CA VERSAILLES (16e ch.), 30 mars 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6799
CA VERSAILLES (16e ch.), 30 mars 2017 : RG n° 16/06027
Publication : Jurica
Extrait : « En application de l'ancien article 1304 du code civil, applicable à l'espèce, le délai de prescription d'une action en nullité d'une convention est de cinq ans.
Le point de départ de ce délai de prescription, s'il est fixé à la date de la convention stipulant le taux effectif global et le taux d'intérêt conventionnel lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, est reporté, si tel n'est pas le cas, à la date de la révélation de l'erreur à l'emprunteur (Cass. 1ère civ., 11 juin 2009, n° 08-11755 ; Cass. 1ère civ., du 7 févr. 2012, n° 12-24115).
En l'espèce, le prêt de 40.000 euros a été conclu le 27 février 2007 et celui de 210.000 euros le 28 février 2007. Ces deux actes font état de façon claire et non équivoque du taux conventionnel applicable et du taux effectif global détaillant l'indice de référence, la détermination du taux d'intérêt variable et la révision du taux variable. En l'espèce, les appelants affirment eux-mêmes, dans l'assignation délivrée en cause d'appel (cf. page 10), que le seul examen des clauses contractuelles afférentes au taux d'intérêt conventionnel permet de déceler l'erreur qui vicie, selon eux, ces conventions à savoir le calcul du taux d'intérêt conventionnel sur une base de 360 jours, étant relevé qu'en outre, Mme Y., de par son emploi à la banque HSBC et sa qualification, est une professionnelle en matière bancaire manifestement en mesure d'apprécier, lors de la conclusion d'un emprunt, la portée et l'exactitude d'un taux d'intérêt conventionnel.
Il s'en déduit qu'en l'espèce, le point de départ de la prescription quinquennale de l'action en annulation de la clause stipulant le taux d'intérêt conventionnel et substitution par le taux légal se situe à la date de signature des deux contrats de prêt et l'expiration du délai de prescription respectivement les 28 février et 29 février 2012. Dès lors est prescrite l'action en nullité des clauses de stipulation des intérêts au taux conventionnel pour avoir été formée tardivement par les emprunteurs, par demande reconventionnelle soutenue lors de l'instance engagée le 5 novembre 2015 par la banque.
Il s'ensuit qu'est devenue sans objet, comme l'a relevé à bon droit le premier juge, l'exception de nullité de la déchéance du terme en ce qu'elle est fondée sur la substitution du taux légal au taux conventionnel, qui n'est pas accordée en l'espèce du fait de la prescription. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
SEIZIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 30 MARS 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/06027. Code nac : 78A. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 7 juillet 2016 par le Juge de l'exécution du tribunal de grande instance de PONTOISE : R.G. n° 15/00277.
LE TRENTE MARS DEUX MILLE DIX SEPT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], de nationalité Portugaise, Représentant : Maître Catherine C. de la SELARL CABINET DE L'ORANGERIE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.404 - N° du dossier 160193, Représentant : Maître Aline P., Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 550
Madame Y.
née le [date] à [ville], de nationalité Portugaise, Représentant : Maître Catherine C. de la SELARL CABINET DE L'ORANGERIE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.404 - N° du dossier 160193, Représentant : Maître Aline P., Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 550
INTIMÉE :
SA CAIXA GERAL DE DEPOSITOS
société anonyme de droit portugais au capital de 2.450.000.000 euros, dont le siège est à LISBONNE (Portugal) [adresse], avec succursale [adresse] 16ème, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 306 927 393, agissant poursuites et diligences de son Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège. N° SIRET : XX. Représentant : Maître Chantal A.-F. de la SCP SCP INTERBARREAUX R. ET ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : T.9 - N° du dossier 1524492, Représentant : Maître Nathalie S. R., Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 1175
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 janvier 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Odette-Luce BOUVIER, Président chargé du rapport et Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Odette-Luce BOUVIER, Président, Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller, Madame Ghislaine SIXDENIER, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 28 février 2007, M. X. et Mme Y. ont acquis un terrain à bâtir et le bénéfice d'un permis de construire d'un pavillon à usage d'habitation situé [adresse] en Parisis moyennant la somme de 210.000 euros.
