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6176 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Cadre général - Modes de preuve

Nature : Synthèse
Titre : 6176 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Cadre général - Modes de preuve
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6176 (14 octobre 2023)

PROTECTION CONTRE LES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS DANS LE CODE DE COMMERCE (ART. L. 442-1-I-2° C. COM.)

NOTION DE DÉSÉQUILIBRE SIGNIFICATIF - CADRE GÉNÉRAL DE L’APPRÉCIATION

PREUVE : MODES DE PREUVE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2023)

 

Évolution des textes. N.B. Il importe de souligner que les textes ont été modifiés à plusieurs reprises, notamment par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 ou celle du 3 juin 2016 (n° 2016-731). Le lecteur se reportera sur Legifrance à la version en vigueur à la date de décision.

Question préjudicielle. L’art. 1er § 1 du règlement (UE) n° 1215/2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que la notion de « matière civile et commerciale », au sens de cette disposition, n’inclut pas l’action d’une autorité publique d’un État membre contre des sociétés établies dans un autre État membre aux fins de faire reconnaître, sanctionner et cesser des pratiques restrictives de concurrence à l’égard de fournisseurs établis dans le premier État membre, lorsque cette autorité publique exerce des pouvoirs d’agir en justice ou des pouvoirs d’enquête exorbitants par rapport aux règles de droit commun applicables dans les relations entre particuliers. CJUE (8e ch.), 22 décembre 2022 : aff. C-98/22 ; Cerclab n° 10006 (arrêt citant notamment l’arrêt du 16 juillet 2020, Movic e.a., C‑73/19 ; arg. : 1/ les pouvoirs d’enquête exorbitants et le fait que s’y soustraire est sanctionné d’une amende de 300.000 euros ; 2/ le fait que la demande porte sur une amende civile que ne peuvent solliciter les personnes privées). § Pour la question préjudicielle : « la matière « civile et commerciale » définie à l'article 1e § 1 du Règlement n°1215/2012 du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit-elle être interprétée comme intégrant dans son champ d'application l'action - et la décision judiciaire rendue à son issue - (i) intentée par le Ministre français de l'économie et des finances sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° (ancien) du Code de commerce français à l'encontre d'une société belge, (ii) visant à faire constater et cesser des pratiques restrictives de concurrence et à voir condamner l'auteur allégué de ces pratiques à une amende civile, (iii) sur la base d'éléments de preuve obtenus au moyen de ses pouvoirs d'enquête spécifiques ? » CA Paris (pôle 5 ch. 4), 2 février 2022 : RG n° 21/09001 ; Cerclab n° 9402, sur appel de T. com. Paris, 15 avril 2021 : RG n° 2019058288 ; Dnd.

A. INVESTIGATIONS MENÉES PAR LES AUTORITÉS DE LA CONCURRENCE ET DE LA CONSOMMATION

Compétence de principe. Les agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ont compétence pour la recherche et la constatation des infractions aux dispositions du livre 4 du code de commerce. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 27 septembre 2017 : RG n° 16/00671 ; Cerclab n° 7064.

Absence de nécessité de ces investigations. Il est possible d’intenter une action en se fondant sur la seule analyse des clauses des accords commerciaux annuels, communiqués par la direction juridique du distributeur, sans procéder à des actes d’investigation, ce qui rend sans portée la critique tirée de l’absence de communication de procès-verbaux. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 4 juillet 2013 : RG n° 12/07651 ; Cerclab n° 4619 ; Juris-Data n° 2013-015022, pourvoi rejeté par Cass. com., 29 septembre 2015 : pourvoi n° 13-25043 ; arrêt n° 818 ; Cerclab n° 5324 (problème non examiné).

Respect de la Conv. EDH. Les dispositions de l’art. L. 450-4 C. com. ne contreviennent pas à celles de l’art. 8 Conv. EDH, dès lors que ces dispositions assurent la conciliation du principe de la liberté individuelle et des nécessités de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles. Cass. crim., 25 avril 2007 : pourvoi n° 06-82441 ; Cerclab n° 4019, rejetant le pourvoi contre TGI Nanterre, 31 janvier 2006 : Dnd. § Les art. L. 450-4 C. com. et 56 C. pr. pén. ne méconnaissent pas le droit au respect de la vie privée, le principe de l’inviolabilité du domicile et des correspondances, le principe du respect des droits de la défense, l’art. 66 de la Constitution et le droit à un recours effectif tel qu’il découle de l’art. 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dès lors que ces droits sont garantis tout au long de la procédure, par l’intervention d’un juge judiciaire dont les décisions motivées sont soumises à un recours effectif et à qui il appartient d’assurer la conciliation entre les droits et libertés visés dans la question et les nécessités de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles. Cass. crim., 19 octobre 2011 : pourvoi n° 10-88193 ; arrêt n° 5947 ; Cerclab n° 4747 (demande invoquant la nécessité d’une proportionnalité des procédés techniques employés) - Cass. crim. 19 octobre 2011 : pourvoi n° 10-88194 ; arrêt n° 5948 ; Cerclab n° 4745 (idem). § V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 1 - 1er pdt), 14 décembre 2016 : RG n° 16/11138 ; arrêt n°134/2016 ; Cerclab n° 6664 (outre 13 autres n° de RG ; absence de manquement en l’espèce), sur appel de TGI Évry (Juge libert. dét.), 5 février 2016 : RG n° 16/11138 ; Dnd (outre quatre autres ordonnances) - CA Paris (pôle 5 ch. 4), 27 septembre 2017 : RG n° 16/00671 ; Cerclab n° 7064 (la rédaction des procès-verbaux, la prise de copie de documents, le recueil de renseignements et justifications ayant été réalisés conformément aux dispositions des art. L. 450-1 C. com., la procédure d'enquête des agents n'est pas contraire aux dispositions de l'art. 6 § 1 Conv. EDH), sur appel de T. com. Lille, 10 novembre 2015 : RG n° J2012000024 ; Dnd. § Sur l’anonymisation des témoignages, V. ci-dessous.

