CA NIMES (1re ch. civ. A), 11 décembre 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 4089
CA NÎMES (1re ch. civ. A), 11 décembre 2012 : RG n° 11/03215
Publication : Jurica
Extrait : « M. X. avait souscrit auprès de MAAF ASSURANCES un contrat d'assurances garantissant les risques corporels d'accidents de la vie privée et prévoyant le versement d'un capital forfaitaire suivant la durée de l'incapacité et le niveau de garantie choisi (en l'espèce niveau 1) et le versement d'un capital au-delà d'un taux de 10 %. Le 25 août 2006, soit trois mois après l'accident, un règlement de 1.314 euros correspondant au montant maximum du capital forfaitaire pour une durée d'incapacité supérieure à 90 jours a été effectué au profit de M. X. ; le taux d'incapacité permanente partielle de 4 % est inférieur au taux prévu par le contrat pour ouvrir droit à un capital. L'autre contrat souscrit auprès de la même compagnie, multirisque habitation, prévoyait une garantie recours à la suite d'un accident causé par un tiers qui est défini par la police d'assurance comme « toute personne autre que l'assuré, ses descendants ou ascendants ». Or, en l'espèce la responsabilité de l'accident incombe au père de la victime au titre de la garde de l'engin à l'origine du dommage. La clause de la police limitant sa garantie aux accidents causés par des tiers qui sont précisément définis par le contrat ne peut, contrairement aux affirmations de M. Cy. X., être considérée comme abusive car cette définition ne vient pas contredire la portée de l'engagement pris par l'assureur et comme à juste titre retenu par le Tribunal, elle n'est pas de nature à créer un équilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. La demande de dommages-intérêts contre la MAAF qui a exécuté ses obligations conformément aux termes du contrat a à juste titre et par des motifs pertinents été rejetée par le Tribunal. »
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
PREMIÈRE CHAMBRE A
ARRÊT DU 16 JUIN 2011
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/03215. TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'AVIGNON, 16 juin 2011.
APPELANTE :
AREAS DOMMAGES
poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social, Rep/assistant : Maître Sylvie LAROCHE DEROULLERS, Plaidant/Postulant (avocat au barreau de NIMES)
INTIMÉS :
Monsieur Cy. X.
né le [date] à [ville], Rep/assistant : la SCP POMIES-RICHAUD VAJOU DISSOUTE REPRÉSENTÉE PAR SES CO LIQUIDATEURS MAÎTRE G. POMIES RICHAUD ET MAÎTRE E.VAJOU, Postulant (avocats au barreau de NIMES), Rep/assistant : Maître Carole ROSTAGNI, Plaidant (avocat au barreau d'AVIGNON) (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Nîmes)
Société MAAF ASSURANCES
intimée sur appel provoqué, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège social, Rep/assistant : la SCP MARION GUIZARD PATRICIA SERVAIS, Postulant (avocats au barreau de NÎMES), Rep/assistant : Maître Xavier FORTUNET, Plaidant (avocat au barreau d'AVIGNON)
Monsieur Mi. X.
intimé sur appel provoqué, assigné à domicile
LES MUTUELLES DU SOLEIL
prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège social, intimée sur appel provoqué, assignée à sa personne
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 13 septembre 2012
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : M. Dominique BRUZY, Président, Mme Christine JEAN, Conseiller, M. Serge BERTHET, Conseiller,
GREFFIER : Mme Jany MAESTRE, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS : à l'audience publique du 25 septembre 2012, où l'affaire a été mise en délibéré au 4 décembre 2012 prorogé au 11 décembre 2012.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel ;
ARRÊT : Arrêt de défaut, prononcé et signé par M. Dominique BRUZY, Président, publiquement, le 11 décembre 2012, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Le 23 mai 2006, Monsieur Cy. X., assuré auprès de la Compagnie MAAF, a été victime d'un accident à [ville A.] (GIRONDE), au domicile de son père, M. Mi. X., qui manipulait une bétonnière à tracter, assurée auprès de la Compagnie d'assurances AREAS DOMMAGE, dont il a perdu le contrôle.