M. X. et Mme Y. ont alors souscrit deux prêts auprès de la société anonyme Caixa Geral de Depositos :
* un premier prêt de 210.000 euros sur une durée de 312 mois à un TEG annuel de 5,12 %,
* un second prêt de 40.000 euros sur une durée de 120 mois à un TEG annuel de 6,70 %.
Après avoir demandé des reports de paiement, acceptés par la SA Caixa Geral de Depositos, les emprunteurs auraient cessé, selon la banque, tout versement à compter du 28 août 2014 concernant le prêt de 210.000 euros et à compter du 27 septembre 2014 concernant le prêt de 40.000 euros.
Par deux courriers du 1er avril 2015, la SA Caixa Geral de Depositos les a informés qu'elle procédait à la déchéance du terme de chacun des deux prêts et qu'ils restaient devoir les sommes de 193.549,66 euros et de 20.915,63 euros, sous réserve du calcul des intérêts courus et non arrêtés, et ce en vertu des deux prêts consentis.
Le 2 septembre 2015, la SA Caixa Geral de Depositos a fait délivrer à M. X. et Mme Y. un commandement de payer valant saisie immobilière pour un montant de 214.465,29 euros, par exploit de maître T., huissier de justice à Pontoise.
Selon exploit du 5 novembre 2015, la SA Caixa Geral de Depositos a assigné M. X. et Mme Y. devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Pontoise aux fins de vente sur saisie de leur bien immobilier situé [adresse] en Parisis.
Le cahier des conditions de vente a été déposé au greffe le 9 novembre 2015.
Par jugement d'orientation rendu le 7 juillet 2016, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Pontoise a :
- fixé la créance de la SA Caixa Geral de Depositos à hauteur de 205.653,05 euros arrêtée au 1er avril 2015,
- ordonné la vente aux enchères publiques des biens et droits immobiliers situés à [...] cadastré section XX, appartenant à M. X. et Mme Y. sur la mise à prix de 170.000 euros à l'audience du jeudi 3 novembre 2016 à 14 h 00,
- désigné en qualité de séquestre M. le Bâtonnier de l'Ordre des avocats du Barreau du Val d'Oise,
- désigné maître Jean-Pierre T., huissier de justice associé à [ville P.] aux fins de faire procéder à la visite dès lieux à tout acquéreur potentiel,
- dit que ledit huissier de justice fera procéder dans les lieux par tout expert de son choix à l'établissement ou à l'actualisation si nécessaire, des diagnostics d'amiante, termites, plomb (si construction antérieure à 1948), performance énergétique, gaz, électricité, risques naturels et technologiques majeurs,
- dit que l'huissier de justice commis pourra se faire assister pour ces deux interventions, si besoin est, du commissaire de police ou de la Gendarmerie ou de deux témoins majeurs conformément à l'article L. 142-1 du code des procédures civiles d'exécution et d'un serrurier requis,
- pour le surplus rejette l'incident,
- dit que le présent jugement sera mentionné en marge de la publication du commandement en date du 2 septembre 2015 publié le 18 septembre 2015 volume 2015 YY au 4e bureau des hypothèques de Cergy-Pontoise (95),
- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente.
Le 2 août 2016, M. X. et Mme Y. ont formé appel de la décision.
A la suite de leur requête déposée le 8 août 2016, M. X. et Mme Y. ont été autorisés, par ordonnance du 11 août 2016, à assigner à jour fixe la SA Caixa Geral de Depositos devant la 16ème chambre de la cour d'appel de Versailles.
