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CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 11 mai 2018

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 11 mai 2018
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 6
Demande : 16/15753
Date : 11/05/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 19/07/2016
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7558

CA PARIS (pôle 5 ch. 6), 11 mai 2018 : RG n° 16/15753 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que la demande à fins de nullité formulée à titre principal devant la cour prend le pas sur cette demande indemnitaire à laquelle elle s'ajoute, maintenue inchangée mais à titre simplement subsidiaire, et dont elle se distingue donc clairement ;

Considérant aussi que compte tenu de sa formulation la demande tendant à la nullité de la déchéance du terme ne constitue bien évidemment pas un simple moyen de droit ou de fait ;

Considérant qu'elle ne se résume pas mieux à un changement de fondement juridique avancé au soutien des prétentions purement indemnitaires initiales du demandeur ;

Considérant enfin que cette demande de nullité n'est pas virtuellement comprise dans les demandes et défenses soumises au premier juge, et n'en constitue ni leur accessoire, ni la conséquence, ni le complément ;

Considérant que compte tenu de ces divers éléments, il est dès lors impossible de considérer que la demande de nullité de déchéance du terme tend aux mêmes fins que celle, indemnitaire, soumise au premier juge ; qu'il s'agit bel et bien d'une demande nouvelle, qui doit être déclarée irrecevable par application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 6

ARRÊT DU 11 MAI 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 16/15753 (11 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - R.G. n° 13/05769.

 

APPELANT :

Monsieur X.

Né le [date] à [ville], Représenté par Maître Guillaume P., avocat au barreau de PARIS, toque : A0259

 

INTIMÉE :

SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE

RCS PARIS XXX, Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [adresse], Représentée par Maître Emmanuelle G. de la SELARL G. H.-B., avocat au barreau d'ESSONNE

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 6 mars 2018, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre, M. Marc BAILLY, Conseiller, Madame Pascale GUESDON, Conseiller, qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Josélita COQUIN

ARRÊT : - Contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Françoise CHANDELON, présidente et par Madame Josélita COQUIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par offre sous seing privé acceptée le 19 juin 2006, la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a consenti à monsieur Michael B. un « prêt immobilier évolutif » d'un montant en capital de 35.700 euros, sans différé, remboursable en 288 mensualités et au taux d'intérêt de 3,95 % l'an.

Des échéances ayant été impayées, par courriers recommandés avec accusé de réception des 13 octobre 2012 et 31 janvier 2013 la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a mis le débiteur en demeure de régulariser l'arriéré, lui indiquant qu'à défaut elle prononcerait la déchéance du terme du prêt.

Par jugement en date du 21 mars 2013, le tribunal d'instance de Le Raincy [qui avait été saisi le 23 décembre 2010] a fait droit à la demande de monsieur X. tendant à la condamnation de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à lui rembourser une somme de 4.000 euros au titre de frais bancaires indûment perçus.

Par e-mail du 24 avril 2013, la banque a indiqué à monsieur X. qu'elle allait lui régler cette somme, et lui a demandé de reprendre à compter du 7 mai 2013 le paiement des échéances mensuelles courantes du prêt et de formuler des propositions de règlement quant aux échéances impayées. Puis le 23 mai 2013, la banque a prononcé la déchéance du terme du prêt et a réclamé au débiteur le paiement de la totalité des sommes dues à ce titre. Un chèque CARPA daté du même jour, d'un montant de 4.000 euros, a été adressé à monsieur X.

Par courrier recommandé du 31 mai 2013, monsieur X. a sollicité de la banque un accord amiable tant pour le remboursement de l'ensemble des frais prélevés sur son compte depuis 2010 que pour les mensualités du prêt, dont il contestait l'exigibilité anticipée compte tenu de la clôture de son compte qui a eu pour effet d'empêcher le prélèvement des mensualités, de l'absence de reprise des paiements sur son compte ouvert auprès d'un autre établissement, et de ce que le montant total des impayés était inférieur à ce que la banque lui devait elle-même.