Les parties, y compris le ministre, ont la liberté de choisir les pièces qu'elles entendent produire au soutien de leurs prétentions, soumises à la libre discussion des parties, et qu'il appartenait ensuite au juge d'examiner les pièces produites au soutien des demandes respectives et d'en apprécier le caractère probant. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 20 décembre 2017 : RG n° 13/04879 et n° 13/11192 ; Cerclab n° 7372 ; Juris-Data n° 2017-027127 (absence de violation des principes de l'égalité des armes), pourvoi rejeté par Cass. com., 20 novembre 2019 : pourvoi n° 18-12823 ; arrêt n° 855 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 8228 (argument non examiné). § Le Ministre peut parfaitement communiquer pour la première fois en cause d'appel de nouvelles pièces au soutien de ses demandes et il est libre de communiquer les pièces de son choix, le présent litige étant la chose des parties et chacune d'elles étant libre de communiquer les pièces nécessaires, selon elle, au soutien de ses prétentions. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 12 juin 2019 : RG n° 18/20323 et n° 18/21153 ; Cerclab n° 8238.

Les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE) ne sont pas une autorité administrative indépendante, mais un service déconcentré de l'Etat ; elles n'exercent aucune fonction de jugement et ne peuvent être regardées, ni par leur composition, ni par la procédure suivie pour prononcer les sanctions en cause, comme des tribunaux au sens des stipulations de la Conv. EDH ; en outre, la sanction prononcée est susceptible d'un recours de plein contentieux devant la juridiction administrative, dont les procédures sont conformes aux exigences de l'art 6 Conv. EDH ; il en résulte que la société contrôlée n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance du principe de séparation des fonctions des poursuites et de sanctions. CAA Marseille (6e ch.), 29 mars 2021 : RG n° 18MA03850 ; rôle n° 21174 ; Cerclab n° 8880 (contrôle au titre de l’anc. art. L. 441-6 C. com. des prestations de notes d’urbanisme annexées à des actes authentiques de vente par le notaire pour satisfaire à son obligation de conseil), annulant TA Marseille, 3 juillet 2018 : req. n° 1603377 ; Dnd. § Si les poursuites engagées par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, en vue d'infliger des sanctions financières sur le fondement de l'art. L. 442-6 C. com., constituent des accusations en matière pénale, au sens de l'art. 6 Conv. EDH, il n'en résulte pas que la procédure administrative doive respecter les stipulations de cet article, dès lors, d'une part, que ni la DIRECCTE, ni son directeur, compétents pour prendre les mesures de sanction, ne peuvent être regardés comme un tribunal au sens des stipulations de cet article et, d'autre part, que la décision de sanction peut faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant la juridiction administrative, conformément aux exigences de l'art. 6. CAA Marseille (6e ch.), 11 octobre 2021 : req. n° 19MA05488 ; Cerclab n° 9262 (rejet du moyen soutenant que le cumul des pouvoirs de constatation et de répression des infractions par la DIRECCTE méconnaîtrait le principe d'impartialité ou tout autre principe, stipulation ou disposition imposant la séparation des autorités administratives responsables du déclenchement des poursuites et de leur sanction), annulant TA Marseille, 14 octobre 2019 : req. n° 1706685 ; Dnd.

Il résulte de l’art. 6, § 1 et 3 Conv. EDH, qu'au regard des exigences du procès équitable, le juge ne peut fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur des déclarations anonymes ; cassation de l’arrêt se fondant, de façon déterminante, sur des déclarations recueillies anonymement pour estimer rapportée la preuve de l'existence d'une soumission des fournisseurs aux clauses contractuelles. Cass. com., 11 mai 2022 : pourvoi n° 19-22242 ; arrêt n° 295 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 9445, cassant CA Paris (pôle 5 ch. 4), 12 juin 2019 : RG n° 18/20323 et n° 18/21153 ; Cerclab n° 8238.

Contrôle des visites par le juge. Il résulte de l'art. L. 450-4, alinéa 1, C. com., qu'après avoir vérifié que la demande qui lui est soumise est fondée, le juge des libertés et de la détention peut autoriser des opérations de visite et saisie dans toute entreprise ; cassation de l’arrêt ajoutant à la loi des conditions qu'elle ne comporte pas, en exigeant notamment l’existence de présomptions précises, graves et concordantes répondant aux exigences des anciens art. 1349 [1354 nouveau] et 1353 C. civ. [1382 nouveau]. Cass. crim. 19 décembre 2012 : pourvoi n° 12-82270 ; Dnd (recherche de la preuve de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la commercialisation des couteaux à usage professionnel), cassant CA Metz (5e ch.), 27 janvier 2012 : RG n° 11/00097 ; arrêt n° 12/00027 ; Dnd (absence de preuve, par la directrice générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, d'un faisceau de présomptions suffisant pour justifier une visite des locaux), et sur renvoi CA Nancy (1re pdt), 30 octobre 2013 : RG n° 13/00839 ; Cerclab n° 4567 (validation de la procédure ; il ressort de la lettre et de l'économie de l'art. L. 450-4 C. com. que le juge peut autoriser l'Administration à procéder à des visites et saisies dans les locaux d'une société en se référant, en les analysant, fût-ce succinctement, aux éléments d'information fournis par la requête dont il tire les faits fondant son appréciation quant à la réalité de présomptions d'agissements prohibés visés par la loi).