Aux termes de l'assignation délivrée le 18 août 2016, à laquelle il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. X. et Mme Y. demandent à la cour de :
- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Pontoise en toutes ses dispositions,
- les dire recevables et bien fondés en leurs demandes, fins et conclusions,
In limine litis :
- dire que les demandes de la SA Caixa Geral de Depositos sont prescrites,
- en tirer toute conséquence de droit quant à l'action de la SA Caixa Geral de Depositos,
S'il devait être dit et jugé que les demandes ne sont pas prescrites :
A titre principal :
- constater que la SA Caixa Geral de Depositos a eu recours au calcul basé sur 360 jours dans chacun des deux prêts,
- constater que la mention du TEG dans l'acte de prêt du 27 février 2008 est à la fois contradictoire et erroné,
En conséquence,
- dire et juger que la clause stipulant que le calcul de l'intérêt est basée sur une année de 360 jours dans chacun des deux prêts est une clause abusive,
- constater la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels en raison du montant erroné du taux effectif global indiqué dans l'acte de prêt du 27 février 2008,
- ordonner la déchéance des intérêts conventionnels et la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel appliqué sur l'intégralité du montant du capital emprunté,
- constater que les déchéances du terme intervenues le 1er avril 2015 ont été prononcées sur la base d'un décompte faux,
- constater qu'à la date de déchéance du terme la SA Caixa Geral de Depositos n'avait aucune créance exigible à leur égard puisqu'ils avaient en réalité opéré un « trop versé »,
En conséquence,
- déclarer nul ou à tout le moins inefficace la déchéance du terme prononcée par la SA Caixa Geral de Depositos le 1er avril 2015,
En conséquence,
- déclarer caduc le commandement de payer valant saisie délivré par le poursuivant le 2 septembre 2015, et à tout le moins déclarer nulle la présente procédure de saisie immobilière faute pour la SA Caixa Geral de Depositos de détenir et d'apporter la preuve d'une créance liquide et exigible à leur encontre,
A défaut et à titre subsidiaire :
- désigner tel expert financier qui plaira à la cour, aux frais de la SA Caixa Geral de Depositos avec mission de :
* confirmer ou d'infirmer, en tant que de besoin, le calcul du TEG réalisé par la SA Caixa Geral de Depositos,
* confirmer ou d'infirmer, en tant que de besoin, que la SA Caixa Geral de Depositos a réalisé ses calculs sur la base de l'année lombarde,
* calculer le montant des sommes réellement dues par eux à la date de la déchéance du terme en date du 5 juin 2010 compte tenu de la déchéance des intérêts et des règlements effectués par eux,
* calculer la somme restant par eux à la SA Caixa Geral de Depositos,
* dire que pour ses calculs, l'expert devra appliquer le taux légal en lieu et place du taux contractuel et que les paiements s'imputeront en priorité sur le capital,
* dire si, en cas de substitution du taux légal au taux conventionnel avec imputation par priorité sur le capital des intérêts indûment perçu par la banque, la défaillance des défendeurs était avérée et si la créance dont se prévaut la SA Caixa Geral de Depositos est certaine, liquide et exigible,
- leur donner acte à de ce qu'ils contestent pour le tout le montant de la somme de 214.465,29 euros que la SA Caixa Geral de Depositos demande au tribunal de retenir,
- réduire à de plus justes proportions les sommes dues au titre des clauses pénales, sachant qu'ils proposent que leur montant total soit évalué à la somme de 100 euros ;
A titre très subsidiaire :
- les accueillir dans leur demande de délai de grâce et leur accorder 24 mois pour se libérer des sommes,
- prendre acte de leur proposition de régler des échéances de 1.000 euros par mois, le solde de la créance à la dernière échéance,
- ordonner durant ce délai la suspension de la procédure de saisie immobilière,
A titre infiniment subsidiaire :
- autoriser la vente amiable de l'immeuble à la requête du saisi pour une mise à prix minimum de 400.000 euros net vendeur,
- dire et juger que les dépens seront employés en frais privilégiés de vente,
En tout état de cause :
- condamner la SA Caixa Geral de Depositos au paiement d'une somme de 40.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à son obligation de mise en garde,
- opérer une compensation entre les sommes qui seraient dues par eux et celles qui seraient dues par la SA Caixa Geral de Depositos,
- condamner la SA Caixa Geral de Depositos en tous les dépens et à une somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire n'y avoir lieu à l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
