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CA VERSAILLES (12e ch.), 19 février 2013

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (12e ch.), 19 février 2013
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 12e ch.
Demande : 11/06239
Date : 19/02/2013
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4346

CA VERSAILLES (12e ch.), 19 février 2013 : RG n° 11/06239 

Publication : Jurica

 

Extraits : « Ainsi que l'a justement rappelé le premier juge, la Convention de Montréal du 28 mai 1999, ratifiée par la France le 24 avril 2003 et par les Etats-Unis le 5 septembre 2003, est entrée en vigueur en France le 28 juin 2004 et prévoit, en son article 1er, qu'elle est applicable à tout transport international de marchandises effectué par aéronef contre rémunération, dès lors que le point de départ et le point de destination sont situés sur le territoire de deux états parties. Cette convention dont les dispositions sont d'ordre public est applicable de plein droit quand bien même elle n'est pas visée dans la LTA. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

DOUZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 19 FÉVRIER 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/06239. CONTRADICTOIRE. Code nac : 55B.

AFFAIRE : Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 26 avril 2011 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE (1re ch.), R.G. n° 09/5300.

LE DIX NEUF FÉVRIER DEUX MILLE TREIZE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, Ayant pour avocat postulant Maître Fabrice H.-B. de la ASS AARPI AVOCALYS (avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 310555), Ayant pour avocat plaidant Maître Stéphane S. (avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D112)

 

INTIMÉE :

Société DHL EXPRESS

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège, Ayant pour avocat postulant Me Franck L., (avocat au barreau de VERSAILLES), Ayant pour avocat plaidant Maître Jean-Louis R. substitué par Maître Aude K., (avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0002)

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 janvier 2013 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marion BRYLINSKI, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme Dominique ROSENTHAL, Président, Mme Marion BRYLINSKI, Conseiller, Mme Marie-Hélène POINSEAUX, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Monsieur X., le 24 juillet 2008, a confié à la société DHL Express l'acheminement de pierres de collection (météorites) depuis la France vers la ville de [ville S .] aux États-Unis ; faisant valoir que les marchandises avaient été totalement détériorées lors du transport, les dégâts étant tellement importants qu'il a fallu plus d'un mois au destinataire pour effectuer un inventaire détaillé des 375 pièces qui lui avaient été renvoyées, monsieur X. a demandé l'indemnisation de son préjudice à la société DHL Express France qui par courrier du 3 septembre 2008, lui a proposé le remboursement des frais de transport, indiquant que sa responsabilité ne pouvait être engagée.

Par acte en date du 18 juin 2009, monsieur X. a assigné la société DHL Express France en paiement de la somme principale de 221 538 euros.

Le tribunal de grande instance de Pontoise, par jugement rendu le 26 avril 2011, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a :

- rejeté les exceptions d'irrecevabilité soulevées par la société DHL Express France et déclaré recevable l'action engagée par monsieur X. ;

- dit que la société DHL Express France est responsable du préjudice subi par monsieur X. à hauteur des 2/3 ;

- dit que le préjudice subi par monsieur X. doit être réparé conformément aux limitations édictées par la Convention de Montréal ;

- condamné la société DHL Express France à payer à monsieur X. en réparation de son préjudice, la contre-valeur en euros, au jour du jugement, de 1.581 droits de tirage spéciaux (DTS), à raison des 2/3 de cette somme ;

- dit que cette somme portera intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil à compter du 18 juin 2009, date de l'assignation en justice ;

- débouté monsieur X. du surplus de ses demandes ;

- condamné la société DHL Express France au paiement à monsieur X. de la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

* * *

Monsieur X. a interjeté appel et, aux termes de ses dernières écritures en date du 11 octobre 2011 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour, le déclarant recevable et bien fondé en son appel, de :

- dire que la société DHL Express France n'a pas rempli ses obligations à son égard et à commis une faute inexcusable en manquant à son obligation principale de transporteur ;

- dire qu'au visa de l’article L.132-1 du code de la consommation, les clauses limitatives de responsabilité invoquées par la société DHL Express France, à l'égard de monsieur X., doivent être considérées comme « non écrites » ;

- dire que la convention de Montréal est inopposable à monsieur X. faute pour la société DHL Express France d'avoir une lettre de transport aérienne conforme et signée par ce dernier ;

- condamner en conséquence la société DHL à payer à monsieur X. les sommes de 108.970 euros en réparation de son préjudice matériel pour la détérioration des marchandises et de 3.000 euros au titre de son préjudice moral ;

- dire que ces sommes porteront intérêts dans les formes de l’article 1154 du code civil à compter du 24 juillet 2008 ;

- condamner la société DHL Express France au paiement à monsieur X. de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

* * *

La société DHL Express France, aux termes de ses dernières écritures en date du 28 novembre 2011 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour de :

- statuer ce que de droit en ce qui concerne la recevabilité de l'appel interjeté par monsieur X., et déclarer recevable l'appel incident formé par la société DHL Express France ;

- infirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions faisant grief à la société DHL Express France et statuant à nouveau,

- à titre liminaire, dire que les demandes de monsieur X. sont irrecevables comme étant fondées sur le droit commun de la responsabilité contractuelle qui est inapplicable en l'espèce ;

- déclarer l'action de monsieur X. irrecevable, faute par lui de justifier que le destinataire a formulé une protestation dans le délai de 14 jours, conformément aux dispositions de l'article 31.2 de la Convention de Montréal ;

- à titre subsidiaire, déclarer monsieur X. mal fondé en ses demandes en application de l'article 18.2.b de la convention de Montréal ;

- à titre encore plus subsidiaire, dire que monsieur X. n'établit pas la réalité et l'importance des dommages ni ne justifie qu'ils se sont produits pendant le transport aérien ;

- à titre toujours plus subsidiaire, faire application de la limitation de responsabilité prévue par l'article 21.3 de la convention de Montréal et dire en conséquence que l'indemnité qui pourrait être éventuellement due ne peut pas excéder la somme de 17 DTS x 93 kgs = 1.581 DTS ;

- condamner monsieur X. au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DISCUSSION :

Le transport a été réalisé au départ de [ville P.] et à destination de [ville S.] aux Etats Unis, sous couvert d'une LTA n° 962 XX YY datée du 24 juillet 2008, concernant 8 colis pour un poids total de 160 Kg.

