24325 - Code civil - Sanction directe des déséquilibres significatifs - Art. 1171 C. civ. (Ord. 10 février 2016 – L. ratif. 20 avril 2018). – Présentation par contrat – Location d’immeubles – Bail professionnel
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 24325 (22 octobre 2025)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE CIVIL ET EN DROIT COMMUN
SANCTION DIRECTE DES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS - DROIT POSTÉRIEUR À L’ORDONNANCE DU 10 FÉVRIER 2016 – LOI DE RATIFICATION DU 20 AVRIL 2018 : ARTICLE 1171 DU CODE CIVIL
PRÉSENTATION PAR CONTRAT – LOCATION D’IMMEUBLES – BAIL PROFESSIONNEL
Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2025)
Régime juridique. Le statut des baux professionnels est défini à l'art. 57 A de la loi du 23 décembre 1986 et précise que le contrat de location d'un local affecté à un usage exclusivement professionnel est conclu pour une durée au moins égale à six ans et est établi par écrit ; les conditions de non-renouvellement du bail et le formalisme du préavis y sont, en outre, spécifiées. CA Nîmes (2e ch. civ. C), 12 juin 2025 : RG n° 24/00031 ; Cerclab n° 24045, sur appel de TJ Privas, 5 décembre 2023 : Dnd.
Dans un bail professionnel, les droits et obligations des parties sont librement fixés comme dans un bail de droit commun. CA Nîmes (2e ch. civ. C), 12 juin 2025 : RG n° 24/00031 ; Cerclab n° 24045.
Application conventionnelle du statut des baux commerciaux. L'art. 57 A de la loi du 23 décembre 1986 a été complété par la loi du 4 août 2008 et dispose que les parties peuvent déroger au présent article dans les conditions fixées au 7° du I de l'art. L. 145-2 C. com., les parties pouvant soumettre au statut des baux commerciaux les baux d'un local affecté à un usage exclusivement professionnel si les parties ont conventionnellement adopté ce régime ; si la volonté d'appliquer le statut des baux commerciaux ne doit pas être nécessairement expresse, il convient cependant que celle-ci soit claire et dénuée de toute équivoque ; la loi n'autorisant pas une application partielle du statut des baux commerciaux, le choix est soit celui de l'application intégrale du statut des baux commerciaux soit l'application du statut des baux professionnels. CA Nîmes (2e ch. civ. C), 12 juin 2025 : RG n° 24/00031 ; Cerclab n° 24045, sur appel de TJ Privas, 5 décembre 2023 : Dnd.
Pour des illustrations de refus d’extension conventionnelle : CA Versailles (ch. 1-2), 3 septembre 2024 : RG n° 22/05810 ; Cerclab n° 23186 (bail professionnel pour un avocat ; absence de preuve d’une volonté des parties de soumettre le contrat aux dispositions du code de commerce), sur appel de T. proxim. Gonesse, 22 juillet 2021 : RG n° 11-21-484 ; Dnd - CA Nîmes (2e ch. civ. C), 12 juin 2025 : RG n° 24/00031 ; Cerclab n° 24045 (arguments jugés insuffisants : 1/ une durée de 9 ans, puisque l’art. 57-A évoque une durée « au moins égale à six ans » ; 2/ la stipulation d’une indemnité d’éviction en cas de rupture à l’initiative du bailleur, qui ne consacre pas un droit au maintien comparable à l’art. L. 145-28 C. com. ; conséquence : refus de droit au maintien dans les lieux de l’association), sur appel de TJ Privas, 5 décembre 2023 : Dnd.
Clause de prise des lieux en l’état. La clause prévoyant que « le preneur prend possession du local dans l'état où il se trouvera à la date de mise à disposition et tel qu'il a été désigné dans le bail et que le preneur reconnait que l'obligation de délivrance du bailleur est totalement remplie par la mise à disposition du local en cet état puisque celui-ci est conforme à sa destination et à l'usage que le preneur souhaite en faire », est une clause d'acceptation des lieux en l'état, qui est usuelle et qui ne décharge pas le bailleur de son obligation de délivrance, prévue par l'art. 1719 C. civ. TJ Évry-Courcouronnes (réf.), 25 février 2025 : RG n° 24/01059 ; Cerclab n° 24395 (bail d’un local à usage de stockage de marchandises et ne pouvant recevoir de public, contenant une clause précisant explicitement que le contrat ne relève pas du statut du bail commercial, dans la mesure où aucun fonds de commerce n'est exploité, et est régi par les art. 1713 s. C. civ. ; absence au surplus de déséquilibre, compte tenu d’une appréciation globale, tenant compte d'autres clauses du bail qui sont en faveur du preneur, notamment la franchise de loyers de quatre mois et l'exonération de charges et taxes foncières).
Clause d’indexation. S'agissant de la clause d'indexation critiquée, il ne peut utilement être fait grief au bail de viser l'indice du coût de la construction (ICC) et non l'indice des loyers commerciaux, s'agissant d'un bail civil régi par les arti. 1713 s. code civil, et non d'un bail commercial. TJ Évry-Courcouronnes (réf.), 25 février 2025 : RG n° 24/01059 ; Cerclab n° 24395 (bail d’un local à usage de stockage de marchandises et ne pouvant recevoir de public, contenant une clause précisant explicitement que le contrat ne relève pas du statut du bail commercial, dans la mesure où aucun fonds de commerce n'est exploité, et est régi par les art. 1713 s. C. civ. ; absence au surplus de déséquilibre, compte tenu d’une appréciation globale, tenant compte d'autres clauses du bail qui sont en faveur du preneur, notamment la franchise de loyers de quatre mois et l'exonération de charges et taxes foncières).
Charges récupérables. En application du principe de la liberté des conventions, la nature des charges récupérables à l'encontre du locataire peut être librement déterminée entre les parties ; ainsi, quand bien même en vertu du Code général des impôts, la taxe foncière est due par le propriétaire de l'immeuble, les parties peuvent convenir qu'elle sera mise à la charge du preneur ; est donc valable la clause claire et dénuée d'ambiguïté stipulant que « le locataire remboursera la taxe foncière au bailleur sur première demande de celui-ci au prorata de la surface occupée (y compris parties communes) ». CA Versailles (ch. 1-2), 3 septembre 2024 : RG n° 22/05810 ; Cerclab n° 23186 (bail professionnel pour un avocat ; art. 1171 inapplicable rationae temporis ; autres arguments évoqués : 1/ il n’est pas établi que la clause ait été imposée ; 2/ preneur avocat ayant respecté la clause pendant un certain temps), infirmant T. proxim. Gonesse, 22 juillet 2021 : RG n° 11-21-484 ; Dnd (clause réputée non écrite sur le fondement des art. 1170 et 1171).
Lorsque le bail est soumis à la réglementation de droit commun résultant des dispositions des art. 1708 s. C. civ., le bailleur est libre de mettre à la charge du locataire certaines obligations qui lui incombent normalement ou encore de s'exonérer de certaines garanties que la loi lui impose, dès lors que les dispositions légales les prévoyant ne sont pas d'ordre public ; est licite la clause précisant que les travaux affectant le gros œuvre en ce inclus ceux prévus par l'article 606 du code civil seront exécutés par le bailleur aux frais exclusifs du preneur, dans la mesure où l'art. 1720 C. civ. n'est pas d'ordre public. TJ Évry-Courcouronnes (réf.), 25 février 2025 : RG n° 24/01059 ; Cerclab n° 24395 (bail d’un local à usage de stockage de marchandises et ne pouvant recevoir de public, contenant une clause précisant explicitement que le contrat ne relève pas du statut du bail commercial, dans la mesure où aucun fonds de commerce n'est exploité, et est régi par les art. 1713 s. C. civ. ; absence au surplus de déséquilibre, compte tenu d’une appréciation globale, tenant compte d'autres clauses du bail qui sont en faveur du preneur, notamment la franchise de loyers de quatre mois et l'exonération de charges et taxes foncières).
Indemnité conventionnelle d’éviction. Présente un caractère manifestement excessif, quant au déséquilibre significatif qu'elle crée dans les rapports entre les parties et ce d'autant qu'il n'existe aucune contrepartie ou réciprocité au profit de la SCI, la clause d’un bail professionnel qui met à la charge du bailleur qui refuse le renouvellement du contrat une indemnité d'éviction égale à deux fois le bilan annuel de l'association locataire ; cette clause ne peut être justifiée par les travaux initiés par l’association, dès lors que la clause d'éviction a pour objet de réparer le préjudice subi par le preneur et non d'indemniser les travaux réalisés par l'association et ce d'autant que le bail stipule que le locataire se réserve le droit de réclamer à celle-ci ou à toute personne susceptible de lui porter préjudice le remboursement du coût global des travaux qu'elle aura réalisés. CA Nîmes (2e ch. civ. C), 12 juin 2025 : RG n° 24/00031 ; Cerclab n° 24045 (bail professionnel pour une association conclu avant l’entrée en vigueur de l’art. 1171 ; conséquence : rejet du moyen prétendant que le jugement a appliqué à tort ce texte, alors que, selon l’arrêt, il n'a pas fait application de cette disposition, qu'il ne vise pas, mais de solutions jurisprudentielles antérieures ; N.B. 1 : l’indemnité était de 257.658 euros, alors que la SCI bailleresse avait acheté l’immeuble pour un montant de 114.336 euros ; N.B. 2 : le bail avait été signé par le représentant de la SCI qui était aussi salarié de l’association locataire, en qualité de directeur du lieu de vie exploité par l’association ; N.B. 3 : l’art. 1171 ayant été écarté, l’arrêt se fonde sur les principes jurisprudentiels antérieurs que le texte n’aurait fait que confirmer), sur appel de TJ Privas, 5 décembre 2023 : Dnd.