CA TOULOUSE (1re ch. 1), 18 mars 2019
CERCLAB - DOCUMENT N° 7812
CA TOULOUSE (1re ch. 1), 18 mars 2019 : RG n° 16/02064 ; arrêt n° 94
Publication : Jurica
Extraits (arguments de la MAF assureur de l’architecte) : « Subsidiairement, - dire que la part de responsabilité de la Sarl R. ne saurait excéder 20 % - dire qu'aucune condamnation solidaire ou in solidum ne saurait être prononcée à l'encontre de la Sarl R. Architecture ou de M. R. et par voie de conséquence à son encontre en application de la clause d'exclusion de solidarité prévue dans le contrat de maîtrise d'œuvre ».
Extraits (arguments d’un des intimés, Sa Placeo, en réponse à celle de la MAF) : « Elle considère que la Maf n'est pas fondée à opposer une clause d'exclusion de solidarité du contrat d'architecte qui est abusive comme créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du non professionnel au sens des articles L 132-1 du code de la consommation, ni la règle de la réduction proportionnelle de l'article L 113-9 du code des assurances dès lors qu'elle ne justifie pas, malgré une sommation de communiquer, du montant de la prime qui aurait du être normalement réglée afin de pouvoir déterminer contradictoirement le coefficient de minoration de l'indemnité, se contentant de dire que le pourcentage est de 58 %. »
Extrait (motifs) : 1/ « Divers manquements à sa mission de conception, de direction des travaux et d'assistance au maître d'ouvrage ayant participé à la survenue du désordre sont établis à l'encontre de la Sarl R.
Elle n'a pas attendu l'étude qu'elle avait elle-même demandée au géotechnicien Fugro pour établir le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) et a rédigé ce document sur ses propres hypothèses de travaux.
Elle a prévu, pour le nouveau dallage, un hérisson de 20 cm d'épaisseur et un film polyane de 150 microns, a proposé le 17 mai 2005 à la signature du maître d'ouvrage le devis de la Sa Crespy qui ne respectait pas ces prescriptions puisqu'il ne comprenait qu'un « reprofilage » du sol avant réalisation du dallage ; lorsqu'elle a reçu le rapport de la Sa Fugro du 13 juin 2005 elle n'a pas tenu compte de ses préconisations qui auraient entraîné un surcoût par rapport au prix du marché déjà signé et ne l'a pas transmis à la Sa Crespy ; elle a demandé à cette entreprise d'effectuer le reprofilage du sol prévu au devis au lieu de le décaisser et de mettre en place une forme insensible à l'eau dès lors que cette étude géotechnique indiquait que la création d'un dallage coté [...] serait effectuée sur un support hétérogène constitué de remblais fermes avec des points durs (anciennes maçonneries) de sorte qu'il convenait de le mettre en œuvre sur une couche de forme en matériau insensible à l'eau de 35 centimètres d'épaisseur ; elle a programmé et fait exécuter le coulage de la dalle sur le sol reprofilé sans avoir l'avis du bureau de contrôle sur les dispositions à prendre pour réaliser le dallage ; elle a pris un risque, qualifié de « grand » par l'expert, en se passant des rapports de techniciens pourtant spécifiquement mandatés sur ces points, d'autant qu'elle ne justifie même pas en avoir avisé le maître d'ouvrage.
Elle a, pour le dallage ancien, mal apprécié sa qualité et la possibilité de le conserver par rapport aux revêtements qu'il était censé recevoir, alors qu'elle avait connaissance par le rapport Fugro de sa faible épaisseur (5 à 7 cm), de l'absence de hérisson et de film polyane (barrière anti-remontées d'humidité), de ce que la mise en place des surcharges d'exploitation pourrait se traduire par des fissurations du dallage existant et des tassements de l'ordre du centimètre, qu'une reconnaissance visuelle permettait de constater qu'il était fissuré.
Elle ne s'est pas davantage préoccupée de l'état des regards extérieurs alors qu'elle aurait du attirer l'attention du maître d'ouvrage sur ce point puisqu'ils étaient tous en mauvais état.
Elle a laissé les entreprises faire couler de l'eau dans un regard sans fond pendant plus de deux mois de chantier (mi-septembre à fin novembre 2015), ce qui traduit une carence dans le suivi du chantier.
Elle a omis de faire mentionner au procès-verbal de réception de la Sa Crespy des réserves pour un désordre d'humidité dont elle était parfaitement informée et qui n'avait pas été réparé, en s'abstenant d'aviser le maître d'ouvrage des conséquences d'une absence de réserve quant aux désordres apparents ; elle a manqué par la même à son devoir de conseil au regard de sa mission d'assistance pour les opérations de réception.
Chacune de ces fautes de l'architecte a contribué à la réalisation du dommage subi par le maître d'ouvrage. »
2/ « M. R. et la Sarl R. doivent être déclarés tenus in solidum au paiement de cette somme, la Sa Maf étant également tenue mais à hauteur de 2.714,50 euros HT indexée seulement (58 % de 4.680,18 euros), avec également partage par moitié soit 2.340,09 euros dans les rapports entre eux pour les mêmes motifs que ci-dessus. » [application de la règle de la réduction proportionnelle]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
PREMIÈRE CHAMBRE SECTION 1
ARRÊT DU 18 MARS 2019