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CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 23 juin 2020

Nature : Décision
Titre : CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 23 juin 2020
Pays : France
Juridiction : Besancon (CA) 1re ch. civ. et com.
Demande : 19/00894
Date : 23/06/2020
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 1/08/2018
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8469

CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 23 juin 2020 : RG n° 19/00894

Publication : Jurica

 

Extrait : « En l'absence de démonstration d'une faute grave justifiant la résiliation, M. X. et la société GPS invoquent la rupture brutale et abusive de la relation commerciale entretenue avec la partie adverse.

Cependant, en application de l'article L. 442-6 du code de commerce, cette question ne relevait, en principe, pas du pouvoir juridictionnel du tribunal de commerce de Besançon et il résulte du plumitif qu'à l'audience de plaidoirie du 28 mars 2018, la société GPS a renoncé à la demande de 100.000 euros de dommages et intérêts relative à la rupture, de sorte que le tribunal n'évoquant pas cette renonciation (non plus que M. X. et GPS en cause d'appel) a statué ultra petita.

Eu égard à la renonciation susmentionnée intervenue en première instance dans le cadre d'une procédure orale, la cour n'a pas à statuer sur cette demande et infirmera le jugement querellé en ce qu'il a condamné solidairement la société Groupe AS Développement et M. Y. à payer à la société GPS la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et brutale du contrat de prestations de services. »

 

COUR D’APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU23 JUIN 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/00894. N° Portalis DBVG-V-B7D-EDH3. Contradictoire. S/appel d'une décision du TRIBUNAL DE COMMERCE DE BESANCON en date du 27 juin 2018 [R.G. n° 2017004153]. Code affaire : 59B Demande en paiement relative à un autre contrat.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS :

Monsieur X.

demeurant [adresse]

SARL GPS

dont le siège est sis [adresse]

SAS PGI

dont le siège est sis [adresse]

Représentés par Maître Laurent M. de la SELARL R. & M., et par Maître Jean-Michel E., avocats au barreau de BESANCON

Monsieur Y.

demeurant [...]

SARL GROUPE AS DEVELOPPEMENT

placée en redressement judiciaire, dont le siège est sis [...]

Représentés par Maître Laurent H. de la SELARL SELARL AJURISS, avocat au barreau de BELFORT et par Maître Ludovic P. de la SCP D. - P., avocat au barreau de BESANCON

 

ET :

INTIMÉE :

SAS EVOLI

dont le siège est sis [adresse], Représentée par Maître Sandrine A. de la SELARL A. - LEXAVOUE BESANCON, avocat au barreau de BESANCON et par Maître B., avocat au barreau de GRENOBLE

 

PARTIE INTERVENANTE :

Maître G. ès qualités de mandataire judiciaire de la Sté GROUPE AS DEVELOPPEMENT

dls [...] - RCS BESANCON 752 289 660, désigné par jugement ouvrant le redressement judiciaire du Tribunal de commerce de BESANCON du 05/12/2018, demeurant [adresse], Représenté par Maître Ludovic P. de la SCP D. - P., avocat au barreau de BESANCON

 

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre.

ASSESSEURS : Mesdames B. UGUEN LAITHIER et A. CHIARADIA, (Magistrat rapporteur), Conseillers.

GREFFIER : Madame D. BOROWSKI, Greffier.

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre

ASSESSEURS : Mesdames B. UGUEN LAITHIER, et A. CHIARADIA, (Magistrat rapporteur), Conseillers.

L'affaire, retenue sans audience le 19 mai 2020 a été mise en délibéré au 23 juin 2020. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Faits et prétentions des parties :

Par acte en date du 15 juin 2012, la SAS PGI, détenue par M. X., a cédé pour un montant de 500.000 euros les titres de la SAS Evoli (qui conçoit, développe et fabrique des équipements destinés au secteur agro-alimentaire) à la SARL Groupe AS Développement, détenue par M. Y.

Le protocole de cession prévoyait que M. X. fournirait des prestations de services à la société Evoli, destinées à accompagner la reprise de la société par M. Y. qui ne connaissait pas ce secteur d'activité.

Par acte du 29 juin 2012, la SARL GPS, créée à cet effet par M. X., et la société Groupe AS Développement, ont régularisé un contrat de prestations de services pour une période de 36 mois. Ce contrat qui devait se terminer le 30 juin 2015 a été renouvelé par trois avenants, le terme en étant fixé au 30 juin 2018.

