CA METZ (3e ch.), 28 septembre 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 7082
CA METZ (3e ch.), 28 septembre 2017 : RG n° 14/02743 ; arrêt n° 17/00541
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Le fait que les fonds prêtés n'aient pas transité par le patrimoine des emprunteurs et aient été versés directement au vendeur des biens financés à crédit ne dispense pas les emprunteurs de leur obligation à restitution ».
2/ « Attendu que l'emprunteur qui détermine la banque à verser les fonds au vendeur au vu de la signature d'une attestation certifiant l'exécution du contrat principal ne peut pas lui opposer une exception d'inexécution du fournisseur pour refuser de rembourser le capital prêté en contrepartie des marchandises qui lui ont été vendues et livrées ;
Attendu qu'aux termes de l'attestation de fin de travaux litigieuse, Madame Y. a attesté que « les travaux, objet du financement susvisé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis » et a demandé à la Banque SOLFEA de payer la somme de 13.000 euros représentant le montant du crédit directement à la société ENDF conformément aux conditions particulières du contrat de crédit qui le prévoit à l'article IV-3 ;
Attendu que la banque, qui est seulement un professionnel du crédit, n'est pas le prestataire chargé d'exécuter la vente et n'a pas à vérifier que les travaux financés ont bien été réalisés ou qu'ils l'ont été conformément aux règles de l'art ou encore que l'installation fonctionne ; qu'aucune clause du contrat de prêt ne met une telle obligation à sa charge ; qu'elle est en droit de se fonder sur la déclaration de l'emprunteur que les travaux financés ont été exécutés conformément au devis ; qu'il lui appartient d'exécuter cet ordre de paiement, sauf à engager sa responsabilité dans le cas contraire ;
Attendu que l'attestation de fin de travaux constitue un acte volontaire de l'emprunteur qui ordonne au prêteur de payer le prix au vendeur à la livraison du bien selon des modalités clairement définies par le document qu'il signe et en toute connaissance de cause des travaux exécutés par le fournisseur ; qu'elle produit un effet juridique en ce qu'elle a pour effet d'autoriser la banque à débloquer les fonds entre les mains du vendeur, ce qui est conforme à l'économie du contrat qui veut qu'une fois la prestation principale comprenant la livraison et l'installation des panneaux photovoltaïques exécutée par le vendeur, il soit payé sans attendre le raccordement effectif au réseau ERDF qui a un monopole, ni l'obtention des autorisations administratives nécessaires, lesquels dépendent de tiers au contrat, voire des diligences de l'emprunteur lui-même et ne peut suspendre le paiement de manière indéterminée ;
Attendu qu'il n'y a aucune clause exonératoire de responsabilité au profit de la banque ; que les intimés sont mal fondés à exciper d'une clause abusive ; »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE METZ
TROISIÈME CHAMBRE - TI
ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. AII n° 14/02743. Arrêt n° 17/00541. Jugement, au fond, origine Tribunal d'Instance de THIONVILLE, décision attaquée en date du 26 août 2014, enregistrée sous le R.G. n° 13/000790.
APPELANTE :
SA BANQUE SOLFEA
Représentée par Maître Gilles R., avocat au barreau de METZ
INTIMÉS :
Monsieur X.
Représenté par Maître Julien D., avocat au barreau de THIONVILLE
Mademoiselle Y.
Représentée par Maître Julien D., avocat au barreau de THIONVILLE
SARL ÉNERGIES NOUVELLES DE FRANCE
DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 22 juin 2017 tenue par Madame FEVRE, et Monsieur HUMBERT, Magistrats Rapporteurs qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré pour l'arrêt rendu le 28 septembre 2017.
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Sylvie MARTIGNON
en présence de Julian W., assistant de Justice,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Madame FEVRE, Président de Chambre
ASSESSEURS : Madame SCHNEIDER, Conseiller, M. HUMBERT, Conseiller
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Selon un bon de commande n° XX en date du 13 décembre 2012, Monsieur X. et Madame Y. ont commandé à la SARL Energies Nouvelles de France, qui les a démarchés, 12 panneaux photovoltaïques de type Monocristallin, un kit d'intégration au bâti-ondulateur-coffret de protection-disjoncteur-parafoudre, un forfait d'installation de l'ensemble et mise en service, les démarches administratives (marie [mairie ?], consuel), la prise en charge plus l'installation complète avec accessoires et fournitures, plus les frais de raccordement à ERDF, au prix total de 13.000 euros TTC.
