CA VERSAILLES (13e ch.), 28 septembre 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 7058
CA VERSAILLES (13e ch.), 28 septembre 2017 : RG n° 15/08029
Publication : Jurica
Extraits (rappel de procédure) : « Par arrêt avant dire droit du 1er juin 2017 la cour a relevé d'office le moyen tiré du défaut de pouvoir du tribunal de commerce de Nanterre et de la cour à sa suite pour connaître de la demande principale de la société Aitec fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce et réservé les autres demandes et les dépens ».
Extraits (motifs) : 1/ « Considérant que la cour n'a pas soulevé son incompétence pour connaître de cette demande principale mais rappelé qu'il n'entrait pas dans ses pouvoirs de connaître des demandes fondées sur l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce et qu'elle avait l'obligation de relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir juridictionnel pour statuer sur un tel litige ainsi que l'irrecevabilité des demandes formées devant elle à ce titre ; que tel est le cas en l'espèce, la demande principale tendant à une condamnation à des dommages-intérêts sur ce fondement ; qu'il convient donc de déclarer la demande principale irrecevable ».
2/ « Considérant que l'article 9 des conditions générales du contrat stipule que le locataire restitue les véhicules loués au lieu fixé par le loueur ; qu'il est expressément prévu que le locataire devra informer le loueur dans les 48 h. de cette restitution au moyen du document « qui lui sera fourni en temps utile » et qui devra être signé par le locataire et le fournisseur, et que la facturation des loyers se poursuivra jusqu'à la remise de ce document conjointement signé ; que les véhicules ont été restitués à la société G. conformément à la demande du loueur et ont fait l'objet de fiches descriptives datées des 11 octobre et 9 novembre 2012, mentionnant et chiffrant les réparations nécessaires ; que cependant la société Aitec bureautique ne justifie pas avoir averti la société Crédipar, loueur, de cette restitution comme le contrat lui en faisait l'obligation ; […] ; qu'elle est donc redevable des loyers dont elle demande le remboursement ; que ceux-ci sont la simple application du contrat qui s'est poursuivi dans l'attente de la complète restitution des véhicules selon les dispositions contractuelles et ne constituent pas une clause pénale manifestement excessive, le loueur n'ayant pas été avisé de la restitution des véhicules ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
TREIZIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 287 SEPTEMBRE 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/08029. Code nac : 53H. CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 octobre 2015 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE (1re ch.), R.G. n° 2014F02129.
LE VINGT HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX SEPT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTE :
SAS AITEC BUREAUTIQUE
inscrite sous le n° XXX au RCS de TOULON, Représentée par Maître Philippe R. de la SELARL R. PHILIPPE, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 172 - N° du dossier P15295 et par Maître F. LIBESSART, avocat plaidant au barreau de
INTIMÉE :
SA COMPAGNIE GÉNÉRALE DE CRÉDIT AUX PARTICULIERS - CREDIPAR
N° SIRET : YYY - RCS NANTERRE, Représentée par Maître Jack N. de la SCP R.-N. & N., avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 187 - N° du dossier 20161 et par la SELAS C. &S., avocats plaidants au barreau de PARIS
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 4 juillet 2017 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GUILLOU, conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Aude RACHOU, Présidente, Madame Hélène GUILLOU, Conseiller, Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Par contrats du 28 décembre 2006 et avenants, la société Aitec bureautique (la société Aitec) a conclu trois contrats de location financière d'une durée de 36 mois portant sur trois véhicules Peugeot, loués auprès de la société Crédipar et fournis par la société G.
Les véhicules ont été remis à la société G. les 11 octobre et 9 novembre 2012, mais la société Credipar a continué de prélever les loyers jusqu'en septembre 2013 date à laquelle la société Aitec a formé opposition à ces prélèvements.
Le 9 octobre 2014, la société Aitec a assigné la société Credipar en restitution de la somme de 8.365,39 euros devant le tribunal de commerce de Nanterre qui, par jugement du 28 octobre 2015 a :
- débouté la société Aitec Bureautique de sa demande de remboursement des loyers pour un montant de 8.365,39 euros,
- débouté la société Crédipar de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Aitec Bureautique aux dépens.
La société Aitec a interjeté appel de cette décision le 20 novembre 2015.
