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CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 10 septembre 2019

Nature : Décision
Titre : CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 10 septembre 2019
Pays : France
Juridiction : Besancon (CA) 1re ch. civ. et com.
Demande : 18/00746
Date : 10/09/2019
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 24/04/2018
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8174

CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 10 septembre 2019 : RG n° 18/00746

Publication : Jurica

 

Extrait : « Si le code de la consommation a vocation à s'appliquer dans les relations entre consommateurs et professionnels, M. X. rappelle que, par dérogation, l'article L. 221-3 étend l'application de l'obligation d'information aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet du contrat n'entre pas dans le champ d'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

En l'espèce, il souligne qu'il a conclu, le 26 août 2015, avec la société un contrat de fourniture de service consistant en la mise à disposition de matériel téléphonique moyennant le paiement de loyers, et ce à son domicile après de multiples démarchages téléphoniques effectués par l'opérateur téléphonique Orange Business Services. Il précise qu'il exerce, seul en libéral, une activité de conseil en matière de construction, de sorte qu'il n'a aucune compétence dans le domaine de la téléphonie et que, par suite, un contrat de location de matériel téléphonique n'entre pas dans le champ de son activité principale. Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, il ajoute rapporter la preuve, au travers d'une attestation de M. Z, expert-comptable, qu'en 2015, année de la signature du contrat litigieux, il n'avait aucun salarié, de sorte qu'il estime remplir les conditions prévues à l'article L. 221-3 du code de la consommation.

Cependant, la société avec laquelle M. X. a passé le contrat litigieux est une société de financement spécialisée dans le crédit-bail. Il apparaît qu'à ce titre, l'activité de cette dernière est soumise au code monétaire et financier qui comporte un régime propre au « démarchage bancaire et financier » qui en tant que loi spéciale est exclusive des dispositions du code de la consommation, l'article L. 221-2 du dit code (dans sa nouvelle codification) disposant que sont exclus du champ d'application du chapitre consacré aux « contrats conclus à distance et hors établissement » : « 4° Les contrats portant sur les services financiers ». Or, un dispositif protecteur en matière de démarchage bancaire et financier se trouve inséré dans le code monétaire et financier dont l'article L. 341-1 prévoit que : « constitue un acte de démarchage bancaire ou financier toute prise de contact non sollicitée avec une personne physique ou morale déterminée en vue d'obtenir de sa part un accord sur », notamment, la réalisation par les établissements de crédit et les sociétés de financement « d'une opération de banque ou d'une opération connexe définies aux articles L. 311-1 et L. 311-2 », « les opérations de location simple de biens mobiliers ou immobiliers pour les établissements habilités à effectuer des opérations de crédit-bail » entrant selon l'article L. 311-2 dans la définition des opérations connexes précitées.

Dès lors, le contrat de location que M. X. a conclu avec la société n'est pas soumis aux dispositions du code de la consommation et notamment pas à l'exigence d'un formulaire de rétractation. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2019

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/00746. - N° Portalis DBVG V B7C D6IX. Contradictoire. Sur appel d'une décision du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE VESOUL en date du 27 mars 2018 [RG n° 17/00638]. Code affaire : 56B, Demande en paiement du prix, ou des honoraires formée contre le client et/ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix, ou des honoraires.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT :

Monsieur X.

profession : économiste de la construction, né le |date] à [ville] - de nationalité française, demeurant [adresse], Représenté par Maître Cristina DE MAGALHAES de la SELARL SCHWERDORFFER WEIERMANN PICHOFF DE MAGALHAES SPATAFORA, avocat au barreau de BESANCON

 

ET :

INTIMÉE :

SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS

dont le siège est sis [adresse], Représentée par Maître Pascale BRETON de la SCP HENNEMANN BRETON BEN DAOUD, avocat au barreau de BESANCON et la SCP LEXI CONSEIL ET DEFENSE, avocats au barreau de SAINT-ÉTIENNE

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre.

ASSESSEURS : Madame A. CHIARADIA (magistrat rapporteur) et Monsieur L. MARCEL, Conseillers.

GREFFIER : Madame D. BOROWSKI, Greffier.

lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre

ASSESSEURS : Madame A. CHIARADIA et Monsieur L. MARCEL, Conseillers.

L'affaire, plaidée à l'audience du 11 juin 2019 a été mise en délibéré au 10 septembre 2019. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et prétentions des parties :

Par exploit d'huissier délivré le 26 avril 2017, la SAS Locam Location Automobiles Matériels (la société) a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Vesoul M. X. pour le voir condamné à lui payer, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la somme de 16.912,47 euros à titre principal, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 mars 2017 et 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant jugement rendu le 27 mars 2018, ce tribunal a :

- débouté M. X. de sa demande en nullité du contrat,

- condamné M. X. à payer à la société la somme de 15.778,97 euros avec les intérêts au taux légal « à compter du 17 mars 2015 » (sic),

- rejeté la « demande d'intérêts formulée par M. X. »,

- condamné M. X. à payer à la société une somme de 100 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné M. X. aux dépens.

[*]

Ce dernier a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe le 24 avril 2018 et, aux termes de ses dernières conclusions transmises le 26 novembre 2018, il en sollicite l'infirmation en toutes ses dispositions et demande à la cour de :

- à titre principal, dire qu'il a été privé de son droit à rétractation,

- à titre subsidiaire, dire que la Cie Orange et la société ont fait usage de manœuvres dolosives,

- à titre infiniment subsidiaire, dire que la présentation qui lui a été faite par la Cie Orange a induit une erreur sur les qualités essentielles du contrat,

- dans les trois cas, prononcer en conséquence la nullité du contrat de location conclu entre les parties le 26 août 2015 et débouter la société de toutes ses fins et prétentions,

- en toutes hypothèses, dire que les contrats Orange et Locam sont des contrats liés et condamner la société à lui verser 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi,

- « condamner la SAS Locam à payer à Mme X Y la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile » (sic),

- condamner la société aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Schwerdorffer Weiermann Pichoff De Magalhaes Spatafora, avocat aux offres de droit.

[*]

Selon écritures déposées le 11 octobre 2018, la société conclut à la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qu'il a réduit à 400 euros la clause pénale de 10 % et demande à la cour de condamner M. X. à lui payer 1.537,50 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 mars 2017 au titre de la clause pénale, 2.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Hennemann Breton Ben Daoud, « en application des dispositions de l'article 688 du code de procédure civile » (sic).

[*]

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions ci-dessus rappelées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 mai 2019.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs de la décision :

Sur l'application des dispositions du code de la consommation :

M. X. soutient que le contrat le liant à la société doit être déclaré nul pour manquement aux dispositions protectrices du code de la consommation dans la mesure où elle ne l'a pas informé préalablement à la conclusion du contrat des conditions, délais et modalités d'exercice du droit de rétractation et ne lui a pas fourni de formulaire de rétractation, lesdites informations devant être formalisées par un écrit en application de l'article L. 221-8 du code de la consommation.

Si le code de la consommation a vocation à s'appliquer dans les relations entre consommateurs et professionnels, M. X. rappelle que, par dérogation, l'article L. 221-3 étend l'application de l'obligation d'information aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet du contrat n'entre pas dans le champ d'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

En l'espèce, il souligne qu'il a conclu, le 26 août 2015, avec la société un contrat de fourniture de service consistant en la mise à disposition de matériel téléphonique moyennant le paiement de loyers, et ce à son domicile après de multiples démarchages téléphoniques effectués par l'opérateur téléphonique Orange Business Services.

Il précise qu'il exerce, seul en libéral, une activité de conseil en matière de construction, de sorte qu'il n'a aucune compétence dans le domaine de la téléphonie et que, par suite, un contrat de location de matériel téléphonique n'entre pas dans le champ de son activité principale.

Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, il ajoute rapporter la preuve, au travers d'une attestation de M. Z, expert-comptable, qu'en 2015, année de la signature du contrat litigieux, il n'avait aucun salarié, de sorte qu'il estime remplir les conditions prévues à l'article L. 221-3 du code de la consommation.

Cependant, la société avec laquelle M. X. a passé le contrat litigieux est une société de financement spécialisée dans le crédit-bail.

Il apparaît qu'à ce titre, l'activité de cette dernière est soumise au code monétaire et financier qui comporte un régime propre au « démarchage bancaire et financier » qui en tant que loi spéciale est exclusive des dispositions du code de la consommation, l'article L. 221-2 du dit code (dans sa nouvelle codification) disposant que sont exclus du champ d'application du chapitre consacré aux « contrats conclus à distance et hors établissement » : « 4° Les contrats portant sur les services financiers ».

Or, un dispositif protecteur en matière de démarchage bancaire et financier se trouve inséré dans le code monétaire et financier dont l'article L. 341-1 prévoit que : « constitue un acte de démarchage bancaire ou financier toute prise de contact non sollicitée avec une personne physique ou morale déterminée en vue d'obtenir de sa part un accord sur », notamment, la réalisation par les établissements de crédit et les sociétés de financement « d'une opération de banque ou d'une opération connexe définies aux articles L. 311-1 et L. 311-2 », « les opérations de location simple de biens mobiliers ou immobiliers pour les établissements habilités à effectuer des opérations de crédit-bail » entrant selon l'article L. 311-2 dans la définition des opérations connexes précitées.

Dès lors, le contrat de location que M. X. a conclu avec la société n'est pas soumis aux dispositions du code de la consommation et notamment pas à l'exigence d'un formulaire de rétractation.

 

Sur les manœuvres dolosives :

Subsidiairement, M. X. invoque des manœuvres dolosives imputées principalement à la société Orange, exposant que celle-ci l'a démarché « pour lui proposer de reprendre à son compte le contrat Paritel et fixer les modalités de rupture du dit contrat », en lui certifiant que le nouveau contrat annulerait et remplacerait l'ancien, et ce, de façon d'autant plus simple que le contrat de financement du nouveau matériel était souscrit auprès de la SAS Locam, société signataire du précédent contrat de financement.

Cependant, celui qui se prétend victime d'un dol doit le prouver et si le dol d'un tiers peut être pris en compte, ce n'est qu'à la condition que ce dernier soit dans la cause. Or tel n'est pas le cas de la société Orange.

 

Sur l'erreur :

Très subsidiairement, sur le fondement de l'article 1132 du code civil, M. X. invoque l'erreur sur les qualités essentielles de la prestation due, en rappelant qu'il ne dispose d'aucune compétence téléphonique et qu'il a cru qu'un contrat pouvait se substituer à un autre, compte tenu de la présentation qui lui en avait été faite dans le cadre du démarchage par la société Orange, de sorte qu'il n'a pas compris la nature de l'engagement souscrit.

Cependant, là encore, M. X. procède par simple affirmation et il est peu crédible que, par ailleurs économiste de la construction, il ait pu se méprendre sur la portée du contrat qui lui était proposé en dépit de son absence de compétence en matière de téléphonie.

 

Sur l'interdépendance des contrats et les dommages et intérêts réclamés par M. X. :

Enfin, M. X. demande à la cour de « prononcer la nullité du contrat conclu avec la compagnie Orange, ainsi que la résolution du contrat conclu avec la société au regard de l'interdépendance des dits contrats », prétention qui ne saurait, toutefois, prospérer dans la mesure où, rappelons-le, la société Orange n'a pas été attraite en la cause.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. X. de sa demande en nullité du contrat le liant à la société. Il en sera de même en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, la cour faisant siens les motifs pertinents du premier juge sur ce point.

 

Sur la demande en paiement :

Le premier juge a, d'office, ramené le montant de la clause pénale à 400 euros. Pourtant celle-ci, destinée à compenser les frais administratifs et de gestion causés par la défaillance du locataire, avait été contractuellement prévue à hauteur de 10 % des sommes dues, soit 1.537,50 euros.

Par ailleurs, il n'est pas contesté que les matériels loués n'ont pas été restitués.

Dans ces conditions, la clause pénale prévue à l'article 12 des conditions générales du contrat n'apparaît pas manifestement excessive de sorte que M. X. sera, sur appel incident de la société, condamné à payer à celle-ci la somme de 1.537,50 euros au titre de la clause pénale, outre les intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2017, date de réception par M. X. de la lettre de mise en demeure, le jugement entrepris étant infirmé en ce qu'il n'a retenu qu'une somme de 400 euros à ce titre.

 

Sur les demandes accessoires :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimée la totalité des frais qu'elle a dû engager pour se défendre en appel. Une somme de 1.500 euros lui sera donc allouée à ce titre, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant, M. X. sera condamné aux dépens d'appel, les dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance étant, par ailleurs, confirmées, ainsi que celles non soumises à la critique des parties.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Vesoul en date du 27 mars 2018, sauf en ce qu'il a réduit à 400 euros le montant de la clause pénale prévue contractuellement.

Statuant à nouveau sur ce point et y ajoutant,

Condamne M. X. à payer à la SAS Locam Location Automobiles Matériels la somme de mille cinq cent trente sept euros cinquante centimes (1.537,50 euros) au titre de la clause pénale, outre intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2017.

Condamne M. X. à payer à la SAS Locam Location Automobiles Matériels la somme de mille cinq cents euros (1.500 euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le condamne aux dépens d'appel, avec possibilité pour la SCP Hennemann - Breton - Ben Daoud, avocat, de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par Monsieur Edouard Mazarin, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Madame Dominique Borowski, greffier.

Le greffier,                            le président de chambre