Selon une offre de crédit affecté acceptée le même jour, la Banque Solfea a accordé à Monsieur X. et Madame Y., co-emprunteurs solidaires, un crédit d'un montant de 13.000 euros au taux nominal de 6,08 %, remboursable en 168 mois avec un différé de 11 mois et un taux effectif global de 6,25 %.
A la réception de l'attestation de fin de travaux du 21 janvier 2013 signé par Madame Y., la Banque Solfea a débloqué les fonds prêtés et a payé la SARL Energies Nouvelles de France le 12 février 2013.
Par actes d'huissier en date du 19 juillet 2013, Monsieur X. et Madame Y. ont fait assigner la SARL Énergies Nouvelles de France et la SA Banque Solfea en nullité du contrat de vente et du contrat de prêt accessoire.
Par jugement en date du 26 août 2014, le tribunal d'instance de Thionville a :
- prononcé la nullité du bon de commande signé le 13 décembre 2012 entre Monsieur X. et Madame Y. et la SARL Énergies Nouvelles de France,
- condamné la SARL Énergies Nouvelles de France à procéder au démontage de l'installation, à la remise en état du toit dans son état originel et l'enlèvement de l'installation en cause dans un délai de deux mois suivant la signification de la décision et dit que, passé ce délai, Monsieur X. et Madame Y. seront autorisés à faire démonter l'installation et à la déposer dans un centre de tri aux frais, risques et périls de la SARL Energies Nouvelles de France,
- constaté l'annulation de plein droit du contrat de crédit souscrit le 13 décembre 2012 entre Monsieur X. et Madame Y. et la Banque Solfea,
- condamné in solidum la Banque SOLFEA et la SARL Energies Nouvelles de France à payer à Monsieur X. et Madame Y. la somme de 1.600 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens,
- rejeté toutes autres demandes.
La déclaration d'appel de la SA Banque Solfea a été remise au greffe de la cour le 17 septembre 2014.
Par arrêt en date du 23 mars 2017, la cour a ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture du 12 janvier 2017 à la demande de la Banque Solfea à la suite de la cession de sa créance à la BNP-Paribas Personal Finance, renvoyé l'affaire à l'audience du 22 juin 2017 pour régularisation de la procédure et clôture à cette date.
Dans ses dernières conclusions, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 4 mai 2017, la BNP-Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Banque Solfea à la suite d'une cession de créance en date du 28 février 2017, demande l'infirmation du jugement et à la cour, statuant à nouveau, de lui donner acte de qu'elle vient aux droits de la Banque SOLFEA en vertu d'une cession de créance intervenue le 28 février 2017, de son intervention volontaire et la déclarer recevable, constater que ses conclusions valent notification de la cession de créance en application de l'article 1324 du code civil, et de :
A titre principal,
- débouter Monsieur X. et Madame Y. de leur appel incident,
- dire qu'aucune faute dans l'octroi du crédit ne peut lui être reprochée dès lors que l'acceptation du crédit résulte de l'étude d'un dossier complet renseigné essentiellement par les emprunteurs,
- dire qu'aucune faute dans le déblocage des fonds ne saurait lui être reprochée, les fonds ayant été versés à l'entreprise sur la foi d'une attestation de fin de travaux claire et dénuée d'équivoque signée par Madame Y., qui avait été informée de son importance et qu'elle n'aurait jamais dû signer si elle ne correspondait pas à la situation,
- condamner solidairement Monsieur X. et Madame Y. à lui payer la somme de 13.000 euros au titre de la restitution consécutive à l'annulation du contrat de prêt, sous déduction des échéances déjà payées, avec intérêts au taux légal à compter de la remise des fonds,
A titre subsidiaire, pour le cas où la cour estimerait que la banque a commis une faute,
