CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 25 octobre 2018
CERCLAB - DOCUMENT N° 7680
CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 25 octobre 2018 : RG n° 17/012931 ; arrêt n° 342-18
Publication : Jurica ; Légifrance
Extrait : « Qu’en effet l’appelant indique à tort que « la SARL MS COLLECTION » a formé opposition alors que cette SARL n’existe pas puisque, s’il avait pu envisager de la créer, il ne l’a jamais fait ; qu’il a seul contracté avec LOCAM et est en conséquence seul tenu en sa qualité d’artisan exerçant sous l’enseigne MS COLLECTION ; Attendu que le tribunal d’instance était dès lors compétent pour délivrer une ordonnance d’injonction de payer et connaître de l’opposition formée par l’appelant ;
Que, dans le cadre de cette opposition, Monsieur X. a cependant sollicité l’application des dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce ; Qu’ainsi que le fait observer l’intimée, cette demande ressort de la compétence exclusive du tribunal de commerce de Paris en application de l’article D. 442-3 du même code ; Que la cour n’a dès lors pas pouvoir pour connaître de la demande de Monsieur X. formée sur le fondement des dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce et qu’il appartient à l’appelant, s’il le souhaite, de saisir le tribunal de commerce de Paris ayant seul pouvoir pour connaître de cette prétention ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL D’ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUEET FINANCIÈRE
ARRÊT DU 25 OCTOBRE 2018
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 17/012931. Arrêt n° 342-18. DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d’Instance d’ORLÉANS en date du 23 février 2017.
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT : - Timbre fiscal dématérialisé N° XX
Monsieur X.
né le [date] à [ville], [adresse], Représenté par Maître Achille B., avocat au barreau D’ORLÉANS, D’UNE PART
INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé N° YY
SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES ET MATÉRIELS
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié [adresse], représentée par Maître Estelle Y..., avocat au barreau d’ORLEANS, D’AUTRE PART
DÉCLARATION D’APPEL en date du : 21 avril 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 janvier 2018
COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l’audience publique du 13 SEPTEMBRE 2018, à 14 heures, devant Mme Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, Rapporteur, par application de l’article 786 du code de procédure civile.
Lors du délibéré : Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité, Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier : Mme Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et du prononcé.
ARRÊT : Prononcé le 25 OCTOBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Monsieur X., qui exploite à titre personnel un fonds artisanal sous l’enseigne « MS COLLECTION », a commandé à la société de prestations informatiques AFE la fourniture d’un site Internet et a contracté le 24 septembre 2010 auprès de la société LOCAM -LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIEL (LOCAM) un contrat de location de cette prestation moyennant le règlement de 48 loyers mensuels d’un montant de 165,05 euros TTC chacun.
Il a signé le 22 octobre 2010 un « procès-verbal de livraison et de conformité de site web ».
Plusieurs échéances de location étant demeurées impayées, LOCAM lui a adressé le 31 janvier 2011 une mise en demeure demeurée vaine et a obtenu, le 31 mai 2011, la délivrance, par le président du tribunal d’instance d’Orléans, d’une ordonnance enjoignant au locataire de lui régler la somme de 7.921,92 euros avec intérêts à compter du 1er février 2011.
Cette ordonnance a été signifiée le 1er août 2011 suivant procès-verbal de recherches infructueuses puis à personne le 30 juin 2016 et Monsieur X. y a formé opposition suivant déclaration au greffe en date du 1er juillet 2016.
Par jugement en date du 23 février 2017, le tribunal d’instance d’Orléans a condamné Monsieur X. à verser à la société LOCAM la somme de 7.921,92 euros outre intérêts au taux légal à compter du 1er février 2011 et a débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Monsieur X. a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 21 avril 2017.
Il conclut à titre principal à l’annulation du jugement déféré pour incompétence matérielle du tribunal d’instance, seul le tribunal de commerce ayant selon lui compétence pour connaître d’un litige opposant deux sociétés commerciales. A titre subsidiaire il demande à la cour de constater le déséquilibre significatif introduit dans le contrat par la clause 18-3 du contrat et demande que la convention, ou à tout le moins cette clause, soient déclarés nulles. Il fait par ailleurs état d’un dol ayant vicié son consentement et il réclame paiement de dommages et intérêts en réparation de son préjudice et sollicite la compensation entre les sommes respectivement dues. A titre infiniment subsidiaire il sollicite la réduction de la clause pénale. En tout état de cause, il sollicite 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et la condamnation de LOCAM à supporter les dépens dont distraction au profit de Maître Achille B.
Il fait tout d’abord valoir que le tribunal d’instance était incompétent pour connaître du litige qui opposait deux sociétés commerciales. Il prétend ensuite que le contrat signé avec LOCAM introduisait un déséquilibre significatif dans les relations des parties au sens de L. 442-6 1 du code de commerce. Il soutient que la clause 18.3 prévoyant le règlement par la société MS COLLECTION d’une indemnité égale à 10 % du montant total des loyers majorée de tous frais engagés au titre de la location est illicite au sens de ces dispositions du code de commerce.
LOCAM conclut à la confirmation du jugement déféré, hormis en ce qu’il a rejeté sa demande relative à la clause pénale. Elle demande à la cour de déclarer irrecevable ou mal fondée l’exception d’incompétence soulevée par l’appelant ou subsidiairement, si la cour y faisait droit, de statuer au fond en application de l’article 79 du code de procédure civile et de condamner Monsieur X. à lui payer la somme principale de 7.921,92 euros outre intérêts au taux légal à compter du premier février 2011. En tout état de cause elle réclame paiement de 792,19 euros au titre de la clause pénale de 10 % avec intérêts au taux légal à compter du premier février 2011, la capitalisation des intérêts par année entière à compter de la date de notification de ses premières écritures en contenant la demande, le versement d’une indemnité de procédure de 2.000 euros et la condamnation de l’appelant aux dépens d’appel dont distraction au profit de Maître Estelle Y.
Elle fait valoir que l’exception d’incompétence matérielle soulevée par l’appelant est doublement irrecevable, d’une part puisque non présentée devant le conseiller de la mise en état d’autre part puisque constituant une exception de procédure devant être soulevée avant toute défense au fond. Elle souligne que cette exception est au surplus mal fondée puisque Monsieur X. est immatriculé en sa personne, l’appellation « MS COLLECTION » n’étant que le nom commercial de l’enseigne du fonds artisanal qu’il exploite. Enfin elle rappelle qu’aux termes de l’article 79 du code de procédure civile, lorsque la cour infirme du chef de la compétence, elle statue néanmoins sur le fond du litige si elle est juridiction d’appel relativement à la juridiction qu’elle estime compétente, ce qui est le cas en l’espèce.
Elle soutient par ailleurs que les prétentions de l’appelant fondées sur les dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce sont irrecevables comme relevant de juridictions spécialisées expressément désignées par décret ; que le tribunal d’instance et la présente cour sont donc incompétents pour en connaître tout comme l’aurait été le tribunal de commerce d’Orléans dont l’appelant souhaite voir reconnaître la compétence ; qu’en tout état de cause les dispositions susvisées ne sont pas applicables à LOCAM qui n’entretient pas un courant d’affaires avec Monsieur X..
Elle prétend enfin qu’il ne saurait y avoir de confusion entre les indemnités de résiliation et la clause pénale prévue au contrat de location que d’ailleurs le premier juge a déjà réduit à néant ; qu’en tout état de cause, le pouvoir modérateur du juge est conditionné par la démonstration du caractère « manifestement excessif » du montant de la peine qui n’est nullement rapportée par l’appelant.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
CELA ETANT EXPOSÉ, LA COUR :
Attendu que l’intimée soutient sans pertinence que l’appelant aurait dû saisir le juge de la mise en état d’un incident tendant à trancher l’exception d’incompétence qu’il soulève aujourd’hui devant la cour puisque cette exception ne mettait pas fin à l’instance, cette cour étant compétente pour statuer sur les décisions rendues tant par le tribunal d’instance que par le tribunal de commerce et devant donc connaître elle-même de la question de la compétence pour, statuer au fond si elle retenait la compétence du tribunal de commerce ;
Attendu que LOCAM fait ensuite valoir que sont applicables les dispositions de l’article 74 du code de procédure civile aux termes desquelles l’exception de compétence doit être soulevée avant toute défense au fond ;
Que cependant tel a bien été le cas en l’espèce puisque Monsieur X. n’a pas comparu en première instance, n’a donc pas conclu devant le premier juge et a soulevé cette exception devant la cour avant toute défense au fond ;
Que l’exception est donc recevable ;
Mais attendu qu’elle n’est pas fondée ;
Qu’en effet l’appelant indique à tort que « la SARL MS COLLECTION » a formé opposition alors que cette SARL n’existe pas puisque, s’il avait pu envisager de la créer, il ne l’a jamais fait ; qu’il a seul contracté avec LOCAM et est en conséquence seul tenu en sa qualité d’artisan exerçant sous l’enseigne MS COLLECTION ;
Attendu que le tribunal d’instance était dès lors compétent pour délivrer une ordonnance d’injonction de payer et connaître de l’opposition formée par l’appelant ;
Que, dans le cadre de cette opposition, Monsieur X. a cependant sollicité l’application des dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce ;
Qu’ainsi que le fait observer l’intimée, cette demande ressort de la compétence exclusive du tribunal de commerce de Paris en application de l’article D. 442-3 du même code ;
Que la cour n’a dès lors pas pouvoir pour connaître de la demande de Monsieur X. formée sur le fondement des dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce et qu’il appartient à l’appelant, s’il le souhaite, de saisir le tribunal de commerce de Paris ayant seul pouvoir pour connaître de cette prétention ;
Attendu que Monsieur X. prétend enfin que les indemnités de résiliation seraient excessives et sollicite, en conséquence, leur réduction ;
Qu’aux termes de l’article 18 du contrat de location, il était convenu que faute de règlement dans les huit jours d’une mise en demeure, la totalité des sommes dues deviendrait de plein droit immédiatement exigible et que la SAS LOCAM pourrait en poursuivre le recouvrement par toutes voies et tous moyens de droit ;
Que l’indemnité de résiliation contractuelle de 7.921,92 euros n’est pas une clause pénale qui est quant à elle prévue à hauteur de 792,19 euros ;
Que l’objet du contrat étant une prestation de site web, LOCAM ne pourra certes récupérer ce site pour compenser son préjudice mais qu’elle obtient paiement immédiat de l’intégralité des loyers dus, ce qui répare son préjudice né des gains non perçus ;
Que, si le premier juge a omis de motiver sa décision de suppression de la clause pénale, il a cependant fait une exacte appréciation des situations respectives des parties et du taux des intérêts qui la rendent manifestement excessives en la réduisant à néant ;
Qu’aux termes des dispositions de l’article 1343-2 nouveau du code civil, applicable à la date à laquelle la cour statue puisque la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisés, la capitalisation des intérêts n’est pas de droit et ne sera pas ordonnée ;
Que la décision déférée sera donc intégralement confirmée ;
Attendu que Monsieur X., succombant à l’instance, en supportera les dépens et qu’il sera fait application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’intimée ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
DÉCLARE recevable mais non fondée l’exception d’incompétence soulevée par Monsieur X.,
CONSTATE que la cour n’a pas pouvoir pour connaître des demandes formées par l’appelant sur le fondement des dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce, ni pour les transmettre à la cour d’appel de Paris, de telles demandes devant être initialement formées devant le tribunal de commerce de Paris,
CONFIRME la décision entreprise,
Y AJOUTANT,
CONDAMNE Monsieur X. à payer à la société LOCAM -LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIEL la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Monsieur X. aux dépens d’appel,
ACCORDE à Maître Y., avocat, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Mme Irène ASCAR, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT