TJ BOBIGNY (T. proxim. Montreuil), 25 mars 2025
CERCLAB - DOCUMENT N° 24447
TJ BOBIGNY (T. proxim. Montreuil), 25 mars 2025 : RG n° 23/02999 ; jugt n° 25/00167
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « S'agissant d'une installation à haut niveau de développement technologique destinée à produire de l'énergie, la marque et le modèle, dont les fonctions sont de garantir l'origine d'un produit commercialisé, sont des caractéristiques essentielles pour le consommateur démarché. Ces informations doivent lui permettre d'identifier le fabricant garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits, et de pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix tenant compte de la technologie mise en œuvre durant le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi. Or, en l'espèce, ni la surface de l'installation photovoltaïque ni son poids, même global, ne sont mentionnés. Il s'agit pourtant d'une caractéristique essentielle du bien vendu puisque sans ces précisions, le consommateur n'est pas en mesure de savoir si l'installation est adaptée à sa toiture.
En outre, il est mentionné un délai de livraison « au plus tard dans les quatre mois à compter de la signature du présent bon de commande », ce délai est exprimé en termes vagues et ne permet pas au consommateur de connaître le délai de livraison en termes précis, ce qui équivaut à une absence de délai. »
2/ « Il incombe à celui qui s'oppose à l'annulation du contrat d'établir que le consommateur avait connaissance des irrégularités du contrat et qu'il a renoncé à s'en prévaloir par des actes non équivoques. Par arrêt du 24 janvier 2024 la Cour de Cassation (Cass 1ère, civ.24 janvier 2024 pourvoi n°W22-16.115) considère que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d’avoir une connaissance effective du vice résultant de l’inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l’absence de circonstances, qu’il appartient au juge de relever, permettant de justifier une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l’envoi par le professionnel d’une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l’article 1183 du code civil.
En l'espèce, les conditions générales reproduisent plusieurs articles du code de la consommation, il n’est cependant pas établi que Monsieur X. ait eu conscience des vices affectant le bon de commande au moment de la souscription du contrat ou de son exécution. En outre, aucune demande de confirmation ne lui a été adressé, de sorte que la confirmation de l’acte entaché de nullité n’est pas caractérisée.
Par conséquent, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne rapporte pas la preuve d'une volonté non équivoque de la part de Monsieur X. de renoncer à soulever la nullité du bon de commande. En effet, le fait de souscrire un contrat de crédit ne saurait être interprété comme une volonté de réparer le vice affectant le contrat, dans la mesure où le contrat de crédit a été conclu le même jour que le contrat de vente, et par l'intermédiaire de la société signataire du contrat de vente. Cette souscription de deux contrats dans un même trait de temps n'a pas permis une quelconque réflexion de Monsieur X. sur la validité du bon de commande.
En outre, la signature d’un procès-verbal de réception des travaux le 23 octobre 2019, certes sans réserve, ne saurait non plus être interprétée comme une volonté non équivoque de renoncer à soulever la nullité du bon de commande puisque ce procès-verbal de réception ne mentionne pas que l'installation est effectivement raccordée et fonctionnelle. En outre, la signature d’une attestation de bonne fin des travaux ne permet pas de caractériser que l’acquéreur avait connaissance du vice ni qu’il a eu l’intention de le réparer. En effet, l’attestation de conformité de l’installation a été émise par la société NJCE le 28 octobre 2019.
De même, le fait de demander le déblocage des fonds et de s'acquitter des mensualités dues en application du contrat de prêt ne saurait être interprété de la sorte, particulièrement chez des acheteurs consommateurs et donc profanes, qui peuvent craindre qu'il leur soit reproché de ne pas s'acquitter des mensualités du crédit.»
3/ « La nullité du contrat de crédit a pour effet de remettre les parties dans la situation dans laquelle elle se trouvaient avant la conclusion du contrat. Elle entraîne donc des restitutions réciproques, sauf si le prêteur a commis des fautes.
Il est de jurisprudence constante (Cass. 1ère civ., 7 octobre 2020, pourvoi n°18-20.664 ; Cass. 1ère civ., 25 novembre 2020, pourvoi n°19-14.908, publié au bulletin ; Cass., 1ère civ., 06 janvier 2021, pourvoi n°19-11.277 et 19-14.536), que le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En cas de faute de la banque ayant causé un préjudice à l'emprunteur, le principe de la réparation intégrale impose que la privation de la créance de restitution ne puisse pas excéder la mesure du préjudice à réparer.