- dire qu'aucun lien de causalité n'existe entre l'octroi du crédit ou le déblocage des fonds et le préjudice allégué par Monsieur X. et Madame Y. dès lors que la nullité du contrat de vente est prononcée pour violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation,
- dire que le montant du préjudice de Monsieur X. et Madame Y. ne peut être égal au montant du crédit en principal,
et, en toute hypothèse, condamner Monsieur X. et Madame Y. à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Dans leurs dernières conclusions, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 8 juin 2017, Monsieur X. et Madame Y. demandent qu'il soit statué ce que de droit sur l'intervention volontaire de la SA BNP-Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque Solfea, qu'il leur soit donné acte de ce qu'ils ne contestent pas la cession de créance faite par la Banque Solfea au profit de la BNP-Paribas Personal Finance, et de :
- déclarer l'appel principal de la Banque Solfea recevable et mal fondé, le rejeter,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé, d'une part, la nullité du bon de commande conclu avec la société ENDF et, d'autre part, la nullité du contrat de crédit contracté avec la Banque Solfea,
et, en conséquence, de la nullité du prêt,
A titre principal sur leur appel incident,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a écarté leur moyen tendant à ce qu'ils soient déchargés du remboursement du capital prêté au motif que les fonds n'ont pas transité par leur patrimoine,
- constater que les fonds ont été versés par la Banque Solfea directement entre les mains de la société ENDF,
- dire qu'ils ne seront tenus à une quelconque restitution à l'égard de la Banque Solfea,
- condamner la Banque Solfea à leur rembourser les mensualités prélevées depuis le 10 février 2014 conformément au tableau d'amortissement,
A titre subsidiaire si la cour rejette leur appel incident et le moyen développé à titre principal,
- confirmer, au besoin par substitution de motifs, le jugement déféré en ce qu'il a retenu une faute de la Banque Solfea,
- dire que la clause aux termes de laquelle « l'emprunteur atteste que les travaux objet du financement visé ci-dessus (qui ne couvre pas le raccordement au réseau éventuel et les autorisations administratives éventuelles) sont terminés » est irréfragablement présumée abusive et, par voie de conséquence, la dire non écrite,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande la Banque Solfea en restitution du capital prêté,
- condamner la banque à leur rembourser les mensualités prélevées depuis le 10 février 2014 conformément au tableau d'amortissement,
A titre plus subsidiaire encore dans l'hypothèse où la cour infirmerait le jugement déféré en ce qu'il a retenu une faute de la Banque Solfea,
- condamner la banque à leur payer la somme de 13.000 euros à titre de dommages-intérêts au titre de leur préjudice économique et de la perte de chance de ne pas contracter un crédit, comme correspondant aux fautes commises dans l'octroi de ce dernier, somme à laquelle il conviendra de retrancher les échéances déjà prélevées depuis le 10 février 2014,
- dire que la banque ne pourra exiger plus que la somme de 13.000 euros exclusive de tous intérêts et/ou pénalités, somme de laquelle il conviendra de retrancher les échéances déjà prélevées depuis le 10 février 2014,
- ordonner la compensation légale des sommes dues de part et d'autre,
et, en tout état de cause,
- débouter la banque de toutes ses demandes,
- condamner la banque à leur payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la banque Solfea à leur payer la somme de 1.600 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la banque aux dépens.
Régulièrement assignée dans les conditions de l'article 659 du Code de Procédure Civile, la SARL Energies Nouvelles de France n'a pas comparu.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
LA COUR,
Attendu que l'appel, interjeté dans les formes et délais légaux, est recevable ;
Attendu que la BNP-Paribas Personal Finance justifie venir aux droits de la Banque Solfea à la suite d'une cession de créance intervenue le 28 février 2017 signifiée au débiteur cédé par voie de conclusions ; que son intervention volontaire à la procédure est recevable ;
Attendu que la BNP-Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Banque Solfea, ne critique pas le jugement déféré sur l'annulation du bon de commande, ni sur l'annulation subséquente du contrat de crédit, mais en ce qu'il a jugé qu'elle avait commis des fautes pour exclure son droit à restitution du capital prêté ; qu'elle fait valoir que les emprunteurs cherchent à obtenir l'annulation des contrats et, notamment du crédit, pour une installation, qui est en état de marche, en arguant du simple défaut de raccordement au réseau public de distribution d'électricité ; qu'il ne s'agit pas d'une installation défectueuse et que Monsieur X. et Madame Y. veulent se libérer de leur crédit en faisant annuler le contrat de prêt affecté, sans remise en l'état initial effective, afin de conserver les panneaux solaires sans rien payer, ce qui est constitutif d'un abus de droit ; qu'elle soutient que l'annulation d'un contrat entraîne des restitutions pour toutes les parties, soit en nature, soit par équivalent avec toutes les conséquences de droit sur les contrats ou avantages fiscaux qui en découlent ;
Qu'elle prétend que, même si le contrat principal est annulé et, par voie de conséquence, le contrat de crédit affecté, les emprunteurs doivent lui restituer le capital prêté, sous déduction des échéances payées, en l'absence de toute faute de sa part, et que le préjudice subi ne pourrait pas être égal à sa créance de restitution, outre l'absence d'un lien de causalité entre la faute alléguée et le prétendu préjudice ; qu'elle fait valoir qu'il ne peut pas lui être reproché d'avoir libéré les fonds entre les mains du vendeur puisqu'elle l'a fait sur instruction des emprunteurs et que c'est à eux de rembourser le prêt qu'ils ont contracté selon un contrat de crédit qui est parfait au regard de l'article L. 311-13 du code de la consommation et de l'agrément de l'emprunteur par le prêteur résultant de la mise à disposition des fonds même si c'est au-delà du délai de sept jours mentionné à l'article L. 311-14 du même code ; que les emprunteurs ont reconnu avoir reçu un exemplaire du contrat de crédit, qu'ils ont fourni les documents nécessaires à l'octroi du crédit sollicité excluant l'autofinancement allégué ; qu'elle en a eu connaissance par leur envoi par le vendeur avant de prendre sa décision ; qu'elle justifie avoir interrogé le FICP avant d'accorder le financement sollicité ; qu'elle estime que c'est à tort que le premier juge a considéré qu'elle avait débloqué les fonds sans s'assurer que le prestataire avait exécuté son obligation alors qu'elle a remis les fonds au vu de l'attestation de fin de travaux qui excluait tant les autorisations administratives que le raccordement au réseau qui ne peut être réalisé que par ERDF qui dispose d'un monopole ; qu'elle soutient qu'il ne lui est matériellement pas possible de vérifier que l'installation fonctionne et que c'est pour ce motif qu'elle fait signer une attestation de fin de travaux par le client-emprunteur qui reçoit le matériel et peut vérifier qu'il est conforme à la commande ; que ce document comporte un ordre de paiement au profit du vendeur ; que Madame Y. l'a signé sans réserve et qu'elle ne peut se prévaloir de sa négligence si les travaux n'étaient pas terminés ou conformes ; que les emprunteurs ne peuvent plus lui opposer l'inexécution de son obligation par la société ENDF ; que le défaut de raccordement au réseau public de transport et de distribution d'électricité est exclu légitimement par l'attestation puisqu'elle suppose l'intervention d'un tiers sur qui personne n'a d'emprise ; que l'économie du contrat commande de fonctionner de cette manière afin qu'une fois la prestation principale exécutée, le vendeur-installateur puisse être payé ; que la société Energies Nouvelles de France ne pouvait pas réaliser ce raccordement qui appartient à ERDF ; que Monsieur X. et Madame Y. bénéficient d'installation qui est en état de fonctionner et qui reste à raccorder au réseau ; qu'elle n'a commis aucune faute en débloquant les fonds sur la foi d'une attestation de fin de travaux claire et précise qui exclut le raccordement au réseau public ; qu'il appartenait aux emprunteurs de ne pas signer cette attestation s'ils estimaient que l'installation n'était pas complète sachant qu'elle emportait le paiement de l'entreprise ; que le défaut de raccordement relève de la prérogative exclusive d'ERDF et ne caractérise pas l'inexécution du contrat principal ;
