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CASS. CIV. 1re, 5 février 2020

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 5 février 2020
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 19-11939
Décision : 20-95
Date : 5/02/2020
Numéro ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:C100095
Nature de la décision : Cassation sans renvoi
Mode de publication : Legifrance
Numéro de la décision : 95
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8374

CASS. CIV. 1re, 5 février 2020 : pourvoi n° 19-11939 ; arrêt n° 95 

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Vu l’article L. 312-8, 3°, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, l’article L. 313-1 du même code, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, l’article L. 312-33 de ce code, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000, et son article R. 313-1, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 : 5. En application de ces textes, l’offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l’emprunteur. Le défaut de communication du taux et de la durée de la période est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels. Une telle sanction ne saurait cependant être appliquée lorsque l’écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l’article R. 313 -1 susvisé.

6. Pour prononcer la nullité de la stipulation d’intérêts de l’offre de crédit immobilier du 29 novembre 2010, acceptée le 16 décembre suivant, l’arrêt retient le défaut de communication du taux de période, élément déterminant du taux effectif global.

7. En statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que le taux effectif global était mentionné dans l’offre acceptée et que l’écart entre celui-ci et le taux réel était inférieur à une décimale, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 5 FÉVRIER 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : V 19-11.939. Arrêt n° 95 FS-P+B+I.

DEMANDEUR à la cassation : Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes Provence

DÉFENDEUR à la cassation : Mme X. – M. Y.

Mme Batut (président), président. SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Yves et Blaise Capron, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes Provence, société coopérative de crédit, dont le siège est [adresse], a formé le pourvoi n° V 19-11.939 contre l’arrêt rendu le 15 novembre 2018 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (8e chambre C), dans le litige l’opposant :

1°/ à Mme X.,

2°/ à M. Y.,

tous deux domiciliés [adresse], défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes Provence, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. Y. et Mme X., et l’avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l’audience publique du 7 janvier 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, M. Girardet, Mmes Duval-Arnould, Teiller, MM. Avel, Mornet, conseillers, Mme Canas, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, M. Serrier, Mmes Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,

La première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1. Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 novembre 2018), le 16 décembre 2010, M. Y. et Mme X. (les emprunteurs) ont accepté l’offre de crédit immobilier émise le 20 novembre 2010 par la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes Provence (la banque), au taux effectif global de 3,363 % par an.

2. Invoquant le caractère erroné de ce taux et l’absence de mention du taux de période, les emprunteurs ont assigné la banque en déchéance des intérêts conventionnels et, subsidiairement, en annulation de la stipulation d’intérêts.

 

Examen des moyens

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, ci-après annexé

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

3. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

 

Mais sur le moyen relevé d’office

4. Après avis donné aux parties conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l’article 620, alinéa 2, du code de procédure civile.

 

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article L. 312-8, 3°, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, l’article L. 313-1 du même code, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, l’article L. 312-33 de ce code, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000, et son article R. 313-1, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 :

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

5. En application de ces textes, l’offre de prêt immobilier doit mentionner le taux effectif global, qui est un taux annuel, proportionnel au taux de période, lequel, ainsi que la durée de la période, doivent être expressément communiqués à l’emprunteur. Le défaut de communication du taux et de la durée de la période est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts conventionnels.

Une telle sanction ne saurait cependant être appliquée lorsque l’écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l’article R. 313 -1 susvisé.

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

6. Pour prononcer la nullité de la stipulation d’intérêts de l’offre de crédit immobilier du 29 novembre 2010, acceptée le 16 décembre suivant, l’arrêt retient le défaut de communication du taux de période, élément déterminant du taux effectif global.

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

7. En statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que le taux effectif global était mentionné dans l’offre acceptée et que l’écart entre celui-ci et le taux réel était inférieur à une décimale, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

 

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

10. Les demandes de déchéance de l’intérêt conventionnel et d’annulation de la stipulation d’intérêts de l’offre de crédit immobilier du 29 novembre 2010, acceptée le 16 décembre suivant, seront rejetées.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il dit n’y avoir lieu d’écarter des débats le rapport rédigé par M. P., l’arrêt rendu le 15 novembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Rejette les demandes de déchéance de l’intérêt conventionnel et d’annulation de la stipulation d’intérêts de l’offre de crédit immobilier du 29 novembre 2010, acceptée le 16 décembre 2010 ;