Il est également de jurisprudence constante qu'il n'incombe pas au prêteur de s'assurer de la mise en service de l'installation (Cass, 1re civ., 11 mai 2017, pourvoi n°16-13.444), mais que celui-ci commet une faute s'il libère les fonds au vu d'une attestation de livraison insuffisamment claire et précise pour rendre compte de la complexité de l'opération financée et ainsi permettre au prêteur de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal (Cass, 1re civ., 02 juillet 2014, pourvoi n°13-16.346 ; Cass, 1re civ., 10 décembre 2014, pourvois n°13-22.674 et 13-22.679). »
4/ « Ce procès-verbal de réception est dépourvu de toute ambiguïté puisqu'il précise que seule la livraison et la pose des biens prévus au bon de commande ont été effectués. Aucune mention des démarches pour obtenir l'attestation de conformité auprès du Consuel ou pour accomplir les démarches administratives auprès d’ENEDIS ne figure sur ce procès-verbal.
Ces prestations faisant partie du bon de commande, l'organisme de crédit aurait dû s'assurer qu'elles avaient été effectuées avant de libérer les fonds, et ce d'autant plus que le délai entre la conclusion des contrats et le procès-verbal de réception était particulièrement brève au regard du nombre de démarches à accomplir.
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE étant tenue de s'assurer avant de libérer les fonds que l'intégralité de la prestation commandée a été exécutée et d’avoir vérifié au préalable la régularité du contrat principal alors que les irrégularités du bon de commande étaient manifeste, a commis une faute de nature à la priver de sa créance de restitution des fonds. »
5/ « Il n'est pas contesté que Monsieur X. a bénéficié de la prestation liée à l’installation solaire, au ballon d’eau chaude et à la pompe à chaleur, qui a été financée par le crédit accordé par la SARL BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, ainsi qu’il ressort de la production de la facture EDF du 8 décembre 2021 (pièce n°9 de Monsieur X.). Cependant il résulte du constat de Maître Z., commissaire de justice à [Localité 12] en date du 25 mars 2024, que l’installation du matériel n’a pas été réalisée dans les règles de l’art et dysfonctionne, ce qui a rendu nécessaire le remplacement à plusieurs reprises du bloc de sécurité. La preuve est donc rapportée de ce que Monsieur X. n’a pu bénéficier d’une installation en bon état de marche, de sorte que le préjudice de Monsieur X. est établi.
La faute de la banque a causé un préjudice à Monsieur X. qui a dû s'acquitter des échéances d'un crédit alors que le contrat n’était pas exécuté en sa totalité et que l’installation était défectueuse. Par conséquent, il y a lieu de dire que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE doit être privée de sa créance de restitution. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DE MONTREUIL
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
JUGEMENT DU 25 MARS 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 23/02999. Jugement n° 25/00167. N° Portalis DB3S-W-B7H-YPZE
Jugement réputé contradictoire rendu et mis à disposition au greffe du tribunal de proximité de Montreuil-sous-Bois en date du 25 mars 2025 ;
Par Hélène DUBREUIL, juge des contentieux de la protection siégeant au tribunal de proximité de Montreuil-sous-Bois assistée de Yann LACHAT, greffier ;
Après débats à l'audience publique du 23 janvier 2025 tenue sous la présidence de Hélène DUBREUIL, juge des contentieux de la protection siégeant au tribunal de proximité de Montreuil-sous-Bois, assistée de Yann LACHAT, greffier audiencier ;
ENTRE :
DEMANDEUR :
Monsieur X.
demeurant [Adresse 11] - [Localité 4], représenté par Maître Ornella SCOTTO DI LIGUORI, avocat au barreau de MARSEILLE, D'UNE PART
ET :
DÉFENDEURS :
SAS NJCE
demeurant [Adresse 3] - [Localité 8], non comparante, ni représentée
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE EXERÇANT SOUS L’ENSEIGNE CETELEM SA
demeurant [Adresse 2] - [Localité 7], représentée par Maître Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocats au barreau de PARIS
Maître V. X. Mandataire liquidateur de NJCE K.
demeurant [Adresse 5] - [Localité 9], non comparant, ni représenté
D'AUTRE PART
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par actes d'huissier en date des 27 et 28 novembre 2023 Monsieur X. a fait assigner la société NJCE et la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux fins d'obtenir l'annulation d'un contrat de vente de panneaux photovoltaïques, l'annulation d'un contrat de crédit affecté, ainsi que le paiement de diverses sommes à titre de remboursement des échéances du crédit et de dommages et intérêts.
