CASS. CIV. 3e, 9 février 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6757
CASS. CIV. 3e, 9 février 2017 : pourvoi n° 15-28691 ; arrêt n° 183
Publication : Legifrance ; Bull. civ.
Extrait : « Mais attendu qu’ayant constaté que la clause d’indexation disposait que l’indice à prendre en considération serait le dernier indice publié au 1er janvier de chaque année, l’indice de référence étant le dernier connu au 1er juillet 1996, et relevé que la SCI avait, lors de la première révision le 1er janvier 1998, pris en compte l’indice publié à cette date, soit celui du 2ème trimestre 1997, et l’avait rapporté à celui connu au 12 juillet 1996, soit celui du 1er trimestre 1996, la cour d’appel, qui a constaté une distorsion temporelle entre l’indice de base fixe et l’indice multiplicateur, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 9 FÉVRIER 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 15-28691. Arrêt n° 183.
DEMANDEUR à la cassation : SCI Avicenne
DÉFENDEUR à la cassation : Société Groupe Flo
M. Chauvin (président), président. SCP Bénabent et Jéhannin, SCP de Nervo et Poupet, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 20 octobre 2015), rendu sur renvoi après cassation (Civ. 3e, 3 décembre 2014, pourvoi n° 13-25034), que, par acte du 21 octobre 1996, l’établissement d’aménagement de la ville nouvelle de Cergy, aux droits duquel vient la SCI Avicenne (la SCI), a donné à bail à la société Groupe Flo (la société Flo) un local commercial ; que la SCI a délivré le 7 mai 2010 à la société Flo un commandement de payer les loyers visant la clause résolutoire ; que la société Flo l’a assignée aux fins de voir réputée non écrite la clause d’indexation du bail, demandant en outre la nullité du commandement et la restitution des sommes versées au titre de l’indexation ;
Sur le premier moyen :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la SCI fait grief à l’arrêt de déclarer non écrite la clause d’indexation, alors, selon le moyen :
1°/ que, dans la note en délibéré qui a été déposée à la demande de la cour, la société Avicenne a fait valoir que le renouvellement du bail n’était pas définitif si bien que la société Flo n’avait aucun intérêt né et actuel pour se prévaloir de l’irrégularité de la clause d’indexation ; que la cour d’appel qui n’a pas répondu à ce moyen alors qu’elle avait demandé aux parties de s’expliquer sur la faculté qu’elle avait d’apprécier la clause litigieuse au regard du renouvellement du bail alors que le loyer n’avait pas été fixé définitivement et que, d’autre part, les parties conservaient un droit d’option en application de l’article L. 145-57 du code de commerce, a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que ce n’est que lorsque l’application d’un indice fixe conduit lors des indexations successives à une distorsion entre l’intervalle de variation indiciaire et la durée s’écoulant entre deux révisions qu’une clause d’indexation prenant pour référence un indice fixe doit être annulée ; que rien n’interdit aux parties de fixer le loyer à la date de la signature du bail et de prévoir une clause de révision mentionnant l’indice de référence connu à la date de la signature du bail dès lors qu’il n’y a pas de distorsion entre la date de signature et la date d’indexation d’une part et la période indiciaire d’autre part ; qu’il est constant que le bail a été signé le 21 octobre 1996 et que l’indice de référence était celui connu à cette date soit celui de juillet 1996 ; que la cour d’appel qui a retenu que la première révision du loyer était intervenue le 1er janvier 1998 sur la base de l’indice du 2ème trimestre 1997 soit celui de juillet 1997 et que cet indice avait été rapporté à celui connu au 12 juillet 1996, 1038 si bien que le loyer avait été réévalué sur la base de l’évolution depuis au minimum 12 mois alors qu’il n’était dû que depuis 7 mois ; qu’en se prononçant de la sorte alors qu’il est constant que les parties avaient fixé le montant du loyer à la date de signature du bail si bien que la réévaluation sur la base de 12 mois pour une durée de bail de 15 mois était licite, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil et l’article L. 112-1 du code monétaire et financier ;
3°/ que les juges du fond ne peuvent se prononcer par pure affirmation sans viser les pièces sur lesquelles ils se fondent ; que la cour d’appel qui a retenu que, lors de la première révision, la société Avicenne avait pris en compte l’indice du 2ème trimestre 1997 1060 et l’avait rapportée à celui connu le 12 juillet 1996 1038, alors même qu’à cette date il est constant que la société Avicenne n’était pas propriétaire des locaux et qu’aucun document ne vient justifier qu’une telle indexation a effectivement eu lieu à cette période selon cet indice, la cour d’appel, qui s’est prononcée par voie d’affirmation, a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