Les relations entre M. X. et M. Y. s'étant dégradées au cours de l'année 2017, ce dernier a résilié le contrat de prestations par lettre recommandée avec avis de réception du 4 septembre 2017.

Le tribunal de commerce de Besançon a été saisi, selon assignation en date du 27 juin 2017, par la société Evoli, la société Groupe AS Développement et M. Y. aux fins de voir constater les manquements de M. X. et de ses sociétés PGI et GPS en ce qu'il a :

- passé sous silence la rupture du contrat de travail de M. M., seul commercial de la société Evoli,

- modifié des devis émis par la société Evoli impliquant un surcoût en imposant une remise commerciale d'un montant de 52.000 euros,

- omis d'établir des comptes rendus et suivis de commandes tels que prévus par les conventions de prestations de services successives,

- placé la société Evoli sous sa dépendance totale en s'imposant avec sa société GPS comme seuls interlocuteurs auprès des clients, à la propre demande de ces derniers,

- omis toute prospection et démarchage commercial en 2015 et 2016,

- imposé une augmentation constante des rétributions versées par la société Groupe AS Développement à la société GPS, les augmentations en 2015 et 2016 étant sans contrepartie ni prestations de la part de M. X.

En conséquence, les demandeurs ont sollicité du tribunal de commerce :

- au titre de l'acte de cession, la condamnation in solidum des défendeurs à payer à la société Groupe AS Développement la somme de 120.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- au titre de la prestation de services, concernant la commande de la coopérative de B., la condamnation des défendeurs in solidum à payer aux sociétés Evoli et Groupe AS Développement celle de 52.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- au titre de la perte de valeur de la société Evoli et/ou des actions composant son capital social, l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 100.000 euros, différence entre le prix de vente de juin 2012 (500.000 euros) et celui proposé en dernier lieu par M. X. (400.000 euros),

- la condamnation de M. X. au paiement de 100.000 euros au profit de la société Groupe AS Développement, à titre de dommages et intérêts,

- la condamnation de chacun des défendeurs au paiement à chacun des demandeurs d'une indemnité de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant jugement rendu sous le bénéfice de l'exécution provisoire le 27 juin 2018, le tribunal de commerce de Besançon, après s'être déclaré compétent pour connaître de l'ensemble du litige :

- a débouté la société Evoli, la société Groupe AS Développement et M. Y. de l'ensemble de leurs demandes,

- les a condamnés solidairement à payer à la société GPS la somme de 261.568,02 euros TTC au titre du contrat de prestations de services jusqu'à la date de résiliation,

- a débouté la société GPS et M. X. de leur demande de paiement de la somme de 283.406,40 euros au titre des prestations qui auraient dû être réalisées jusqu'au terme du contrat, soit le 30 juin 2018,

- a condamné solidairement la société Groupe AS Développement et M. Y. à payer à la société GPS la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et brutale du contrat de prestations de services,

- a confirmé la validité de la clause de non-concurrence,

- a condamné solidairement les sociétés Evoli, Groupe AS Développement et M. Y. à payer aux sociétés GPS, PGI et à M. X., in solidum, la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

La société Groupe AS Développement et M. Y., d'une part, et M. X. et les sociétés GPS et PGI, d'autre part, ont interjeté appel de cette décision, par déclarations reçues respectivement au greffe les 1er août et 5 septembre 2018.

L'instance a été interrompue par ordonnance du conseiller de la mise en état du 8 février 2019 à la suite du placement de la société Groupe AS Développement en redressement judiciaire. L'affaire a été remise au rôle le 3 mai 2019 et les procédures ont été jointes le 24 juillet 2019.

[*]

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises le 28 avril 2020, M. Y., la société Groupe AS Développement et M. X. ès qualités de représentant des créanciers et de commissaire à l'exécution du plan d'apurement du passif de ladite société, sollicitent l'infirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il a déclaré valide la clause de non-concurrence et demandent à la cour de :

- débouter la société GPS de toutes ses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de prestations de services dirigées contre M. Y.,

- débouter les sociétés GPS, PGI et M. X. de toutes leurs demandes à l'encontre de M. Y.,

- prononcer la résiliation abusive et aux torts exclusifs de la société GPS et de M. X. et ce à l'époque de leurs manquements constatés au 1er juillet 2016, subsidiairement, « fixer cette résiliation dans les mêmes termes que le premier jugement, savoir le 7 juillet 2017 » (sic),