Par acte en date du 10 décembre 2024, Monsieur X. a assigné en intervention forcée Maître V. X. K. es qualité de mandataire liquidateur de la société NJCE, désigné par jugement du tribunal de commerce de Créteil du 25 mars 2023.
Les deux affaires ont été jointes le 23 janvier 2025.
L'affaire a été retenue, après plusieurs renvois, à l'audience du 23 janvier 2025.
[*]
Dans ses dernières conclusions remises au greffe à l'audience du 23 janvier 2025, Monsieur X. demande au juge, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de :
déclarer son action recevable, débouter la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de l'ensemble de ses demandes, à titre principal, prononcer l'annulation du contrat de vente qu'il a conclu avec la société NJCE et l'annulation du contrat de crédit affecté qu'il a conclu avec la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, à titre subsidiaire, prononcer la résolution de ces deux contrats, en conséquence :à titre principal, ordonner le remboursement par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE des sommes qu'il lui a versé, soit la somme de 21.344,68 euros arrêtée au mois de janvier 2025.à titre subsidiaire, condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à lui verser la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts, à titre infiniment subsidiaire, prononcer la déchéance du droit aux intérêts et ordonner la poursuite du paiement des échéances mensuelles du prêt, hors intérêts, selon le nouveau tableau d'amortissement communiqué par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, en tout état de cause, condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à lui verser les sommes suivantes :
* 5.000 euros au titre de son préjudice moral,
* 3.000 euros au titre des frais irrépétibles,
* les entiers dépens,
Pour un plus ample exposé des moyens à l'appui des demandes de Monsieur X., il convient de se référer, en application de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions récapitulatives déposées à l'audience du 23 janvier 2025.
[*]
Dans ses dernières écritures déposées à l'audience du 23 janvier 2025, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE demande de :
à titre principal, débouter Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes, à titre subsidiaire, en cas de nullité des contrats, condamner Monsieur X. à lui régler la somme de 35.900 euros en restitution du capital emprunté, et ordonner la compensation des créances réciproques, à titre infiniment subsidiaire : condamner Monsieur X. à lui verser la somme de 35.900 euros à titre de dommages et intérêts, Enjoindre Monsieur X. à restituer, à ses frais, le matériel installé à Maître V. X. K. es qualité de mandataire liquidateur de la société NJCE dans un délai d'un mois à compter de la signification du jugement, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité et dire qu'à défaut de restitution, Monsieur X. restera tenu au remboursement du capital emprunté,
en tout état de cause, elle demande au juge de débouter le demandeur de l'ensemble de ses demandes, d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence et de le condamner à lui verser la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens.
[*]
Pour un plus ample exposé des moyens à l'appui des demandes la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, il convient de se référer, en application de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions en défense déposées à l'audience du 23 janvier 2025.
Bien que régulièrement citée à personne morale et avisée de la date de l'audience de renvoi, la société NJCE, prise en la personne de son mandataire liquidateur Maître K., n'a pas comparu, ni personne pour la représenter.
Maître K. a écrit le 16 décembre 2024 pour indiquer que compte-tenu de l’impécuniosité du dossier, il ne lui est pas possible de se faire représenter à l’audience.
A l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré au 25 mars 2025.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1/ Sur le fond :
À titre liminaire, il convient de rappeler que le contrat de prêt litigieux est soumis aux dispositions applicables aux crédits à la consommation telles que modifiées par la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010. La version des articles mentionnés dans les développements qui suivent est la version antérieure à l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, applicable en l'espèce.
En outre, les dispositions du code civil applicables et mentionnées dans les développements qui suivent sont, sauf précision contraire, celles antérieures à la réforme du 10 février 2016.
Sur la qualification du contrat de vente :
L'article L. 121-16 du code de la consommation définit le contrat hors établissement comme un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le contrat de vente litigieux a été conclu hors établissement. Il est donc soumis aux dispositions du code de la consommation applicables à ce type de contrats.
Sur la nullité du contrat de vente :
Sur les irrégularités du bon de commande :
Il résulte des articles L. 111-1 et L. 121-17 du code de la consommation qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les caractéristiques essentielles du bien ou du service ainsi que le prix de ce bien ou de ce service, et ce à peine de nullité. Il est également tenu de communiquer la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou exécuter le service.
