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CJUE (6e ch.), 3 juillet 2014

Nature : Décision
Titre : CJUE (6e ch.), 3 juillet 2014
Pays : UE
Juridiction : Cour de Justice de l'UE (6e ch.)
Demande : C-92/14
Date : 3/07/2014
Nature de la décision : Irrecevabilité
Mode de publication : Site Curia (CJUE)
Date de la demande : 25/02/2014
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4976

CJUE (6e ch.), 3 juillet 2014 : Affaire C-92/14

Publication : Rec. ; Juris-Data n° 2014-019617

 

Extrait : « 26. S’agissant, en premier lieu, de la directive 93/13, il ressort de la décision de renvoi que le contrat de crédit en cause au principal a été conclu le 5 octobre 2006, et que l’hypothèque le garantissant a été constituée le 11 octobre de la même année, soit avant le 1er janvier 2007, date de l’adhésion de la Roumanie à l’Union.

27. Or, d’une part, la Cour est compétente pour interpréter le droit de l’Union uniquement pour ce qui concerne l’application de celui-ci dans un État membre à partir de la date d’adhésion de ce dernier à l’Union (ordonnance Pohotovosť, C-153/13, EU:C:2014:264, point 24 et jurisprudence citée).

28. D’autre part, dans la mesure où il résulte de l’article 10, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 93/13 que cette dernière est applicable uniquement aux contrats conclus après le 31 décembre 1994, date de l’expiration du délai de transposition de celle-ci, il convient de tenir compte de la date de conclusion du contrat en cause au principal pour déterminer l’applicabilité de cette directive à ce contrat, la période durant laquelle ce dernier produit des effets n’étant pas pertinente.

29. Partant, considérant que le contrat de crédit en cause au principal a été conclu le 5 octobre 2006, assorti d’une hypothèque constituée le 11 octobre 2006, force est de constater que la directive 93/13 ne s’applique pas au litige au principal. ».

 

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE

SIXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 3 JUILLET 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Dans l’affaire C-92/14, ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Judecătoria Câmpulung (Roumanie), par décision du 25 février 2014, parvenue à la Cour le 5 mars 2014, dans la procédure :

 

Liliana Tudoran, Florin Iulian Tudoran, Ilie Tudoran

contre

SC Suport Colect SRL,

 

LA COUR (sixième chambre), composée de MM. A. Borg Barthet, président de chambre, M. E. Levits (rapporteur) et Mme M. Berger, juges,

Avocat général : Mme J. Kokott,

Greffier : M. A. Calot Escobar,

Vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente :

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Ordonnance :

1. La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 49 TFUE et 56 TFUE, de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), des articles 3 et 10 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO L 95, p. 29), ainsi que de certaines dispositions de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO L 133, p. 66).

2. Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Tudoran ainsi que MM. Florin Iulian Tudoran et Ilie Tudoran à SC Suport Colect SRL (ci-après « Suport Colect »), au sujet des modalités de recouvrement d’une dette issue d’un contrat de crédit conclu dans le cadre de l’acquisition d’un bien immobilier, assorti d’une hypothèque.

 

Le cadre juridique :

Le droit de l’Union

3. L’article 10 de la directive 93/13 dispose, à son paragraphe 1, deuxième alinéa :

« Les dispositions [de la directive 93/13] sont applicables à tous les contrats conclus après le 31 décembre 1994. »

4. L’article 2, paragraphe 2, de la directive 2008/48 est rédigé comme suit :

« La présente directive ne s’applique pas :

a) aux contrats de crédit garantis par une hypothèque, par une autre sûreté comparable communément utilisée dans un État membre sur un immeuble, ou par un droit lié à un bien immobilier ;

b) aux contrats de crédit destinés à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété d’un terrain ou d’un immeuble existant ou à construire ; […] »

 

Le droit roumain

5. L’article 372 du code de procédure civile prévoit :

« L’exécution forcée n’a lieu qu’en vertu d’une décision de justice ou d’un autre document qui, conformément à la loi, forme titre exécutoire. »

6. Aux termes de l’article 379, paragraphe 1, de ce code :

« Une poursuite portant sur des biens mobiliers ou immobiliers ne peut avoir lieu que pour une créance certaine, liquide et exigible. »