Par acte d'huissier en date du 31 juillet 2013, la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a fait assigner monsieur X. devant le tribunal de grande instance d'Evry, qui par jugement en date du 28 janvier 2016 :

* a condamné monsieur X. à verser à la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE :

- une somme de 29.815,31 euros outre les intérêts au taux contractuel de 3,95 % l'an produits par cette somme depuis le 23 mai 2013 jusqu'à parfait règlement,

- une somme de 1.151,51 euros, laquelle produira intérêts au taux contractuel de 3,95 % l'an à compter du 24 mai 2014,

- une somme de 200 euros outre les intérêts au taux légal produits par cette somme depuis le 23 mai 2013 jusqu'à parfait règlement,

et,

* a condamné la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à verser une indemnité de 5.000 euros à monsieur X.,

* a rejeté le surplus des demandes de chacune des parties,

* a dit que chacune des parties gardera la charge définitive des dépens qu'elle a exposés dans la présente instance,

* a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration du 19 juillet 2016, monsieur X. a interjeté appel de ce jugement.

Au terme de la procédure d'appel clôturée le 23 janvier 2018 les moyens et prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.

 

Par dernières conclusions, aux fins d'infirmation, notifiées par voie de RPVA le 7 octobre 2016, monsieur X., appelant, demande à la cour,

* à titre principal,

- de prononcer la nullité de la clause de déchéance du terme que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a appliquée le 22 mai 2013,

- de débouter la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE de ses demandes de paiement,

- de dire que les échéances du prêt immobilier du 19 juin 2006, comprises entre la déchéance du terme non valide appliquée le 22 mai 2013 par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE et la reprise des remboursements seront reportées à la fin du tableau d'amortissement de ce prêt et remboursées mensuellement dans les mêmes conditions jusqu'à règlement complet, les majorations d'intérêts et les pénalités contractuelles cessant d'être dues à raison de ce retard,

* à titre subsidiaire,

de dire que la rupture du contrat de crédit par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est constitutive d'une violation de son obligation de sincérité, loyauté et bonne foi dans les relations contractuelles,

et en conséquence, de condamner la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à lui payer une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts,

et en tout état de cause,

- de lui accorder les plus larges délais de paiement pour s'acquitter de sa dette et ce en application des dispositions de l'article 1244-1 du code civil,

- de condamner la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à lui payer une somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés par Me P. conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, monsieur X. fait valoir qu'à la date de la déchéance du terme du 22 mai 2013, d'une part il était titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible [suivant jugement rendu le 21 mars 2013 par le tribunal d'instance de Raincy condamnant la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à lui payer la somme] de 4.000 euros, et d'autre part les échéances impayées du prêt immobilier s'élevaient selon le relevé de compte de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à la somme de 2.498,40 euros. Par le jeu de la compensation légale, qui s'opère de plein droit, la créance dont était alors titulaire monsieur X. sur la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE compensait largement les échéances impayées du prêt immobilier.

Par ailleurs, la clause qui dans un contrat de prêt prévoit que le non-paiement des sommes exigibles fait partie des cas de survenance de déchéance du terme permettant au prêteur de se prévaloir de l'exigibilité immédiate de la totalité de la créance, constitue une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation et comme telle réputée non écrite, En effet, cette clause crée, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties car par une décision unilatérale du prêteur, en dehors du mécanisme de la condition résolutoire, il y a aggravation soudaine des conditions de remboursement du prêt et une modification majeure de l'économie du contrat. De plus, toute sanction doit être accompagnée de garanties offertes à la personne qui la subit, garanties qui comprennent toujours a minima l'information de la personne sanctionnée et un délai pour lui permettre de se défendre. Il est donc logique que l'emprunteur soit informé du risque encouru et qu'il lui soit accordé un délai pour s'efforcer d'échapper aux conséquences de la déchéance du terme en réglant ses impayés. Or, la clause stipulée dans le contrat de prêt immobilier souscrit par monsieur X. en date du 19 juin 2006 permet à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE de se prévaloir de l'exigibilité immédiate sans mise en demeure préalable de la totalité de sa créance en cas de non-paiement des sommes exigibles, concernant quelque dette que ce soit de l'emprunteur vis à vis du prêteur, de sorte que cette clause doit être réputée non écrite en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation. Par conséquent, il est demandé à la cour de déclarer non avenue la déchéance du terme du prêt fondée sur cette clause abusive invoquée par la banque le 22 mai 2013.

Enfin, l'alinéa 3 de l'article 1134 du code civil exige que les conventions soient exécutées de bonne foi. Or la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a eu un comportement gravement répréhensible et a fait preuve d'une particulière déloyauté à l'égard de monsieur X. : alors même que le compte SOCIÉTÉ GÉNÉRALE était utilisé normalement par monsieur X. jusqu'en décembre 2010, il s'est retrouvé privé à compter de janvier 2011 de chéquier et de carte bancaire en réponse à son action introduite devant la juridiction de Le Raincy le 21 décembre 2010. Puis au mois de juillet 2012, monsieur X. a ouvert un compte bancaire entre les mains de la BANQUE POSTALE et a transmis alors à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE un RIB afin que les échéances du prêt soient prélevées sur ce compte, mais celle-ci n'en a aucunement tenu compte et de ce fait plusieurs échéances du prêt immobilier sont demeurées impayées. Par ailleurs la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a continué à prélever des frais et agios d'un montant très important entre 2011 et fin 2012 alors qu'une procédure était diligentée à son encontre devant le tribunal d'instance de Le Raincy en vue d'obtenir la restitution des sommes indûment prélevées pour les années 2009 et 2010. La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE alors même qu'elle se savait débitrice de monsieur X. et condamnée par une juridiction à lui rembourser des sommes indûment perçues sur son compte courant, a prononcé la déchéance du terme du prêt immobilier et ce, de surcroît, alors que des négociations amiables étaient en cours.

Quant aux sommes réclamées par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, monsieur X. fait valoir que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE ne justifie pas des intérêts figurant au décompte et au poste « anatocisme » et ne s'explique pas sur le mode de calcul de ces sommes. Par ailleurs, s'agissant du capital restant dû au 22 mai 2013 date de la déchéance du terme, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE sollicite l'octroi d'une somme de 30.425,01 euros alors qu'un simple examen du tableau d'amortissement laisse apparaître un capital restant dû à la date de la 83ème échéance d'un montant de 28.526,62 euros. Enfin la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE réclame une somme de 2.129,75 euros à titre d'indemnité forfaitaire de résiliation mais ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice distinct induit de la résiliation du contrat.

 

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie de RPVA le 5 décembre 2016, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, intimé, demande à la cour

* de confirmer la décision rendue par le tribunal de grande instance d'Evry le 28 janvier 2016 en ce qu'il a fait application de l'article 11 du contrat de prêt sur l'exigibilité anticipée des sommes dues en cas d'échéances impayées,

* de l'infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau,

- de condamner monsieur X. au paiement de la somme de 39.987,10 euros selon décompte arrêté en date du 1er septembre 2016, outre les intérêts conventionnels au taux de 3,95 % jusqu'à parfait paiement,

- de prononcer l'irrecevabilité de la demande de monsieur X. tendant à obtenir la nullité de la déchéance du terme du 22 mai 2013 et la reprise des remboursements selon le tableau d'amortissement,

- de prononcer l'irrecevabilité de la demande de monsieur X. tendant à voir reconnaître le caractère abusif de l'article 11 du contrat de prêt,

- de débouter monsieur X. de l'ensemble de ses demandes,

- d'ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil,

- de condamner monsieur X. à payer à la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles,

- de condamner monsieur X. aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SELARL G. H.-B.,

Au soutien de ses prétentions, la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, quant à sa créance, expose les éléments suivants :

- le prêt consenti le 19 juin 2006 est en situation d'impayés depuis le 7 juin 2012. Aussi au vu du tableau d'amortissement le capital restant dû au moment de la déchéance du terme du 7 mai 2013 est d'un montant de 30.425,01 euros, contrairement à ce qu'a indiqué le tribunal retenant un montant de 28.526,62 euros ‘en considérant à tort que le tableau d'amortissement produit ne devait pas être retenu dans la mesure où il différait de celui contenu dans l'acte de prêt, alors qu'il est inscrit en tête du tableau d'amortissement de l'acte de prêt que « l'échéancier définitif avec les dates d'échéances exactes sera adressé lors du décaissement du prêt ».

- sur l'indemnité d'exigibilité : le décompte laisse apparaître que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE sollicite le paiement de la somme de 2.129,75 euros soit 7 % du montant du capital restant dû au jour de la déchéance du terme, conformément aux prévisions contractuelles de l'article 11 du contrat de prêt prévoyant que si le prêteur exige le remboursement immédiat des sommes dues, il peut demander une indemnité qui ne peut dépasser 7 % desdites sommes. Monsieur X. ne rapporte pas la preuve du caractère excessif de cette clause pénale. Au surplus cette clause pénale n'est pas de nature comminatoire, si bien que le créancier qui s'en prévaut n'a donc pas l'obligation de justifier d'un préjudice distinct induit par la résiliation du contrat. En tout état de cause la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE subit un préjudice distinct, puisqu'elle sera privée de l'application du cours des intérêts.

- par ailleurs, en ce qui concerne le montant des intérêts, l'article 11 du contrat prévoit que tant que la déchéance du terme n'est pas prononcée, le prêteur est fondé à ajouter 3 points au montant du taux d'intérêt de base, en l'espèce 3,95 %. Ainsi la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a pu valablement appliquer un taux d’intérêt de 6,95 % de la date du premier impayé jusqu'à la date d'exigibilité.

La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE conclut à l'irrecevabilité de la demande de monsieur X. tendant à la nullité de la déchéance du terme, en raison des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile qui dispose que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, or monsieur X. s'était contenté en première instance de solliciter l'allocation de dommages et intérêts et aucune demande tendant à obtenir l'annulation de la déchéance du terme prononcée, ni de reprise des remboursements selon le tableau d'amortissement, n'avaient alors été présentées. De même aucune demande tendant à obtenir le rejet de la déchéance du terme en raison du caractère abusif de la clause n'avait été formulée.

Sur le fond, nonobstant la compensation éventuelle entre les sommes dues de manière réciproques par la banque et monsieur X., la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est fondée à prononcer la déchéance du terme en vertu de l'article 11 du contrat, dans la mesure où les dates d'échéances de paiement n'ont pas été respectées, puisque du 7 juin 2012 au 21 mars 2013, date du jugement prononçant la condamnation de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, aucune somme en règlement des échéances de prêt n'a été payée par monsieur X. D'ailleurs monsieur X. à aucun moment n'a indiqué à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE qu'il souhaitait voir opérer une compensation entre le montant des échéances impayées et celui de la condamnation du tribunal. En cas d'impayés, il apparaît évident que le contrat doit pouvoir permettre aux banques de dénoncer le concours et de recouvrer la totalité des sommes dues. Les termes de l'article 11 ne prévoient aucunement que l'exigibilité des sommes peut être prononcée sans mise en demeure préalable et la banque n'a pas manqué, à trois reprises, de se rapprocher de monsieur X. pour lui demander de régulariser sa situation. La clause critiquée n'a pas de caractère abusif.

Sur la prétendue mauvaise foi de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, celle- ci dit avoir fait preuve d'une très grande patience à l'égard de monsieur X. : la première échéance impayée date du 7 juin 2012, et le prononcé de la déchéance du terme du 22 mai 2013. Deuxièmement monsieur X. ne démontre pas avoir transmis de RIB, ni avoir répondu aux courriers de la banque lui demandant les coordonnées du compte bancaire sur lequel les échéances devaient être prélevées. Monsieur X. a lui-même fait preuve de mauvaise foi, pour retarder la déchéance du terme il a fait miroiter à la banque des propositions de paiement à venir auxquelles il n'a jamais donné suite. Il ne peut sérieusement arguer des manquements de la banque s'agissant de son solde débiteur alors que celui-ci et le prêt sont deux contrats distincts.

Enfin, pour démontrer un préjudice, il ne suffit pas comme monsieur X. le fait, d'affirmer que le prétendu manquement par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à son obligation de bonne foi « a généré un préjudice important » pour lui, et en l'état monsieur X. ne démontre pas en quoi ce prétendu préjudice devrait être indemnisé à hauteur de 15.000 euros.

La SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE s'oppose aux délais de paiement sollicités par monsieur X. qui ne verse aucun élément au débat permettant de justifier de ses difficultés financières, et qui de facto a déjà bénéficié de deux ans de délais, puisque le prêt est en situation d'impayés depuis le 7 juin 2012.

