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CASS. CIV. 3e, 9 avril 2013

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 3e, 9 avril 2013
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 3
Demande : 12-12817
Décision : 13/415
Date : 9/04/2013
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Numéro de la décision : 415
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4581

CASS. CIV. 3e, 9 avril 2013 : pourvoi n° 12-12817 ; arrêt n° 415

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Vu l’article 1152 du code civil ; […] ; Attendu que, pour rejeter la demande formée par le bailleur en application de la clause pénale le jugement retient que, même si cette clause est stipulée dans le bail, son application en l'espèce est abusive, M. Y. ne justifiant d'aucun trouble lui portant nuisance ; Qu'en statuant ainsi, sans constater que la peine prévue était manifestement excessive, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 9 AVRIL 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 12-12817. Arrêt n° 415.

DEMANDEUR à la cassation : Monsieur Y.

DÉFENDEUR à la cassation : Époux X.

M. Terrier (président), Président. SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Hémery et Thomas-Raquin, Avocat.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon le jugement attaqué (juridiction de proximité de Sens, du 8 novembre 2011), rendu en dernier ressort, que les époux X., preneurs à bail d'une maison à usage d'habitation appartenant aux époux Y., ont demandé la restitution de leur dépôt de garantie et le remboursement du prix du fuel restant ; que les époux Y. ont sollicité la condamnation des locataires à leur payer certaines sommes au titre de loyers, de charges et de travaux de réfection, ainsi que la moitié du coût de l'état des lieux de sortie et une indemnité en application de la clause pénale insérée au bail ;

 

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, ci-après annexé :

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE ET RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu'ayant retenu que M. X. produisait un certificat médical indiquant qu'il devait déménager en raison de son état de santé, la juridiction de proximité, qui a souverainement apprécié la valeur et la portée de cet élément de preuve, en a exactement déduit que les preneurs devaient bénéficier d'un délai de préavis abrégé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

 

Mais sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article 1152 du code civil ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre ; que, néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; toute stipulation contraire sera réputée non écrite ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, pour rejeter la demande formée par le bailleur en application de la clause pénale le jugement retient que, même si cette clause est stipulée dans le bail, son application en l'espèce est abusive, M. Y. ne justifiant d'aucun trouble lui portant nuisance ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu'en statuant ainsi, sans constater que la peine prévue était manifestement excessive, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

 

Et sur le moyen unique, pris en sa septième branche :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article 1134 du code civil, ensemble l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que pour débouter les bailleurs de leur demande de condamnation des preneurs à supporter le coût des travaux de remise en état des lieux loués, le jugement retient que le constat établi par l'huissier indique que le propriétaire a reçu les clés sans réserve ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu'en statuant, par ce seul motif, alors que l'acceptation de la restitution des clés n'emporte pas renonciation certaine et non équivoque du bailleur à réclamer au preneur une remise en état des lieux loués, la juridiction de proximité n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième et huitième branches qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 8 novembre 2011, entre les parties, par la juridiction de proximité de Sens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité d'Auxerre ;

Condamne M. X. aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. X. à payer à M. Y. la somme de 2.500 euros ; rejette la demande de M. X. ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille treize.

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. Y.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR, débouté Monsieur Y. de diverses demandes formulées à l'encontre de Monsieur X. et de l'AVOIR condamné à payer à ce dernier la somme de 966,44 euros outre 400,00 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE « l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 stipule que les personnes âgées de 60 ans et dont l'état de santé justifie un changement de domicile bénéficient d'une durée de préavis réduite à un mois au lieu de trois ; qu'en l'espèce, Monsieur X. a notifié leur congé le 14 mai 2009 pour le 15 juin 2009 et a produit à la demande du bailleur un certificat médical établi par le Dr Z. le 26 mai 2009 ; que ce certificat indique que Monsieur X. doit déménager en raison de son état de santé et il ne saurait être reproché au médecin de ne pas avoir apporté plus de précisions eu égard au secret professionnel auquel il est tenu ; que quant à prétendre que ce certificat est illisible, la juridiction a pu en prendre connaissance sans difficultés oculaires ; qu'en outre l'article de la loi précité n'exige nullement que le justificatif soit joint au congé ; qu'au surplus et contradictoirement il conviendra de relever que le bailleur ne réclame pas le paiement des loyers sur trois mois selon leur argumentation de base mais se contente de réclamer les loyers dus du 1er au 16 juin 2009 ce que le preneur reconnaît ; que contrairement aux dires du défendeur, l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 relative au dépôt de garantie permet au bailleur de retenir des sommes dues au titre de la régularisation de loyers et charges ; que pour ce qui concerne le fuel, les pièces produites aux débats démontrent très précisément que le preneur a payé au bailleur lors de l'entrée dans les lieux le paiement correspondant à 500 L de fuel, qu'il a fait remplir la cuve de 1000 L en 2008 et qu'il restait incontestablement 310 L dans la cuve lors de son départ ; que la clause pénale a pour but d'évaluer forfaitairement les dommages-intérêts dus par le débiteur en cas d'inexécution d'une ou plusieurs de ses obligations contractuelles ; que même si cette clause est prévue contractuellement dans le bail, son application en l'espèce est abusive, le défendeur ne justifiant d'aucun trouble lui portant nuisance ; que le prix des réparations réclamé par le défendeur ne saurait prospérer dans la mesure où le constat établi par l'huissier indique que le propriétaire a reçu les clés sans réserve ; qu'en conséquence, le défendeur sera condamné à payer au demandeur la somme de 966,44 euros avec intérêts légaux à compter du 16 août 2009 au titre du remboursement du dépôt de garantie, du montant du fuel, déduction faite des loyers et charges dues du 1er au 16 juin 2009 » ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°) ALORS QU'il résulte des conclusions de Monsieur Y. qu'il demandait la condamnation de Monsieur X. non seulement au paiement du loyer dû du 1er au 16 juin 2009, pour un montant de 406,88 euros, mais également au paiement de 2 mois de loyer mensuel brut, du fait du non-respect du préavis par les preneurs, soit la somme de 1.238 euros plus 32,34 euros de provision mensuelle sur charges et taxe d'enlèvement des ordures ménagères (conclusions Y., p. 4, al. 4) ; qu'en jugeant « que le bailleur n'aurait pas réclamé le paiement des loyers sur trois mois selon leur argumentation de base mais se serait contenté de réclamer les loyers dus du 1er  au 16 juin 2009 » (jugement p. 4, al. 2), la Juridiction de proximité a dénaturé les termes du litige et a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le preneur qui entend se prévaloir d'un délai de préavis d'un mois justifié par la nécessité de changer de domicile en raison de son état de santé doit démontrer qu'il remplit les conditions requises pour bénéficier d'une dérogation à la règle selon laquelle le préavis donné par le locataire est de trois mois ; qu'en se contentant des termes vagues d'un certificat médical établi après la délivrance du préavis, sans s'assurer que le preneur présentait effectivement une pathologie justifiant un changement de domicile, pour décider que Monsieur X. pouvait bénéficier d'un préavis d'un mois, la Juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 ;