Dans ses dernières conclusions devant la cour, en date du 28 février 2017, la société Aitec demande à la cour de :
- infirmer le jugement déféré dans ses entières dispositions,
Statuant à nouveau,
- constater les dates de restitution des véhicules,
- dire que la rédaction de l'article 9 des conditions générales du contrat de location de la société Crédipar crée un déséquilibre significatif au détriment du locataire Aitec et dire et juger que la responsabilité de la société Crédipar se trouve engagée sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce,
- en conséquence, condamner la société Crédipar au paiement de la somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts,
Subsidiairement,
- condamner la société Crédipar à payer à la société Aitec la somme totale de 8.365,39 euros au titre des loyers indûment perçus pour la période de novembre 2012 à septembre 2013 avec intérêt légal à compter de la mise en demeure du 29 juillet 2013,
A titre infiniment subsidiaire,
- constater que l'article 9 des conditions générales du contrat de location est une clause pénale et que le montant de 8.365,39 euros au titre des loyers indûment perçus pour les trois contrats de location de véhicule pour la période de novembre 2012 à septembre 2013 se trouve manifestement excessif,
- réduire le montant de 8.365,39 euros à de plus justes proportions,
En tout état de cause,
- débouter la société Crédipar de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la société Crédipar au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de maître R..
Dans ses dernières conclusions du 1er mars 2017 la société Crédipar demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 28 octobre 2015 en ce qu'il a débouté la société Aitec de sa demande de remboursement de loyers pour un montant de 8.365,39 euros,
Statuant à nouveau,
- dire que l'article 9 des conditions générales de location ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ;
- dire que l'article 9 des conditions générales de location est opposable à la société Aitec,
En conséquence,
- débouter la société Aitec de l'ensemble de ses demandes,
En tout état de cause,
- condamner la société Aitec à payer à la société Crédipar la somme de 1.500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Aitec aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué par la SELAS C. et S., société d'avocats conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture a été prononcée le 2 mars 2017.
Par arrêt avant dire droit du 1er juin 2017 la cour a relevé d'office le moyen tiré du défaut de pouvoir du tribunal de commerce de Nanterre et de la cour à sa suite pour connaître de la demande principale de la société Aitec fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce et réservé les autres demandes et les dépens.
Dans des observations en vue de la réouverture des débats du 22 juin 2017, la société Aitec expose que les trois contrats de location entre les parties comportent la même clause attributive de compétence au tribunal du siège du loueur Crédipar soit le tribunal de Nanterre en l'espèce ; que l'invocation des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce et celles de l'annexe 4-2-1 de l'article D. 442-3, ne peuvent conduire la cour à décliner sa compétence pour statuer sur les demandes de la société Aitec ; qu'en effet si la loi et son décret d'application prévoient que les litiges relatifs à l'article L. 442-6 sont traités par des juridictions spécialisées, les dispositions sur l'attribution à un tribunal de grande instance ou un tribunal de commerce dans un territoire particulier ne sont pas d'ordre public, de sorte qu'aucune disposition légale ne fait obstacle à ce que deux sociétés commerciales conviennent de la compétence de la juridiction commerciale de droit commun en lieu et place de la juridiction commerciale d'exception ; qu'à aucun moment, les parties n'ont contesté cette clause qui peut donc s'appliquer à la demande de la société Aitec devant la présente juridiction au visa de l'article L. 442-6 du code de commerce ; que si la cour devait se déclarer incompétente sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce, elle maintient ses demandes subsidiaires.