Le juge, statuant en application de l’art. L. 450-4 C. com. peut autoriser des agents de l’Administration, autres que celui qui présente la demande, à procéder ou faire procéder aux visites et saisies, à la condition d’y être habilités, sans, notamment, qu’ils aient à être placés sous l’autorité du bénéficiaire de la requête. Cass. crim., 6 octobre 2004 : pourvoi n° 03-85707 ; Cerclab n° 3899, rejetant le pourvoi contre TGI Nanterre, 23 avril 2003 : Dnd.

Le juge qui autorise des opérations de visite et de saisie sur le fondement de l'art. L. 450-4 C. com. est tenu de vérifier si la demande d'autorisation doit comporter tous les éléments d'informations utiles en possession du demandeur, de nature à justifier la visite ; par suite, le juge doit s'assurer que les éléments produits par l'administration aient une apparence de licéité et sont suffisants pour justifier que la mesure intrusive de visite et de saisie soit justifiée ; à cette fin, le JLD doit vérifier, en se référant aux éléments d'informations fournis par l'administration, qu'il existe des indices laissant apparaître des faisceaux de présomptions d'agissements prohibés justifiant que soit recherchée leur preuve, au moyen d'une visite et de saisies de documents s'y rapportant, sans qu'il soit nécessaire que soient caractérisées des présomptions précises, graves et concordantes ou des indices particulièrement troublants des pratiques ; ces présomptions sont appréciées en proportion de l'atteinte aux libertés individuelles que sont susceptibles de comporter la visite et les saisies envisagées. CA Paris (pôle 5 ch. 1 - 1er pdt), 14 décembre 2016 : RG n° 16/11138 ; arrêt n°134/2016 ; Cerclab n° 6664 (outre 13 autres n° de RG ; absence de manquement en l’espèce), sur appel de TGI Évry (Juge libert. dét.), 5 février 2016 : RG n° 16/11138 ; Dnd (outre quatre autres ordonnances). § V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 1 - ord.), 18 novembre 2015 : RG n° 14/20267 ; ord. n° 056/2015 ; Cerclab n° 5438 (refus d’annulation de l’ordonnance autorisant des visites domiciliaires, avec rejet de plusieurs arguments, notamment le caractère anonyme des déclarations recueillies pour solliciter de plus amples investigations et l’atteinte aux droits de la défense aux motifs que seul l’OPJ pourrait saisir le juge en cas de difficultés d’exécution de la mesure), sur appel de TGI Évry (jug. lib. dét.), 16 juillet 2014 : Dnd - CA Paris (pôle 5 ch. 1 - ord.), 18 novembre 2015 : RG n° 14/20268 ; ord. n° 057/2015 ; Cerclab n° 5437 (idem), sur appel de TGI Évry (jug. lib. dét.), 16 juillet 2014 : Dnd.

Modalités d’exécution. Les agents habilités ne sont pas tenus de prendre préalablement attache avec le responsable du magasin. CA Nîmes (ch. com. 2 B), 26 janvier 2012 : RG n° 09/05026 ; Cerclab n° 3674, sur appel de T. com. Avignon, 2 octobre 2009 : RG n° 2007/040080 ; Dnd (services non fournis). § Pour réaliser leurs opérations de contrôle et leurs investigations, les agents habilités de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes ne sont pas tenus d'être assistés d'une personne de l'entreprise, la contradiction étant suffisamment respectée par la connaissance des actes de la procédure donnée au représentant de la personne morale concernée et par la faculté qui est offerte à celle-ci de faire la preuve contraire des faits constatés. CA Nîmes (ch. com. 2 B), 26 janvier 2012 : RG n° 09/05027 ; Cerclab n° 3673 (services non fournis), sur appel de T. com. Avignon, 2 octobre 2009 : RG n° 2007/040081 ; Dnd.

Régularité de la procédure dès lors que tous les procès-verbaux de prise de copie de documents et de déclaration mentionnent que les agents font l'objet de l'habilitation prévue par l'art. L. 450-1 C. com. CA Aix-en-Provence (2e ch.), 15 septembre 2010 : RG n° 08/10314 ; arrêt n° 2010/346 ; Cerclab n° 4308, sur appel de T. com. Manosque, 6 mai 2008 : RG n° 2006/000120 ; Dnd.

Rejet de l’argument tiré du fait que la visite des enquêteurs aurait eu lieu en dehors des horaires d’ouverture d’un marché public, affirmation contestée et en tout état de cause sans portée, dès lors que si les marchandises étaient de nouveau entreposées en chambre froide, les éléments matériels destinés à caractériser la prestation de mise en avant des produits n'avaient pas vocation à disparaître, puisqu’elle consistait en la mise à disposition au fournisseur d’« un espace clairement séparé, spécialement, adapté et exclusivement dédié à ses produits ». CA Paris (pôle 5 ch. 5), 15 janvier 2015 : RG n° 13/03832 ; Cerclab n° 5019.