7. L’article 399 dudit code dispose :

« Les personnes intéressées ou lésées par l’exécution peuvent contester l’exécution forcée ainsi que tout acte d’exécution. »

8. L’article 120 de l’ordonnance d’urgence n° 99, du 6 décembre 2006, relative aux établissements de crédit et à l’adéquation du capital (Monitorul Oficial al României, n° 1027, ci-après l’« ordonnance d’urgence n° 99 »), précise :

« Les contrats de crédit, y compris les contrats de sûreté réelle ou personnelle, conclus par un établissement de crédit constituent des titres exécutoires. »

 

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9. Le 5 octobre 2006, les requérants au principal ont conclu avec la Banca Comercialǎ Românǎ un contrat de crédit pour un montant de 17.200 euros en vue de l’achat d’un bien immobilier situé à Câmpulung (Roumanie).

10. Ce contrat stipule que le taux d’intérêt est fixe pendant la première année de mise à disposition du crédit. À l’issue de cette année, il est constitué par le taux de référence variable, calculé sur le fondement d’un taux d’intérêt affiché au siège de la banque, majoré de la variable dite « service de la dette de l’emprunteur », qui représente la capacité de ce dernier à honorer les échéances de l’emprunt, exprimée en jours de retard de paiement à compter de la date d’échéance.

11. En outre, ce contrat prévoit une majoration du taux d’intérêt en cours de contrat, en fonction des capacités de remboursement de l’emprunteur. Ainsi, le taux d’intérêt révisé est majoré en fonction de l’étendue du retard de paiement.

12. Le 11 octobre 2006, M. Florin Iulian Tudoran et Mme Tudoran ont constitué avec cette même banque une hypothèque de rang 1 sur le bien immobilier acquis, afin de garantir les obligations de paiement découlant du contrat de crédit du 5 octobre 2006.

13. Le 12 mai 2009, la banque a adressé une notification aux requérants au principal en raison du non-accomplissement de leurs obligations contractuelles, ceux-ci n’ayant pas procédé au paiement de certaines tranches de remboursement du crédit. Le paiement d’un montant de 233,91 euros leur était réclamé dans un délai de 7 jours à compter de cette notification. En cas de non-paiement, l’intégralité du solde restant dû serait exigible et la banque recourrait aux procédures d’exécution forcée.

14. La créance à l’encontre des requérants au principal a fait l’objet de deux cessions successives. Elle a été acquise, en dernier lieu, par Suport Colect par un contrat de cession de créance du 5 août 2009.

15. Le 18 mai 2012, Suport Colect a engagé une procédure d’exécution forcée à l’encontre des requérants au principal.

16. Le 15 mars 2013, un huissier de justice, saisi par Suport Colect, a émis, sur le fondement du contrat de prêt, garanti par une hypothèque, conclu par les requérants au principal, une injonction de payer visant le recouvrement d’une somme de 16.980,75 euros.

17. Cette injonction a servi de fondement aux actes d’exécution consistant en une saisie sur salaire et en une saisie du bien immobilier concerné.

18. Le 13 juin 2013, les requérants au principal ont formé un recours devant la Judecătoria Câmpulung pour s’opposer à l’ensemble des actes d’exécution. Ils demandent l’annulation desdits actes ainsi que celle de l’injonction de payer.

19. Au fond, les requérants au principal soutiennent que l’exécution forcée se fonde sur une créance qui ne remplit pas les conditions prévues à l’article 379, paragraphe 1, du code de procédure civile, celle-ci n’étant pas certaine, liquide et exigible. Ainsi, aucune précision ne serait donnée sur le montant exact des sommes composant ladite créance.

20. Après avoir ordonné une expertise comptable pour déterminer l’étendue exacte de la créance, la juridiction de renvoi s’est interrogée sur la compatibilité des clauses relatives à la détermination des taux d’intérêt telles qu’elles sont stipulées dans le contrat de crédit en cause au principal avec les directives 93/13 et 2003/48 ainsi que sur la compatibilité de l’article 120 de l’ordonnance d’urgence n° 99 avec les articles 49 TFUE et 56 TFUE ainsi que 47 de la Charte.