3°) ALORS QUE pour bénéficier d'une durée de préavis réduite à un mois au lieu de trois, les personnes âgées de 60 ans doivent présenter un état de santé qui rend objectivement nécessaire leur changement de domicile ; qu'en l'espèce, Monsieur X. faisait valoir, pour justifier la réduction du délai légal de préavis, qu'il avait « été victime d'un arrêt cardiaque il y a quelques années » et qu'il « ne supportait plus les tracasseries incessantes que lui créait son voisin et propriétaire Monsieur Y. depuis plusieurs mois » (conclusions p. 4, antépénultième alinéa) ; qu'en décidant que Monsieur X. pouvait bénéficier d'un délai de préavis d'un mois, bien que le motif invoqué par le preneur, indépendant du logement lui-même, n'ait pas été de nature à justifier qu'il puisse bénéficier d'un préavis d'un mois, la Juridiction de proximité a violé l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 ;

4°) ALORS QUE lorsque la convention porte que celui qui manquera d'exécuter la convention payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme moindre sans qu'il soit nécessaire de rapporter la preuve de l'existence d'un préjudice subi par le créancier ; qu'en refusant de faire application de la clause pénale stipulée dans le contrat de bail au motif que « même si cette clause est prévue contractuellement dans le bail son application en l'espèce est abusive, le défendeur ne justifiant d'aucun trouble lui portant nuisance » (jugement p. 4, al. 6), la Juridiction de proximité a violé les articles 1134 et 1152 du Code civil ;

5°) ALORS QUE le caractère abusif d'une clause qui n'est pas stipulée par un professionnel n'est pas de nature à écarter son application ; qu'en refusant de faire application de la clause pénale stipulée dans le contrat de bail au motif que « même si cette clause est prévue contractuellement dans le bail son application en l'espèce est abusive, le défendeur ne justifiant d'aucun trouble lui portant nuisance » (jugement p. 4, al. 6), la Juridiction de proximité a violé l’article 1134 du Code civil, ensemble l’article L. 132-1 du Code de la consommation ;

6°) ALORS QUE le juge ne peut modérer la peine convenue que si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; qu'en refusant d'appliquer la clause pénale stipulée dans le contrat de bail conclu entre Monsieur X. et Monsieur Y. sans constater son caractère manifestement excessif, la Juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1152 du Code civil ;

7°) ALORS QUE la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; qu'en déduisant de ce que le bailleur avait reçu les clés du preneur sans réserve que le bailleur aurait renoncé à solliciter du preneur la prise en charge des travaux de remise en état des lieux lui incombant, la Juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1181 du Code civil ;

8°) ALORS QU'en cas de recours à huissier pour la rédaction de l'état des lieux de sortie d'un logement loué, les frais sont partagés par moitié entre bailleur et locataire ; que le contrat de bail stipulait que l'état des lieux de sortie serait établi « contradictoirement ou par huissier de justice, en fin de bail, lors de la restitution des clés » (contrat de bail, p. 3) ; qu'en déboutant Monsieur Y. de sa demande tendant à la condamnation du preneur à lui payer la somme de 127,99 euros correspondant à la moitié du coût de l'état des lieux établi conformément aux stipulations contractuelles la Juridiction de proximité a violé l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989.