Information du contrôlé sur la nature de l’enquête et la qualité des enquêteurs. Intervenant à un stade de la procédure où aucune accusation n'a encore été portée et où l’enquêteur débute ses investigations, sans pouvoir entrer dans les détails d'une incrimination qu'il n’est alors pas lui-même en mesure de déterminer, le visa de l'ensemble des dispositions du Code de commerce relatives au pratiques anticoncurrentielles, à la concentration économique, à la transparence et aux pratiques restrictives de concurrence ou prohibées prévient suffisamment les personnes entendues que leurs déclarations s'inscrivent dans une enquête relative à d'éventuelles infractions au droit de la concurrence dans le secteur d'activité économique qui les concernent, satisfaisant ainsi au principe de loyauté dans la recherche de la preuve. CA Rennes (2e ch. com.), 20 janvier 2009 : RG n° 08/00246 ; Cerclab n° 4334 ; Juris-Data n° 2009-005280 (enquêteur justifiant de sa qualité et de l’objet de son enquête en spécifiant que celle-ci était « relative à la vérification des dispositions du livre IV du Code de commerce dans le secteur de la distribution des produits de consommation courante »), sur appel de TGI Dinan, 13 novembre 2007 : Dnd. § V. aussi : CA Aix-en-Provence (2e ch.), 15 septembre 2010 : RG n° 08/10314 ; arrêt n° 2010/346 ; Cerclab n° 4308 (l’indication dans les procès-verbaux que l'objet de l'enquête est « la vérification de l'application des dispositions du Livre IV du Code de Commerce dans le cadre des relations commerciales de la présente enseigne avec ses fournisseurs » précise suffisamment l'objet et la nature de l'enquête), sur appel de T. com. Manosque, 6 mai 2008 : RG n° 2006/000120 ; Dnd.

Ne sont pas irréguliers des procès-verbaux qui ne contiennent pas de mention écrite littérale de l'objet de l'enquête, cette absence ne faisant pas grief dès lors que les procès-verbaux contiennent une mention préimprimée selon laquelle les enquêteurs ont justifié de leur qualité et indiqué l'objet de l'enquête, mention qui fait foi, et qu’en outre, le distributeur n’a pu se méprendre sur la portée de ses déclarations, les questions posées ne laissant aucun doute sur l’objet de l’enquête concernant un litige avec un de ses fournisseurs. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 19 avril 2017 : RG n° 15/24221 ; Cerclab n° 6821, sur appel de T. com. Paris (13e ch.), 3 novembre 2015 : RG n° 2013030835 ; Dnd. § Le procès-verbal de déclaration ne comportant pas la mention écrite littérale de l'objet de l'enquête, mais une mention préimprimée selon laquelle les enquêteurs ont justifié de leur qualité et indiqué l'objet de l'enquête, cette mention faisant foi jusqu'à preuve contraire, il appartient aux sociétés assignées de rapporter cette preuve. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 21 juin 2017 : RG n° 15/18784 ; Cerclab n° 6938 (1/ s'il est exact que les enquêteurs de la DGCCRF ont des pouvoirs d'enquête pour rechercher les infractions au Code de la consommation, sur le fondement des art. L. 215-1 s. C. consom., alors en vigueur, la mention expresse de l'art. L. 450-3 C. com. sur le procès-verbal permettait aux deux personnes entendues de ne pas se méprendre sur l'objet de l'enquête et de savoir qu'elles étaient entendues au titre du livre IV du code de commerce ; 2/ il ressort du contenu du procès-verbal que les deux représentants étaient parfaitement informés qu'ils étaient interrogés sur le modèle marchand des plateformes en ligne, concernant tant leurs relations avec les clients finals, qu'avec les hôtels partenaires, ainsi que sur la répartition des diverses responsabilités au sein du groupe, ce qui exclut toute violation du principe de non auto incrimination ; 3/ la demande, à la suite de l’audition, de la communication des conditions générales adressées aux hôteliers de cinquante contrats est dépourvue de déloyauté ; 4/ la circonstance que la DGCCRF ait enquêté sur des pratiques commerciales trompeuses imputables aux plateformes de réservation hôtelières ne saurait la priver de la faculté d'enquêter sur d'autres pratiques du même secteur, les contrats figurant au dossier étant ceux recueillis à la suite du message électronique du 7 mars 2011 et non dans le cadre de l'enquête de consommation), pourvoi rejeté par Cass. com., 8 juillet 2020 : pourvoi n° 17-31536 ; arrêt n° 314 ; Cerclab n° 8520 (de cette appréciation, faisant ressortir que ces personnes connaissaient le contenu concret de l’objet de l’enquête, la cour d’appel a pu déduire que l’obtention, à la demande d’un des enquêteurs ayant procédé à l’audition et postérieurement à celle-ci, des conditions générales de la société investiguée adressées aux hôteliers ainsi que des contrats signés avec ces derniers, transmis par les personnes ainsi entendues, n’était pas déloyale ; arrêt jugeant au surplus inopérant la contestation du 1° ci-dessus, le procès-verbal mentionnant bien l’art. L. 450-3 et ne prétendant pas que l’enquête visait des pratiques contraires au droit de la consommation).

N.B. La pratique de l’administration, consistant à faire constater par une mention préimprimée la délivrance d’une information rappelle malheureusement celle de certains professionnels à l’encontre des consommateurs. Il ne semble pourtant pas particulièrement difficile d’établir un imprimé mentionnant pour l’objet de l’enquête une zone à remplir par l’enquêteur…

Présence des avocats. Dans les procédures fondées sur la violation du droit de la concurrence, l’obligation d’assurer l’exercice des droits de la défense doit être respectée dès le stade de l’enquête préalable ; cassation d’une ordonnance d’un premier président, qui a méconnu le sens et la portée du principe de respect des droits de la défense, en rejetant l’action en nullité d’opérations de visite et de saisie d’enquêteurs de l’administration de la concurrence, alors que les fonctionnaires avaient fait obstacle à la présence des avocats appelés à assister aux opérations de visite domiciliaire. Cass. crim. 25 juin 2014 : pourvoi n° 13-81471 ; Bull. crim. ; Cerclab n° 4977 (cassation sans renvoi), cassant CA Paris (ord. 1er pdt), du 12 février 2013 : Dnd.

Les avocats de la société objet d’une opération de visite et de saisie bénéficient des droits reconnus à celle-ci et à ses représentants par l’alinéa 8 de l’art. L. 450-4 C. com. Cass. crim., 27 novembre 2013 : pourvoi n° 12-85830 ; Bull. crim. ; Cerclab n° 4648 (ordonnance frappée de pourvoi ayant adopté, à tort la position contraire, mais sans qu’il y ait lieu de casser, puisque qu’il appartenait à la société et à ses conseils, qui sont intervenus dès le début des opérations de visite et avaient nécessairement connaissance des documents susceptibles d’être appréhendés, de soulever toute contestation utile sur les documents qui leur paraissaient devoir être exclus de la saisie), rejetant le pourvoi contre CA Paris (1er pdt), 29 mai 2012 : RG n° 10/23190 ; ord. n° 55 ; Dnd.

Comp. : les agents de l’administration, qui ont informé les personnes visées par l’enquête de l’objet de celle-ci, n’ont employé aucun procédé déloyal pouvant compromettre les droits de la défense, et aucun texte ne prévoit que les intéressés, qui peuvent être effectivement assistés d’un avocat, soient avisés de ce droit. Cass. crim., 18 juillet 2017 : pourvoi n° 15-86153 ; arrêt n° 2068 ; Bull. crim. ; Dnd (visa de l’art. L. 450-3 C. com. dans un litige de fraude fiscale).

Signature et remise des PV. Les préposés du distributeur contrôlé, responsables de départements ou services, dont les déclarations font l'objet de procès-verbaux, doivent légitiment les signer et peuvent en recevoir un double au nom du distributeur, sans que la signature du PDG de ce dernier soit nécessaire. CA Aix-en-Provence (2e ch.), 15 septembre 2010 : RG n° 08/10314 ; arrêt n° 2010/346 ; Cerclab n° 4308 (prescriptions de l’art. L. 450-2 C. com. respectées), sur appel de T. com. Manosque, 6 mai 2008 : RG n° 2006/000120 ; Dnd. § Aucune disposition légale ou réglementaire n'impose que les déclarants signataires des procès-verbaux soient les mêmes que les signataires des contrats dont les clauses sont contestées et qui font l'objet de l'enquête. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 19 avril 2017 : RG n° 15/24221 ; Cerclab n° 6821, sur appel de T. com. Paris (13e ch.), 3 novembre 2015 : RG n° 2013030835 ; Dnd.

La réalisation des inventaires est régie par les dispositions de l'art. R. 450-2 C. com., qui mentionne que les procès-verbaux, prévus à l'article L. 450-4 dudit code, relatent le déroulement de la visite et consignent les constatations effectuées, sont dressés sur le champ et comportent l'inventaire des pièces et documents saisis ; il se déduit de ce texte et de plusieurs décisions de jurisprudences significatives qu'aucune forme particulière de l'inventaire des pièces et des documents saisis n'est imposée, que celui-ci peut, à titre illustratif, prendre la forme d'une arborescence. CA Paris (pôle 5 ch. 1 - 1er pdt), 14 décembre 2016 : RG n° 16/11138 ; arrêt n°134/2016 ; Cerclab n° 6664 (outre 13 autres n° de RG), sur appel de TGI Évry (Juge libert. dét.), 5 février 2016 : RG n° 16/11138 ; Dnd (outre quatre autres ordonnances).

Portée des procès-verbaux (art. L. 450-2 C. com.). Les mentions du procès-verbal concernant la nature des manquements recherchés valent jusqu'à preuve contraire. CA Rennes (2e ch. com.), 20 janvier 2009 : RG n° 08/00246 ; Cerclab n° 4334 ; Juris-Data n° 2009-005280, sur appel de TGI Dinan, 13 novembre 2007 : Dnd. § V. aussi : CA Paris (pôle 5 ch. 5), 15 janvier 2015 : RG n° 13/03832 ; Cerclab n° 5019 (prise en compte des déclarations du directeur général de la société poursuivie, entendue de façon contradictoire et ayant signé le procès-verbal).

Conformément aux dispositions de l'art. L. 450-2 C. com., le procès-verbal fait foi jusqu'à preuve contraire mais seulement des faits que son auteur a personnellement et matériellement constatés, soit, en l'espèce, d'une part, la coexistence de deux tarifications très différentes s'appliquant, à compter du 14 avril 2003, aux nouveaux entrants d'une part et aux opérateurs historiques d'autre part, et d'autre part, l'absence de transparence sur cette double tarification et ses conséquences pour les différents opérateurs en termes de concurrence ; en revanche, ce même procès-verbal n'a pas de valeur probante en ce qui concerne la qualification juridique de ces faits, laquelle était susceptible d'être infirmée ou confirmée ultérieurement et qui ne s'imposait de toute évidence pas au Ministre qui pouvait la remettre en cause. CAA Paris (3e ch.), 5 avril 2012 : req. n° 11PA00634 ; Cerclab n° 3757.

Procès-verbaux et secret des affaires. Ne peuvent être utilement communiqués à la cour et ne peuvent être considérés comme probants dans leur version intégrale des procès-verbaux que le ministre n'a pas été autorisé à produire dans cette version, préalablement à la clôture des débats, par une décision spéciale d'un juge conformément aux art. R. 153-2 s. C. com. dans le cadre de la procédure relative à la protection du secret des affaires. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 12 juin 2019 : RG n° 18/20323 et n° 18/21153 ; Cerclab n° 8238.

