CA RENNES (2e ch.), 27 juin 2014
CERCLAB - DOCUMENT N° 4837
CA RENNES (2e ch.), 27 juin 2014 : RG n° 11/05333 ; arrêt n° 296
Publication : Jurica
Extrait : « Par application des dispositions de l'article L. 311-37 dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce en raison de la date de l'offre de crédit, le délai biennal de forclusion, opposable au prêteur pour l'engagement de son action, court à compter du premier incident de paiement non régularisé.
Les règles de l'imputation des paiements ont par ailleurs pour conséquence que le paiement doit être imputé sur la dette la plus ancienne. […] Il s'ensuit que le premier incident de paiement non régularisé, à savoir l'échéance de mars 2009, a précédé de plus de deux ans l'assignation délivrée par la banque le 9 mai 2011, et qu'en conséquence à cette date celle-ci était forclose pour agir contre Monsieur X., comme l'a jugé le tribunal. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 27 JUIN 2014
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/05333. ARRÊT n° 296.
APPELANTE :
Société ATRADIUS CRÉDIT INSURANCE NV
[adresse] ; Ayant un Établissement Principal en France : Société ATRADIUS - [adresse] ; Représentée par Maître Jean-Jacques BAZILLE de la SELARL BAZILLE/TESSIER/PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES ; Représentée par Maître Anne-Laure PRIM-THOMAS, Plaidant, avocat au barreau de GERS
INTIMÉ :
Monsieur X.
né le [date] à [ville] ; Représenté par la SELARL GOURVES et associés, avocats au barreau de RENNES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame Catherine LE BAIL, Président, Madame Françoise LE BRUN, Conseiller, Madame Béatrice LEFEUVRE, Conseiller,
GREFFIER : Madame Stéphanie LE CALVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS : À l'audience publique du 24 avril 2014 devant Mme Béatrice LEFEUVRE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 27 juin 2014 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La société EGG, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société ATRADIUS ASSURANCE NV elle-même subrogée dans les droits de la Banque ACCORD cessionnaire des activités de la société EGG, a, par offre du 21 août 2003, consenti à Monsieur X. un crédit utilisable par fractions associé à une carte bancaire, d'une durée d'un an renouvelable, d'un montant de 19.200 euros, avec intérêts à taux variable en plus ou en moins du taux de base du prêteur fixé lors de la conclusions du contrat à 9,59 % en cas d'utilisation de la réserve maximale de 21.500 euros.
Saisi par la société ATRADIUS d'une action en paiement à la suite de la déchéance du terme, le tribunal d'instance de QUIMPER après avoir soulevé à l'audience en tant que de besoin la forclusion et divers moyens relatifs à l'irrégularité éventuelle de l'offre, a, par jugement du 29 juin 2011 :
- déclaré forclose l'action en paiement engagée par la société ATRADIUS IPC à l'encontre de Monsieur X.,
- déclaré en conséquence irrecevables les demandes de la société ATRADIUS IPC,
- condamné la société ATRADIUS IPC aux dépens de l'instance ;
Le tribunal a considéré que le premier incident de paiement non régularisé datant du 24 mars 2009, l'action engagée le 9 mai 2011 était forclose.
Par déclaration du 22 juillet 2011, la société ATRADIUSINSURANCE NV a formé appel contre cette décision.
Par conclusions du 21 octobre 2011, elle demande à la cour :
- de recevoir la société ATRADIUS IPC en son appel et de le dire bien fondé,
- de débouter Monsieur X. de toutes ses demandes,
- de réformer le jugement en toutes ses dispositions
Et statuant à nouveau
- de juger que la forclusion n'est pas acquise,
- de condamner Monsieur X. au paiement de la somme de 14.206,83 euros outre intérêts au taux de 14,9 % à compter du 16 décembre 2009,
Y ajoutant
- de condamner Monsieur X. à payer à la société ATRADIUS la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- de le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
La société ATRADIUS INSURANCE NV fait valoir que l'incident de paiement de mars 2009 a été régularisé en avril 2009, que l'échéance d'avril 2009 a été réglée en mai 2009, et que le premier incident de paiement non régularisé date d'août 2009 de sorte que le délai de forclusion n'était pas acquis au jour de l'assignation du 9 mai 2011.
