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6617 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Coffre-fort

Nature : Synthèse
Titre : 6617 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Coffre-fort
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6617 (29 août 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT

BANQUE - COFFRE-FORT

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Textes. Les banques peuvent offrir à leur clientèle un service de coffre-fort, qui est évoqué par quelques textes : l’art. D. 312-1-1 CMF (rédaction décret du 27 mars 2014, texte sur la terminologie devant être employée par les banques dans leurs plaquettes tarifaires : II-8° « Frais de location de coffre-fort : le compte est débité des frais de location d'un coffre-fort ») et l’art. L. 321-20 CMF (loi du 6 août 2015, relatif à la clôture des comptes inactifs : « VI. – Un coffre-fort mis à disposition par un établissement de crédit est considéré comme inactif lorsque son titulaire, le représentant légal de ce dernier ou la personne habilitée par lui ou l'un de ses ayants droit ne s'est pas manifesté, sous quelque forme que ce soit, ni n'a effectué aucune opération sur un compte ouvert à son nom dans les livres de l'établissement pendant une durée d'au moins dix ans et que, à l'issue de cette période de dix ans, les frais de location n'ont pas été payés au moins une fois »).

Recommandation. Recommandation n° 87-01 du 21 novembre 1986 sur le location de coffres-forts : BOCCRF du 20 mars 1987 ; Cerclab n° 2179.

Formation du contrat. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de rendre opposable au consommateur un document non revêtu de sa signature. Recomm. 87-01/1° : Cerlab n° 2179 (considérant n° 2 : le consommateur devant avoir une connaissance précise de ses obligations, la simple référence à des conditions générales, dont le contenu peut d'ailleurs varier dans le temps, apparaît insuffisante pour que soit assurée une bonne information du consommateur).

Objet initial du contrat. La Commission recommande l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de mettre à la charge du consommateur des obligations sans définir de manière précise et objective, notamment les caractéristiques de l'emplacement loué, le prix de la location et la durée du contrat. Recomm. 87-01/2° : Cerlab n° 2179.

Modification du contrat. La Commission recommande l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier unilatéralement, en cours de contrat, le prix, la durée de la location, les caractéristiques de l'emplacement loué sans faire dépendre ces modifications d'une clause contractuelle prenant en considération des événements ne dépendant pas exclusivement de la volonté du professionnel. Recomm. 87-01/3° : Cerlab n° 2179. § N.B. Clause interdite par l’ancien art. R. 132-1-3° C. consom. depuis le décret du 18 mars 2009, sous réserve pour le prix de l’ancien art. R. 132-2-1, II et IV, texte devenus depuis l’ordonnance du 14 mars 2016 les art. R. 212-1-3° C. consom., R. 212-4 C. consom. et R. 212-5 C. consom. (extension aux non-professionnels).

Responsabilité : surveillance de l’accès au coffre. Dans un contrat de location de coffre-fort, il faut distinguer l'obligation de sécurité concernant le coffre lui-même et son contenu, qui est une obligation de résultat, et l'obligation de surveillance qui contraint la banque à contrôler l'accès au compartiment de coffre-fort, qui, depuis l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 9 février 2016 (pourvoi n° 14-23006), est une obligation de moyen renforcée ou de résultat atténué, dans la mesure où banque qui met un coffre-fort à la disposition d'un client est tenue d'une obligation de surveillance qui lui impose d'établir qu'elle a accompli toutes les diligences utiles pour en contrôler l'accès par un tiers, fût-il muni d'une clé. CA Versailles (16e ch.), 9 juillet 2020 : RG n° 19/01179 ; Cerclab n° 8515, sur appel de TGI Versailles, 29 janvier 2019 : RG n° 16/10086 : Dnd. § L'obligation de surveillance est une obligation essentielle du contrat, et c'est sur le banquier que pèse la preuve des diligences qu'il a accomplies pour s'acquitter de cette obligation ; il appartient donc à la banque, en vertu de l'obligation qui est la sienne de réserver l'accès au coffre à son titulaire et/ou à une personne habilitée, de justifier que seules les personnes autorisées ont pu avoir accès au coffre, que ce soit par la tenue d'un registre ou toute autre procédure lui permettant de s'aménager des moyens de preuve à sa convenance et peu important que l'obligation légale de tenir un tel registre ait été abrogée. CA Versailles (16e ch.), 9 juillet 2020 : préc. ; Cerclab n° 8515 (preuve non rapportée en l’espèce).