Procès-verbaux extérieurs à l’enquête. Le distributeur ne peut reprocher au jugement de s’appuyer sur un procès-verbal réalisé pour une autre enquête, dès lors que c’est lui-même qui l’a produit volontairement, afin de donner des précisions quant à son organisation. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 19 avril 2017 : RG n° 15/24221 ; Cerclab n° 6821 (le fait que ce procès-verbal ait été dressé sur la base de l’art. L. 215-3 C. consom. ne saurait impliquer que les déclarants auraient été trompés sur l'objet de l'enquête et se seraient auto incriminés, puisque la portée de ce procès-verbal est purement descriptive et qu’il n'a été utilisé dans la procédure que pour éclairer la cour sur l'organisation interne de la société distributrice et non pour fonder des griefs contre elle), sur appel de T. com. Paris (13e ch.), 3 novembre 2015 : RG n° 2013030835 ; Dnd.

Régime des scellés. La procédure du scellé provisoire, qui permet à l'entreprise de faire connaître aux enquêteurs les pièces qui, d'après elle, pourraient bénéficier de la protection liée à la confidentialité des correspondances avocat-client, afin que ces documents puissent être rapidement supprimés des fichiers de messagerie dans lesquels ils figurent, étant précisé que la société visitée peut refuser d'utiliser cette procédure qui lui est proposée, ne porte aucune atteinte aux droits fondamentaux, et notamment aux droits de la défense. CA Paris (pôle 5 ch. 1 - 1er pdt), 14 décembre 2016 : RG n° 16/11138 ; arrêt n°134/2016 ; Cerclab n° 6664 (outre 13 autres n° de RG ; arrêt rappelant par ailleurs qu’il appartient aux sociétés qui ont, en leur possession, une copie des documents informatiques saisis, d'identifier la pièce relative à la violation du privilège légal, n'entrant pas dans le champ d'application de l'ordonnance, ou se rapportant à une atteinte à la vie privée pour la soumettre au second juge afin d'obtenir, le cas échéant, son annulation), sur appel de TGI Évry (Juge libert. dét.), 5 février 2016 : RG n° 16/11138 ; Dnd (outre quatre autres ordonnances).

Autres illustrations. V. CA Paris (pôle 5 ch. 15 - ord.), 10 avril 2019 : RG n° 18/05973 et n° 18/19390 ; Dnd.

B. AUTRES MODES DE PREUVE

Art. 145 CPC : juge compétent. Seules les juridictions du premier degré spécialement désignées par les art. D. 442-3 et R. 420-3 C. com. sont investies du pouvoir de statuer sur les litiges relatifs à l’application de l’anc. art. L. 442-6 [L. 442-1] ou dans lesquels les dispositions de l’article L. 420-1 du même code sont invoquées ; après avoir énoncé que, si la partie qui demande une mesure sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile dispose du choix de saisir soit le président du tribunal appelé à connaître du litige soit celui du tribunal du lieu de l’exécution de la mesure d’instruction, le président saisi ne peut toutefois ordonner une telle mesure que dans les limites du pouvoir juridictionnel de ce tribunal, c’est à bon droit qu’ayant constaté que la société se prévalait dans sa requête de pratiques méconnaissant l’anc. art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] C. com. et relevé que le tribunal de commerce de Grenoble, dans le ressort duquel la mesure d’investigation devait être exécutée, n’avait pas le pouvoir juridictionnel de statuer sur un tel litige, la cour d’appel a infirmé les ordonnances déférées et rétracté l’ordonnance sur requête ayant ordonné la mesure, peu important que la requête ait pu invoquer, en outre, un fondement de droit commun. Cass. com., 17 janvier 2018 : pourvoi n° 17-10360 ; arrêt n° 87 ; Cerclab n° 7415 ; Bull. civ., rejetant le pourvoi contre CA Grenoble (ch. com.), 10 novembre 2016 : RG n° 16/03660 et n° 16/03666 ; Cerclab n° 6497 ; Juris-Data n° 2016-023940 (les dispositions de l’art. D. 442-3 C. com., d'ordre public, s'appliquent à toute demande fondée sur l’ancien art. L. 442-6 C. com., y compris celles faites à titre subsidiaire ou reconventionnelle ; elles s’appliquent aussi à une demandé fondée sur l’art. 145 CPC, dès lors que le président du tribunal saisi ne peut ordonner une mesure d’instruction que dans les limites de la compétence de son tribunal), sur appel de T. com. Grenoble, 19 juillet 2016 : RG n° 2016R531 ; Dnd. § Rappr. dans la même affaire : CA Paris (pôle 1 ch. 3), 8 novembre 2017 : RG n° 17/04981 ; arrêt n°712 ; Cerclab n° 7131, sur appel de T. com. Bordeaux (réf.), 31 janvier 2017 : RG n° 16/01766 ; Dnd. § V. aussi : CA Paris (pôle 1 ch. 8), 23 mars 2018 : RG n° 17/14613 ; Cerclab n° 7490 (arrêt admettant l’application de la compétence spécialisée à une action fondée sur l’art. 145 CPC ; incompétence du tribunal de commerce de Rennes, alors que seul le TGI de Rennes l’était ; sur les mesures immédiatement ordonnées, V. ci-dessous), sur appel de T. com. Rennes, 6 juillet 2017 : RG n° 2017R00020 ; Dnd.

Pour une illustration : CA Paris (pôle 1 ch. 8), 23 mars 2018 : RG n° 17/14613 ; Cerclab n° 7490 ; précité (société exploitant une pharmacie s’affiliant à un réseau d’autres pharmacies, constitué par une société et proposant des prestations d'assistance ; admission de la demande de communication formulée par une pharmacie en ce qu'elle porte sur les conditions, les modalités et les justificatifs de la rémunération intitulée « trade » pour les années 2012 à 2016 ainsi que sur les accords de référencements avec les laboratoires pharmaceutiques fournisseurs du prestataire pour ces mêmes années ; rejet de la demande portant sur les comptes annuels de celui-ci, qui excède le motif légitime incoqué pour la perspective d'un éventuel litige entre les deux parties).

Expertise privée. Absence de prise en compte d’un rapport privé établi par une partie de façon non contradictoire. CA Paris (pôle 5 ch. 10), 3 octobre 2012 : RG n° 10/10308 ; arrêt n° 198 ; Cerclab n° 4077 (argument retenu avec d’autres éléments), sur appel de T. com. Paris Chambre (15e ch.), 19 mars 2010 : RG n° 2008/088681 ; Dnd.

Témoignages. En écartant l’attestation produite par le distributeur, au motif que son auteur était un fournisseur concerné par la procédure, la cour d’appel n’a fait qu’apprécier souverainement la force probante d’un élément de preuve, eu égard au contexte dans lequel il avait été produit. Cass. com., 26 avril 2017 : pourvoi n° 15-27865 ; arrêt n° 581 ; Cerclab n° 6876, rejetant le pourvoi contre CA Paris (pôle 5 ch. 4), 25 novembre 2015 : RG n° 12/14513 ; Cerclab n° 5441. § V. déjà : doivent être examinés avec beaucoup de précautions les témoignages de certains fournisseurs en faveur du distributeur, dès lors que ceux-ci qui fournissent toujours le groupe intimé ont un intérêt fondamental à ce que leurs produits continuent à être référencés. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 2 février 2012 : RG n° 09/22350 ; Cerclab n° 3621 ; Lettre distrib. 2012/3, p. l, obs. J.-M. Vertut, pourvoi rejeté par Cass. com. 10 septembre 2013 : pourvoi n° 12-21804 ; Cerclab n° 4624.

Sur l’admission de témoignages anonymisés pour éviter les représailles : CA Paris (pôle 5 ch. 4), 12 juin 2019 : RG n° 18/20323 et n° 18/21153 ; Cerclab n° 8238 (absence d’atteinte excessive aux droits de la défense dans la communication de procès-verbaux anonymisés ne causant pas, au regard des circonstances très particulières de l'espèce, une atteinte disproportionnée au principe du contradictoire ; arguments : 1/ les PV sont dressés par des agents assermentés ; 2/ ils portent sur des questions dont la société a connaissance et auxquelles elle peut répondre en produisant des pièces destinées à démontrer le contraire ; 3/ la société peut débattre contradictoirement du fond des pièces et de la portée des auditions dont le contenu n'est pas anonymisé ; 4/ seules les informations empêchant toute réidentification de l'identité du déposant, pour éviter des représailles, ont été tronquées ; éléments anonymisés : nom du fournisseur et de la personne auditionnée, activité de la société et toute information relative au marché sur lequel elle opère, éléments relatifs à son chiffre d'affaires passé et futur ainsi que la part de chiffre d'affaires qu'elle réalise avec la société poursuivie) - T. com. Paris (1re ch.), 2 septembre 2019 : RG n° 2017050625 ; Cerclab n° 8250 (Amazon ; admission de la production par le Ministre de témoignages anonymisés, qui ne remet pas en cause les droits de la défense, dès lors que l’entreprise a pu les discuter, le tribunal les contrôlant au cas par cas ; le nombre limité de procès-verbaux, en l’espèce dix, n’est pas un obstacle, dès lors que, s'agissant d'un contrat d'adhésion, tous les vendeurs tiers se trouvent potentiellement dans la même situation que ceux dont les témoignages sont produits).

Sur le formalisme procédural pour invoquer l’argument : CA Paris (pôle 5 ch. 4), 12 juin 2019 : RG n° 18/20323 et n° 18/21153 ; Cerclab n° 8238 (la cour n'est pas saisie de la demande d'irrecevabilité des pièces anonymisées qui ne figure pas dans le dispositif des conclusions ; conséquence, examen des pièces sous le seul angle de leur valeur probante).

C. COMMUNICATION DES PIÈCES

Communication des documents contractuels. Pour une illustration : rejet de l’argument tiré d’un déséquilibre significatif provenant d’un « guide de Merchandising » dès lors que celui-ci n'est pas produit aux débats. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 6 juin 2018 : RG n° 16/10621 ; Cerclab n° 7622 (franchise de distribution de vêtements), sur appel de T. com. Paris, 6 novembre 2013 : RG n° 2013050596 ; Dnd.

Communication des conditions générales. Dès lors que la demande de communication des conditions générales de vente s'inscrivait dans le cadre du présent litige et non pour l'exercice de son activité professionnelle, les conditions de la responsabilité visée à l'art. L. 442-6-I-9° C. com. ne sont pas réunies. CA Paris (pôle 5 ch. 5), 6 octobre 2022 : RG n° 20/00069 ; arrêt n° 185 ; Cerclab n° 9871 (achat de champagne par un restaurant grâce à un intermédiaire ; absence de preuve d’un avantage sans contrepartie), infirmant T. com. Évry, 30 octobre 2019 : RG n° 2018F00389 ; Dnd.