Qu'elle soutient qu'elle a vérifié la solvabilité des emprunteurs et leur état d'endettement avant d'accorder le crédit ; que Monsieur X. et Madame Y. ont renseigné la fiche de solvabilité en certifiant l'exactitude des informations fournies ; qu'elle ajoute que, si la cour devait estimer qu'elle a commis une faute, l'obligation de restitution du capital prêté demeure, car la demande de dispense de remboursement s'analyse en une demande de dommages-intérêts se compensant avec la dette de restitution ; que le matériel a été livré et installé ; qu'il a une valeur ; que la société Energies Nouvelles de France ne récupérera jamais le matériel qui sera conservé par Monsieur X. et Madame Y. qui pourront en bénéficier au moins pour leur autoconsommation ; qu'elle estime qu'elle ne peut pas être privée d'une créance certaine, liquide et exigible de restitution consécutive à l'annulation du contrat de crédit alors que le préjudice éventuellement subi par les emprunteurs n'est pas égal au montant de cette créance ; qu'il n'y a aucun lien de causalité entre le déblocage des fonds et la nullité du contrat principal due au non-respect des dispositions d'ordre public du code de la consommation ;
Attendu que Monsieur X. et Madame Y. répliquent qu'ils n'ont eu aucun exemplaire du contrat de crédit à la signature du bon de commande et qu'ils n'ont pas eu connaissance du coût du crédit ; que l'opération leur a été présentée comme autofinancée par la revente d'énergie à ERDF ; que les exemplaires du contrat produits démontrent que le coût total du crédit a été rajouté sur celui de la banque, ce qu'elle ne pouvait ignorer ; que s'ils avaient eu connaissance du coût du prêt, ils ne l'auraient pas contracter ;
Qu'ils forment un appel incident estimant qu'ils ne sont pas tenus à restitution d'un prêt dont les fonds ne leur ont pas été versés, puisqu'ils ont été remis directement au vendeur sans transiter par leur patrimoine ; qu'à titre subsidiaire, ils font valoir qu'ils sont déchargés de leur obligation de restitution dès lors que le contrat de crédit n'est pas parfait au sens du code de la consommation, faute pour le prêteur d'avoir fait connaître sa décision d'accorder le crédit dans un délai de 7 jours de sorte que le contrat n'a pas été valablement formé et n'a pas de force obligatoire ; qu'à défaut, ils prétendent que la Banque Solfea a commis une faute en finançant une opération irrégulière au regard des vices affectant le bon de commande, dans l'octroi du crédit et dans la délivrance des fonds excluant son droit à obtenir le remboursement du capital prêté sans qu'ils aient à démontrer de préjudice ; que le seul fait que le prêteur ait commis une faute emporte une déchéance du droit à restitution ; qu'ils soutiennent que le contrat de prêt est irrégulier puisque le coût total du crédit avec assurance n'y figure pas et qu'ils n'ont pas pu user de la faculté de se rétracter ; que la banque Solfea n'a pas vérifié leur solvabilité et ne s'est pas informée sur les charges qu'ils supportaient déjà, ni sur leur endettement préalable avant l'émission de l'offre ; qu'ils sont des emprunteurs non avertis, ce qui met à la charge de la banque un devoir de mise en garde sur le risque d'endettement né du crédit en cause et qu'elle n'aurait pas dû leur accorder un crédit excessif au regard de leurs revenus et charges ; que la banque a manqué à ses obligations lors de l'octroi du crédit et ne peut prétendre à aucune restitution ;
Qu'en outre, ils prétendent qu'elle a également commis des fautes en débloquant les fonds prêtés en dépit de la non-exécution intégrale des prestations financées ; que l'attestation de fin de travaux ne décharge pas la banque de ses obligations ; qu'elle devait vérifier que les prestations vendues avaient été complètement exécutées par le vendeur et que l'installation du matériel financé fonctionnait ; que le bon fonctionnement de l'installation revêt un caractère essentiel puisqu'à défaut, l'acheteur peut demander la résolution judiciaire du contrat ; qu'ils prétendent que la mention figurant sur l'attestation de travaux, dont se prévaut la Banque Solfea, indiquant qu'elle ne couvre pas le raccordement au réseau éventuel et les autorisations administratives éventuelles, vise à la soustraire à ses obligations et constitue une cause exonératrice de responsabilité qui s'analyse en une clause irréfragablement présumée abusive réputée non écrite en application de l'article R. 132-1 du code de la consommation ; que la Banque Solfea ne peut pas se retrancher derrière cette clause pour se dispenser de vérifier la fonctionnalité de l'installation avant le déblocage des fonds au-delà de la pose attestée par l'emprunteur excluant le raccordement, pourtant inclus dans le contrat lequel comprend les démarches de mise en service et administratives relatives au raccordement et est financé pour le tout, alors qu'elle est un prêteur récurrent en matière d'énergie photovoltaïque et qu'elle ne pouvait ignorer qu'au stade de la signature de l'attestation, l'installation n'était pas fonctionnelle ; qu'elle devait différer le déblocage des fonds jusqu'à ce que l'installation soit raccordée ; qu'ils soulignent que le bon de commande met à la charge de la société Energies Nouvelles de France les démarches administratives de raccordement (Consuel) comprenant le dossier nécessaire auprès d'ERDF et que la Banque Solfea cherche à créer une confusion entre cette phase administrative et la phase pratique de branchement par les techniciens d'ERDF ; que le prêteur ne démontre pas avoir vérifié le raccordement de l'installation au réseau public, ni que les démarches administratives avaient été accomplies par le vendeur auprès de Consuel et qu'elle a ainsi commis une faute en débloquant prématurément les fonds excluant son droit à restitution ; qu'ils justifient qu'ils ne sont toujours pas raccordés au réseau et que les fonds ont été débloqués par la banque avant l'obtention de l'autorisation administrative puisque la pose de panneaux solaires suppose une déclaration préalable de travaux en mairie laquelle a été effectuée le 4 février 2013 donnant lieu à un arrêté municipal de non-opposition du 4 mars 2013 après le versement des fonds au vendeur ; qu'à titre très subsidiaire, si la cour devait infirmer le jugement déféré sur le droit à restitution de la banque, ils sollicitent des dommages-intérêts d'un montant de 13.000 euros au regard des fautes commises par le prêteur, déduction faite des échéances déjà prélevées ; qu'ils prétendent que la négligence fautive et le manque de prudence de la Banque Solfea ont eu pour conséquence directe de les lier par un contrat de crédit qu'ils doivent honorer alors que l'opération financée leur a été présentée comme autofinancée et que l'installation n'est pas fonctionnelle ; que la nullité du contrat exclut tous intérêts et pénalités ; qu'il y aura compensation entre les créances réciproques de chaque partie ;
[*]
Attendu que la nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté n'est pas contesté par l'appelante ; que seule reste en litige le droit à restitution du capital prêté par la banque ;
Attendu que l'annulation du contrat de crédit emporte, en principe, la restitution des prestations réciproques et notamment la restitution du capital prêté par l'emprunteur ; que, pour échapper à cette obligation, Monsieur X. et Madame Y. invoquent le paiement direct fait par la banque à la société ENDF, plusieurs fautes de la Banque SOLFEA dans le déblocage des fonds et l'octroi du crédit ;
Attendu qu'en application de l'article L. 311-13 du code de la consommation dans sa version applicable, l'agrément de la personne de l'emprunteur par l'établissement de crédit parvenu à sa connaissance après l'expiration du délai de 7 jours reste néanmoins valable si l'emprunteur entend toujours bénéficier du crédit ;
Attendu que Monsieur X. et Madame Y. n'ont pas usé de leur faculté de rétractation et ont demandé à la Banque SOLFEA de débloquer le prêt en signant sans réserve l'attestation de fin de travaux le 21 janvier 2013 postérieurement au courrier qui leur a été adressé par la banque les avisant de l'acceptation de leur crédit en date du 17 janvier 2013 ; que le contrat a été valablement formé contrairement à ce que soutiennent les appelants ;
Attendu que le contrat de prêt affecté est conclu entre la Banque SOLFEA et les emprunteurs ; que la société Energies Nouvelles de France est tiers à ce contrat ; qu'elle est seulement le bénéficiaire du paiement du prix financé par le prêt contracté par Monsieur X. et Madame Y. qui en sont les seuls débiteurs ;
Attendu que le fait que les fonds prêtés n'aient pas transité par le patrimoine des emprunteurs et aient été versés directement au vendeur des biens financés à crédit ne dispense pas les emprunteurs de leur obligation à restitution contrairement à ce qu'ils prétendent s'agissant d'un crédit affecté à une vente assorti d'une obligation de paiement direct du prix par le prêteur au vendeur conformément à la convention des parties ;
Attendu que Monsieur X. et Madame Y. sont mal fondés à contester être les débiteurs du crédit qu'ils ont personnellement contracté et en leur appel incident de ce chef ;
Attendu qu'il ressort des pièces produites que, même si le bon de commande n'indique pas les modalités de paiement du prix et notamment qu'il sera payé par un crédit, Monsieur X. et Madame Y. ont signé concomitamment une demande de prêt pour le montant du prix et une fiche de solvabilité sur leurs revenus et charges en vue de l'obtention du prêt sollicité avec les pièces justificatives de sorte qu'ils ne peuvent prétendre qu'ils ignoraient qu'ils contractaient un crédit pour financer leur installation photovoltaïque ; qu'il n'y a aucune garantie contractuelle d'un rendement de l'installation ; qu'ils ont reconnu avoir reçu et pris connaissance du contrat de prêt et en avoir conservé un exemplaire ; qu'ils sont mal fondés en leur contestation de ce chef ;
Attendu qu'il ne peut pas non plus être reproché à la Banque SOLFEA d'avoir libéré les fonds entre les mains de la société Energies Nouvelles de France en exécution de la convention des parties et conformément à l'ordre de paiement qui lui a été donné par l'attestation de fin de travaux signée par Madame Y. le 21 janvier 2013 ;
Attendu que l'emprunteur qui détermine la banque à verser les fonds au vendeur au vu de la signature d'une attestation certifiant l'exécution du contrat principal ne peut pas lui opposer une exception d'inexécution du fournisseur pour refuser de rembourser le capital prêté en contrepartie des marchandises qui lui ont été vendues et livrées ;
Attendu qu'aux termes de l'attestation de fin de travaux litigieuse, Madame Y. a attesté que « les travaux, objet du financement susvisé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et sont conformes au devis » et a demandé à la Banque SOLFEA de payer la somme de 13.000 euros représentant le montant du crédit directement à la société ENDF conformément aux conditions particulières du contrat de crédit qui le prévoit à l'article IV-3 ;
Attendu que la banque, qui est seulement un professionnel du crédit, n'est pas le prestataire chargé d'exécuter la vente et n'a pas à vérifier que les travaux financés ont bien été réalisés ou qu'ils l'ont été conformément aux règles de l'art ou encore que l'installation fonctionne ; qu'aucune clause du contrat de prêt ne met une telle obligation à sa charge ; qu'elle est en droit de se fonder sur la déclaration de l'emprunteur que les travaux financés ont été exécutés conformément au devis ; qu'il lui appartient d'exécuter cet ordre de paiement, sauf à engager sa responsabilité dans le cas contraire ;
Attendu que l'attestation de fin de travaux constitue un acte volontaire de l'emprunteur qui ordonne au prêteur de payer le prix au vendeur à la livraison du bien selon des modalités clairement définies par le document qu'il signe et en toute connaissance de cause des travaux exécutés par le fournisseur ; qu'elle produit un effet juridique en ce qu'elle a pour effet d'autoriser la banque à débloquer les fonds entre les mains du vendeur, ce qui est conforme à l'économie du contrat qui veut qu'une fois la prestation principale comprenant la livraison et l'installation des panneaux photovoltaïques exécutée par le vendeur, il soit payé sans attendre le raccordement effectif au réseau ERDF qui a un monopole, ni l'obtention des autorisations administratives nécessaires, lesquels dépendent de tiers au contrat, voire des diligences de l'emprunteur lui-même et ne peut suspendre le paiement de manière indéterminée ;
Attendu qu'il n'y a aucune clause exonératoire de responsabilité au profit de la banque ; que les intimés sont mal fondés à exciper d'une clause abusive ;
Attendu que Monsieur X. et Madame Y. sont mal fondés à exciper d'une faute de la banque dans le déblocage des fonds prêtés pour s'exonérer de leur propre obligation de restitution consécutive à la nullité du contrat de prêt ;
Attendu que les autres griefs des emprunteurs sur les manquements de la banque au regard de ses obligations résultant du code de la consommation sur la régularité du bon de commande et de l'offre de prêt, les manquements de la banque au regard de ses obligations résultant de l'article L. 311-6 du code de la consommation dans sa version applicable en la cause sont surabondants puisque les conventions ont été annulées et sont réputées n'avoir pas existé ; qu'en outre ces griefs ne sauraient justifier une condamnation de la banque à leur payer des dommages-intérêts en plus des sanctions du code de la consommation qui ont produit leurs effets ; que la restitution du capital prêté est la contrepartie du déblocage des fonds en paiement des marchandises achetées par les emprunteurs, livrées et installées ;
Attendu qu'il ressort des pièces produites que la banque a vérifié la solvabilité des emprunteurs avant l'octroi du crédit ; que Monsieur X. et Madame Y. ont signé une fiche de solvabilité indiquant leurs revenus de 1.000 euros pour monsieur et de 4.500 euros pour madame, avoir un enfant à charge de 14 ans, être propriétaire de leur logement et supporter un crédit immobilier jusqu'en 2021 avec des échéances de 850,00 euros par mois, plus un crédit Domofinance jusqu'en 2020 avec des échéances de 180,00 euros, en certifiant l'exactitude des informations qu'elle contient ; qu'ils ont fourni les documents nécessaires à l'obtention du prêt en remettant notamment la copie de leurs bulletins de salaire et leur avis d'imposition ; qu'ils n'ont pas fait mention d'autres crédits alors que la fiche pose la question ; qu'il est justifié que la banque a interrogé le FICP dès le 20 décembre 2012 et qu'il n'y avait aucune déclaration d'incident de paiement concernant Monsieur X. et Madame Y. ;
Attendu que la Banque SOLFEA était en droit de se fonder sur les informations communiquées par les emprunteurs qui ne lui ont pas déclaré toutes leurs charges d'endettement ;
Attendu qu'au regard des revenus et charges déclarés, le prêt accordé par la Banque SOLFEA n'apparaît pas excessif ; que la banque n'était tenue, en conséquence, à aucun devoir de mise en garde ; qu'elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'il n'est justifié d'aucune perte de chance de ne pas contracter ;
Attendu que Monsieur et Madame X. et Madame Y. sont mal fondés en leur contestation de leur obligation de restitution et en leur demande en dommages-intérêts ; qu'ils seront déboutés de leur demande de restitution des échéances qu'ils ont payées ;
Attendu qu'il y a lieu de condamner Monsieur X. et Madame Y. à payer à la BNP-Paribas Personal Finance venant aux droits de la Banque SOLFEA la somme de 13.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds jusqu'à parfait paiement, sous déduction des échéances réglées ;
Attendu que le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions contraires au présent arrêt et en ce qu'il a condamné la Banque SOLFEA avec la société Energies Nouvelles de France à payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile à Monsieur X. et Madame Y. et aux dépens ; que le jugement sera confirmé pour le surplus en ses autres dispositions non contraires à la présente décision ;
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Attendu que Monsieur X. et Madame Y. supporteront les dépens d'appel ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, par arrêt rendu par défaut, statuant publiquement en la procédure spéciale sur titre, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code procédure civile,
DONNE ACTE à la BNP-Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Banque SOLFEA à la suite d'une cession de créance du 28 février 2017, de son intervention volontaire à la procédure,
INFIRME le jugement déféré en ses dispositions contraires au présent arrêt et en ce qu'il a condamné la Banque SOLFEA avec la société Energies Nouvelles de France à payer une indemnité de 1.600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à Monsieur X. et Madame Y. et aux dépens,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
CONDAMNE Monsieur X. et Madame Y. à rembourser à la BNP-Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Banquer SOLFEA, la somme de 13.000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la remise des fonds et sous déduction des échéances réglées,
DÉBOUTE Monsieur X. et Madame Y. de leurs demandes tendant à être déchargés de leur obligation de restitution du capital prêté, de leurs demandes en dommages-intérêts et de remboursement des échéances payées, de leur demande au titre de leurs frais irrépétibles et des dépens à l'encontre de la banque,
CONFIRME pour le surplus le jugement déféré en ses autres dispositions non contraires au présent arrêt,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,
REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires,
CONDAMNE Monsieur X. et Madame Y. aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique au greffe le 28 Septembre 2017, par Madame Caroline FEVRE, Président de Chambre, assistée de Mme Julie CHRISTOPHE, Greffier, et signé par elles.
Le Greffier Le Président de Chambre