Par exploits des 2, 5 et 22 mai 2008, Monsieur Cy. X. a assigné devant le Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON Monsieur Mi. X., la Société d'assurances mutuelles à cotisations fixes, AREAS DOMMAGES, et la SA MAAF ASSURANCES. Par exploit du 23 mai 2008, il a assigné les MUTUELLES DU SOLEIL aux fins de déclaration du jugement à intervenir commun et opposable.
Par ordonnance de référé du 28 mai 2008, le Docteur A. a été désigné pour procéder à une expertise médicale et Monsieur B. pour diligenter une expertise comptable. Une provision de 10.000 euros a été allouée à Monsieur X.
Le Docteur A. a déposé son rapport d'expertise le 9 octobre 2008 et Monsieur B. le 12 novembre 2009.
Par ordonnance du Juge de la mise en état du 16 novembre 2009, une provision complémentaire de 15 000 euros a été accordée à Monsieur X.
Par jugement du 16 juin 2011, le Tribunal de Grande Instance d'Avignon a statué comme suit :
« Déclare recevable la demande d'indemnisation au titre du préjudice corporel ;
- Dit que le droit à indemnisation de Monsieur Cy. X., du fait de l'accident survenu le 23 mai 2006, doit être supporté par la Société d'assurances mutuelles à cotisations fixes AREAS DOMMAGES ;
- Fixe le préjudice patrimonial subi par Monsieur Cy. X. à la somme de 80.835 euros ;
- Fixe le préjudice extra-patrimonial subi par Monsieur Cy. X. à la somme de 15.100 euros ;
- Condamne la Société d'assurance mutuelles à cotisations fixes AREAS DOMMAGES à verser à Monsieur Cy. X. la somme de 56.662,52 euros (cinquante-six mille six cent soixante-deux euros cinquante-deux centimes) avec intérêts légaux à compter de la signification de la présente décision ;
- Déboute Monsieur Cy. X. du surplus de ses demandes à l'encontre de la Société d'assurances mutuelles à cotisations fixes AREAS DOMMAGES ;
- Déboute Monsieur Cy. X. de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SA MAAF ASSURANCES ;
- Assortit la présente décision de l'exécution provisoire ;
- Déclare le jugement commun et opposable aux MUTUELLES DU SOLEIL ;
- Condamne la Société d'assurance mutuelles à cotisations fixes AREAS DOMMAGES à verser à Monsieur Cy. X. la somme de 3.000 euros (trois mille euros) sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamne Monsieur Cy. X. à verser à la SA MAAF ASSURANCES la somme de 1.200 euros (mille deux cents euros) en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamne la Société d'assurances mutuelles à cotisations fixes AREAS DOMMAGES aux dépens engagés par Monsieur Cy. X., en ceux compris les frais d'expertises, avec distraction au profit de Maître ROSTAGNI ;
- Condamne Monsieur Cy. X. aux dépens engagés par la SA MAAF ASSURANCES ».
La société d'assurances mutuelles AREAS DOMMAGES a relevé appel cantonné au préjudice patrimonial à l'encontre de M. Cy. X. qui a formé appel incident et provoqué contre M. Mi. X., MAAF ASSURANCES et les MUTUELLES DU SOLEIL.
Pour l'exposé du détail des prétentions et moyens des parties devant la Cour, il est expressément fait référence à leurs conclusions récapitulatives signifiées le :
- 6 avril 2012 pour M. Cy. X.,
- 16 mai 2012 pour MAAF ASSURANCES,
- 22 mai 2012 pour AREAS DOMMAGES.
La société d'Assurances AREAS DOMMAGES demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré uniquement en ce qui concerne l'évaluation du préjudice économique et financier de M. Cy. X. et d'homologuer le rapport d'expertise judiciaire de M. B. qui retient un préjudice financier de 26.054 euros, déduction faite des indemnités journalières perçues. Elle conclut à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses autres dispositions.
M. Cy. X. conclut au rejet des demandes de l'appelante et forme les prétentions suivantes :
« - Faire droit à l'appel incident et provoqué du concluant,
- CONDAMNER AREAS à lui payer les sommes suivantes :
* Incapacité temporaire totale : 7 mois et 14 jours soit la somme de 14.000 euros,
* Déficit fonctionnel temporaire : Gêne totale : soit la somme de 4.000 euros, Gêne partielle : soit la somme de 6.000 euros,
* Déficit fonctionnel permanent : 4 %, soit la somme de 9.000 euros,
* Préjudice esthétique temporaire : 2/7, soit la somme de 4.000 euros,
* Préjudice esthétique permanent : 1/7, soit la somme de 2.000 euros,
* Souffrance endurées : 3/7, soit la somme de 11.000 euros,
* Incidence professionnelle : 19.000 euros,
Et ce, avec intérêts légaux à compter de la signification du jugement de première instance,
- LIQUIDER le préjudice financier et économique de Monsieur X.
EN CONSEQUENCE,
- CONDAMNER AREAS à lui payer la somme de 66.563 euros au titre du préjudice financier et économique, avec intérêts légaux à compter de la signification du jugement du Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON,
- Dont à déduire l'indemnité provisionnelle de 30.000 euros.
- DÉCLARER COMMUNE ET OPPOSABLE la décision à intervenir à la société LES MUTUELLES DU SOLEIL et à Monsieur Mi. X.
- CONDAMNER AREAS à lui verser la somme de 90.000,00 euros à titre de dommages et intérêts et ce, sur le fondement de l’article 1383 du Code civil et de l’article L. 113-5 du Code des assurances, avec intérêts légaux à compter de la signification du jugement du Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON.
- CONDAMNER la MAAF à lui verser la somme de 70.000,00 à titre de dommages et intérêts et ce, sur le fondement de l’article L. 121-12 du Code des assurances, de l’article 1184 du Code civil ainsi que de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, avec intérêts légaux à compter de la signification du jugement du Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON.
- CONDAMNER la MAAF à lui verser la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 1183 du Code civil, avec intérêts légaux à compter de la signification du Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AVIGNON.
- CONDAMNER AREAS à verser à Monsieur Cy. X. la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens y compris les frais d'expertises avec distraction au profit de la SCP POMIES RICHAUD VAJOU sur ses affirmations de droit.
- DÉBOUTER la CIE AREAS, Mr Mi. X., la MAAF, les MUTUELLES DU SOLEIL de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires. »
La SA MAAF ASSURANCES conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté M. X. de ses demandes contre elle et en ce qu'il a condamné le demandeur à lui payer une indemnité au titre de ses frais irrépétibles. Elle sollicite l'allocation d'une somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
M. Mi. X., assigné à domicile, n'a pas constitué avoué ni avocat.
La société MUTUELLES DU SOLEIL, assignée à personne habilitée par exploit du 9 décembre 2011, n'a pas constitué avocat.
Il sera statué par arrêt de défaut.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
SUR LE PRÉJUDICE :
La société d'assurances AREAS, assureur de responsabilité civile de M. Mi. X. ne conteste pas le droit à indemnisation de M. Cy. X. ni son obligation à réparation ni encore le montant des sommes allouées en indemnisation du préjudice à l'exception de l'indemnité accordée au titre du préjudice économique et financier.
M. X. demande l'augmentation des indemnités pour tous les chefs de préjudice.
Agé de 34 ans à la date de l'accident, il était artisan chauffeur livreur dans le cadre d'une entreprise employant cinq personnes. Il a repris son activité professionnelle le 19 janvier 2007.
La société MUTUELLES DU SOLEIL, à laquelle a été délivrée injonction par le conseiller de la mise en état de communiquer l'intégralité de ses débours, n'a pas déféré à cette injonction. Il doit donc être retenu que cette société n'a versé aucune prestation à M. X. lequel n'a perçu que les indemnités journalières mentionnées dans le rapport d'expertise judiciaire de 9.272,48 euros.