 

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précitées.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

1 - Sur la recevabilité de la demande principale :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses, ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ;

Que toutefois, l'article 565 du code de procédure civile dispose que les prétentions ne sont pas nouvelles « et sont donc pleinement recevables » dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, c'est à dire qu'elles visent à obtenir en faveur de celui qui les émet une satisfaction équivalente à celle à laquelle tendaient la ou les prétentions devant le premier juge ;

Considérant que la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, rappelant que seule une demande indemnitaire avait été formulée en première instance, estime nouvelle la demande formulée pour la première fois en cause d'appel tendant à la nullité de la déchéance du terme, tout comme il n'est question qu'à hauteur d'appel, du caractère abusif de la clause ;

Qu'il sera fait observer qu'aucune demande relative à ce caractère abusif n'est reprise dans le dispositif des conclusions saisissant la cour ;

Considérant que monsieur X. demande à la cour,

« A titre principal,

- de prononcer la nullité de la clause de déchéance du terme que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE a fait jouer le 22 mai 2013,

- de débouter la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE de ses demandes de paiements,

- de dire que les échéances du prêt immobilier du 19 juin 2006, comprises entre la déchéance du terme non valide appliquée le 22 mai 2013 par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE et la reprise des remboursements seront reportés à la fin du tableau d'amortissement de ce prêt et remboursées mensuellement dans les mêmes conditions jusqu'à règlement complet, les majorations d'intérêts et les pénalités contractuelles cessant d'être dues à raison de ce retard » ;

Considérant qu'au vu des énonciations du jugement déféré, non contestées, il apparaît que monsieur X. en première instance a demandé, par dernières écritures en réplique du 10 mars 2015 :

- le rejet des demandes de la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE,

- la condamnation de celle-ci à lui verser une indemnité de 15.000 euros pour manquement à son obligation de bonne foi contractuelle,

- en tout état de cause l'octroi des plus larges délais pour qu'il s'acquitte de sa dette ;

Considérant que, toujours selon les énonciations du jugement déféré, il s'agissait d'une demande reconventionnelle d'indemnisation sur le fondement de l'article 1134 du code civil posant le principe d'exécution de bonne foi des conventions et de l'article 1147 du même code en ce qui concerne l'engagement de la responsabilité et la réparation, étant reproché à la banque d'avoir « prononcé la déchéance de manière déloyale » ;

Considérant qu'à hauteur d'appel cette demande indemnitaire est désormais formulée à titre subsidiaire, et à l'identique, puisque monsieur X. à ce titre demande à la cour « de dire que la rupture du contrat de crédit par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est constitutive d'une violation de son obligation de sincérité, loyauté et bonne foi dans les relations contractuelles, et en conséquence de condamner la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à payer à monsieur X. une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts » ;

Considérant que la demande à fins de nullité formulée à titre principal devant la cour prend le pas sur cette demande indemnitaire à laquelle elle s'ajoute, maintenue inchangée mais à titre simplement subsidiaire, et dont elle se distingue donc clairement ;

Considérant aussi que compte tenu de sa formulation la demande tendant à la nullité de la déchéance du terme ne constitue bien évidemment pas un simple moyen de droit ou de fait ;

Considérant qu'elle ne se résume pas mieux à un changement de fondement juridique avancé au soutien des prétentions purement indemnitaires initiales du demandeur ;

Considérant enfin que cette demande de nullité n'est pas virtuellement comprise dans les demandes et défenses soumises au premier juge, et n'en constitue ni leur accessoire, ni la conséquence, ni le complément ;

Considérant que compte tenu de ces divers éléments, il est dès lors impossible de considérer que la demande de nullité de déchéance du terme tend aux mêmes fins que celle, indemnitaire, soumise au premier juge ; qu'il s'agit bel et bien d'une demande nouvelle, qui doit être déclarée irrecevable par application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ;

 

2 - Sur le quantum de la créance de la banque au titre du prêt :

Considérant que le tribunal a écarté le tableau d’amortissement sur lequel la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE se base pour chiffrer sa demande au titre du capital restant dû, au motif qu'il diffère de celui contenu dans l'acte de prêt et que la banque ne fournit aucune explication ou pièce justificative expliquant ces différences et permettant de constater que les montants qui y figurent sont exacts, si bien que la banque ne justifiant pas de la valeur contractuelle et donc probante de ce tableau, il convient de retenir le tableau initial versé au contrat de prêt ;

Considérant que la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE soutient que le tableau figurant dans l'acte de prêt n'était que provisoire et a été annoncé comme tel, étant inscrit en tête dudit tableau d'amortissement que « l'échéancier définitif avec les dates d'échéances exactes sera adressé lors du décaissement du prêt » ;

Considérant que la banque produit « en pièce 7 » un tableau d'amortissement, possiblement émis le 7 mars 2013, qui est manifestement celui dont elle se prévaut pour dire que le capital restant dû au moment de la déchéance du terme du 7 mai 2013 est d'un montant de 30.425,01 euros, et non pas de 28.526,62 euros comme l'a retenu le tribunal ;

Considérant que s'il est effectivement mentionné au bas du tableau d'amortissement figurant à l'acte de prêt : « l'échéancier définitif avec les dates d’échéances exactes sera adressé lors du décaissement du prêt », pour autant la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE n'indique à aucun moment la date précise de décaissement des fonds à partir de laquelle le tableau « définitif » a, selon elle, pu être établi ;

Considérant qu'en l'absence de date de mise à disposition des fonds on ne peut se fier aux dates figurant au tableau dont la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE se prévaut, et partant au montant de capital restant dû qu'elle réclame ;

Que s'il se déduit logiquement, au vu du relevé bancaire du compte de monsieur X. du mois de juillet 2006 où figure une échéance du prêt au 7 juillet 2006 et de la mention du tableau d'amortissement initial sur une prise d'effet au 3 juillet 2006, que les fonds avaient été débloqués, quoi qu'il en soit, étant rappelé que l'offre est en date du 7 juin 2006 et a été acceptée le 19 juin 2006, on voit mal comment pourrait s'expliquer le décalage entre les deux tableaux [30.425,01’28 526,62 = 1.898,39] à la date de la 83e échéance dont il n'est pas contesté qu'elle correspond à la date de déchéance du terme ;

Considérant qu'en outre en tête de ce tableau d'amortissement dont se prévaut dorénavant la banque figure la mention suivante : « ce tableau d'amortissement ne revêt aucun caractère contractuel et n'est transmis qu'à titre d'information » ;

Considérant qu'au vu de ces divers éléments il ne peut lui être reconnu aucune valeur contractuelle probante, comme l'a justement retenu le tribunal qui n'avait d'autre solution que retenir le document inséré dans le contrat de prêt pour fixer la créance de la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE ; le jugement déféré sera donc confirmé en ce qui concerne la somme dont reste redevable monsieur X., le tribunal ayant valablement déterminé ce montant sur la foi des pièces justificatives versées aux débats ;

Considérant que la banque, qui a fait appel incident, sollicite le bénéfice de la majoration des intérêts, l'article 11 du contrat de prêt prévoyant que tant que la déchéance du terme n'est pas prononcée, le prêteur est fondé à ajouter 3 points au montant du taux d'intérêt de base, qui en l'espèce est de 3,95 %, de sorte que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE peut valablement prétendre à l'application d’un taux d'intérêt de 6,95 % de la date du premier impayé « 7 juin 2012 » jusqu'à la date d'exigibilité ‘22 mai 2013 ;

Considérant qu'en sus de cette majoration la SA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE sollicite le paiement de la somme de 2.129,75 euros soit 7 % du montant du capital restant dû au jour de la déchéance du terme, conformément aux prévisions contractuelles de ce même article 11 prévoyant que si le prêteur exige le remboursement immédiat des sommes dues, il peut demander une indemnité qui ne peut dépasser 7 % desdites sommes ;

Considérant que ces dispositions s'analysent l'une comme l'autre en clause pénale susceptible d'être modérée par le juge en cas de caractère excessif, ce qu'a, par une motivation appropriée, pertinemment décidé le tribunal de première instance ;

Considérant que le tribunal a fait une exacte application du droit en rejetant la demande de capitalisation des intérêts qu'il y a aussi lieu de le confirmer sur ce point ;

 

3 - Sur la demande subsidiaire, en dommages et intérêts :

Considérant que monsieur X. à titre subsidiaire demande à la cour de « dire que la rupture du contrat de crédit par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est constitutive d'une violation de son obligation de sincérité, loyauté et bonne foi dans les relations contractuelles, et en conséquence, de condamner la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à lui payer une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts » ;