Ainsi que l'a justement rappelé le premier juge, la Convention de Montréal du 28 mai 1999, ratifiée par la France le 24 avril 2003 et par les Etats-Unis le 5 septembre 2003, est entrée en vigueur en France le 28 juin 2004 et prévoit, en son article 1er, qu'elle est applicable à tout transport international de marchandises effectué par aéronef contre rémunération, dès lors que le point de départ et le point de destination sont situés sur le territoire de deux états parties.

Cette convention dont les dispositions sont d'ordre public est applicable de plein droit quand bien même elle n'est pas visée dans la LTA.

La circonstance, dont se prévaut monsieur X. (en se référant à la jurisprudence rendue pour l'application de la convention de Varsovie dont les termes sont différents), que la lettre de transport aérien ne comporte pas sa signature en sa qualité d'expéditeur contrairement à ce que prescrit l'article 7 de la convention, est indifférente, la Convention de Montréal prévoyant en son article 9 que l'inobservation des dispositions des articles 4 à 8 n'affecte ni l'existence ni la validité du contrat de transport, qui n'en sera pas moins soumis aux règles de la présente convention, y compris celles qui portent sur la limitation de responsabilité.

Il convient en conséquence de statuer exclusivement en application de cette Convention dont les dispositions ne peuvent être écartées, et sur lesquelles monsieur X. a été en mesure de s'expliquer, le visa par celui-ci de textes manifestement inapplicables n'ayant pas pour conséquence de rendre son action irrecevable.

* * *

Il résulte des alinéas 2, 3 et 4 de l'article 31 de la convention qu'en cas d'avaries sur marchandises, le destinataire doit adresser au transporteur une protestation immédiatement après la découverte de l'avarie et au plus tard dans un délai de 14 jours à dater de leur réception, toute protestation doit être faite par réserve écrite et remise ou expédiée dans le délai prévu pour cette protestation, à défaut de quoi toutes actions contre le transporteur sont irrecevables.

Pour déclarer l'action recevable, le tribunal a retenu « qu'il ne peut être reproché à monsieur X. l'absence de protestation émise par le destinataire dans le délai de quatorze jours, dès lors qu'il ressort des circonstances de l'espèce que, les colis ont été confiés au transporteur le 24 juillet 2008 ; que si leur réception n'a pas été faite par le destinataire lui-même, monsieur X. a néanmoins été avisé sans délai par monsieur Y. de la détérioration des colis, dès son arrivée à son domicile et la découverte de ceux-ci ; enfin, que la preuve est rapportée d'une protestation portée à la connaissance du transporteur dès le 30 juillet 2008. »

Le tribunal a pris en considération deux courriels datés du 30 juillet 2008, adressés par monsieur X. à DHL, le premier rédigé comme suit : « Veuillez trouver ci-jointes une vingtaine de photographies des colis éventrés de cet envoi, ainsi que la liste des minéraux contenus dans l'envoi enlevé le 24 juillet. Certains colis ont été grossièrement « recollés », d'autres laissés en l'état. Il y avait 375 « cailloux » au total. Combien en reste-t-il ? Impossible à dire pour le moment. Vous trouverez également copie des lettres reçues de Monsieur Y., destinataire de cet envoi. Dans l'attente de vos commentaires (...) », le second rédigé comme suit : « Il n'y a pas eu de réserves faites. N'étaient présents lors de la livraison que la compagne de M. Y. et son fils de 11 ans environ. Nul doute que vous en prendrez prétexte. Je me permets simplement de vous suggérer qu'à l'inverse, le dossier photos est démonstratif de la qualité de vos services, et de vous rappeler qu'Internet existe. »

Monsieur X. produit d'autres courriels, qui ne peuvent être admis aux débats comme étant rédigés en langue anglaise et non traduits, et qui sont en tout état de cause inopérants comme étant échangés entre lui-même et monsieur Y. Les deux courriels, qui n'ont été complétés par aucun autre document détaillé et exploitable adressé à DHL dans le délai de 14 jours, ne sont pas suffisants à constituer des protestations et réserves au sens de l'article 31 de la convention de Montréal, dès lors qu'ils se bornent à transmettre des photographies de cartons endommagés et de certains emballages intérieurs rigides cassés, mais ne comportent d'autres précisions sur les avaries effectivement subies par les marchandises emballées.

Ils sont en tout état de cause inopérants, dès lors qu'ils émanent de monsieur X. expéditeur alors que le destinataire désigné, qui lors de la livraison n'a pas renoncé à prendre possession de la marchandise, dispose seul, en cas d'avarie, de la qualité pour adresser une protestation au transporteur.

Dans ces conditions, l'action de monsieur X. doit être déclarée irrecevable, le jugement entrepris étant réformé en ce sens.

* * *

Le jugement sera réformé en ses dispositions relatives aux indemnités de procédure et dépens de première instance.

Monsieur X. supportera les entiers dépens de première instance et d'appel, mais il n'y a pas lieu de prévoir l'allocation d'indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et, y ajoutant,

Déclare monsieur X. irrecevable en son action ;

Dit n'y avoir lieu à allocation d'indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne monsieur X. aux entiers dépens de première instance et d'appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,                     Le PRÉSIDENT,