L'article L. 121-18-1 du même code prévoit que ces mentions sont requises à peine de nullité, étant précisé qu'il s'agit d'une nullité relative.
En l'espèce, le bon de commande en date du 13 septembre 2019 porte notamment sur la fourniture et la pose de 10 panneaux photovoltaïques SOLUXTEC 300 WC, 10 micro onduleurs ENPHASE, un chauffe-eau thermodynamique THERMOR AEROMAX 5, une pompe à chaleur DAIKIN Altherma.
S'agissant d'une installation à haut niveau de développement technologique destinée à produire de l'énergie, la marque et le modèle, dont les fonctions sont de garantir l'origine d'un produit commercialisé, sont des caractéristiques essentielles pour le consommateur démarché. Ces informations doivent lui permettre d'identifier le fabricant garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits, et de pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix tenant compte de la technologie mise en œuvre durant le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi.
Or, en l'espèce, ni la surface de l'installation photovoltaïque ni son poids, même global, ne sont mentionnés. Il s'agit pourtant d'une caractéristique essentielle du bien vendu puisque sans ces précisions, le consommateur n'est pas en mesure de savoir si l'installation est adaptée à sa toiture.
En outre, il est mentionné un délai de livraison « au plus tard dans les quatre mois à compter de la signature du présent bon de commande », ce délai est exprimé en termes vagues et ne permet pas au consommateur de connaître le délai de livraison en termes précis, ce qui équivaut à une absence de délai.
Il résulte de ces éléments que le bon de commande est entaché de plusieurs irrégularités formelles emportant nullité relative du contrat, sans qu'il soit nécessaire d'analyser le surplus des griefs formulés à l'encontre de la société NJCE.
Sur la confirmation :
L'article 1338 du code civil dispose que l'acte de confirmation ou ratification d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité ou en rescision n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l'action en rescision, et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée. A défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée. La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers.
Il incombe à celui qui s'oppose à l'annulation du contrat d'établir que le consommateur avait connaissance des irrégularités du contrat et qu'il a renoncé à s'en prévaloir par des actes non équivoques.
Par arrêt du 24 janvier 2024 la Cour de Cassation (Cass 1ère, civ.24 janvier 2024 pourvoi n°W22-16.115) considère que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d’avoir une connaissance effective du vice résultant de l’inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l’absence de circonstances, qu’il appartient au juge de relever, permettant de justifier une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l’envoi par le professionnel d’une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l’article 1183 du code civil.
En l'espèce, les conditions générales reproduisent plusieurs articles du code de la consommation, il n’est cependant pas établi que Monsieur X. ait eu conscience des vices affectant le bon de commande au moment de la souscription du contrat ou de son exécution. En outre, aucune demande de confirmation ne lui a été adressé, de sorte que la confirmation de l’acte entaché de nullité n’est pas caractérisée.
Par conséquent, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne rapporte pas la preuve d'une volonté non équivoque de la part de Monsieur X. de renoncer à soulever la nullité du bon de commande.
En effet, le fait de souscrire un contrat de crédit ne saurait être interprété comme une volonté de réparer le vice affectant le contrat, dans la mesure où le contrat de crédit a été conclu le même jour que le contrat de vente, et par l'intermédiaire de la société signataire du contrat de vente. Cette souscription de deux contrats dans un même trait de temps n'a pas permis une quelconque réflexion de Monsieur X. sur la validité du bon de commande.
En outre, la signature d’un procès-verbal de réception des travaux le 23 octobre 2019, certes sans réserve, ne saurait non plus être interprétée comme une volonté non équivoque de renoncer à soulever la nullité du bon de commande puisque ce procès-verbal de réception ne mentionne pas que l'installation est effectivement raccordée et fonctionnelle. En outre, la signature d’une attestation de bonne fin des travaux ne permet pas de caractériser que l’acquéreur avait connaissance du vice ni qu’il a eu l’intention de le réparer.
En effet, l’attestation de conformité de l’installation a été émise par la société NJCE le 28 octobre 2019.
De même, le fait de demander le déblocage des fonds et de s'acquitter des mensualités dues en application du contrat de prêt ne saurait être interprété de la sorte, particulièrement chez des acheteurs consommateurs et donc profanes, qui peuvent craindre qu'il leur soit reproché de ne pas s'acquitter des mensualités du crédit.