Les conclusions du Dr A. sont les suivantes :
- déficit fonctionnel temporaire total du 20 mai au 24 juillet 2006 (avec une hospitalisation du 23 au 25 mai 2006) puis les 17 et 18 janvier 2007 (hospitalisation) et partiel du 25 juillet 2006 au 31décembre 2006,
- déficit fonctionnel permanent après consolidation arrêtée au 18 février 2007 fixé à 4 %,
- souffrances endurées avant consolidation : 3/7,
- préjudice esthétique évalué à 2/7 avant consolidation puis 1/7 après consolidation,
- préjudice d'agrément : sans objet,
- incidence professionnelle : difficultés au ripage et transport de charges lourdes n'ayant pas entraîné de changement de profession,
- pas de frais futurs prévisibles.
En considération de l'âge et de la situation de la victime, au vu du rapport d'expertise judiciaire mais aussi des pièces produites soumises à la discussion contradictoire des parties, et faisant application des dispositions de l’article 25 de la loi du 21 décembre 2006 d'application immédiate aux situations en cours, la réparation du préjudice corporel de M. Cy. X. sera fixée comme suit :
1 - Préjudices patrimoniaux :
A) avant consolidation :
1) dépenses de santé actuelles :
Aucune demande n'est formée au titre de frais médicaux restés à charge.
2) perte de gains professionnels pendant l'ITT
M. X. a perçu des indemnités journalières de 9.272,48 euros et la perte totale de revenus, avant et après consolidation, sera ci-après étudiée au vu du rapport d’expertise judiciaire de M. B. et des pièces produites.
B) préjudices patrimoniaux permanents :
* perte de gains professionnels
M. X. se prévaut d'un préjudice économique et financier au titre de la perte de chiffre d'affaires en raison de l'impossibilité de faire face à ses obligations professionnelles d'artisan en bâtiment pendant plus de sept mois alors qu'il dirigeait une société qui était in bonis et dont le chiffre d'affaires ne cessait de croître. Il se prévaut d'une perte de chiffre d'affaires de 450.903,82 euros telle que chiffrée par l'expert judiciaire dans son pré-rapport avec application de taux correcteurs de 79 % pour la marge moyenne entre 2005 et 2006 et 50 % pour la perte d'activité imputable à l'accident de mai 2006 à février 2007 soit un préjudice financier de 75.835 euros sous déduction des indemnités journalières de 9.272 euros.
Le Tribunal a, à juste titre retenu comme base d'appréciation du préjudice économique le travail précis et complet de l'expert judiciaire B., expert-comptable qui a examiné la comptabilité de l'entreprise du demandeur et l'évolution du chiffre d'affaires de celle-ci entre 2005, soit un an avant l'accident, et 2008.
Le pré-rapport contient une analyse détaillée de la comptabilité de l'entreprise de M. X., mois par mois, de 2005 à 2008. L'expert relève que le client ANFA représentait 93 % et que les facturations à ce client avaient baissé de façon significative dès le mois de février 2006, donc antérieurement à l'accident et qu'il y a eu perte du client ALLIANCE au mois de juillet 2005. La baisse s'est accélérée après l'accident.