21. C’est dans ces circonstances que la Judecătoria Câmpulung a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Les dispositions des [directives 93/13 et 2008/48] sont-elles applicables à un contrat de crédit conclu le 5 octobre 2006, avant l’adhésion de la Roumanie à l’Union européenne, mais qui produit encore des effets à ce jour, ses dispositions étant mises en œuvre actuellement, à la suite de cessions successives de la créance inscrite dans ledit contrat ?

2) Dans l’affirmative, des clauses telles que celles relatives au « service de la dette de l’emprunteur » en référence à l’existence de retards de paiement du débiteur et [à] l’augmentation des intérêts à l’issue d’une année, date à partir de laquelle ils sont constitués par le taux de référence variable de la Banca Commercială Română affiché au siège de la banque majoré de 1,90 [points de pourcentage], peuvent-elles être considérées comme abusives au regard de la directive [93/13] ?

3) Le principe de la protection juridictionnelle effective des droits conférés aux justiciables par le droit de l’Union, tel que garanti par l’article 47 de la [Charte], s’oppose-t-il à une disposition de droit national, telle que l’article 120 de l’ordonnance d’urgence n° 99 […], qui reconnaît le caractère de titre exécutoire d’un contrat de prêt bancaire conclu en l’absence de forme authentique et sans possibilité pour le débiteur d’en négocier les clauses, contrat en vertu duquel, après une vérification sommaire et l’obtention de l’autorisation de procéder à l’exécution forcée dans le cadre d’une procédure non contentieuse, laissant peu de possibilités au juge de rechercher l’étendue de la créance, l’huissier de justice peut procéder à l’exécution forcée des biens du débiteur ?

4) La directive [93/13] doit-elle être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation d’un État membre, telle que les articles 372 et suivants de l’ancien code de procédure civile, qui permet au créancier de demander l’exécution d’une prestation découlant de clauses contractuelles abusives en procédant à l’exécution de la sûreté immobilière au moyen de la vente de l’immeuble en dépit de l’opposition du consommateur, sans que lesdites clauses contractuelles n’aient été examinées par un tribunal indépendant ?

5) L’existence dans la législation nationale d’une disposition telle que l’article 120 de l’ordonnance d’urgence n° 99 […], qui reconnaît le caractère de titre exécutoire d’un contrat de prêt bancaire, est-elle de nature à porter atteinte à la liberté d’établissement prévue à l’article 49 [TFUE] ainsi qu’à la libre prestation des services prévue à l’article [56] TFUE, en ce qu’elle dissuade les citoyens de l’Union de s’établir dans un État dans lequel un contrat bancaire conclu par un établissement privé se voit reconnaître la même valeur qu’un titre exécutoire consistant dans une décision de justice ?

6) Dans le cas où il serait répondu par l’affirmative aux questions précédentes, la juridiction nationale peut-elle soulever d’office le caractère non exécutoire d’un tel titre en vertu duquel il est procédé à l’exécution forcée d’une créance inscrite dans un tel contrat ? »

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Sur la procédure devant la Cour :

22. La juridiction de renvoi a, dans sa demande de décision préjudicielle, présenté une demande d’application de la procédure accélérée prévue à l’article 105 du règlement de procédure de Cour.

23. Toutefois, en vertu de l’article 53, paragraphe 2, de ce règlement, lorsque la Cour est manifestement incompétente pour connaître d’une affaire ou lorsqu’une demande ou une requête est manifestement irrecevable, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

24. Dès lors qu’il convient de faire application en l’espèce de cette disposition, il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de procédure accélérée.

 

Sur les questions préjudicielles :

Sur la première question :

25. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande si les directives 93/13 et 2008/48 doivent être interprétées en ce sens que leurs dispositions sont applicables à un contrat de crédit immobilier conclu avant l’adhésion de la Roumanie à l’Union européenne, mais qui produit encore des effets à ce jour, et, en substance, si la Cour est compétente pour répondre aux deuxième et quatrième questions.

26. S’agissant, en premier lieu, de la directive 93/13, il ressort de la décision de renvoi que le contrat de crédit en cause au principal a été conclu le 5 octobre 2006, et que l’hypothèque le garantissant a été constituée le 11 octobre de la même année, soit avant le 1er janvier 2007, date de l’adhésion de la Roumanie à l’Union.