Monsieur X. demande à la cour :
au visa des articles L. 311 et suivants du code de la consommation pris dans leur version antérieure au 1er juillet 2010, des articles 1689 et suivants, 1254 et 1174 et suivants du code civil,
- de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
- de débouter la société ATRADIUS de toutes ses demandes,
À titre subsidiaire
- de dire que l'offre préalable souscrite par Monsieur X. est non conforme aux dispositions des articles L. 311-8 à L. 311-13 du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à la loi du 1er juillet 2010, et contient des clauses abusives,
En conséquence
- de dire la société ATRADIUS déchue du droit aux intérêts échus, des intérêts de retard et de la clause pénale,
- de dire que le remboursement des primes d'assurance est contraire à l'article L. 311-32 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à la loi du 1er juillet 2010, et débouter la société ATRADIUS de sa demande en paiement de ces primes,
- de dire que les sommes perçues au titre des intérêts, productives d'intérêts au taux légal à compter de leur versement seront imputées sur le capital restant dû ;
En tout état de cause
- de condamner sous astreinte de 50 euros par jour de retard la société ATRADIUS à accomplir les démarches nécessaires pour que Monsieur X. ne soit plus fiché sur la liste des incidents de paiements auprès de la Banque de France,
- de dire que la procédure engagée par la société ATRADIUS est abusive et de condamner cette dernière à verser la somme de 2.000 euros à Monsieur X. à titre de dommages et intérêts,
- de condamner la société ATRADIUS à payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner la société ATRADIUS aux dépens.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la forclusion :
Monsieur X. soutient que, faute de démonstration par la Banque de ce que la régularisation des échéances, qui ont cessé d'être acquittées en totalité à partir de novembre 2008, a été effective et complète, la banque est forclose en son action, le délai de forclusion ayant commencé à courir en novembre 2008.
La Banque oppose à l'inverse à son adversaire que, du fait des régularisations successives des échéances impayées, le délai de forclusion n'a commencé à courir qu'en août 2009.
Par application des dispositions de l'article L. 311-37 dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce en raison de la date de l'offre de crédit, le délai biennal de forclusion, opposable au prêteur pour l'engagement de son action, court à compter du premier incident de paiement non régularisé.
Les règles de l'imputation des paiements ont par ailleurs pour conséquence que le paiement doit être imputé sur la dette la plus ancienne.
Il ressort à cet égard de l'historique du fonctionnement du compte de Monsieur X. qu'à compter de novembre 2008 et décembre 2008, les échéances ont cessé d'être payées régulièrement, et que les règlements effectués en janvier 2009, avril 2009 et mai 2009, n'ont pu couvrir, par suite de l'imputation des paiements, que les échéances les plus anciennes de novembre 2008, décembre 2008, et janvier 2009, laissant impayées les échéances de février, mars 2009 et avril 2009 ; qu'ensuite, le compte fait apparaître un seul paiement, en juillet 2009, qui ne peut avoir régularisé que l'échéance de février 2009.
Il s'ensuit que le premier incident de paiement non régularisé, à savoir l'échéance de mars 2009, a précédé de plus de deux ans l'assignation délivrée par la banque le 9 mai 2011, et qu'en conséquence à cette date celle-ci était forclose pour agir contre Monsieur X., comme l'a jugé le tribunal.
La décision déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.
Sur la demande de condamnation sous astreinte :
N'étant plus recevable à contraindre Monsieur X. au paiement, la banque doit procéder aux démarches nécessaires pour le faire radier du fichier des incidents de paiement de la Banque de France. Elle y sera condamnée en tant que de besoin, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette condamnation du paiement d'une astreinte.
Sur la demande de condamnation au paiement de dommages et intérêts :
La forclusion édictée par l'article L. 311-37 ancien du code de la consommation n'emporte pas extinction de la créance, et il ne peut en être tiré argument suffisant, à défaut d'autres éléments, pour caractériser la mauvaise foi de la banque, et obtenir sa condamnation à des dommages et intérêts pour procédure abusive.
La demande de Monsieur X. à ce titre sera en conséquence rejetée.
La Société ATRADIUS CRÉDIT INSURANCE NV, qui succombe, devra supporter les dépens d'appel et verser à Monsieur X. la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
- Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;
Y additant,
- Condamne en tant que de besoin la société ATRADIUS CRÉDIT INSURANCE NV à faire procéder à la radiation de Monsieur X. du fichier des incidents de paiement de la Banque de France, sans qu'il y ait lieu au prononcé d'une astreinte ;
- Déboute Monsieur X. de sa demande de dommages et intérêts ;
- Condamne la société ATRADIUS CRÉDIT INSURANCE NV à payer à Monsieur X. la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne la société ATRADIUS CRÉDIT INSURANCE NV aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier Le Président