Au soutien de leurs prétentions, M. X. et Mme Y. font valoir notamment que :
- l'action de la banque est prescrite pour avoir été introduite après l'expiration du délai de prescription biennale courant à compter du premier impayé non régularisé, en l'espèce en novembre 2012 pour le prêt de 210.000 euros et décembre 2012 pour celui de 40.000 euros,
- que la clause stipulant les intérêts au taux conventionnel est nulle pour avoir fondé le calcul de ces intérêts sur une base erronée de 360 jours ; qu'ils sollicitent en conséquence la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel et la nullité en conséquence de l'acte de déchéance du terme ; à titre subsidiaire, qu'une expertise judiciaire s'avère nécessaire pour conforter celle faite à leur demande ;
- qu'il convient de réduire à zéro le montant des sommes dues au titre de clauses pénales manifestement excessives ;
- qu'ils sollicitent à titre subsidiaire des délais de grâce en proposant de verser la somme de 1.000 euros pendant 24 mois ;
- qu'ils demandent à être autorisés à vendre leur bien à l'amiable ;
- que la banque a manqué à son obligation de mise en égard lors de la conclusion des deux contrats au regard de leur situation professionnelle et patrimoniale.
Dans ses conclusions transmises le 24 janvier 2017, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA Caixa Geral de Depositos, intimée, demande à la cour de :
- débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes.
En conséquence
- infirmer le jugement rendu le 6 octobre 2016 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Pontoise en ce qu'il a fixé sa créance à la somme de 205.653,05 euros et rejeté l'incident pour le surplus,
Y statuant à nouveau,
- fixer sa créance à la somme de 214.465,29 euros,
- confirmer le jugement rendu le 6 octobre 2016 par le juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Pontoise en toutes ses autres dispositions,
- condamner M. X. et Mme Y. au paiement d'une somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;
Au soutien de ses demandes, la SA Caixa Geral de Depositos fait valoir notamment que :
- que l'action engagée par elle n'est pas prescrite,
- que les demandes en nullité des stipulations d'intérêt conventionnels des deux prêts présentées par les appelants sont en revanche prescrites, et en tout état de cause infondées,
- plus subsidiairement que les demandes de déchéances des intérêts conventionnels des deux prêts présentées par les appelants sont infondées,
- que les demandes de nullité ou d'inopposabilité des déchéances du terme sont tout aussi irrecevables qu'infondées,
- que le commandement de payer est parfaitement régulier ainsi que la procédure subséquente,
- qu'il n'y a lieu ni à réduction des clauses pénales des deux contrats de prêts ni à réduction de sa créance,
- que la demande de délais de paiement présentée par les appelants au regard de leurs revenus est infondée tout comme l'est celle de vente amiable du bien immobilier, la seule estimation du bien présentée datant de 2003,
- que la demande en dommages-intérêts présentée par les appelants au titre d'une responsabilité contractuelle ne relève pas de la compétence de la présente cour d'appel, qu'elle est irrecevable et en toute hypothèse infondée.
* * *
L'audience de plaidoirie a été fixée au 25 janvier 2017 et le délibéré au 30 mars suivant.
Le recours à une médiation judiciaire proposée par la cour à l'audience des plaidoiries a été rejeté par les parties.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l'existence d'une créance liquide et exigible :
Sur la prescription de la créance de la banque :
Selon l'article L 311-2 du code des procédures civiles d'exécution, « Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière dans les conditions fixées par le présent livre et par les dispositions qui ne lui sont pas contraires du livre Ier ».
L'article 322-18 du même code précise que « le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais intérêts et autres accessoires ».
Aux termes de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, la créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation.
Il est constant que l'exigence d'une créance liquide et exigible suppose que cette créance ne soit pas éteinte.
L'ancien article L. 137-2 du code de la consommation, issu de la loi n° 2008-561 du juin 2008, applicable à l'espèce, les actes litigieux ayant été conclus avant le 1er octobre 2016, date de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que « l'action des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans ».