Monsieur X. verse aux débats une facture EDF après installation datée du 8 décembre 2021 faisant apparaître des majorations et déduction en tant qu’auto-consommateur tel que précisé dans le bon de commande.
Le rapport de la SASU 2CLM du 12 décembre 2022 (pièce n°10 de M.X.) indique que la promesse d’autofinancement qui a motivé l’investissement n’est pas tenue.
En outre, il est établi par le constat du commissaire de justice versé aux débats que l’installation est défectueuse.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le contrat de vente conclu le 13 septembre 2019 entre la société NJCE et Monsieur X. est nul pour omission de plusieurs caractéristiques essentielles des biens vendus, sans qu'il soit nécessaire d'analyser les autres moyens soulevés par les demandeurs au soutien de leur demande de nullité, et sans que cette nullité n'ait été couverte par la confirmation.
Sur la nullité du contrat de crédit affecté
L'article L. 311-32 du code de la consommation dispose que le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le contrat de crédit consenti par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le 13 septembre 2019 est un contrat accessoire au contrat de vente conclu entre Monsieur X. et la société NJCE.
Dès lors, la nullité du contrat de vente entraîne la nullité du contrat de crédit.
Sur les conséquences de la nullité du contrat de crédit :
La nullité du contrat de crédit a pour effet de remettre les parties dans la situation dans laquelle elle se trouvaient avant la conclusion du contrat. Elle entraîne donc des restitutions réciproques, sauf si le prêteur a commis des fautes.
Il est de jurisprudence constante (Cass. 1ère civ., 7 octobre 2020, pourvoi n°18-20.664 ; Cass. 1ère civ., 25 novembre 2020, pourvoi n°19-14.908, publié au bulletin ; Cass., 1ère civ., 06 janvier 2021, pourvoi n°19-11.277 et 19-14.536), que le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En cas de faute de la banque ayant causé un préjudice à l'emprunteur, le principe de la réparation intégrale impose que la privation de la créance de restitution ne puisse pas excéder la mesure du préjudice à réparer.
Il est également de jurisprudence constante qu'il n'incombe pas au prêteur de s'assurer de la mise en service de l'installation (Cass, 1re civ., 11 mai 2017, pourvoi n°16-13.444), mais que celui-ci commet une faute s'il libère les fonds au vu d'une attestation de livraison insuffisamment claire et précise pour rendre compte de la complexité de l'opération financée et ainsi permettre au prêteur de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal (Cass, 1re civ., 02 juillet 2014, pourvoi n°13-16.346 ; Cass, 1re civ., 10 décembre 2014, pourvois n°13-22.674 et 13-22.679).
En l'espèce, le bon de commande conclu avec la société NJCE porte sur la fourniture et la pose de 10 panneaux photovoltaïques SOLUXTEC 300 WC, 10 micro onduleurs ENPHASE, un chauffe-eau thermodynamique THERMOR AEROMAX 5, une pompe à chaleur DAIKIN Altherma.
Il ressort de ce contrat qu'il incombait également à la société NJCE d'accomplir les démarches administratives auprès de la Mairie, d'obtenir l'attestation de conformité photovoltaïque du Consuel ainsi que les démarches administratives auprès d’ENEDIS.
Or, il ressort de la « fiche de réception des travaux » (pièce défendeur n°3), signée par Monsieur X. le 23 octobre 2019, soit plus d’un mois après la conclusion du contrat de vente et de crédit affecté, que Monsieur X. « déclare que la réception est prononcée sans réserves ». Il est précisé, au titre du matériel livré et installé : « CENTRALE (PHOTOVOLTAÏQUE 3kwc +Ballon thermodynamique 200 litres+ATLANTIC Air4Eau 11 à 16 kw)».
Ce procès-verbal de réception est dépourvu de toute ambiguïté puisqu'il précise que seule la livraison et la pose des biens prévus au bon de commande ont été effectués. Aucune mention des démarches pour obtenir l'attestation de conformité auprès du Consuel ou pour accomplir les démarches administratives auprès d’ENEDIS ne figure sur ce procès-verbal.
Ces prestations faisant partie du bon de commande, l'organisme de crédit aurait dû s'assurer qu'elles avaient été effectuées avant de libérer les fonds, et ce d'autant plus que le délai entre la conclusion des contrats et le procès-verbal de réception était particulièrement brève au regard du nombre de démarches à accomplir.