La société Credipar n'a pas formé d'observation.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Sur la demande principale :
Considérant que devant le tribunal de commerce de Nanterre la société Aitec bureautique avait formé à titre principal une demande en remboursement des loyers indûment perçus à hauteur de 8.265,39 euros et que ce n'est que subsidiairement qu'elle a formé devant cette juridiction une demande en paiement de la même somme à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ; que devant la cour d'appel la société Aitec bureautique forme à titre principal une demande de dommages-intérêts à hauteur de 12.000 euros sur le fondement de la responsabilité de la société Credipar au regard de l'article L. 442-6-I-2° en soutenant que les dispositions de l'article 9 des conditions générales du contrat de location consenti par la société Credipar créent un déséquilibre significatif au détriment du locataire ; que la cour doit donc nécessairement envisager cette demande avant toutes les demandes subsidiaires ;
Considérant que la cour n'a pas soulevé son incompétence pour connaître de cette demande principale mais rappelé qu'il n'entrait pas dans ses pouvoirs de connaître des demandes fondées sur l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce et qu'elle avait l'obligation de relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir juridictionnel pour statuer sur un tel litige ainsi que l'irrecevabilité des demandes formées devant elle à ce titre ; que tel est le cas en l'espèce, la demande principale tendant à une condamnation à des dommages-intérêts sur ce fondement ; qu'il convient donc de déclarer la demande principale irrecevable ;
Sur la demande subsidiaire :
Considérant que la demande subsidiaire de la société Aitec bureautique tend au remboursement des loyers perçus pour la période de novembre 2012 à septembre 2013 pour un montant de 8.365,39 euros avec intérêts au taux légal depuis le 29 juillet 2013 ; qu'elle soutient que la société Credipar lui oppose l'absence de fourniture d'un document dénommé « procès-verbal de restitution », délivré à la diligence du seul fournisseur désigné pour la restitution ; que ce n'est que le 31 juillet 2013 soit 9 mois après la restitution des trois véhicules que la société Aitec a été informée par la société Credipar de la nécessité de remettre ce document ; que les conditions contractuelles ne prévoient pas la réalisation systématique d'un contrôle technique lors de la restitution ; que la société Credipar a accepté sans réserve la restitution des véhicules dont elle a été parfaitement informée en octobre et novembre 2012, étant précisé que c'est elle qui a fixé le lieu de restitution chez le concessionnaire G. ; qu'elle ne peut donc réclamer 12 mois de loyers supplémentaires pour chacun des trois véhicules restitués ;
Considérant que la société Crédipar réplique que la société Aitec bureautique était tout à fait informée de la nécessité d'obtenir les procès-verbaux de restitution pour les lui faire parvenir en vue de la clôture des contrats ; que les fiches techniques ont pour objet de déterminer l'état des véhicules pour permettre leur remise en état par le locataire ; qu'en l'espèce elles comportaient mention de réparations à effectuer ; que la société Aitec bureautique ne l'a informée de la restitution qu'en juillet 2013 ; qu'elle ne peut donc être considérée comme ayant eu lieu en octobre et novembre 2012 ;
Considérant que l'article 9 des conditions générales du contrat stipule que le locataire restitue les véhicules loués au lieu fixé par le loueur ; qu'il est expressément prévu que le locataire devra informer le loueur dans les 48 h. de cette restitution au moyen du document « qui lui sera fourni en temps utile » et qui devra être signé par le locataire et le fournisseur, et que la facturation des loyers se poursuivra jusqu'à la remise de ce document conjointement signé ; que les véhicules ont été restitués à la société G. conformément à la demande du loueur et ont fait l'objet de fiches descriptives datées des 11 octobre et 9 novembre 2012, mentionnant et chiffrant les réparations nécessaires ; que cependant la société Aitec bureautique ne justifie pas avoir averti la société Crédipar, loueur, de cette restitution comme le contrat lui en faisait l'obligation ; que le premier courrier qu'elle produit est un courrier du 29 juillet 2013 auquel n'est pas joint ce document ni aucun document relatif à la restitution des véhicules ; que les loyers ont été prélevés pendant plusieurs mois et que ce n'est que fin juillet 2013 que la société Aitec bureautique a demandé qu'il soit mis fin aux prélèvements ; que dans le courrier du 29 juillet 2013 elle fait état de différents entretiens téléphoniques et de différents mails échangés sans en justifier ; qu'elle est donc redevable des loyers dont elle demande le remboursement ; que ceux-ci sont la simple application du contrat qui s'est poursuivi dans l'attente de la complète restitution des véhicules selon les dispositions contractuelles et ne constituent pas une clause pénale manifestement excessive, le loueur n'ayant pas été avisé de la restitution des véhicules ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de restitution des loyers pour la période postérieure aux 11 octobre et 9 novembre 2012 ; qu'il sera également confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La COUR,
Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,
Vu l'arrêt avant dire droit du 1er juin 2017,
Déclare irrecevable la demande principale de la société Aitec bureautique en paiement de la somme de 12.000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce,
Sur les demandes subsidiaires :
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 28 octobre 2015 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Aitec bureautique aux dépens et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Hélène GUILLOU, Conseiller, conformément aux dispositions de l'article 456 du Code de procédure civile et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le conseiller,