Les taux proposés par l’expert judiciaire dans le rapport définitif de 75 % pour le calcul de la marge moyenne et de 50 % pour la perte imputable à l'accident du mois de mai 2006 au mois de février 2007 doivent être retenus. En effet, le taux de marge de 79 % dans le pré-rapport ne tenait pas compte de certains frais et charges directement liés à l'activité car certains documents n'avaient été communiqués à l'expert que de façon partielle. Après analyse complète de ces frais, le taux de marge s'établit à 75 % tenant les éléments chiffrés récapitulés en page 10 du rapport définitif. Contrairement aux affirmations de M. X., le taux correcteur de 50 % de la perte de chiffre d'affaires pour évaluer la perte directement imputable à l'accident n'est pas appliqué deux fois par l'expert qui a à juste titre évalué la perte en fonction des périodes d'incapacité totale et d'incapacité partielle, celle-ci étant estimée à la moitié de l'incapacité totale. En revanche, c'est à tort que l’expert a appliqué un prorata pour la période de mai 2006 à juillet 2006 puisque l'incapacité retenue par l'expert médical était totale pendant ces deux mois et qu'il n’y a pas lieu d'évaluer une perte de chiffre d'affaires mensuelle en fonction du nombre de jours d'incapacité sur le mois mais de prendre en compte la perte totale du mois considéré correspondant à la réalité de l'activité économique de l'entreprise. Il en est de même pour le mois de janvier 2007au cours duquel M. X. a subi une nouvelle incapacité totale. Cette perte totale de chiffre d'affaires directement imputable à l'accident de mai 2006 à février 2007 s'établit donc, au vu des chiffres mensuels de 2005 et 2006, à : 50.077,31 euros (mai à juillet 2006) + 55.885,72 euros (incapacité partielle de 50 % du mois d'août 2006 à décembre 2006) + 10.398 euros (janvier 2007) = 116.361,03 euros dont la moitié, soit 58.180,51euros, est directement imputable à l'accident comme précédemment explicité. En fonction d'une marge moyenne de 75 %, la perte de gains de M. X. s'élève à 43.635,38 euros dont il y lieu de déduire les indemnités journalières perçues pour la période considérée de 9.272,48 euros soit une perte nette de 34.362,90 arrondie à 35.000 euros.
C'est à tort que le Tribunal a pris en compte les évaluations proposées dans le pré-rapport de l'expert judiciaire au regard desquelles les parties ont adressé des dires à l'expert qui a été amené à réviser ses conclusions dans son rapport définitif au vu des pièces comptables.
* incidence professionnelle
Ce poste a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle, ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage ou encore du préjudice subi relatif à la nécessité de devoir abandonner la profession qu'elle exerçait avant le dommage.
M. X. fait état d'une reconversion professionnelle difficile en raison de son handicap qui lui interdit d'envisager une activité dans le domaine du transport lui-même en tant que salarié. Il demande de ce chef l'allocation d'une somme de 19.000 euros.
L'expert judiciaire retient des difficultés pour M. X. au ripage et au transport de charges lourdes qui n'ont toutefois pas entraîné de changement d'activité professionnelle. M. X. a repris son activité professionnelle le 19 janvier 2007. Le Tribunal a exactement retenu que la perte d'une chance de retravailler dans le secteur des transports n'est pas avérée mais qu'en revanche, l'augmentation de la fatigabilité au travail et de la pénibilité de son métier ressort des conclusions de l'expert. L'indemnité de 5.000 euros allouée de ce chef par le Tribunal sera portée à 15.000 euros tenant ces constatations et la nature de l'activité de M. X.
2 - préjudices extra-patrimoniaux :
A) préjudices extra- patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :
* déficit fonctionnel temporaire :
Ce poste de préjudice traduit l'incapacité fonctionnelle subie par celle-ci jusqu'à sa consolidation. Il correspond aux périodes d'hospitalisation mais aussi à la perte de qualité de vie et à celle des joies usuelles de la vie courante subies par la victime pendant la durée de l'incapacité. Cette invalidité dans la sphère personnelle de la victime jusqu'à la consolidation est dégagée de toute incidence sur la rémunération professionnelle de la victime.
En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise judiciaire et des documents produits devant la Cour que M. X. a subi un déficit fonctionnel temporaire total de deux mois et six jours puis partiel pendant cinq mois et six jours. L'indemnité de 1.300 euros allouée par le Tribunal en réparation du déficit temporaire total a été exactement appréciée et sera confirmée. Celle de 1 500 euros accordée en réparation du déficit fonctionnel temporaire partiel sera également confirmée, l'appui total sans cannes ayant été autorisé à compter du 25 juillet 2006.
* souffrances endurées :
Il s'agit de toutes les souffrances physiques et psychiques ainsi que des troubles associés que doit endurer la victime durant la maladie traumatique c'est-à-dire du jour du dommage à celui de sa consolidation.
L'expert judiciaire a chiffré à 3 sur 7 les souffrances endurées par M. X. imputables à l'accident. Compte tenu des blessures initiales, du retentissement psychologique, de la nature et de la durée des soins subis, le Tribunal a exactement apprécié la réparation des souffrances endurées par l'allocation d'une indemnité de 4.500 euros.
* préjudice esthétique temporaire
M. X. demande de ce chef l'allocation d'une somme de 4.000 euros qui apparaît excessive eu égard à la nature et à la durée du préjudice esthétique temporaire de 2/7 résultant de la déambulation au moyen de deux cannes anglaises puis d'une canne et du port d'un plâtre. L'indemnité de 1 000 euros sera confirmée.
B) préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation) :
1) déficit fonctionnel permanent :
Ce poste de dommage non économique est lié au déficit définitif résultant de la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel de la victime. Le préjudice psychologique est déjà pris en compte dans l'évaluation des souffrances endurées. Le déficit fonctionnel permanent correspond à un préjudice extra-patrimonial découlant d'une incapacité constatée médicalement qui établit que le dommage subi a une incidence sur les fonctions du corps humain de la victime.
En l'espèce, l'IPP de 4 % résulte de la réduction de l'amplitude de la cheville dans les mouvements de flexion plantaire extrêmes et de varus associée à une gêne malléolaire externe lors de la marche soutenue. L'indemnité de 6.000 euros allouée par le Tribunal sera confirmée compte tenu de la nature des séquelles subies et de leur qualification par l'expert.
2) préjudice esthétique permanent :
Ce poste de dommage vise à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique de la victime ; il a un caractère strictement personnel.
En l'espèce, M. X. présente une cicatrice chirurgicale bien visible au niveau de la cheville gauche mais qui ne déforme pas le modelé anatomique de la cheville. Il n'y a pas de boiterie.
Ce préjudice qui doit être qualifié de très léger est entièrement réparé par l'indemnité de 800 euros allouée par le Tribunal qui sera confirmée.
En définitive, seule est réformée l'indemnité allouée par le Tribunal au titre du préjudice patrimonial et par voie de conséquence le montant de la condamnation à paiement d'AREAS DOMMAGES.
Le préjudice corporel subi par M. X. à la suite de l'accident du 23 mai 2006 s'établit donc comme suit :
I - PRÉJUDICES PATRIMONIAUX :
- préjudice économique et financier : 35.000 euros
- incidence professionnelle : 15.000 euros
II - PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX :
- déficit fonctionnel temporaire : 2.800 euros
- souffrances endurées : 4.500 euros
- préjudice esthétique :
* temporaire : 1.000 euros
* permanent : 800 euros
- déficit fonctionnel permanent : 6.000 euros
AREAS ASSURANCES sera condamnée au paiement de ces sommes à M. Cy. X. en deniers ou quittances.
SUR LES DEMANDES FORMEES CONTRE LES ASSURANCES AU TITRE DE LA RESPONSABILITE DÉLICTUELLE :
M. X. invoque un manque de diligences de la part des assureurs, AREAS et MAAF, qui n'auraient pas donné suite à ses demandes malgré la déclaration d'accident de chaque partie et de nombreuses relances infructueuses.
M. X. avait souscrit auprès de MAAF ASSURANCES un contrat d'assurances garantissant les risques corporels d'accidents de la vie privée et prévoyant le versement d'un capital forfaitaire suivant la durée de l'incapacité et le niveau de garantie choisi (en l'espèce niveau 1) et le versement d'un capital au-delà d'un taux de 10 %. Le 25 août 2006, soit trois mois après l'accident, un règlement de 1.314 euros correspondant au montant maximum du capital forfaitaire pour une durée d'incapacité supérieure à 90 jours a été effectué au profit de M. X. ; le taux d'incapacité permanente partielle de 4 % est inférieur au taux prévu par le contrat pour ouvrir droit à un capital. L'autre contrat souscrit auprès de la même compagnie, multirisque habitation, prévoyait une garantie recours à la suite d'un accident causé par un tiers qui est défini par la police d'assurance comme « toute personne autre que l'assuré, ses descendants ou ascendants ». Or, en l'espèce la responsabilité de l'accident incombe au père de la victime au titre de la garde de l'engin à l'origine du dommage. La clause de la police limitant sa garantie aux accidents causés par des tiers qui sont précisément définis par le contrat ne peut, contrairement aux affirmations de M. Cy. X., être considérée comme abusive car cette définition ne vient pas contredire la portée de l'engagement pris par l'assureur et comme à juste titre retenu par le Tribunal, elle n'est pas de nature à créer un équilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. La demande de dommages-intérêts contre la MAAF qui a exécuté ses obligations conformément aux termes du contrat a à juste titre et par des motifs pertinents été rejetée par le Tribunal.
La société AREAS est l'assureur de la bétonnière à l'origine du dommage. Les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 ne s'appliquent pas au litige et l'assureur n'est pas tenu par la procédure d'offre ni par les délais prescrits par ce texte. Il est tenu d'exécuter loyalement ses obligations de garantie à l'égard de son assuré et du tiers victime. En l'espèce, à la suite des courriers du conseil de M. X. des 14 novembre et 5 décembre 2007 présentant les demandes de celui-ci, la société AREAS a demandé les documents justificatifs, notamment des documents médicaux, les avis d'imposition et les bilans comptables 2005, 2006 et 2007. Le 29 janvier 2008, AREAS demandait à nouveau communication de ces documents pour envisager une expertise comptable. Un expert médical était désigné par cette compagnie. Le 5 février 2008, une provision de 5.000 euros a été versée dans l'attente du rapport de l'expert financier par elle commis. L'expert-comptable intervenant pour le compte de M. X. n'a pas établi un rapport critique au rapport de l'expert DULAC mandaté par AREAS. Une nouvelle provision de 10.000 euros a été versée au mois de mars 2008, avant la procédure judiciaire engagée au mois de mai 2008. Le défaut de diligences allégué à l'encontre d’AREAS n'est donc pas établi.
Le rejet par le Tribunal des demandes en dommages-intérêts formées par M. X. contre les assureurs, pertinemment motivé, sera confirmé.
SUR L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET LES DÉPENS :
L'abus de droit n'est pas caractérisé. Il n'y a pas lieu à dommages-intérêts.
AREAS, tenue à indemnisation, supportera les dépens à l'exception de ceux exposés par la MAAF intimée sur appel provoqué de M. X. qui en aura la charge.
Une somme supplémentaire de 1.200 euros sera allouée à M. X. sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il n'y a pas lieu à application de ce texte au profit des autres parties en cause d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt de défaut, en matière civile et en dernier ressort,
Dit l’appel régulier et recevable en la forme,
Réformant le jugement déféré des seuls chefs de l'évaluation du préjudice patrimonial de M. X. et du montant de la condamnation à paiement de la société AREAS DOMMAGES,
Condamne cette société d'assurances à payer à M. Cy. X., en deniers ou quittances, les sommes suivantes, outre intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement déféré, en réparation des :
I - PRÉJUDICES PATRIMONIAUX
- préjudice économique et financier : 35.000 euros déduction faite des indemnités journalières,
- incidence professionnelle : 15.000 euros
II - PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX
- déficit fonctionnel temporaire : 2.800 euros
- souffrances endurées : 4.500 euros
- préjudice esthétique :
* temporaire : 1.000 euros
* permanent : 800 euros
- déficit fonctionnel permanent : 6.000 euros
Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,
Dit n'y avoir lieu à dommages-intérêts pour procédure abusive,
Condamne M. X. à supporter les dépens exposés par la SA MAAF ASSURANCES,
Condamne l'appelante aux autres dépens,
La condamne à payer à M. X. la somme supplémentaire de 1.200 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
Dit n'y avoir lieu à application de ce texte au profit des autres parties en cause d'appel.
Arrêt signé par M. BRUZY, Président et par Mme MAESTRE, Greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,