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE étant tenue de s'assurer avant de libérer les fonds que l'intégralité de la prestation commandée a été exécutée et d’avoir vérifié au préalable la régularité du contrat principal alors que les irrégularités du bon de commande étaient manifeste, a commis une faute de nature à la priver de sa créance de restitution des fonds.
Toutefois, il est constant que l’emprunteur doit établir l’existence d’un préjudice en lien avec la faute de la banque.
Il n'est pas contesté que Monsieur X. a bénéficié de la prestation liée à l’installation solaire, au ballon d’eau chaude et à la pompe à chaleur, qui a été financée par le crédit accordé par la SARL BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, ainsi qu’il ressort de la production de la facture EDF du 8 décembre 2021 (pièce n°9 de Monsieur X.).
Cependant il résulte du constat de Maître Z., commissaire de justice à [Localité 12] en date du 25 mars 2024, que l’installation du matériel n’a pas été réalisée dans les règles de l’art et dysfonctionne, ce qui a rendu nécessaire le remplacement à plusieurs reprises du bloc de sécurité.
La preuve est donc rapportée de ce que Monsieur X. n’a pu bénéficier d’une installation en bon état de marche, de sorte que le préjudice de Monsieur X. est établi.
La faute de la banque a causé un préjudice à Monsieur X. qui a dû s'acquitter des échéances d'un crédit alors que le contrat n’était pas exécuté en sa totalité et que l’installation était défectueuse.
Par conséquent, il y a lieu de dire que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE doit être privée de sa créance de restitution.
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE doit én conséquence être condamnée à restituer à Monsieur X. la somme de la somme de 21.344,68 euros arrêtée à janvier 2025 au titre du capital, intérêts et frais accessoires en vertu du contrat de crédit affecté du 13 septembre 2019.
Sur la demande de dommages et intérêts de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE :
En l’espèce, il ne peut être reproché à Monsieur X. une légèreté blâmable alors que la BNP PARIBAS PERSONAL SERVICE, en tant que professionnel du crédit affecté devait procéder aux vérifications nécessaires avant de libérer les fonds.
Cette demande doit être rejetée.
Sur la demande de restitution du matériel installé :
Le principe de réparation intégrale impose de réparer l'intégralité du préjudice subi, sans perte ni profit.
En l'espèce, la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a été déboutée de sa demande en restitution du capital emprunté correspondant au coût de l'installation photovoltaïque.
Cependant, eu égard aux malfaçons et au dysfonctionnement du matériel installé d’une part et à la liquidation judiciaire de la société NJCE d’autre part, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de restitution du matériel, aucun profit ne pouvant être retiré de ce matériel.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur X. :
En matière de responsabilité contractuelle comme en matière de responsabilité délictuelle, l'octroi de dommages et intérêts suppose l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.
En l'espèce, Monsieur X. rapporte la preuve du préjudice moral qu'il allègue du fait des dysfonctionnements de l’installation litigieuse et des tracasseries causées par une procédure judiciaire.
Il y a lieu en conséquence de condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à lui régler à ce titre la somme de 2.000 euros au titre du préjudice moral.
Sur les autres demandes :
La SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, partie perdante, sera condamnée aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile. Il convient également de la condamner à verser à Monsieur X. la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles.
En application de l'article 514 du code de procédure civile dans sa version applicable au litige, il convient de rappeler que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Hélène DUBREUIL, juge des contentieux de la protection, statuant par jugement réputé contradictoire, rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,
DÉCLARE recevable l'action de MonsieurX. ;
PRONONCE la nullité du contrat de vente conclu entre Monsieur X. et la société NJCE en date du 13 septembre 2019 ;
PRONONCE la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre Monsieur X. et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en date du 19 septembre 2019 ;
CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Monsieur X. la somme de 21.344,68 euros au titre du capital, des intérêts et des frais accessoires arrêtés en janvier 2025 ;
DEBOUTE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande de dommages et intérêts;
DEBOUTE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande de restitution du matériel à la société NJCE ;
CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Monsieur X. la somme de 2000 euros au titre du préjudice moral ;
CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux dépens ;
CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Monsieur X. la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
RAPPELLE que la présente décision est de plein droit assortie de l'exécution provisoire.
Ainsi fait, jugé et mis à disposition au greffe de la juridiction aux jour, mois et année susdits. En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier.
Le greffier Le juge