27. Or, d’une part, la Cour est compétente pour interpréter le droit de l’Union uniquement pour ce qui concerne l’application de celui-ci dans un État membre à partir de la date d’adhésion de ce dernier à l’Union (ordonnance Pohotovosť, C-153/13, EU:C:2014:264, point 24 et jurisprudence citée).

28. D’autre part, dans la mesure où il résulte de l’article 10, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 93/13 que cette dernière est applicable uniquement aux contrats conclus après le 31 décembre 1994, date de l’expiration du délai de transposition de celle-ci, il convient de tenir compte de la date de conclusion du contrat en cause au principal pour déterminer l’applicabilité de cette directive à ce contrat, la période durant laquelle ce dernier produit des effets n’étant pas pertinente.

29. Partant, considérant que le contrat de crédit en cause au principal a été conclu le 5 octobre 2006, assorti d’une hypothèque constituée le 11 octobre 2006, force est de constater que la directive 93/13 ne s’applique pas au litige au principal.

30. S’agissant, en second lieu, de la directive 2008/48, il suffit de constater que, en vertu de son article 2, paragraphe 2, sous a) et b), sont exclus du champ d’application de cette directive les contrats de crédit garantis par une hypothèque ainsi que les contrats de crédit destinés à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété d’un immeuble existant ou à construire.

31. Dans la mesure où il ressort de la décision de renvoi que le contrat en cause au principal est un contrat de crédit destiné à l’acquisition d’un bien immeuble, garanti par une hypothèque, la directive 2008/48 ne s’applique pas aux faits en cause au principal.

32. Partant, ni les dispositions de la directive 93/13 ni celles de la directive 2008/48 ne sont applicables au litige au principal.

 

Sur les deuxième et quatrième questions :

33. Compte tenu de la réponse apportée à la première question, il n’y a pas lieu de répondre aux deuxième et quatrième questions.

 

Sur la cinquième question :

34. Par sa cinquième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 49 TFUE et 56 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui reconnaît le caractère de titre exécutoire à un contrat de prêt bancaire.

35. Il convient de relever qu’il appartient à la Cour d’examiner les conditions dans lesquelles elle est saisie par le juge national en vue de vérifier sa propre compétence (voir, en ce sens, arrêts Volker und Markus Schecke et Eifert, C-92/09 et C-93/09, EU : C : 2010 : 662, point 39, ainsi que Susisalo e.a., C-84/11, EU:C:2012:374, point 16).

36. À cet égard, il y a lieu de rappeler que la Cour n’est pas compétente pour répondre à une question posée à titre préjudiciel lorsqu’il est manifeste que la disposition du droit de l’Union soumise à son interprétation ne peut trouver à s’appliquer (arrêt Caixa d’Estalvis i Pensions de Barcelona, C-139/12, EU:C:2014:174, point 41 et jurisprudence citée).

37. En ce qui concerne les règles du droit de l’Union dont l’interprétation est demandée, il y a lieu de relever que les dispositions du traité FUE en matière de liberté d’établissement et de libre prestation de services ne trouvent pas à s’appliquer à une situation dont tous les éléments se cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre (voir, en ce qui concerne la liberté d’établissement, arrêt Commission/France, C-389/05, EU:C:2008:411, point 49 et jurisprudence citée, ainsi que, en ce qui concerne libre prestation de services, arrêt Omalet, C-245/09, EU:C:2010:808, point 12 et jurisprudence citée).

38. Il convient néanmoins de rappeler que, dans certaines conditions, le caractère purement interne de la situation concernée ne fait pas obstacle à ce que la Cour réponde à une question posée au titre de l’article 267 TFUE.

39. Tel peut être le cas, notamment, dans l’hypothèse où le droit national impose à la juridiction de renvoi de faire bénéficier un ressortissant de l’État membre dont cette juridiction relève des mêmes droits que ceux qu’un ressortissant d’un autre État membre tirerait du droit de l’Union dans la même situation (voir, en ce sens, arrêts Guimont, C-448/98, EU:C:2000:663, point 23 ; Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti, C-451/03, EU:C:2006:208, point 29, ainsi que Cipolla e.a., C-94/04 et C-202/04, EU:C:2006:758, point 30), ou si la demande de décision préjudicielle porte sur des dispositions du droit de l’Union auxquelles le droit national d’un État membre renvoie pour déterminer les règles applicables à une situation purement interne à cet État (voir en ce sens, notamment, arrêts Dzodzi, C-297/88 et C-197/89, EU:C:1990:360, point 36 ; Poseidon Chartering, C-3/04, EU:C:2006:176, point 15, et Romeo, C-313/12, EU:C:2013:718, point 21).

