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CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 19 septembre 2018

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 19 septembre 2018
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 4
Demande : 16/05535
Date : 19/09/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2018-015993
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8012

CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 19 septembre 2018 : RG n° 16/05535 

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2018-015993

 

Extrait (rappel des faits) : « La société B. exerce l'activité de négoce import-export de produits agricoles tandis que la société Agriland a pour activité le conditionnement de bulbes et la fabrication de tresses, grappes et manchons d'oignons, échalotes et aulx. Par contrat de fourniture exclusive du 4 février 2004, la société B. s'est engagée à acheter à la société Agriland, qui s'est engagée à lui vendre, divers produits en s'interdisant de les fournir à toute société concurrente de la société B. Ce contrat a été souscrit pour une durée de trois ans, renouvelable d'année en année par tacite reconduction, sauf dénonciation par l'une des parties trois mois avant son terme.

Le 5 octobre 2009, la société B. a dénoncé ce contrat et transmis à la société Agriland un nouveau projet de contrat valable du 1er janvier au 31 décembre 2010. Mais aucun nouveau contrat n'a été signé entre les parties pour cette période de temps.

Le 22 décembre 2010, les deux sociétés ont signé un nouveau contrat de fournitures d'une durée d'un an, soit du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, renouvelable d'année en année par tacite reconduction sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties trois mois avant son terme.

Aux termes de cette convention : - la société B. s'engageait à acheter et la société Agriland à lui vendre : 5000/8000 grappes d'oignons-Cat 1 par semaine, à fournir en fonction des besoins ainsi que 10.000/20.000 manchons 500 g d'oignons Cat 1 par semaine, à fournir en fonction des besoins, - la société B., en sus des matières premières, fournissait à la société Agriland les emballages et accessoires (filets, cartons étiquettes...) nécessaires à la confection des produits commandés, - les factures des deux parties devaient être réglées par décade les 10, 20 et 30 du mois courant déduction faite du compte client sur règlement du compte fournisseur, - la société Agriland s'interdisait de fournir les produits, objet du contrat, à toute société concurrente de la société B.

Reprochant à la société Agriland de livrer des produits identiques à ceux objet du contrat à un de ses concurrents, la société B. l'a mise en demeure, le 9 janvier 2012, de respecter son obligation d'exclusivité. Le 19 septembre 2012, la société B. a notifié à la société Agriland la dénonciation du contrat du 22 décembre 2010 arrivant à échéance le 31 décembre 2012 ; toutefois les parties ont poursuivi des relations en 2013. Le 31 octobre 2013, la société Agriland a fait assigner la société B. devant le tribunal de commerce de Lyon afin d'obtenir paiement de différentes sommes, dont des dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale établie. »

Extrait (motifs) : « Sur les demandes de la SELARL Thierry S., ès-qualités, en dommages-intérêts pour non-respect des quantités minimales à commander et pour non-respect des délais de paiement : La SELARL Thierry S., ès-qualités, reproche en premier lieu à la société B. d'avoir manqué à son obligation de résultat en ne commandant pas les quantités minimales prévues au contrat du 22 décembre 2010 au cours des mois de juillet, août et septembre 2013. Elle souligne que la société B. lui impute un non-respect de la clause d'exclusivité y compris en 2013, ce qui démontre que la relation contractuelle a perduré entre les parties aux mêmes conditions, que la contrepartie de l'exclusivité était l'obligation de commandes minimales et que la société Agriland était en situation de dépendance économique puisqu'elle n'avait que la société B. comme cliente.

La SELARL Thierry S., ès-qualités, fait grief en second lieu à la société B. de ne pas avoir respecté les délais de paiement prévus au contrat et de lui avoir imposé des conditions de paiement dérogatoires aux accords contractuels et à la loi, à savoir les articles L. 442-6-I-2°, L. 441-6 et L. 443-1 du code de commerce. Elle précise que :

- la première décade d'août n'a été réglée que le 11 septembre 2012,

- la société B. a déduit abusivement deux factures datées du 5 septembre 2013 sur la décade d'août au lieu de la décade de septembre, a effectué un calcul erroné de leur montant (2.197,87 euros au lieu de 2.181,87 euros) et a exigé leur paiement avant leur exigibilité,

- le manquement aux obligations légales a causé un préjudice à la société Agriland qui devait assurer son exploitation quotidienne et respecter son plan de redressement.

Mais la société B. réplique, à juste raison, qu'il ne peut lui être reproché le non-respect des quantités minimales de commandes ni le non-respect des délais de paiement, tels que prévus au contrat du 22 décembre 2010, celui-ci ayant été régulièrement dénoncé et aucun accord n'étant démontré sur le maintien des conditions contractuelles antérieures.

S'agissant des délais de paiement, l'article L. 441-6 du code de commerce applicable à tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur dispose, notamment, que sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution de la commande, l'article 443-1 sanctionnant par une amende le non-respect du délai de paiement. Or, à supposer qu'une infraction à cette règle soit établie, il n'est pas rapporté la preuve de l'existence du préjudice qui en serait résulté pour la société Agriland.

Il n'est pas plus démontré que la société B. aurait, au mépris des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce soumis ou tenté de soumettre son partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

En conséquence de ces éléments, les deux demandes en dommages-intérêts seront rejetées. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 4

ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2018