CA CHAMBÉRY (2e ch.), 9 mars 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6768
CA CHAMBÉRY (2e ch.), 9 mars 2017 : RG n° 16/01037
Publication : Jurica
Extrait : « Les époux X. et Y. font valoir le caractère abusif de cette clause mais sans en tirer la moindre conséquence quant à leurs prétentions, au surplus ils invoquent le caractère abusif de cette indemnité cumulée avec le paiement des loyers échus impayés et la restitution du véhicule, or en l'espèce ils ont conservé le véhicule. »
COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 9 MARS 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/01037. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de CHAMBERY en date du 15 mars 2016, RG 11-15-000528.
Appelante :
SA DIAC
dont le siège social est sis [adresse] prise en la personne de son représentant légal, assistée de Maître Guillaume P., avocat au barreau de CHAMBERY
Intimés :
M. X.
né le [date] à [ville], demeurant [adresse]
Mme Y. épouse X.
née le [date] à [ville], demeurant [adresse]
assistés de la SCP P. ET C., avocat au barreau de CHAMBERY
COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 17 janvier 2017 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffier,
Et lors du délibéré, par : - Madame Evelyne THOMASSIN, Conseiller faisant fonction de Président, à ces fins désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président - Monsieur Franck MADINIER, Conseiller, qui a procédé au rapport - Monsieur Gilles BALAY, Conseiller.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte sous seing privé du 11 décembre 2013, les époux X. et Y. ont souscrit auprès de la DIAC un contrat de location de 49 mois, moyennant un loyer de 295,66 euros, avec option d'achat, portant sur un véhicule automobile Nissan d'une valeur de 19.500 euros.
Se plaignant du non-paiement des loyers à compter de février 2015, la DIAC, par acte d'huissier du 4 août 2015, a fait assigner les époux X. et Y. devant le tribunal d'instance de Chambéry poursuivant leur condamnation à lui payer les sommes de 15.500,19 euros au principal et de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les époux X. et Y. ont sollicité des délais de paiement.
Par jugement du 15 mars 2016, le tribunal a condamné les époux X. et Y. à payer à la DIAC la somme de 864,19 euros, correspondant au montant des loyers impayés et à la clause pénale réduite à 1 euro.
La DIAC a fait appel de ce jugement par déclaration au greffe de la cour du 12 mai 2016.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 10 novembre 2016, la DIAC demande à la cour de condamner, solidairement, les époux X. et Y. à lui restituer le véhicule et à lui payer la somme principale actualisée de 15 .627,66 euros et celle de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La DIAC soutient que le raisonnement du tribunal reviendrait à faire payer le véhicule aux époux X. et Y. 5 026,31 euros, alors qu'elle l'a acquis au prix de 19.500 euros et que ces derniers ne contestaient même pas le montant de la dette.
L'indemnité de résiliation réclamée aux époux X. et Y. ne constituerait pas une clause pénale, mais aurait un caractère légal et son calcul résulterait de la stricte application des dispositions du code de la consommation.
Le véhicule n'ayant pas été récupéré, sa valeur résiduelle n'a pu être déduite de la créance, les époux X. et Y. ayant fait opposition à l'ordonnance aux fins d'appréhension.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 septembre 2016, les époux X. et Y. demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'indemnité de résiliation constitue une clause pénale manifestement excessive,
- constater que la DIAC a abandonné sa demande de restitution du véhicule,
- dire que la somme due à la DIAC s'élève à 5.617,54 euros provisoirement arrêtée au 14 septembre 2016,
- débouter la DIAC de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la DIAC à leur payer la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
L'article 2.2 des conditions générales du contrat stipulant, en cas de défaillance du locataire, la restitution du bien, le paiement des loyers échus impayés et, à titre de sanction de l'inexécution du contrat, une indemnité de résiliation constituerait une clause abusive.
La DIAC ayant renoncé, en première instance, à demander la restitution du véhicule, ne serait plus recevable à le faire en appel.
L'indemnité de résiliation stipulée constituerait bien une clause pénale, ainsi que le prévoient expressément les dispositions de l'article L. 311-25 du code de la consommation et serait, en l'espèce, manifestement excessive, dans la mesure où la valeur résiduelle du véhicule de 13 065 euros, le montant des loyers payés de 4.434,90 euros et le montant de l'indemnité de résiliation réclamée à hauteur de 14.388,80 représenteraient un total de 31.888,70 euros, alors que la DIAC a acquis le véhicule au prix de 19.500 euros.
Ils fixent le montant de leur dette à la somme de 5.617,54 euros, soit 19 loyers à 295,66 euros, arrêtée au 14 septembre 2016, outre les loyers échus postérieurement à cette date.
La clôture de la procédure est intervenue le 2 janvier 2017.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la résiliation du contrat :
Les conditions générales du contrat contiennent en leur article 2 une clause de résiliation de plein droit du contrat en cas de non-paiement des loyers, acquise après l'envoi d'une mise en demeure restée infructueuse.
Le juge d'instance n'a pas constaté la résiliation du contrat et les parties ne le demandent pas en cause d'appel, la DIAC soulignant, aux termes des motifs de ses conclusions, qu'elle est acquise depuis février 2015, date à partir de laquelle les époux X. et Y. ont cessé le règlement des loyers, ces derniers ne le contestant pas puisque les seuls points en débat entre les parties portent sur la restitution du véhicule et le montant des sommes restant dues, essentiellement au titre de l'indemnité de résiliation.
Sur la restitution du véhicule :
Les époux X. et Y. s'opposent à cette restitution faisant valoir que la DIAC y a renoncé en première instance, or il le jugement déféré retient effectivement que la DIAC n'a pas repris cette demande lors de l'audience à laquelle le dossier a été retenu et mis en délibéré.
La demande de restitution devant la cour est donc nouvelle, au sens des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile.
La DIAC n'oppose d'ailleurs aucun argument à l'encontre de ce moyen.
Sa demande, de ce chef, sera en conséquence déclarée irrecevable.
Sur l'indemnité de résiliation :
L'article 2 des conditions générales du contrat relatif à la défaillance du locataire dans le cadre de ses obligations stipule qu'« en cas de défaillance de votre part (non-paiement de loyer ou non-respect d'une obligation essentielle du contrat), vous encourrez la déchéance du terme. Celle-ci sera acquise après l'envoi d'une mise en demeure restée infructueuse. Le bailleur pourra alors exiger la restitution du véhicule et le paiement des loyers échus non réglés ».
S'agissant de l'indemnité de résiliation, l'article 2-2 des conditions générales stipule qu'en cas de défaillance du locataire, le bailleur pourra exiger du locataire défaillant, outre la restitution du bien et le paiement des loyers échus impayées, « une indemnité égale à la différence entre, d'une part, la valeur résiduelle HT du bien stipulé au contrat, augmentée de la valeur actualisée, à la date de résiliation du contrat, de la somme HT des loyers non encore échus et, d'autre part, la valeur vénale HT du bien restitué. »
Les époux X. et Y. font valoir le caractère abusif de cette clause mais sans en tirer la moindre conséquence quant à leurs prétentions, au surplus ils invoquent le caractère abusif de cette indemnité cumulée avec le paiement des loyers échus impayés et la restitution du véhicule, or en l'espèce ils ont conservé le véhicule.
Ils soutiennent, en revanche, que l'indemnité, ainsi désignée par les conditions générales, constitue, en application des dispositions de l'article 1152 du Code civil, une clause pénale que le juge peut réduire ou augmenter d'office si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Afin de procéder à cette appréciation, il convient de prendre en compte que la DIAC a initialement fait l'acquisition du véhicule pour un prix de 19.500 euros en décembre 2013, que les époux X. et Y. ont conservé le véhicule et qu'ils ont payé les loyers échus jusqu'en février 2015 pour un montant 4.162,12 euros (ces derniers invoquent des paiements pour un total de 4.434,90 euros mais n'en justifient pas alors que cette preuve leur incombe par application des dispositions de l'article 1353 du Code civil).
La DIAC poursuit le paiement de la somme de 15.627,66 euros se décomposant en :
- loyers impayés 957,79 euros
- indemnité de résiliation 14.388,80 euros
- intérêts de retard 174,33 euros
- frais de justice 106,74 euros
De cette somme doivent être déduits les frais de justice portés pour un montant de 106,74 euros qui ne constitue pas une créance née du contrat, ce qui ramène le montant de la somme sollicitée à 15.520,92 euros (15.627,66 - 106,74).
Or, cette somme cumulée avec le montant des loyers payés représente un total de 19.683,04 euros (15.520,92 + 4.162,12) perçu par la DIAC qui acquis le véhicule pour 19.500 euros, véhicule que les époux X. et Y. ont conservé.
Réduire le montant de l'indemnité de résiliation reviendrait à ruiner totalement l'économie du contrat, la DIAC percevant moins que le montant de son investissement initial et les époux X. et Y. ayant loué puis conservé un véhicule pour un montant moindre que sa valeur d'acquisition initiale.
Les époux X. et Y. seront dès lors condamnés à payer à la DIAC la somme de 15.520,92 euros.
Sur les demandes annexes :
Les époux X. et Y. ne sollicitent plus de délais de paiement.
Ils seront condamnés à payer à la DIAC la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils supporteront les dépens exposés en première instance et en appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la Loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclare irrecevable la demande de restitution du véhicule formée pour la première fois en appel.
Condamne solidairement les époux X. et Y. à payer à la DIAC la somme de 15.520,92 euros outre intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2016.
Condamne in solidum les époux X. et Y. à payer à la DIAC la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne in solidum les époux X. et Y. à supporter les dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de Maître Guillaume P., avocat en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Ainsi prononcé publiquement le 9 mars 2017 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Sylvie DURAND, Greffier.