4°/ qu’en cas de renouvellement du bail commercial et de fixation par le juge d’un nouveau loyer, l’indice de référence du nouveau bail ne peut plus être celui du bail initial, qui n’a plus aucun rapport avec le nouveau loyer ; que dans les conclusions d’appel de la société Avicenne, il a été indiqué que, lorsque du fait d’une disposition légale, la date du nouveau bail et le loyer se trouvent modifiés, l’indice de base de la première révision du nouveau bail doit être celui de l’année -1, si bien qu’en l’espèce s’agissant d’un bail renouvelé, il n’y avait aucune distorsion entre la période indiciaire et la durée entre deux révisions ; que la cour d’appel, qui a retenu qu’il existait une distorsion compte tenu de la date de prise d’effet du bail initial entre la période d’indexation et la durée du bail dès la première indexation, mais qui ne s’est pas expliquée sur l’incidence du renouvellement du bail, a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L. 112-1 du code monétaire et financier ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu qu’ayant constaté que la clause d’indexation disposait que l’indice à prendre en considération serait le dernier indice publié au 1er janvier de chaque année, l’indice de référence étant le dernier connu au 1er juillet 1996, et relevé que la SCI avait, lors de la première révision le 1er janvier 1998, pris en compte l’indice publié à cette date, soit celui du 2ème trimestre 1997, et l’avait rapporté à celui connu au 12 juillet 1996, soit celui du 1er trimestre 1996, la cour d’appel, qui a constaté une distorsion temporelle entre l’indice de base fixe et l’indice multiplicateur, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la SCI fait grief à l’arrêt de la condamner à payer à la société Flo une certaine somme au titre des loyers trop payés des 3ème et 4ème trimestres 2011 et du 1er trimestre 2012, outre les intérêts légaux à compter du 11 mars 2013, alors, selon le moyen, que les juges ne peuvent se borner à affirmer qu’une demande est justifiée au regard des seules allégations d’une partie ; que dans ses conclusions d’appel, la SCI a fait valoir que l’indexation de l’année 2006 n’était pas de 6.086,21 euros mais de 740,01 euros, elle a visé les pièces 11 et 12 de la société Flo ; que la cour d’appel, qui s’est bornée à énoncer que la société Flo justifiait avoir indûment payé au titre de l’indexation une somme de 6.086,21 euros en 2006, sans préciser sur quels documents elle fondait cette affirmation, a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu qu’ayant apprécié la valeur et la portée des éléments de preuve produits, la cour d’appel, qui a relevé, par motifs propres et adoptés, que la SCI ne contestait pas les calculs portant sur la détermination du différentiel de loyer pour l’année 2006, se bornant à invoquer la prescription de la demande, a souverainement retenu que la société Flo justifiait avoir indûment payé au titre de l’indexation une somme de 6.086,21 euros hors taxes en 2006 ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI Avicenne aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Avicenne et la condamne à payer à la société Groupe Flo la somme de 3.000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille dix-sept.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour la société Avicenne
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré non écrite la clause d’indexation du loyer stipulée dans le bail commercial du 21 octobre 1996 et d’avoir, en conséquence, condamné la SCI Avicenne à payer à la SA Groupe Flo le montant des loyers trop payés au titre de l’indexation
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Aux motifs qu’aux termes de l’article L. 112-1 du code monétaire et financier, « est réputée non écrite toute clause d’un contrat à exécution successive et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d’une période de variation de l’indice postérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision » ; que les clauses d’indexation se référant à un indice de base fixe ne contreviennent pas en tant que telles, à cette disposition ; qu’il est nécessaire d’examiner si en l’espèce, il y eu en application de la clause querellée une distorsion effective entre l’intervalle de variation indiciaire et la durée s’écoulant entre deux révisions ; que la première révision est intervenue le 1er janvier 1998 ; que la société Avicenne a pris en compte l’indice du 2ème trimestre 1997, soit 1060 et l’a rapporté à celui connu le 12 juillet 1038 ; que le bail n’a pris effet que le 21 mai 1997 ; que le loyer est dû, sous réserve de la franchise, à compter de cette date ; qu’ainsi le loyer a été réévalué sur la base de l’évolution depuis au minimum douze mois de l’indice alors qu’il n’était dû que depuis 7 mois ; que la période de variation de l’indice a donc été, du fait de la clause supérieure à la durée s’écoulant entre la fixation du loyer et sa révision ; que la clause entraîne en conséquence, compte tenu de la date de prise d’effet du bail, dès la première indexation, une distorsion effective prohibée par l’article précité, qu’en application de cet article, elle est donc réputée non écrite ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1° Alors que, dans la note en délibéré qui a été déposée à la demande de la Cour, l’exposante a fait valoir que le renouvellement du bail n’était pas définitif si bien que le Groupe Flo n’avait aucun intérêt né et actuel pour se prévaloir de l’irrégularité de la clause d’indexation ; que la cour d’appel qui n’a pas répondu à ce moyen alors qu’elle avait demandé elle-même aux parties de s’expliquer sur la faculté qu’elle avait d’apprécier la clause litigieuse au regard du renouvellement du bail alors que le loyer n’avait pas été fixé définitivement et que d’autre part les parties conservaient un droit d’option en application de l’article L. 145-57 du code de commerce, a violé l’article 455 du code de procédure civile