40. En l’espèce, force est de constater que tous les éléments du litige au principal sont circonscrits à l’intérieur d’un seul État membre, dès lors que ce litige porte sur la procédure d’exécution forcée d’une créance née d’un contrat de crédit assorti d’une garantie hypothécaire conclu entre des ressortissants roumains et une banque roumaine et diligentée par une société roumaine, détentrice de cette créance.

41. Or, il ne ressort pas de la demande de décision préjudicielle que la juridiction de renvoi doit accorder aux parties au principal, en vertu du droit national, un traitement qui serait déterminé en fonction de celui accordé, en vertu du droit de l’Union, à un opérateur économique d’un autre État membre se trouvant dans la même situation. Il n’apparaît pas non plus qu’elle devrait se fonder sur une interprétation des règles du droit de l’Union pour déterminer le contenu du droit national applicable en l’espèce.

42. Il en résulte que, la décision de renvoi ne fournissant manifestement pas d’éléments concrets permettant d’établir un lien entre les articles 49 TFUE et 56 TFUE et la législation nationale applicable dans les circonstances du litige au principal, dont tous les éléments sont cantonnés à l’intérieur de l’État membre concerné, la cinquième question est irrecevable.

 

Sur la troisième question :

43. Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande si le principe de protection juridictionnelle des droits conférés aux justiciables par le droit de l’Union, tel que garanti à l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une disposition nationale, telle que l’article 120 de l’ordonnance d’urgence n° 99, qui prévoit que les contrats de crédit conclus par un établissement de crédit constituent des titres exécutoires.

44. S’agissant des exigences découlant de la protection des droits fondamentaux, il est de jurisprudence constante qu’elles lient les États membres dans tous les cas où ils sont appelés à appliquer le droit de l’Union (voir ordonnances Asparuhov Estov e.a., C-339/10, EU : C : 2010 : 680, point 13, ainsi que Chartry, C-457/09, EU:C:2011:101, point 22).

45. De même, l’article 51, paragraphe 1, de la Charte prévoit que les dispositions de celle-ci s’adressent aux États membres uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union. L’article 6, paragraphe 1, TUE et l’article 51, paragraphe 2, de la Charte précisent que les dispositions de cette dernière n’étendent en aucune manière les compétences de l’Union telles que définies dans les traités.

46. Or, d’une part, ainsi qu’il résulte des points 32 et 42 de la présente ordonnance, ni les dispositions des directives 93/13 et 2008/48 ni les articles 49 TFUE et 56 TFUE ne sont applicables au litige au principal.

47. D’autre part, la décision de renvoi ne contient aucun élément concret permettant de considérer que l’affaire au principal se rattache par son objet à d’autres dispositions du droit de l’Union ou porte sur une réglementation nationale mettant en œuvre le droit de l’Union au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte.

48. Dès lors, la Cour est manifestement incompétente pour répondre à la troisième question posée par la juridiction de renvoi.

49. Sans qu’il y ait lieu d’examiner la sixième question, il résulte de l’ensemble de ces considérations que, en application de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, d’une part, la Cour est manifestement incompétente pour répondre à la troisième question préjudicielle et, d’autre part, la cinquième question est manifestement irrecevable.

 

Sur les dépens :

50. La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par ces motifs,

la Cour (sixième chambre) ordonne :

La directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ainsi que la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil ne sont pas applicables au litige au principal.

En outre, d’une part, la Cour de justice de l’Union européenne est manifestement incompétente pour répondre à la troisième question préjudicielle posée par la Judecătoria Câmpulung (Roumanie), par décision du 25 février 2014 ; d’autre part, la cinquième question préjudicielle posée par cette même juridiction est manifestement irrecevable.

Signatures