8325 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com.) - Domaine de la protection - Victime : autre partie
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 8325 (19 janvier 2023)
PROTECTION CONTRE LES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS DANS LE CODE DE COMMERCE (ART. L. 442-1-I-2° C. COM.)
DOMAINE DE LA PROTECTION - VICTIME : AUTRE PARTIE
Texte. Selon l’art. L. 442-1 C. com., dans sa rédaction résultant de l’ordonnance du 24 avril 2019, « I. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services : […] 2° De soumettre ou de tenter de soumettre l'autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. »
Contrôle de légalité de l’ordonnance. En substituant à la notion de « partenaire commercial » figurant antérieurement au 1° du I de l'article L. 442-6, celle d'« autre partie », de façon cohérente avec la confirmation de l'inclusion dans le champ des pratiques restrictives prohibées de celles commises au cours de la négociation commerciale, l'auteur de l'ordonnance n'a pas davantage méconnu la portée de l'habilitation donnée par le Parlement. CE (ch. réun.), 21 décembre 2022 : req. n° 463938 ; Rec. CE tables ; Cerclab n° 10001 (point n° 8), sur demande de T. com. Paris, 10 mai 2022 : Dnd. § Sur la portée générale de la loi d’habilitation, V. Cerclab n° 6160.
Commentaire. Le texte supprime donc la condition antérieure de partenariat commercial (V. Cerclab n° 6169). L’esprit de la modification va plutôt dans un sens extensif, comme celle visant le responsable (Cerclab n° 6168). La nouvelle rédaction risque toutefois de poser, au moins dans un premier temps, quelques difficultés.
En effet, le texte suppose que le contrat fasse l’objet d’une négociation commerciale (« dans le cadre de la négociation commerciale »), ce qui n’est pas forcément le cas de contrats ponctuels avec des intérêts antagonistes (ventes, locations, transport, etc.). Autrement dit, même sans aller jusqu’à la définition étroite du partenariat, il reste à déterminer si l’idée d’intérêt commun a totalement disparu du texte. Si tel est le cas, l’art. L. 442-1 risque d’absorber l’art. 1171 C. civ., avec le risque de considérer que l’absence de toute négociation est un élément établissant la soumission ou la tentative de soumission. A l’inverse, le maintien de l’idée d’un intérêt commun, nécessitant une négociation des parties pour l’organisation de leur projet commun, ponctuel ou s’étalant dans le temps, maintient une certaine spécificité de l’art. L. 442-1 C. com., facilitant son articulation avec l’art. 1171 C. civ.
Par ailleurs, il conviendra de mesurer le sens exact du caractère « commercial » de la négociation, alors que le responsable est défini de façon large, ce qui devrait aussi s’entendre de « l’autre partie ». Il faut noter que les textes connexes ont également une vision large. Ainsi, l’art. L. 441-1-II C. com. sur les conditions générales de vente précise que « toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services qui établit des conditions générales de vente est tenue de les communiquer à tout acheteur qui en fait la demande pour une activité professionnelle », ce qui correspond à la définition du responsable de l’art. L. 442-1. Or, le III du même texte, « dès lors que les conditions générales de vente sont établies, elles constituent le socle unique de la négociation commerciale ».
En revanche, les solutions adoptées pour l’action des tiers victimes devraient pouvoir être reprises en s’assurance que les conditions du textes sont remplies à l’égard du cocontractant, victime immédiate (V. Cerclab n° 6169).