Responsabilité en cas de vol : principe. L’agence de la banque ayant fait l'objet d'un vol en réunion avec effraction au cours duquel, parmi d'autres, le coffre-fort loué par la cliente a été forcé, c'est à bon droit que le tribunal a retenu le principe de la responsabilité contractuelle de la banque en sa qualité de loueur de coffre-fort. CA Paris (pôle 5 ch. 6), 21 avril 2017 : RG n° 15/17741 ; Cerclab n° 6879 ; Juris-Data n° 2017-007472, sur appel de TGI Paris, 10 juillet 2015 : RG n° 14/13616 ; Dnd.

Évaluation du préjudice et preuve du contenu du coffre. La liberté de la preuve du contenu du coffre ne signifie pas que la simple déclaration du titulaire du contrat de coffre-fort suffit à établir le contenu dérobé d'un coffre et il lui appartient d'apporter des présomptions graves, précises et concordantes, y compris par témoignage, permettant de convaincre. CA Paris (pôle 5 ch. 6), 21 avril 2017 : RG n° 15/17741 ; Cerclab n° 6879 ; Juris-Data n° 2017-007472 (arrêt estimant qu’en l’espèce la preuve de la présence de lingots d’or n’est pas établie, ce qui rend inutile la discussion sur le caractère abusif de la clause limitative de responsabilité), confirmant TGI Paris, 10 juillet 2015 : RG n° 14/13616 ; Dnd.

N’est pas abusive, en application de l’art. R. 212-1-6° C. consom., la clause qui stipule que « la réparation par la banque sera subordonnée à la production de tous justificatifs utiles quant à la présence, la consistance et la valeur des objets disparus ou détériorés et, le cas échéant, la preuve que la banque n'a pas apporté toute la diligence promise pour assurer la sauvegarde du compartiment », dès lors qu’elle concerne l'indemnisation de la perte du contenu du coffre, qui n'est pas ici recherchée puisque l’héritier reproche à la banque un manquement de celle-ci dans son obligation de surveillance de l’accès au coffre et qu’en tout état de cause, elle ne limite aucunement le montant de l'indemnisation et n'est pas limitative de responsabilité mais détermine l'étendue des obligations contractuelles des parties sans être de nature à supprimer ou réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à son obligation, en l'occurrence de surveillance. CA Versailles (16e ch.), 9 juillet 2020 : préc. ; Cerclab n° 8515 (preuve non rapportée en l’espèce).

Si la banque a bien une obligation de résultat, la clause limitative de responsabilité étant à juste titre écartée, ceci ne délie pour autant pas les demandeurs des règles ordinaires de la preuve, à savoir la double preuve que les objets détruits ou détériorés se trouvaient effectivement dans le coffre et ce dès la location ou peu après, et que leur état de dégradation lors de leur retrait soit en lien certain avec son dépôt dans le coffre et qu'il n'ait pas préexisté, quand bien même la garantie de secret sur le contenu du coffre et l'obligation du banquier de la respecter rendraient plus complexe son administration. CA Poitiers (2e ch. civ.), 6 février 2018 : RG n° 16/03860 ; arrêt n° 88 ; Cerclab n° 7470 (mise à disposition de coffre fort ; « si la banque a bien une obligation de résultat, la clause limitative de responsabilité étant à juste titre écartée… »), sur appel de TGI La Rochelle, 18 octobre 2016 : Dnd.