2° Alors que ce n’est que lorsque l’application d’un indice fixe conduit lors des indexations successives à une distorsion entre l’intervalle de variation indiciaire et la durée s’écoulant entre deux révisions qu’une clause d’indexation prenant pour référence un indice fixe doit être annulée ; que rien n’interdit aux parties de fixer le loyer à la date de la signature du bail et de prévoir une clause de révision mentionnant l’indice de référence connu à la date de la signature du bail dès lors qu’il n’y a pas de distorsion entre la date de signature et la date d’indexation d’une part et la période indiciaire d’autre part ; qu’il est constant que le bail a été signé le 21 octobre 1996 et que l’indice de référence était celui connu à cette date soit celui de juillet 1996 ; que la cour d’appel qui a retenu que la première révision du loyer était intervenue le 1er janvier 1998 sur la base de l’indice du 2ème trimestre 1997 soit celui de juillet 1997 et que cet indice avait été rapporté à celui connu au 12 juillet 1996, 1038 si bien que le loyer avait été réévalué sur la base de l’évolution depuis au minimum 12 mois alors qu’il n’était dû que depuis 7 mois ; qu’en se prononçant de la sorte alors qu’il est constant que les parties avaient fixé le montant du loyer à la date de signature du bail si bien que la réévaluation sur la base de 12 mois pour une durée de bail de 15 mois était licite, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil et l’article L 112-1 du code monétaire et financier
3° Alors que les juges du fond ne peuvent se prononcer par pure affirmation sans viser les pièces sur lesquelles ils se fondent ; que la cour d’appel qui a retenu que, lors de la première révision, la société Avicenne avait pris en compte l’indice du 2ème trimestre 1997 1060 et l’avait rapportée à celui connu le 12 juillet 1996 1038, alors même qu’à cette date il est constant que la société Avicenne n’était pas propriétaire des locaux et qu’aucun document ne vient justifier qu’une telle indexation a effectivement eu lieu à cette période selon cet indice, la cour d’appel, qui s’est prononcée par voie d’affirmation, a violé l’article 455 du code de procédure civile
4° Alors que de plus en cas de renouvellement du bail commercial et de fixation par le juge d’un nouveau loyer, l’indice de référence du nouveau bail ne peut plus être celui du bail initial, qui n’a plus aucun rapport avec le nouveau loyer ; que dans les conclusions d’appel de la société Avicenne, il a été indiqué que, lorsque du fait d’une disposition légale la date du nouveau bail et le loyer se trouvent modifiés, l’indice de base de la première révision du nouveau bail doit être celui de l’année -1, si bien qu’en l’espèce s’agissant d’un bail renouvelé, il n’y avait aucune distorsion entre la période indiciaire et la durée entre deux révisions ; que la cour d’appel, qui a retenu qu’il existait une distorsion compte tenu de la date de prise d’effet du bail initial entre la période d’indexation et la durée du bail dès la première indexation, mais qui ne s’est pas expliquée sur l’incidence du renouvellement du bail, a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L 112-1 du code monétaire et financier.
SECOND MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir condamné la SCI Avicenne à payer à la SA Groupe Flo la somme de 17.779,97 € correspondant aux loyers trop payés des 3 et 4ème trimestres 2011 et 1er trimestre 2012 outre les intérêts légaux à compter du 11 mars 2013
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Aux motifs que la société Groupe Flo a réglé la somme de 68.332,21 € correspondant aux sommes réclamées et au coût de l’acte ; qu’elle a droit à restitution de cette somme majorée des intérêts légaux à compter du 4 juin 2010, date de son opposition ; qu’elle s’est acquittée en outre de la somme de 40.994,60 € au titre de cette indexation jusqu’au 1er trimestre 2012 ; qu’elle a droit à son remboursement ; que le jugement qui a condamné la société Avicenne à payer la somme de 23.214,63 € outre intérêts légaux à compter du 22 juin 2011 au titre des loyers trop payés arrêtés au 2ème trimestre 2011 sera donc confirmé de ce chef et complété pour le surplus ; que ce surplus portera intérêts à compter du 11 mars 2013, date des conclusions de la société Groupe Flo sollicitant son paiement ; qu’elle justifie avoir payé indûment au titre de cette indexation la somme de 6.086, 21 HT euros en 2006 ; qu’il lui sera alloué de ce chef la somme de 7.279, 91 € outre les intérêts légaux à compter du 21 juillet 2010 date de l’assignation ; que le jugement sera donc confirmé dans son intégralité sauf à ajouter les loyers trop payés des 3ème et 4ème trimestres 2011 et 1er trimestre 2012
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Alors que les juges ne peuvent se borner à affirmer qu’une demande est justifiée au regard des seules allégations d’une partie ; que dans ses conclusions d’appel, la SCI Avicenne a fait valoir que l’indexation de l’année 2006 n’était pas de 6.086,21 € mais de 740,01 €, elle a visé les pièces 11 et 12 de la société Groupe Flo ; que la cour d’appel, qui s’est bornée à énoncer que la société Groupe Flo justifiait avoir indûment payé au titre de l’indexation une somme de 6.086,21 € en 2006, sans préciser sur quels documents elle fondait cette affirmation, a violé l’article 455 du code de procédure civile.