Considérant que pour retenir la faute de la banque le tribunal a considéré comme déloyal de solliciter immédiatement le paiement des échéances impayées et la reprise du remboursement du prêt tout en tardant à verser la somme qu'elle devait elle-même qui aurait permis d'apurer l'impayé et de reprendre le cours normal du crédit ;

Considérant surtout que s'il est constant que la banque devait à monsieur X. au titre de la condamnation du 21 mars 2013 une somme supérieure à ce qu'il devait au titre du prêt immobilier il ne pouvait y avoir compensation avant que le jugement soit signifié ; que cette date n'est pas connue ; que l'on ne peut donc dire que la banque a tardé à s'exécuter et aurait par ce fait manifesté sa mauvaise foi ;

Considérant qu'il convient de souligner que le tribunal n'a pas autrement motivé sa décision, ne retenant donc pas les autres griefs de monsieur X. ;

Considérant qu'un premier courrier de préavis, daté du 5 janvier 2010 et fixant la fermeture du compte au 5 mars 2010 n'a visiblement pas été suivi d'effet, puisqu'un deuxième courrier de même teneur a été envoyé le 10 août 2010 pour une fermeture annoncée le 11 octobre 2010 ; que dans l'intervalle, en suite du courrier daté du 12 mars 2010 que monsieur X. contestant non pas le principe de la fermeture mais plutôt le montant des frais et agios bancaires prélevés, il a été procédé à un réexamen du dossier par le directeur commercial de la banque ; qu'à cette date le solde débiteur était de 626,84 euros « hors les échéances du prêt impayées » ; que monsieur X. ne peut donc sérieusement prétendre comme il le fait dans ses écritures que son compte a fonctionné normalement jusqu'à décembre 2010 ;

Considérant que selon monsieur X. cette fermeture (ne) serait (finalement) intervenue (qu') en 2012, sans qu'aucune pièce du dossier de chacune des parties ne permette d'en fixer précisément la date ;

Que quoiqu'il en soit la saisine du tribunal d'instance est postérieure de plusieurs mois au premier courrier annonçant la volonté de la banque de fermer le compte ;

Considérant qu'il doit être rappelé que la banque a toujours la faculté de décider de la fermeture d'un compte, la seule obligation pesant sur elle étant de respecter les règles de procédure qui y président, ce qui en l'espèce a été le cas ;

Qu'il en découle que le motif de la décision importe peu ; qu'il sera simplement souligné que résulte du courrier même de monsieur X. qu'il reconnaît avoir dépassé « légèrement » le découvert autorisé ; que la banque justifie en produisant les relevés dont il ressort que le compte qui sera annulé « n° [...] » et qui ne semble pas être celui sur lequel étaient effectués les prélèvements du prêt « n° 10065830914 » a fonctionné de manière créditrice pendant des années avant de se retrouver en débit de manière peu importante mais constante ce qui ne faisait pas de monsieur X. un client exemplaire ;

Considérant que dans ce même courrier monsieur X. reproche à la banque, comme il le fera dans ses écritures judiciaires y compris à hauteur d'appel, de ne pas avoir tenu compte de ses coordonnées bancaires nouvelles auprès de sa nouvelle banque pour honorer les échéances du prêt ; que pour autant, il se borne à affirmer qu'il a eu le plus grand mal à trouver une autre banque, sans produire aucune pièce relative à cet établissement (dont on ignore même le nom) ;

Considérant qu'ainsi, en l'absence de faute de la part de la banque, le jugement doit être infirmé en ce qu'il accordé à monsieur X. à titre de dommages et intérêts, la somme de 5.000 euros ;

 

Sur les délais de paiement :

Considérant que faute de tout élément nouveau cette demande sera rejetée et le jugement confirmé sur ce point ;

 

Sur les dépens et frais irrépétibles :

Considérant que monsieur X. qui échoue dans ses demandes, doit supporter la charge des dépens, et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant qu'aucune raison d'équité ne conduit à faire droit à la demande de la banque formulée sur ce même fondement ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la banque à verser à monsieur X. la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Et statuant à nouveau,

Déboute monsieur X. de sa demande indemnitaire,

Confirme le jugement déféré pour le surplus,

Et y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de monsieur X. aux fins de nullité de la déchéance du terme,

Déboute les parties de leurs demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne monsieur X. aux dépens.

LE GREFFIER                   LE PRÉSIDENT