Condamne M. Y. et Mme X. aux dépens, incluant ceux exposés devant les juridictions du fond ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille vingt.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Alpes Provence.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le pourvoi fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR :

* annulé la mention du taux effectif global que contient le prêt ayant donné lieu à l’offre de crédit immobilier que la Crcam Alpes Provence a adressée à Mme X. et à M. Y. le 20 novembre 2010 et que ceux-ci ont acceptée le 16 décembre 2010 ;

* ordonné la substitution de l’intérêt au taux légal à l’intérêt au taux conventionnel que cette mention prévoit ;

* enjoint à la Crcam Alpes Provence d’établir un nouveau décompte conforme à cette substitution ;

* et condamné la Crcam Alpes Provence à restituer à Mme X. et à M. Y. la somme de 28.504 € ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE, « s’agissant de l’absence de communication du taux de période, il est constant que l’offre de prêt litigieuse ne mentionne pas ce taux et que le Crédit agricole n’établit pas, ni même n’allègue, que celui-ci aurait été communiqué aux emprunteurs dans un document distinct » (cf. arrêt attaqué, p. 6, 2e attendu) ; « que, faute de mention du taux de période du taux effectif global, il n’a pas été satisfait aux exigences des articles L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation et de l’article 1907 du code civil qui impose la mention dans l’écrit constatant un prêt d’argent du taux effectif global comme condition de validité de la stipulation d’intérêt au point que l’inexactitude de cette mention équivaut à une absence de mention assortie à titre de sanction de la substitution du taux d’intérêt légal au taux conventionnel » (cf. arrêt attaqué, p. 6, 3e attendu) ; « que, par ailleurs, sauf à méconnaître les dispositions de l’article R. 313-1 du code de la consommation qui rappellent que pour les prêts relevant de l’article L. 312-2 du code de la consommation, « le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période », ce qui implique que le taux effectif global est calculé à partir du taux périodique préalablement déterminé, et non l’inverse, de sorte que la banque ne peut légitimement soutenir qu’il suffisait aux emprunteurs de diviser le taux effectif global par douze pour connaître le taux de période » (cf. arrêt attaqué, p. 6, 4e attendu) ; « que faute de communication du taux de période, élément déterminant du calcul du taux effectif global, la sanction encourue est nécessairement la nullité de la clause litigieuse » (cf. arrêt attaqué, p. 6, 5e attendu) ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                               (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1/ ALORS QUE, si, dans les crédits immobiliers qui ressortissent aux articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, le premier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 et le second dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ensemble l’article R. 313-1 du même code dans sa rédaction antérieure au décret n° 2011-135 du 1er février 2011, lequel n’est entré en vigueur que le 1er mai 2011, le prêteur doit communiquer le taux de période à l’emprunteur, cette communication peut avoir lieu suivant une autre modalité que le contrat de prêt ; que la Crcam Alpes Provence indiquait, dans ses écritures d’appel, p. 12, 6e alinéa, que le taux de période du crédit immobilier qu’elle a consenti à Mme X. et à M. Y. est de 0,3025 % ; qu’en énonçant, dans ces conditions, que la Crcam Alpes Provence n’a pas communiqué à Mme X. et à M. Y. le taux de période du crédit immobilier qu’elle leur a consenti, la cour d’appel a violé les articles L. 312-8, L. 312-33, L. 313-17 et R. 313-1 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause ;

2/ ALORS QUE, dans les crédits immobiliers qui ressortissent aux articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, le premier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 et le second dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ensemble l’article R. 313-1 du même code dans sa rédaction antérieure au décret n° 2011-135 du 1er février 2011, lesquels sont d’ordre public, de sorte qu’ils sont exclusifs de la règle qu’énonce l’article 1907 du code civil, la sanction applicable lorsque le taux de période n’est pas mentionné consiste dans la seule déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts ; qu’en attachant au défaut de communication du taux de période à Mme X. et à M. Y., non la sanction que prévoit l’article L. 312-33 ancien du code de la consommation (déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts) mais la sanction que prévoit l’article 1907 du code civil (annulation de la stipulation d’intérêt et substitution du taux de l’intérêt légal au taux de l’intérêt conventionnel), la cour d’appel a violé les articles L. 312-8, L. 312-33, L. 313-17 et R. 313-1 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause.