liberté d'opter à tout moment de la procédure. N’est pas contraire à l’effet relatif des contrats et ne crée pas de déséquilibre contractuel le fait que le preneur se voit imposer le règlement des frais d’avocat exposés par le bailleur, y compris la clause d’honoraire de résultat, clause classique qui n'est ni imprévisible ni même irrésistible et encore moins extérieure aux parties. TJ Lille (loy. com.), 3 mars 2025 : RG n° 24/00024 ; Cerclab n° 23772 (arg. du preneur : un cocontractant ne peut légitimement contraindre son partenaire contractuel à l'indemnisation de frais qu'il ne pouvait légitimement prévoir : N.B. le jugement estime par ailleurs que le bailleur n’avait pas à prévenir le preneur du montant exact des frais qu'il engageait et que le preneur serait amené à supporter s'il exerçait son droit d'option).
Clause résolutoire, indemnité de résiliation. Le déséquilibre significatif ne saurait s'inférer de la seule absence de réciprocité d'une clause résolutoire de plein droit dès lors qu'elle se justifie par la nature des obligations auxquelles sont respectivement tenues les parties. CA Versailles (ch. civ. 1-6), 13 mars 2025 : RG n° 23/04880 ; Cerclab n° 23741 (bail commercial ; clause résolutoire et clause pénale fixant l’indemnité de résiliation ; arrêt citant Cass. com., 26 janvier 2022 : pourvoi n° 20-16782), sur appel TJ Pontoise, 19 juin 2023 : RG n° 21/05829 ; Dnd - CA Versailles (ch. civ. 1-6), 13 mars 2025 : RG n° 23/05079 ; Cerclab n° 23737 (idem), sur appel de TJ Versailles, 15 juin 2023 : RG n° 21/06306 ; Dnd.