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6301 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Compromis d’arbitrage

Nature : Synthèse
Titre : 6301 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Compromis d’arbitrage
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6301 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT

COMPROMIS D’ARBITRAGE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

 Présentation : rappel de l’art. 2061 C. civ. Selon l’art. 2061 C. civ., dans sa rédaction résultant de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 (art. 126 JORF 16 mai 2001), « sous réserve des dispositions législatives particulières, la clause compromissoire est valable dans les contrats conclus à raison d'une activité professionnelle ».

Sur la compétence de principe de l’arbitre pour apprécier le caractère abusif : il appartient à l’arbitre de statuer, par priorité, sous le contrôle du juge de l’annulation, sur sa propre compétence, le juge étatique étant sans pouvoir pour le faire, sauf nullité ou inapplicabilité manifeste de la clause. Cass. civ. 1re, 12 mai 2010 : pourvoi n° 09-11872 ; arrêt n° 468 ; Cerclab n° 2848 (arrêt estimant que tel n’est pas le cas en l’espèce dès lors que l’art. 2061 n’était pas applicable à un contrat international ; demandeur au pourvoi invoquant le caractère abusif de la clause), rejetant le pourvoi contre CA Paris (1re ch. D), 21 janvier 2009 : RG n° 08/18859 ; arrêt n° 8 ; Cerclab n° 7368 (en l'état d'une clause d'arbitrage international, qui est par principe valable sans condition de commercialité, les moyens pris de sa nullité en matière civile et en matière mixte sont inopérants, l'art. 2061 C. civ. étant sans application dans l'ordre international ; renvoi des parties à mieux se pourvoir), sur appel de TGI Paris (3e ch. sect. 2), 12 septembre 2008 : RG n° 08/8427 ; Dnd.

A. CLAUSE COMPROMISSOIRE DANS LE CONTRAT

Contrat interne conclu avec un consommateur. En application de l’art. 2061 C. civ. précité, une clause compromissoire est donc illicite dans les relations entre un professionnel et un consommateur, ce qui réduit l’intérêt de l’examen de son caractère abusif, sauf à retenir la position traditionnelle de la Commission estimant que le maintien d’une clause illicite dans le contrat rend aussi la clause abusive, en ce qu’elle trompe le consommateur sur ses droits. § V. pourtant une illustration de contrat d’assurance contenant une telle clause, dont l’application a au surplus été revendiquée par l’assureur (!) : irrecevabilité de la demande des assureurs, personnes morales défenderesses, aux fins de voir constater l'incompétence de la juridiction saisie, au profit d’un arbitrage en application de la clause compromissoire stipulée au contrat. TGI Douai, 31 août 2017 : RG n° 16/01261 ; Dnd (assurance de véhicule non professionnelle d’un particulier), confirmé par CA Douai (3e ch.), 22 novembre 2018 : RG n° 17/06390 ; arrêt n° 18/463 ; Cerclab n° 7937 (absence de contestation en appel par les assureurs du rejet de ce moyen par le tribunal).

Sur la notion de professionnel au sens du texte : cassation de l’arrêt admettant la validité d’une clause intitulée « procédure de conciliation » et prévoyant que les conclusions du médecin s’imposaient aux parties, dans un contrat d’assurance collective ayant pour objet de couvrir le risque d’invalidité permanente totale, alors qu’un tel contrat qui n’était pas conclu à raison d’une activité professionnelle ne pouvait instaurer valablement une procédure d’arbitrage. Cass. civ. 2e, 16 juin 2011 : pourvoi n° 10-22780 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 3438 (cassation pour violation de l’art. 2061 C. civ., selon lequel, sous réserve de dispositions législatives particulières, la clause compromissoire est valable dans les contrats conclus à raison d’une activité professionnelle), cassant CA Bastia (ch. civ.), 4 novembre 2009 : RG n° 08/00402 ; Cerclab n° 3625.

Contrat interne conclu avec un non-professionnel. Compte tenu de la définition du non-professionnel donnée par l’article liminaire du Code de la consommation, depuis l’ordonnance du 14 mars 2016, la solution devrait être identique à celle posée pour le consommateur.

Contrat international conclu avec un consommateur ou contrat conclu avec un non-professionnel. Lorsque le contrat conclu avec le consommateur présente un caractère international, l’art. 2061 C. civ. est inapplicable et l’art. L. 212-1 C. consom. retrouve un intérêt direct. La solution est la même lorsque le contrat est conclu avec un non-professionnel au sens de l’article liminaire.

* Commission. La Commission des clauses abusives s’est toujours montrée hostile à ce type de clauses : la Commission recommande d’éliminer les clauses visant à imposer le recours à l’arbitrage pour un litige qui n’est pas encore né (clause compromissoire). Recomm. n° 79-02/2° : Cerclab n° 2143 (considérant n° 3 ; clause contraire à l'art. 2061 C. civ.). § Dans le même sens à propos de contrats particuliers, avant la loi de 2001 : Recomm. n° 81-02/17 : Cerclab n° 2173 (considérant n° 15 : clause abusive) - Recomm. 94-04/B-11° : Cerclab n° 2162 (locations saisonnières ; clause illicite) - Recomm. n° 91-01/C : Cerclab n° 2159 (établissements d’enseignement ; considérant n° 12 : clause manifestement illicite) - Recomm. n° 97-02 : Cerclab n° 2190 (considérant n° 3 et visa de l’art. 2061 C. civ. ; clause abusive).

* Droit antérieur. Dans le cadre de la loi du 1er février 1995, le point 1.q) de l’annexe à l’ancien art. L. 132-1 C. consom. consom. (abrogée à compter du 1er janvier 2009, mais toujours présente dans la directive) précisait que peuvent être regardées comme abusives, si elles satisfont aux conditions posées au premier alinéa de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. et à condition, en cas de litige, que le demandeur apporte la preuve de ce caractère abusif, les clauses ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou d'entraver l'exercice d'actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d'arbitrage non couverte par des dispositions légales (L. n° 2005-67 du 28 janv. 2005) « ou à passer exclusivement par un mode alternatif de règlement des litiges », en limitant indûment les moyens de preuves à la disposition du consommateur ou en imposant à celui-ci une charge de preuve qui, en vertu du droit applicable, devrait revenir normalement à une autre partie au contrat (annexe 1.q, conforme à la Directive 93/13/CEE, sauf l’incidente entre guillemets).

* Décret du 18 mars 2009 : clause simplement présumée abusive. Depuis le décret du 18 mars 2009, l’art. R. 212-2-10° C. consom. (reprenant l’ancien art. R. 132-2-10° C. consom.) dispose qu’est présumée abusive, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire, la clause ayant pour objet ou pour effet de « supprimer ou entraver l’exercice d’actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d’arbitrage non couverte par des dispositions légales ou à passer exclusivement par un mode alternatif de règlement des litiges ». § N.B. 1 Il peut paraître étrange de présumer simplement abusive une clause illicite, mais la disposition ne se comprend que dans les exceptions où cette clause est licite (contrat conclu avec un non-professionnel, contrat international conclu par un consommateur). § N.B. 2 L’ancien art. R. 132-2-10° C. consom. ne visait que le consommateur, en contradiction avec l’alinéa premier qui incluait les non-professionnels. Depuis le déplacement de la protection des non-professionnels dans un article autonome, l’art. R. 212-5 C. consom., l’applicabilité du 10° aux non-professionnels ne souffre plus la discussion.

Illusrations : contrats internationaux. La clause d’un contrat de vente d’un salon en cuir, acheté en Belgique et livré en France, obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d’arbitrage constitue une clause abusive au sens de l’art. 3 de la directive CEE n° 93/13 du conseil du 5 avril 1993 et de son annexe, et des dispositions d’ordre public de l’ancien art. L 132-1 C. consom. et son annexe. L’art. 17 du règlement 44/2001 qui permet de déroger aux dispositions du règlement par des dispositions permettant au consommateur de saisir d’autres « Tribunaux que ceux indiqués dans la présente section » ne peut recevoir application en l’espèce dès lors que le Tribunal désigné par le contrat est un Tribunal arbitral. CA Douai (1re ch. 1re sect.), 15 décembre 2008 : RG n° 08/02472 ; Cerclab n° 2659 (est non écrite la clause attribuant compétence, exclusive, à la Commission des litiges, instance arbitrale), sur appel de TI Douai, 14 mars 2008 : RG n° 07/000530 ; Dnd.

Contrat conclu avec un professionnel. Depuis l’ordonnance du 14 mars 2016, lorsque le contrat est conclu avec un professionnel agissant à des fins qui n’entrent pas dans la cadre de son activité ou n’exerçant pas une des cinq activités professionnelles visées par l’article liminaire (avant l’ordonnance, la situation concernait les contrats sans rapport direct avec l’activité), l’art. 2061 C. civ. est applicable mais la clause est licite. Seul son caractère abusif pourrait le cas échéant être discuté.

B. COMPROMIS POSTÉRIEUR AU CONTRAT

Un compromis d’arbitrage signé, hors toute clause compromissoire insérée à la police d’assurance, entre l’assureur et l’assuré après la naissance d’un litige, ne constitue pas une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et un non-professionnel ou un consommateur, et n’est donc pas susceptible de présenter un caractère abusif au sens de l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom. Cass. civ. 1re, 25 février 2010 : pourvoi n° 09-12126 ; arrêt n° 211 ; Bull. civ. I, n° 49 ; Cerclab n° 1979, rejetant le pourvoi contre CA Aix-en-Provence (11e ch. A), 26 novembre 2008 : Dnd. § N.B. Si la première partie de l’affirmation de la Cour de cassation est justifiée, puisqu’en l’occurrence le compromis résulte d’un nouvel accord de volontés, venant compléter le premier, la seconde partie est en revanche contestable, puisque s’il n’est pas une clause, le compromis est alors un contrat conclu entre un professionnel et un non-professionnel ou un consommateur qui, d’une part, peut contenir des clauses abusives et, d’autre part, n’échappe au contrôle de l’art. L. 212-1 C. consom., quant à l’objet principal du contrat, que si celui-ci est stipulé clairement (alinéa 3). § Comp. CA Paris (pôle 2, ch. 5), 20 septembre 2011 : RG n° 09/28061 ; Cerclab n° 3331 (le compromis d'arbitrage signé dans le cadre d'une clause compromissoire insérée à la police d'assurance, entre l'assureur et l'assuré avant la naissance d'un litige, constitue une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et un non-professionnel ou un consommateur et est susceptible de présenter un caractère abusif), sur appel de TGI Paris, 19 novembre 2009 : RG n° 08/03035 ; Dnd.