- débouter les sociétés GPS et PGI et M. X. des sommes revendiquées au titre de l'arriéré de prestations de services,

- débouter les sociétés GPS et PGI et M. X. des sommes revendiquées au titre de la rupture de la convention de prestations de services,

- « donner acte à la renonciation par les sociétés GPS et PGI et de M. X. à leurs demandes portant sur la somme de 100.000 euros, à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et brutale du contrat de prestations de services »,

- « en tout état de cause, les débouter au regard des manquements constatés de toutes demandes dirigées à l'encontre de la société Groupement AS Développement, Maître Pascal G., mandataire judiciaire, ès-qualités [...] et M. Y. »,

- « s'il devait y avoir condamnation de la société Groupe AS Développement, fixer sa créance dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire » (sic).

M. Y., la société Groupe AS Développement et Maître Pascal G. ès-qualités demandent également à la cour de :

- condamner la société PGI et M. X. solidairement au paiement à la société Groupe AS Développement de dommages et intérêts à hauteur de 120.000 euros, au titre de l'acte de cession,

- condamner la société GPS et M. X. solidairement au paiement à la société Groupe AS Développement de dommages et intérêts d'un montant de 52.000 euros au titre de la convention de prestations de services, concernant la commande de la coopérative de B.,

- condamner M. X. au paiement au profit de la société Groupe AS Développement et de M. Y. de la somme de 100.000 euros de dommages et intérêts, différence entre le prix de vente de juin 2012 (500.000 euros) et celui proposé en dernier lieu par M. X. (400.000 euros),

en tout état de cause,

- débouter la société GPS et M. X. de leurs demandes dirigées contre de M. Y. « qui n'est pas une partie à l'une des conventions de prestations de services »,

- débouter la société GPS et M. X. de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Groupe AS Développement,

- « condamner les sociétés PGI, GPS et M. X. au paiement à chacun des demandeurs d'une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile »,

- condamner la société GPS et M. X. aux entiers dépens.

[*]

Par écritures déposées le 25 avril 2020, M. X. et les société GPS et PGI sollicitent la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qu'il :

- les a déboutés « de leur demande de condamnation à une somme de 283.406,40 euros au titre des prestations qui auraient dû être réalisées jusqu'au terme du contrat, soit jusqu'au 30 juin 2018 »,

- les a déboutés « de leur demande tendant à voir le tribunal constater la nullité de la clause de non-concurrence prévue par le protocole de cession de titres du 15 juin 2012 en raison de son caractère disproportionné et en ce qu'elle interdit à M. X. d'exercer toute activité dans son domaine »,

- a confirmé la validité de la clause de non-concurrence,

et demandent à la cour de :

- condamner M. Y. au paiement d'une somme de 283.406,40 euros au titre des prestations qui auraient dû être réalisées jusqu'au terme du contrat, soit jusqu'au 30 juin 2018,

- constater la nullité de la clause non concurrence mentionnée au contrat de cession de titres,

- « subsidiairement, limiter les effets dans le temps de la clause de non-concurrence et juger que ladite clause n'a plus à produire d'effet à compter de l'arrêt à intervenir »,

- « fixer la créance de la société GPS au passif de la société Groupe AS Développement à la somme de 663.022,15 euros »,

- « fixer la créance de la société PGI et de M. X. au passif de la société Groupe AS Développement à la somme de 26.000 euros »,

- « le cas échéant, prononcer la compensation entre les sommes auxquelles les sociétés GPS et PGI ainsi que M. X. pourraient être condamnés et celles dues par la société Groupe AS Développement au(x) concluant(s) »,

- condamner solidairement la société Evoli et M. Y. au paiement de 20.000 euros au profit des sociétés GPS, PGI et de M. X. sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de M. E., avocat sur son affirmation de droit.

Selon conclusions déposées le 30 janvier 2019, la société Evoli demande à la cour de :

- confirmer le jugement querellé en ce qu'il n'a pas retenu sa responsabilité sur les chefs de demandes formées par M. X. et les sociétés GPS et PGI et a débouté M. X. de sa demande en nullité de la clause de non-concurrence,

- infirmer le jugement attaqué en ce qu'il n'a pas retenu les manquements de M. X. et de la société GPS dans l'exécution de la convention de prestations de services et a condamné la société Evoli solidairement aux côtés de M. Y. et de la société Groupe AS Développement au paiement de la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- « condamner solidairement M. X., GPS et PGI à verser à la société Evoli la somme de 52.000 euros en réparation du préjudice subi par elle dans l'exécution de la convention de prestations de services »,

- « condamner solidairement M. X., GPS et PGI à verser à la société Evoli la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens ».