Documents recueillis lors de l’enquête. S’il est constant qu'en matière pénale les pièces relatives à l'enquête qui constituent le dossier d'instruction doivent être, à peine de nullité, communiquées au défendeur qui peut y trouver des éléments à décharge et si les demandes du Ministre fondées sur l'anc. art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] et III [L. 442-4] C. com. tendent à obtenir la condamnation des défenderesses à une amende qui peut sous certains aspects être assimilée à une sanction pénale, la demande de communication ne peut être arbitrairement étendue à tout document établi ou détenu par la partie adverse et un lien doit pouvoir être établi entre les documents dont la communication est réclamée et les demandes contenues dans les conclusions récapitulatives. T. com. Évry (3e ch.), 6 février 2013 : RG n° 2009F00727 ; Cerclab n° 4352. § Doit dès lors être rejetée la demande la demande de communication sous astreinte des pièces listées dans les procès-verbaux annexés à l'assignation et des compte rendus rédigés par les unités départementales CCRF à la suite à l'enquête nationale portant sur les relations entre les fournisseurs et la grande distribution réalisée en 2009, dès lors qu'en l'espèce le Ministre, pour tenir compte d'une jurisprudence récente, a notablement modifié ses demandes initiales et ne demande plus la nullité des clauses concernées, mais leur interdiction pour l'avenir, sans référence à leur application passée éventuelle. T. com. Évry (3e ch.), 6 février 2013 : RG n° 2009F00727 ; Cerclab n° 4352 (conséquences du refus de communication : refus d’apprécier le déséquilibre en raison d’une accumulation d’obligations ou de clauses licites et limitation de l’examen à des clauses isolées dont la force ou la nocivité seraient telles qu'elles pourraient à elles seules, peu important les autres clauses du contrat, déséquilibrer l'ensemble).

Saisies de fichiers informatiques. Régularité d’une saisie de fichiers informatiques, dès lors que les fichiers saisis ont été identifiés, puis inventoriés, et que les sociétés concernées, qui en ont reçu copie et ont ainsi été mises en mesure d’en connaître le contenu, n’ont formulé aucune observation au moment où les opérations ont été effectuées et n’ont invoqué, devant le premier président, aucun élément de nature à établir que certains des documents ne pouvaient, en raison de leur objet, être saisis. Cass. crim., 14 novembre 2013 : pourvoi n° 12-87346 ; Bull. crim. ; Cerclab n° 4647 (absence de violation, notamment, des art. 6 et 8-1 Conv. EDH), pourvoi contre CA Paris (1re pdt), 28 juin 2011 : Dnd. § En cas de saisie de fichiers informatiques, la présence, parmi eux, de pièces insaisissables ne saurait avoir pour effet d’invalider la saisie de tous les autres documents, dès lors que certains de ces derniers étaient susceptibles de contenir des éléments intéressant l’enquête. Cass. crim., 27 novembre 2013 : pourvoi n° 12-85830 ; Bull. crim. ; Cerclab n° 4648 (absence de violation, notamment, des art. 6 et 8-1 Conv. EDH), rejetant le pourvoi contre CA Paris (1er pdt), 29 mai 2012 : RG n° 10/23190 ; ord. n° 55 ; Dnd. § V. encore : lorsqu’un support de documents est indivisible, l’administration est en droit d’appréhender tous les documents qui y sont contenus si certains d’entre eux se rapportent, au moins en partie, aux agissements visés par l’autorisation de visite, et il appartient ensuite au demandeur au recours de préciser et produire les éléments du fichier qui seraient insaisissables en en indiquant la raison pour chacun de ces éléments. Cass. com., 8 mars 2016 : pourvoi n° 14-26929 ; arrêt n° 229 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 6516 (messagerie Outlook se présente sur le disque dur sous la forme d’un fichier unique, indivisible et insécable, contenant tous les messages), rejetant le pourvoi contre CA Aix-en-Provence, 6 novembre 2014 : Dnd.

La confection de scellés provisoires est une faculté laissée à l’appréciation des enquêteurs, agissant sous le contrôle du juge. Cass. crim., 14 novembre 2013 : précité.

Cassation pour violation des art. L. 450-4 C. com. et art. 143 CPC, de l’ordonnance ordonnant avant dire droit une expertise, ayant notamment pour objet d’obtenir des explications techniques sur les modalités auxquelles ont recouru les enquêteurs et de fournir tous éléments permettant d’évaluer techniquement la possibilité d’une saisie sélective de messages dans une messagerie électronique sans compromettre l’authenticité de ceux-ci, alors que seuls les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d’office, être l’objet d’une mesure d’instruction. Cass. crim., 11 janvier 2012 : pourvoi n° 10-88193 ; Cerclab n° 4748 (saisie de la totalité des messages d’une messagerie électronique), cassant CA Paris (1er pdt), 2 novembre 2010 : ord n° 365 ; Dnd, après rejet d’une demande de QPC par Cass. crim., 19 octobre 2011 : pourvoi n° 10-88193 ; arrêt n° 5947 ; Cerclab n° 4747 - Cass. crim., 11 janvier 2012 : pourvoi n° 10-88194 ; Cerclab n° 4745, cassant CA Paris (1er pdt), 2 novembre 2010 : ord. n° 366 ; Dnd, après rejet de QPC par Cass. crim. 19 octobre 2011 : pourvoi n° 10-88194 ; arrêt n° 5948 ; Cerclab n° 4746.

Documents détenus par des tiers. Si la demande de communication de pièces du Président de l’Autorité de la Concurrence ne remet pas en cause les principes de l'art. 6 Conv. EDH ni ceux de l'art. 1er du premier protocole, le fait que des tiers non parties à l'instance puissent être concernés par ces communications, alors qu'aucune protection du secret des affaires contenues dans les pièces demandées ne pourra être organisée, car elle n'est prévue ni dans le Code de commerce, ni dans le Code de procédure civile, constitue un empêchement légitime à la communication des pièces. T. com. Créteil (1re ch.), 13 octobre 2009 : RG n° 2008F00629 ; Cerclab n° 4355 (possibilité pour le président d’accéder aux comptes annuels publiés).