Ces nouveaux délais commencent à courir à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, soit le 19 juin 2008, sans pouvoir excéder la durée de la loi ancienne.
La prescription biennale de l'article L. 137-2 (ancien article L. 137-2) du code de la consommation s'applique aux actions en remboursement d'un prêt immobilier consenti à un consommateur et partant, aux contrats de prêts litigieux.
Il est désormais constant qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité (Cass. 1ère civ., 11 févr. 2016, n° 14-28383 ; 11 févr. 2016, n° 14-27143 ; 11 févr. 2016, n° 14-22938 ; 11 févr. 2016, n° 14-29539).
En l'espèce, la cour relève qu'il résulte des pièces versées aux débats et notamment des deux acceptations de report des échéances de prêts signées et validées par Mme Y. et M. X. (pièces 2 et 3) qu'en réponse à la demande de report des échéances des prêts souscrits, la banque leur a accordé :
* pour le prêt de 210.000 euros, un report des échéances allant du 28 novembre 2012 au 28 avril 2014,
* pour le prêt de 40.000 euros, un report des échéances allant du 27 décembre 2012 au 27 mai 2014.
Les emprunteurs, après avoir repris les paiements aux échéances prévues mais n'ayant pas réglé l'échéance du mois d'août 2014 en ce qui concerne le premier prêt et l'échéance du mois de septembre 2014 pour le second prêt, la banque leur a notifié par lettre recommandée du 21 avril 2015 la déchéance du terme.
Dès lors, n'est pas prescrite au regard des règles fixées par l'ancien article L. 137-2 du code de la consommation l'action de la banque en paiement de sa créance, la créancière ayant fait délivrer le 2 septembre 2015 un commandement de payer valant saisie immobilière, acte interruptif d'instance, intervenu dans les deux années courant à compter des dernières échéances impayées en vertu des accords de report des échéances de prêts, soit le 28 août 2014 pour le prêt de 210.000 euros et du 27 septembre 2014 pour le prêt de 40.000 euros et non à compter de l'exercice 2012, comme l'a exactement retenu le jugement d'orientation, étant relevé qu'en tout état de cause, le point de départ de la prescription biennale de l'action en paiement du capital impayé court à compter du 21 avril 2015, date de la déchéance du terme.
Sur la prescription de la contestation des débiteurs saisis relative à la stipulation des intérêts conventionnels :
En application de l'ancien article 1304 du code civil, applicable à l'espèce, le délai de prescription d'une action en nullité d'une convention est de cinq ans.
Le point de départ de ce délai de prescription, s'il est fixé à la date de la convention stipulant le taux effectif global et le taux d'intérêt conventionnel lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur, est reporté, si tel n'est pas le cas, à la date de la révélation de l'erreur à l'emprunteur (Cass. 1ère civ., 11 juin 2009, n° 08-11755 ; Cass. 1ère civ., du 7 févr. 2012, n° 12-24115).
En l'espèce, le prêt de 40.000 euros a été conclu le 27 février 2007 et celui de 210.000 euros le 28 février 2007. Ces deux actes font état de façon claire et non équivoque du taux conventionnel applicable et du taux effectif global détaillant l'indice de référence, la détermination du taux d'intérêt variable et la révision du taux variable.
En l'espèce, les appelants affirment eux-mêmes, dans l'assignation délivrée en cause d'appel (cf. page 10), que le seul examen des clauses contractuelles afférentes au taux d'intérêt conventionnel permet de déceler l'erreur qui vicie, selon eux, ces conventions à savoir le calcul du taux d'intérêt conventionnel sur une base de 360 jours, étant relevé qu'en outre, Mme Y., de par son emploi à la banque HSBC et sa qualification, est une professionnelle en matière bancaire manifestement en mesure d'apprécier, lors de la conclusion d'un emprunt, la portée et l'exactitude d'un taux d'intérêt conventionnel.
Il s'en déduit qu'en l'espèce, le point de départ de la prescription quinquennale de l'action en annulation de la clause stipulant le taux d'intérêt conventionnel et substitution par le taux légal se situe à la date de signature des deux contrats de prêt et l'expiration du délai de prescription respectivement les 28 février et 29 février 2012.
Dès lors est prescrite l'action en nullité des clauses de stipulation des intérêts au taux conventionnel pour avoir été formée tardivement par les emprunteurs, par demande reconventionnelle soutenue lors de l'instance engagée le 5 novembre 2015 par la banque.
Il s'ensuit qu'est devenue sans objet, comme l'a relevé à bon droit le premier juge, l'exception de nullité de la déchéance du terme en ce qu'elle est fondée sur la substitution du taux légal au taux conventionnel, qui n'est pas accordée en l'espèce du fait de la prescription.
En conséquence de ces constatations et des décomptes précis et détaillés de la banque, la créance de celle-ci est certaine, liquide et exigible au sens de l'article L. 311-2 du code des procédures civiles et la demande d'expertise portant sur les taux litigieux manifestement infondée de ce fait.
Il convient, ajoutant, à la décision déférée, de débouter les appelants de leur demande d'expertise, soutenue à titre subsidiaire devant la cour.
Sur la clause pénale :
Comme l'a retenu à bon droit le jugement d'orientation, les clauses pénales d'un montant respectif de 9.172,60 euros pour le premier prêt et de 617,64 euros pour le second sont manifestement excessives et il convient, en application de l'article 1152 du code civil et au regard du préjudice effectivement subi par la banque, de les réduire à hauteur de 917 euros pour le premier prêt et de 61 euros.
Il y a lieu en conséquence de débouter, ajoutant à la décision déférée, les appelants de leur demandes et l'intimée de son appel incident.
Sur les demandes de délais de paiement et de suspension de la procédure de saisie immobilière :
Il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande de délais de paiement en cause d'appel, en application de l'ancien article 1244-1 du code civil, applicable à l'espèce, dès lors que les débiteurs saisis ont bénéficié dans un premier temps du report de paiement des échéances des prêts conclus et qu'ils ne justifient pas de leur capacité à s'acquitter d'une somme de 1.000 euros sur une durée de deux ans pour apurer leur dette.
Sur l'autorisation de vente amiable :
Les débiteurs saisis ne présentent, en cause d'appel, aucune pièce nouvelle attestant de la faisabilité d'une vente amiable de leur bien, au regard des diligences qu'ils auraient effectuées en vue de trouver un acquéreur, conformément aux exigences fixées par l'article R. 322-15 du code des procédures civiles d'exécution.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de cette demande.
Sur la mise en cause de la banque pour violation de son devoir de mise en garde et la demande de compensation de sommes :
Comme l'a retenu à bon droit le premier juge, il ne relève pas des pouvoirs du juge de l'exécution statuant en matière de saisie immobilière et partant, de la cour d'appel saisie d'un recours formé à l'encontre d'une décision rendue en la matière, de connaître d'une action en responsabilité de la banque pour manquement à ses obligations contractuelles.
Il convient en conséquence de confirmer la décision en ce qu'elle a débouté M. X. et Mme Y. de leurs demandes d'indemnisation en réparation de la violation du devoir de mise en garde et de compensation des sommes.
Au regard de ces constatations et énonciations, il y a lieu de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et, y ajoutant, de débouter les appelants du surplus de leurs demandes et l'intimée de sa demande de sommes au titre des clauses pénales.
Enfin, il n'y a pas lieu de « donner acte », de « constater » ou de « dire et juger » dès lors que de telles demandes, telles que figurant dans les écritures des parties, ne constituent pas des prétentions susceptibles d'emporter des conséquences juridiques.
Sur les demandes accessoires :
L'équité commande de ne pas faire droit à la demande des parties présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Parties perdantes pour l'essentiel, les appelants s'acquitteront des entiers dépens d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Statuant publiquement par décision contradictoire et en dernier ressort
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Rejette la demande des parties présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. X. et Mme Y. aux entiers dépens d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Odette-Luce BOUVIER, Président et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,