[*]

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions ci-dessus rappelées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 28 avril 2020.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Motifs de la décision :

Sur la demande en dommages et intérêts au titre de l'acte de cession :

Se prévalant des manquements et du comportement déloyal de M. X. et de la société PGI lors de la cession des d'actions, M. Y., la société Groupe AS Développement et M. X. ès qualités revendiquent l'allocation d'une somme de 120.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de l'acte de cession.

Dans le cadre de la discussion, M. X. et les sociétés GPS et PGI y opposent une fin de non-recevoir tirée de la prescription, au motif que l'action a été introduite le 27 juin 2017 alors que l'acte de cession a été signé le 15 juin 2012 avec une garantie de passif de 36 mois, de sorte que l'action de M. Y. de la société Groupe AS Développement et de M. X. ès qualités est doublement prescrite.

Ces derniers contestent la prescription en invoquant la convention de prestations de services du 29 juin 2012 corrélative à la cession de titres et la partie adverse admet dans ses écritures que le contrat de prestations de services faisait partie de l'économie du contrat de cession de titres, si bien qu'on doit retenir que la réalité de la cession est intervenue le 29 juin 2012 de sorte que l'action n'est pas prescrite.

M. Y., la société Groupe AS Développement et Maître Pascal G. ès qualités fondent leur demande en dommages et intérêts sur le fait que la rupture du contrat de travail de M. M., seul commercial de la société cédée, qui y était entré le 17 janvier 2011, aurait été passée sous silence par M. X., la liste jointe au protocole d'acquisition du 15 juin 2012 remontant au mois de mars 2012 et que, « en l'absence d'autre commercial, la société Evoli ne pouvait plus que compter que M. X. » et que « les termes du contrat de prestations de services rédigé par M. X. se sont naturellement imposés ».

Cependant, cette contestation intervient cinq ans après la reprise du capital de la société Evoli et la signature du contrat de prestations de services qui était indispensable à assurer la reprise de l'activité de la société, le protocole d'acquisition du 15 juin 2012 contenant un article 6 « accompagnement personnel des cédants » prévoyant un accompagnement par M. X. pendant une période de 6 mois et une prestation de consultant réalisée par le cessionnaire pendant 36 mois.

Dans ces conditions, le contrat de prestations de services étant prévu dès la cession des titres, les premiers juges ont justement débouté M. Y. et les sociétés Groupe AS Développement et Evoli de leur demande en dommages et intérêts au titre de l'acte de cession. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

 

Sur la perte de valeur des titres de la société Evoli :

M. Y., la société Groupe AS Développement et M. X. ès qualités soutiennent que M. X., après avoir affaibli la société Evoli, a proposé de la racheter au prix de 400.000 euros alors que le prix de vente de 2012 était de 500.000 euros, de sorte qu'ils sollicitent l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 100.000 euros au titre de la perte de valeur de la société.

Cependant, cette demande intervient plus de cinq ans après l'acquisition des titres de la société Evoli, période pendant laquelle M. Y. et la société Groupe AS Développement ont eux-mêmes géré ladite société et tandis que la garantie de passif n'a jamais été mise en œuvre.

En outre, M. Y., la société Groupe AS Développement et M. X. ès qualités se plaignent tout à la fois d'un excès d'investissement de M. X. et d'une implication insuffisante dans l'exécution du contrat de prestations de services, alors que divers courriers des clients de la société Evoli font état de la bonne qualité de son travail et/ou mettent en cause l'inexpérience de M. Y.

Par ailleurs, il résulte des pièces versées aux débats que, contrairement à ce qu'affirment ses adversaires, M. X. rédigeait les comptes rendus et se déplaçait pour des visites auprès des clients, étant au surplus rappelé que le contrat de prestations de services a été renouvelé à trois reprises, ce qui n'aurait pas été le cas si M. X. avait réellement démérité.

Dès lors, les appelants ne rapportent pas la preuve du lien de causalité entre les fautes reprochées et le préjudice allégué, celui-ci n'étant d'ailleurs pas justifié puisque M. Y. n'a pas donné suite à la proposition de rachat de M. X.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande de M. Y. et des sociétés Groupe AS Développement et Evoli.

