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CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-4), 9 janvier 2020

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-4), 9 janvier 2020
Pays : France
Juridiction : Aix-en-Provence (CA), ch. 3 - 4
Demande : 17/08928
Décision : 2020/13
Date : 9/01/2020
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 10/05/2017
Numéro de la décision : 13
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8294

CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 3-4), 9 janvier 2020 : RG n° 17/08928 ; arrêt n° 2020/13

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « La prescription court donc à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance. Il en résulte que l'action en responsabilité diligentée par monsieur et madame X. se prescrit par cinq ans ; le point de départ se situe au jour où les emprunteurs ont connu ou auraient dû connaître les faits leur permettant d'agir en responsabilité contre la banque.

Le premier juge a relevé que les époux X. ne justifient pas de la date à laquelle le dommage invoqué leur a été révélé et que leurs écritures ne comportent sur ce point aucun élément et aucune explication ; en cause d'appel, il en est de même. En ce qui concerne les opérations du crédit litigieux, le point de départ est donc le jour de l'octroi du prêt ; l'offre a été acceptée le 6 juillet 2009 ; l'assignation a été délivrée le 13 novembre 2015, après expiration du délai de cinq ans. Le jugement sera dès lors confirmé sur la prescription. »

2/ « La prescription court donc sur ce point à compter de la date à laquelle le dommage leur a été révélé ; néanmoins, dans le silence des époux X. sur la date à laquelle ils ont eu connaissance de l'irrégularité alléguée, le point de départ de la prescription est la date du contrat ; ce dont il résulte que l'action est également prescrite. »

3/ « En cause d'appel, monsieur et madame X. demandent « de juger non écrite avec les conséquences de droit, la stipulation d'intérêts chargeant à titre exclusif les risques de change sur ceux qu'aurait pris l'emprunteur, comme créant un déséquilibre au détriment du consommateur. » La banque soulève l'irrecevabilité de la demande, comme étant nouvelle en appel.

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. En vertu de l'article 565 qui suit, les prétentions ne sont pas nouvelles, dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. Néanmoins, en application de l'article 566 les parties peuvent ajouter à leurs demandes devant le premier juge, toutes celles qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.

En l'occurrence, la demande concernant le caractère abusif de la clause litigieuse n'est pas l'accessoire, la conséquence ou le complément des demandes présentées en première instance. C'est donc à bon droit que la banque conclut à l'irrecevabilité de la demande comme nouvelle en appel. »

4/ « A titre subsidiaire, monsieur et madame X. demandent d'annuler la « clause d'indexation » pour violation des dispositions de « l'article L. 111-2 » du code monétaire et financier (en réalité L. 112-2 du code monétaire et financier) ; ils exposent que la stipulation conduisant à faire varier un crédit en francs suisses en fonction d'un indice est illicite et constitue une clause d'indexation irrégulière. […] En l'occurrence, l'offre de prêt permettait à monsieur et madame X. d'avoir connaissance qu'ils souscrivaient un prêt en francs suisses ; cela ressort de la description du crédit en première page ; il est mentionné que le montant du crédit et de 466.806,36 francs suisses. Il est également clairement stipulé en pages 2 et 3 de l'offre de crédit, l'ouverture d'un compte interne en euros et d'un compte interne en francs suisses ; il est précisé que le crédit sera géré d'une part en francs suisses (monnaie de compte) pour connaître à tout moment l'état de remboursement du crédit et, d'autre part en euros (monnaie de paiement) pour permettre le paiement des échéances du crédit. Ainsi à la lecture de l'offre de prêt, monsieur et madame X. avaient connaissance de la clause de monnaie de compte qu'ils qualifient de clause d'indexation. Ce faisant, l'action engagée le 13 novembre 2015 est prescrite, ayant été engagée plus de cinq ans après l'offre acceptée en date du 6 juillet 2009. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 3-4

ARRÊT DU 8 JANVIER 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 17/08928. Arrêt n° 2020/13. N° Portalis DBVB-V-B7B-BAQHW. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 10 avril 2017 enregistré au répertoire général sous le R.G. n° 15/06226.

 

APPELANTS :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par Maître Elodie F. de la SELAS B & F, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame Y.

née le [date] à [ville], demeurant [adresse], représentée par Maître Elodie F. de la SELAS B & F, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

 

INTIMÉE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

demeurant [adresse], représentée par Maître Philippe K. de la SCP R.K., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et assistée de Maître Laura C., avocat au barreau de Paris substituant Maître Philippe M., avocat au barreau de PARIS

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 novembre 2019 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure BOURREL, Président, et Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller, chargés du rapport. Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Laure BOURREL, Président, Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller, Mme Anne FARSSAC, Conseiller.