Clause exonératoire ou limitative de responsabilité. Depuis le décret du 18 mars 2009, les clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité du professionnel sont interdites par l’ancien art. R. 132-1-6° C. consom., transféré par l’ordonnance du 14 mars 2016 à l’art. 212-1-6° C. consom., sauf pour l’extension aux non-professionnels prévue à l’art. R. 212-5 C. consom. § V. implicitement, sans référence au texte : CA Poitiers (2e ch. civ.), 6 février 2018 : RG n° 16/03860 ; arrêt n° 88 ; Cerclab n° 7470 (mise à disposition de coffre fort ; « si la banque a bien une obligation de résultat, la clause limitative de responsabilité étant à juste titre écartée… »), sur appel de TGI La Rochelle, 18 octobre 2016 : Dnd.

* Clauses applicables en cas d’effraction. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet d'exonérer le professionnel de toute responsabilité en cas d'effraction du coffre loué. Recomm. 87-01/4° : Cerlab n° 2179 (considérant n° 6 : le professionnel peut s’exonérer par la force majeure). § … Ou de celles qui ont pour objet ou pour effet de limiter le montant de la réparation du préjudice subi en cas d'effraction sans offrir au consommateur la possibilité de couvrir pleinement ce risque par une majoration de la redevance contractuelle. Recomm. 87-01/5° : Cerlab n° 2179 (considérant n° 7 : recommandation visant aussi les limitations indirectes par l’interdiction du dépôt de certains objets).

* Clauses applicables en cas de faute lourde. La Commission recommande l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de limiter la réparation due au consommateur si le sinistre est dû à une faute lourde du loueur. Recomm. 87-01/6° : Cerlab n° 2179 (considérant n° 6 : éviction abusive de l'application des règles de droit commun).

* Clause écartant certains préjudices. Est abusive la clause d’un contrat de location de coffre-fort par laquelle la banque exclut toute réparation du préjudice moral, alors qu'il est certain qu'un objet déposé dans un coffre peut avoir une valeur matérielle négligeable et une valeur affective importante. TI Saint-Étienne, 19 mars 1996 : RG n° 2150/94 ; Cerclab n° 132 (loi du 10 janvier 1978), après avis de la Commission des clauses abusives jugeant également la clause abusive dès lors qu’aucune option n’est offerte au consommateur. CCA (avis), 16 juin 1995 : avis n° 95-02 ; BOCCRF 6 juillet 1996 ; Cerclab n° 3363.

* Clauses plafonnant le montant des objets déposés. Rappr. pour l’hypothèse un contrat de location de coffre-fort stipulant que le locataire du compartiment de coffre s'interdit de déposer et de conserver dans ce compartiment des biens et objets dont la valeur globale dépasserait le montant de l'option choisie, en l'espèce la somme de 40.000 euros, et qu'en cas de sinistre prouvé notamment par effraction, l'indemnisation ne saurait être supérieure au montant de l'option choisie. CA Paris (pôle 5 ch. 6), 21 avril 2017 : RG n° 15/17741 ; Cerclab n° 6879 ; Juris-Data n° 2017-007472 (arrêt estimant qu’en l’espèce la preuve de la présence de lingots d’or n’est pas établie, ce qui rend inutile la discussion sur le caractère abusif de la clause limitative de responsabilité), confirmant TGI Paris, 10 juillet 2015 : RG n° 14/13616 ; Dnd. § N.B. La stipulation ne semble pas contraire à l’art. R. 212-1-6° C. consom. dès lors qu’elle délimite clairement l’objet principal de l’obligation du professionnel et que son effet limitatif présuppose le non-respect par le consommateur de ses obligations.

Voies d’exécution. La Commission recommande l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de conférer au professionnel un « privilège » lui permettant, en cas de non-paiement du loyer, de faire ouvrir le coffre et de procéder à la vente de son contenu sans utiliser les voies d'exécution prévues par la législation et admises par la jurisprudence. Recomm. 87-01/7° : Cerlab n° 2179 (considérant n° 10 : il apparaît abusif qu'un professionnel puisse se faire ainsi justice sans respecter des procédures d'exécution prévues par la loi, en invoquant un privilège qui n'existe pas ; protection suffisamment assurée, en cas de disparition de fait du locataire, par la désignation d'un administrateur judiciaire).