 

Sur la rupture brutale de la relation commerciale :

M. X. et les sociétés GPS et PGI font valoir que la résiliation brutale du contrat de prestations de services doit être sanctionnée sur le double fondement de la responsabilité contractuelle, en application des articles 1134 et 1147 anciens du code civil, et de la responsabilité délictuelle selon l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce dans sa version applicable aux faits.

En l'espèce, par avenant du 7 mars 2016, la société Groupe AS Développement s'est engagée à poursuivre jusqu'au 30 juin 2018 le contrat de prestations de services signé avec la société GPS.

Or, par courrier du 4 septembre 2017 adressé par M. Y. à M. X., rédigé comme suit : « Je vous informe de la résiliation avec effet immédiat (jour de la réception de la présente lettre) du contrat en date du 23 septembre 2014 dont la validité a été portée au 30 juin 2018 par avenant en date du 7 mars 2016 [...] », la société Groupe AS Développement a unilatéralement mis un terme au contrat sans préavis et alors que les factures de la société PGS dues depuis le mois de mars 2017 n'étaient pas réglées.

En l'absence de démonstration d'une faute grave justifiant la résiliation, M. X. et la société GPS invoquent la rupture brutale et abusive de la relation commerciale entretenue avec la partie adverse.

Cependant, en application de l'article L. 442-6 du code de commerce, cette question ne relevait, en principe, pas du pouvoir juridictionnel du tribunal de commerce de Besançon et il résulte du plumitif qu'à l'audience de plaidoirie du 28 mars 2018, la société GPS a renoncé à la demande de 100.000 euros de dommages et intérêts relative à la rupture, de sorte que le tribunal n'évoquant pas cette renonciation (non plus que M. X. et GPS en cause d'appel) a statué ultra petita.

Eu égard à la renonciation susmentionnée intervenue en première instance dans le cadre d'une procédure orale, la cour n'a pas à statuer sur cette demande et infirmera le jugement querellé en ce qu'il a condamné solidairement la société Groupe AS Développement et M. Y. à payer à la société GPS la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et brutale du contrat de prestations de services.

Au contraire, par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont rejeté la demande en paiement des prestations non réalisées mais qui auraient dû l'être en l'absence de résiliation du contrat, le jugement discuté étant confirmé sur ce point.

En revanche, la société GPS et M. X. sont fondés à obtenir paiement des prestations réalisées jusqu'à la date de résiliation du contrat, de sorte que le jugement attaqué sera confirmé en ce qu'il a, par des motifs que la cour adopte également, condamné solidairement la société Groupe AS Développement et M. Y. à payer à la société GPS la somme de 261 568,02 euros TTC au titre du contrat de prestations de services jusqu'à la date de résiliation.

En effet, bien que M. Y., la société Groupe AS Développement et M. X. ès qualités soutiennent que M. Y. n'était pas partie à la convention de prestations de services, le protocole de cession stipulait : « Ce dernier [M. Y.] se réservant la faculté de s'adjoindre ou de se substituer toute personne physique ou morale de son choix, mais en demeurant dans tous les cas solidairement tenus des engagements souscrits au titre des présentes ».

Or, aux termes de l'article 6 dudit protocole la société Groupe AS Développement s'engageait à régler les factures présentées par la société GPS, selon des modalités détaillées dans l'acte.

Compte tenu de la procédure collective dont la société Groupe AS Développement bénéficie actuellement, il y a lieu de fixer au passif de celle-ci la créance de la société GPS, soit la somme de 261.568,02 euros.

 

Sur la commande de la coopérative de B. :

M. Y., la société Groupe AS Développement et M. X. ès qualités font valoir qu'en modifiant un devis initial validé par M. Y. et destiné à la coopérative de B., M. X. a causé un préjudice de 52.000 euros dont ils demandent réparation par allocation de ladite somme.

En cause d'appel, une demande similaire est faite par la société Evoli à l'encontre de M. X. et des sociétés GPS et PGI en réparation du préjudice qu'elle affirme avoir subi dans le cadre de l'exécution de la convention de prestations de services, dans la mesure où celle-ci prévoyait que les devis à proposer aux clients soient nécessairement validés par mail ou par écrit par M. Y..

Cependant, aucune contestation relativement à cette commande n'a été soulevée pendant plus de 5 ans, alors qu'un tel fait relevait manifestement de la garantie de passif, laquelle n'a, au demeurant, pas été mise en œuvre dans le délai de 36 mois prévu au protocole du 15 juin 2012.

En outre, M. Y., alors seul décisionnaire au sein de la société Evoli, qui aurait pu réagir au moment de la facturation, n'a pas contesté cette remise destinée à obtenir le marché de la coopérative de B..

Le jugement critiqué sera donc confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés Evoli et Groupe AS Développement ainsi que M. Y. de cette demande.

 

Sur la clause de non-concurrence :

Les premiers juges ont validé la clause de non-concurrence incluse dans le protocole d'acquisition des actions de la société Evoli signé le 15 juin 2012, aux motifs qu'elle a été acceptée sans restriction par M. X., qu'elle est justifiée dans la mesure où elle protège les intérêts légitimes de la société Evoli alors que M. X. maîtrise le savoir-faire de l'entreprise et qu'il est en relation avec sa clientèle, qu'enfin, elle est limitée dans l'espace et dans le temps.

Il s'avère que la clause litigieuse énonce s'agissant de sa durée et de son périmètre : « Cette interdiction s'exercera pendant une durée de cinq (5) ans sur l'ensemble de la France métropolitaine à compter de la cessation du contrat de prestations de services conclu avec la société à créer par M. X. avec la société holding AS Développement à créer par le cessionnaire; et avec un minimum de sept (7) ans à compter de la date de cession de la société Evoli ».

L'interdiction d'exercer une activité concurrente est donc opposable à M. X. jusqu'en septembre 2022, ce qui correspond à une clause de non-concurrence d'une durée de 10 ans à compter de la cession, durée qui apparaît excessivement longue.

En outre, l'interdiction est prévue sur l'ensemble du territoire métropolitain, voire à l'international, alors que l'activité de la société Evoli s'exerce essentiellement dans le cadre régional, la société Evoli faisant elle-même état de « la spécificité de la société Evoli, à savoir la conception, la fabrication et l'installation de fruitière à comté ». Or le comté bénéficie d'une appellation d'origine protégée qui limite réglementairement sa région de production.

En conséquence, la clause litigieuse apparaît insuffisamment limitée tant dans l'espace que dans le temps, de sorte qu'il y a lieu, sinon d'infirmer le jugement dont appel, du moins de limiter les effets de ladite clause dans le temps à la date du prononcé du présent arrêt.

 

Sur les demandes accessoires :

Les trois parties succombant partiellement, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'une quelconque d'entre elles et les dépens de première instance et d'appel seront supportés pour un tiers par la société Evoli et pour les deux tiers, in solidum, par la société Groupe AS Développement et M. Y., les dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance étant par ailleurs infirmées, tandis que celles non soumises à la critique des parties seront confirmées.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Besançon en date du 27 juin 2018, sauf à dire que la clause de non-concurrence opposable à M. X. ne produira plus d'effets à compter du prononcé du présent arrêt, et sauf en ce qu'il a condamné solidairement la société Groupe AS Développement et M. Y. à payer à la société GPS la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et brutale du contrat de prestations de services ainsi qu'en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Constate qu'en première instance, la société GPS a déclaré renoncer à sa demande de 100.000 euros de dommages et intérêts relative à la rupture de la relation commerciale.

Déboute la société GPS et M. X. de leur demande tendant à voir condamner la société Groupe AS Développement et M. Y. à leur payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et brutale du contrat de prestations de services.

Fixe au passif de la société Groupe AS Développement la créance de la société GPS à la somme de deux cent soixante-et-un mille cinq cent soixante-huit euros deux centimes (261.568,02 euros) à titre chirographaire.

Invite la société GPS à adresser, lorsqu'il sera passé en force de chose jugée, une expédition du présent arrêt au greffier du tribunal qui a ouvert la procédure collective de la société Groupe AS Développement conformément aux dispositions de l'article R. 624-11 du code de commerce.

Déboute les parties de leurs prétentions respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront supportés pour un tiers par la société Evoli et pour les deux tiers, in solidum, par la société Groupe AS Développement et M. Y., et accorde à M. Jean-Michel E., avocat qui en a fait la demande, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par Monsieur Edouard Mazarin, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Madame Chantal Mouget, faisant fonction de greffier.

Le greffier,                            le président de chambre