Greffier lors des débats : Mme Rime GHORZI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 9 janvier 2020.

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 9 janvier 2020. Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Mme Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS et PROCÉDURE - MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le 6 juillet 2009, monsieur et madame X. ont accepté l'offre de prêt Helvet Immo adressée par la BNP Paribas Personal Finance ; un contrat de crédit Helvet Immo a été réitéré par acte authentique le 26 août 2009.

Ce prêt porte sur un capital de 466.806,36 francs suisses pour une durée initiale fixée à 18 ans, l'objet du prêt étant l'acquisition d'un appartement à usage locatif.

Le prêt, souscrit en francs suisses est remboursable en euros et peut être converti en euros par les emprunteurs tous les cinq ans.

Par exploit du 13 novembre 2015, monsieur et madame X. ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nice la société anonyme BNP Paribas Personal Finance, aux fins notamment de voir :

- déclarer leur action recevable

- ordonner au prêteur de deniers de fournir aux emprunteurs une situation actualisée de l'amortissement du crédit à la date de délivrance de l'acte introductif d'instance

- dire que la banque a manqué à son devoir de mise en garde sur les risques spéciaux et anormaux et a engagé sa responsabilité pour faute lourde

- condamner l'émetteur de l'offre de crédit à payer à monsieur et madame X. une somme de 73.166,40 euros à titre de dommages-intérêts couvrant les dommages financiers subis par l'emprunteur issus du risque de change

- condamner la banque au paiement d'une somme de 30.000 euros à titre de dommages-intérêts au titre du préjudice moral pour dol spécial

- annuler la clause de la stipulation conventionnelle d'intérêt au motif que le TEG est erroné

- dire en toute hypothèse et subsidiairement que le TEG est erroné et ordonner en conséquence la substitution du taux nominal contractuel par le taux de l'intérêt légal en vigueur, après avoir annulé la stipulation d'intérêts conventionnels

- ordonner à la banque de produire un tableau d'amortissement au taux d'intérêt légal

- subsidiairement, annuler la clause d'indexation pour violation des dispositions de l'article L 111-2 du code monétaire et financier.

En réponse, la société anonyme BNP Paribas Personal Finance a soulevé à titre principal l'irrecevabilité des demandes sur le fondement de la prescription ; à titre subsidiaire, elle a conclu au rejet des demandes en paiement des sommes de 73.166,40 euros (risque de change) et 30.000 euros (préjudice moral) de dommages-intérêts, ainsi qu'au rejet de la demande de nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts, de la demande de substitution du taux d'intérêt légal au taux contractuel et au rejet de toutes autres demandes.

Le tribunal, par jugement du 10 avril 2017, a notamment :

- dit que les demandes de monsieur et madame X. sont prescrites

- condamné in solidum monsieur et madame X. à verser à la société BNP Paribas Personal Finance une somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné in solidum monsieur et madame X. aux entiers dépens.

[*]

Monsieur et madame X. ont régulièrement relevé appel, le 10 mai 2017, de ce jugement en vue de sa réformation.

Ils demandent à la cour, selon conclusions déposées le 9 août 2017 par RPVA, de :

Vu les dispositions des articles 1135, 1147 et 1149 du code civil,

Vu les dispositions de l'article L. 312-11 du code de la consommation,

Vu les dispositions de l'article L. 111-2 du code monétaire et financier,

Vu les dispositions des articles L. 131-1, L. 313-2, R. 313-1 et son annexe et 1907 du code civil concernant la définition du TEG et son mode de calcul,

Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation, devenu L. 212-1 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

- les recevoir en leur appel,

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuer à nouveau,

- juger non écrite avec les conséquences de droit la stipulation d'intérêts chargeant à titre exclusif les risques de change sur ceux qu'aurait pris l'emprunteur comme créant un déséquilibre au détriment du consommateur

- ordonner au prêteur de deniers de fournir aux emprunteurs une situation actualisée de l'amortissement du crédit de monsieur et madame X. à la date de la délivrance de l'acte introductif d'instance,

- dire et juger également que la banque BNP Paribas Personal Finance a manqué à son devoir de mise en garde sur les risques spéciaux et anormaux auxquels l'offre de crédit du 24 juin 2009 a exposé l'emprunteur et engagé sa responsabilité pour faute lourde de ce chef,

- condamner l'émetteur de l'offre de crédit, en réparation, à payer à monsieur et madame X. la somme de 73.166,40 euros à titre de dommages intérêts couvrant les dommages financiers subis par l'emprunteur issus du risque de change,

- dire encore et juger qu'en exposant l'emprunteur à des risques de marché et de change tout en s'étant abstenu de mettre en place les instruments de couverture adéquate qui auraient eu pour effet de limiter raisonnablement les risques sous-jacents, l'émetteur de l'offre qui dispose d'une parfaite maîtrise de ses instruments, a engagé sa responsabilité pour dol spécial envers l'emprunteur,

- le condamner de ce chef à réparer le préjudice de souffrance causé à l'emprunteur et l'évaluer à la somme de 30.000 euros,

- annuler en tout état de cause la stipulation conventionnelle d'intérêt pour violation des dispositions de l'article L. 312-8-2 ter du code de la consommation,

- dire en toute hypothèse et subsidiairement que le TEG mentionné au contrat de prêt immobilier accordé le 24 juin 2009 est erroné et ordonner en conséquence la substitution du taux nominal contractuel par le taux de l'intérêt légal en vigueur à la date de la décision à intervenir après avoir annulé la stipulation d'intérêts conventionnels,

- ordonner à la banque prêteuse de deniers de produire un tableau d'amortissement du crédit accordé rémunéré au taux de l'intérêt légal et dire que les paiements effectués s'imputeront sur le capital emprunté,

- subsidiairement, annuler la clause d'indexation pour violation des dispositions de l'article L. 111-2 du code monétaire et financier,

- condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à monsieur et madame X. la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles visés aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SA BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens de l'instance.

[*]

Formant appel incident, la société BNP Paribas Personal Finance sollicite de voir, selon conclusions déposées par RPVA le 27 septembre 2019 :

Vu les articles 1135, 1147, 1149, 1304, 1907, 2224 du code civil, L. 110-4 du code de commerce, L. 131-1, L. 312-1 et suivants, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, L. 111-2 et L. 112-2 du code monétaire et financier, 31, 32, 564 et 700 du code de procédure civile, l'ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet 2019 relative aux sanctions civiles applicables en cas de défaut ou d'erreur du taux effectif global,

- à titre principal,

* confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que les demandes formulées par monsieur et madame X. sont prescrites et en conséquence irrecevables

- et y ajoutant,

* par substitution de moyens, juger que monsieur et madame X. ne justifient pas d'un intérêt à agir en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels de leur offre de prêt

* juger que les demandes tendant à faire constater l'existence de clauses prétendument abusives dans l'offre de prêt souscrite par monsieur et madame X. sont nouvelles en cause d'appel et prescrites

- En conséquence,

* déclarer monsieur et madame X. irrecevables en leur demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels

* déclarer irrecevables les demandes de monsieur et madame X. s'agissant des clauses abusives

- à titre subsidiaire,

* débouter monsieur et madame X. de l'intégralité de leurs demandes

- en tout état de cause,

* condamner monsieur et madame X. au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

* les condamner aux entiers dépens.

[*]

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 15 octobre 2019.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 - Sur l'action en responsabilité :

Monsieur et madame X. sollicitent à titre de dommages-intérêts, le paiement de la somme de 73.166,40 euros pour préjudice financier résultant d'une absence de mise en garde des emprunteurs sur les risques spéciaux auxquels l'offre de crédit les a exposés, outre 30.000 euros pour préjudice de souffrance, à raison d'un dol spécial.

Pour faire échec aux demandes, la société BNP Paribas Personal finance soulève la prescription des demandes.

En application de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

La prescription court donc à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

Il en résulte que l'action en responsabilité diligentée par monsieur et madame X. se prescrit par cinq ans ; le point de départ se situe au jour où les emprunteurs ont connu ou auraient dû connaître les faits leur permettant d'agir en responsabilité contre la banque.

Le premier juge a relevé que les époux X. ne justifient pas de la date à laquelle le dommage invoqué leur a été révélé et que leurs écritures ne comportent sur ce point aucun élément et aucune explication ; en cause d'appel, il en est de même.

En ce qui concerne les opérations du crédit litigieux, le point de départ est donc le jour de l'octroi du prêt ; l'offre a été acceptée le 6 juillet 2009 ; l'assignation a été délivrée le 13 novembre 2015, après expiration du délai de cinq ans.

Le jugement sera dès lors confirmé sur la prescription.

 

2 - Sur l'annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels :

Monsieur et madame X. demandent l'annulation de la stipulation d'intérêts.

Pour faire échec à la demande, la banque BNP Paribas Personal Finance soulève la prescription ; ce à quoi s'opposent monsieur et madame X. sur le fondement de l'article L. 312-8-2 ter du code de la consommation ; ils font valoir que l'opération constituant un crédit à taux variable, la prescription de la demande d'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts du crédit se décompte non pas par cinq ans à compter du prêt, mais à compter de chaque nouvelle notification du taux.

Selon l'article L. 312-8 invoqué par les appelants, dans sa rédaction applicable au cas d'espèce, l'offre doit comporter un certain nombre de mentions ; en particulier, l'alinéa 2° ter stipule que : Pour les offres de prêts dont le taux d'intérêt est variable, l'offre est accompagnée d'une notice présentant les conditions et modalités de variation du taux d'intérêt et d'un document d'information contenant une simulation de l'impact d'une variation de ce taux sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit. Cette simulation ne constitue pas un engagement du prêteur à l'égard de l'emprunteur quant à l'évolution effective des taux d'intérêt pendant le prêt et à son impact sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit. Le document d'information mentionne le caractère indicatif de la simulation et l'absence de responsabilité du prêteur quant à l'évolution effective des taux d'intérêt pendant le prêt et à son impact sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit.

L'argumentation des époux X. est inopérante au regard de ces dispositions.

En effet, le TEG est un élément qui est donné pour permettre à l'emprunteur de comparer plusieurs offres de crédit ; aucune disposition n'impose une notification du taux modifié ou révisé, de sorte que le TEG doit seulement être fourni lors de la souscription du prêt ; la prescription de la demande d'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts ne saurait dans ces conditions se décompter à partir de chaque nouvelle notification du taux.

Seule la date de connaissance de l'irrégularité alléguée marque le point de départ de la prescription ; dans le silence des époux X. sur la date de connaissance de l'irrégularité alléguée, ce point de départ est la date de la convention, soit en l'occurrence le 6 juillet 2009, date d'acceptation de l'offre, étant observé que l'action a été engagée le 13 novembre 2015, soit plus de cinq ans après cette date.

Pour fonder leur demande d'annulation de la stipulation d'intérêts, monsieur et madame X. se plaignent d'un TEG erroné ; ils invoquent à cet effet trois erreurs :

- d'une part à raison du fait que 12 taux de période n'égalent pas le TEG initial

- d'autre part, à raison du fait que le TEG n'intègre pas l'ensemble des frais mentionnés au contrat (frais d'acte notarié, frais de change et frais de garantie)

- enfin, à raison d'une erreur de méthode de calcul relative au flux qui aboutit à un effet « d'écrasement » du taux de période (erreur sur la méthode mathématique).

La banque oppose la prescription.

Il apparaît à cet égard que les deux premiers griefs étaient facilement décelables lors de l'acceptation de l'offre de prêt.

Il était aisé, pour monsieur et madame X. de faire une multiplication par 12 et de vérifier si 12 taux de période de 0,44 % correspondaient bien au TEG annoncé de 5,29 % ; cette simple opération ne nécessitait aucune compétence particulière.

De même, il était aisé à la simple lecture de l'offre de crédit de constater l'erreur alléguée sur les frais ; s'agissant des frais d'acte notarié, l'offre de prêt mentionne expressément que le TEG est calculé hors frais d'acte (page 9) ; s'agissant des frais de change, l'offre de prêt mentionne que les charges annexes qui composent une partie de l'assiette du calcul du TEG comprennent les frais de change égaux à 1,50 % toutes taxes éventuelles comprises des sommes à convertir dans le cadre des opérations de change, en ce compris les frais supportés pour le déblocage des fonds ; il était donc clair que les frais de change n'étaient pas inclus en totalité dans l'assiette du TEG ; s'agissant enfin des frais de garantie, ils ne sont nullement répertoriés dans le chapitre « taux effectif global du crédit » en page 9, bien que décrits précisément en pages 12 et 13 (privilège de prêteur de deniers et hypothèque, devant faire l'objet d'un acte notarié ultérieur).

Du chef de ces deux griefs, le point de départ de la prescription est donc la date de l'acceptation de l'offre, soit le 6 juillet 2009 ; ce dont il résulte que la demande est prescrite, eu égard à la date de délivrance de l'assignation, le 13 novembre 2015.

S'agissant par ailleurs de la troisième erreur invoquée portant sur la méthode mathématique, il apparaît, en l'absence de tout élément permettant de retenir une particulière qualification en matière bancaire ou financière de monsieur et madame X., que ces derniers étaient des clients non avertis ; l'erreur n'était pas décelable par des clients non avertis, dans la mesure où cela nécessitait des compétences bancaire et financière.

La prescription court donc sur ce point à compter de la date à laquelle le dommage leur a été révélé ; néanmoins, dans le silence des époux X. sur la date à laquelle ils ont eu connaissance de l'irrégularité alléguée, le point de départ de la prescription est la date du contrat ; ce dont il résulte que l'action est également prescrite.

 

3 - Sur la demande relative à la clause abusive :

En cause d'appel, monsieur et madame X. demandent « de juger non écrite avec les conséquences de droit, la stipulation d'intérêts chargeant à titre exclusif les risques de change sur ceux qu'aurait pris l'emprunteur, comme créant un déséquilibre au détriment du consommateur. »

La banque soulève l'irrecevabilité de la demande, comme étant nouvelle en appel.

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En vertu de l'article 565 qui suit, les prétentions ne sont pas nouvelles, dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

Néanmoins, en application de l'article 566 les parties peuvent ajouter à leurs demandes devant le premier juge, toutes celles qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.

En l'occurrence, la demande concernant le caractère abusif de la clause litigieuse n'est pas l'accessoire, la conséquence ou le complément des demandes présentées en première instance.

C'est donc à bon droit que la banque conclut à l'irrecevabilité de la demande comme nouvelle en appel.

 

4 - Sur la demande subsidiaire d'annulation de la clause d'indexation :

A titre subsidiaire, monsieur et madame X. demandent d'annuler la « clause d'indexation » pour violation des dispositions de « l'article L. 111-2 » du code monétaire et financier (en réalité L. 112-2 du code monétaire et financier) ; ils exposent que la stipulation conduisant à faire varier un crédit en francs suisses en fonction d'un indice est illicite et constitue une clause d'indexation irrégulière.

Pour faire échec à cette demande, la banque oppose la prescription.

Selon l'article L. 112-2 du code monétaire et financier en sa version applicable au contrat en cause, dans les dispositions statutaires ou conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n'ayant pas de relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties. Est réputée en relation directe avec l'objet d'une convention relative à un immeuble bâti toute clause prévoyant une indexation sur la variation de l'indice national du coût de la construction publié par l'Institut national des statistiques et des études économiques ou, pour des activités commerciales définies par décret, sur la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux publié dans des conditions fixées par ce même décret par l'Institut national de la statistique et des études économiques.

En l'occurrence, l'offre de prêt permettait à monsieur et madame X. d'avoir connaissance qu'ils souscrivaient un prêt en francs suisses ; cela ressort de la description du crédit en première page ; il est mentionné que le montant du crédit et de 466.806,36 francs suisses.

Il est également clairement stipulé en pages 2 et 3 de l'offre de crédit, l'ouverture d'un compte interne en euros et d'un compte interne en francs suisses ; il est précisé que le crédit sera géré d'une part en francs suisses (monnaie de compte) pour connaître à tout moment l'état de remboursement du crédit et, d'autre part en euros (monnaie de paiement) pour permettre le paiement des échéances du crédit.

Ainsi à la lecture de l'offre de prêt, monsieur et madame X. avaient connaissance de la clause de monnaie de compte qu'ils qualifient de clause d'indexation.

Ce faisant, l'action engagée le 13 novembre 2015 est prescrite, ayant été engagée plus de cinq ans après l'offre acceptée en date du 6 juillet 2009.

Au regard de l'ensemble des développements qui précèdent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que les demandes de Monsieur X. et de Madame Y. sont prescrites.

 

5 - Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Succombant sur leur appel, Monsieur X. et Madame Y. doivent être condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 1.000 (mille) euros au titre des frais non taxables que celle-ci a dû exposer en appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera confirmé sur le surplus.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Nice en date du 10 avril 2017,

Y ajoutant,

Dit qu'est irrecevable, la demande tendant à voir déclarer non écrite avec les conséquences de droit, « la stipulation d'intérêts chargeant à titre exclusif les risques de change sur ceux qu'aurait pris l'emprunteur, comme créant un déséquilibre au détriment du consommateur »,

Déboute Monsieur X. et Madame Y. de leur demande en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Monsieur X. et Madame Y. aux dépens, ainsi qu'à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 1.000 (mille) euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT