CASS. SOC., 8 juillet 2020
CERCLAB - DOCUMENT N° 8521
CASS. SOC., 8 juillet 2020 : pourvoi n° 18-26385 ; arrêt n° 565
Publication : Legifrance
Extrait (motifs de l’arrêt attaqué – moyen non admis) : « qu’il est de jurisprudence constante que l’employeur peut en principe imposer une mutation au salarié dont le contrat de travail comporte une clause de mobilité à la condition que celle-ci définisse de façon précise sa zone géographique d’application, qu’elle soit appliquée de bonne foi et que sa mise en œuvre soit dictée par l’intérêt de l’entreprise ; que le juge doit également contrôler que son application ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit du salarié à une vie personnelle et familiale ; que la bonne foi étant présumée, cet intérêt l’est aussi, et il incombe au salarié de démontrer que la décision de l’employeur a, en réalité, été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt ou bien qu’elle a été mise en œuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle ; que le refus par le salarié d’une nouvelle affectation aux termes de la clause de mobilité sans motif légitime peut être qualifié de faute grave : ; […] ; que le seul fait que jusqu’alors les pôles marketing de la société étaient divisés en trois sites, Paris, Valence et [...] ne démontre pas qu’il n’était pas dans l’intérêt de l’entreprise de les réduire désormais à deux pôles dans un souci d’effectivité qui relève essentiellement du pouvoir de direction de l’employeur ; que la seule présence du supérieur hiérarchique de M. X. sur Valence constatée le 7 novembre 2016 ne caractérisant pas le caractère abusif de la mise en œuvre de la clause de mobilité ; que, de la même façon, le fait que l’employeur s’interroge sur la manière dont mener la suppression du site de Paris, par proposition de promotion ou mise en œuvre de la clause de mobilité, ne démontre pas non plus ce caractère abusif, les stratégies de l’entreprise pour préserver son efficacité et ses finances, si elles respectent les droits des salariés, lui appartenant ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 8 JUILLET 2020
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : B 18-26385. Arrêt n° 565 F-D.
DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X.
DÉFENDEUR à la cassation : Société LPG Systems
Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président), président. SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Célice, Texidor, Périer, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
M. X., domicilié [adresse], a formé le pourvoi n° B 18-26.385 contre l’arrêt rendu le 2 octobre 2018 par la cour d’appel de Grenoble (chambre sociale, section A), dans le litige l’opposant à la société LPG Systems, dont le siège est [...], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Duval, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. X., de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société LPG Systems, après débats en l’audience publique du 26 mai 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Duval, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gilibert, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
1. Selon l’arrêt attaqué (Grenoble, 2 octobre 2018), M. X., engagé le 1er juillet 2010 par la société LPG Systems en qualité de « webmarketeur », a été licencié pour faute grave le 2 avril 2015.
2. Le 10 avril 2015, le salarié a saisi la juridiction prud’homale de demandes relatives tant à l’exécution qu’à la rupture de son contrat de travail.
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Examen des moyens :
Sur le premier moyen, ci-après annexé
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
3. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
4. Le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral alors :
« 1°/ que le harcèlement moral est constitué indépendamment de l’intention de son auteur ; qu’au nombre des faits caractérisant le harcèlement moral dont il avait été victime, l’exposant avait fait valoir l’envoi de l’avenant sur les objectifs deux jours après son rattachement à sa nouvelle supérieure hiérarchique alors que d’ordinaire cet avenant était donné en janvier et le fait que ce nouvel avenant avait ‘’rogné’’ sur les conditions d’octroi de ses primes ; que pour écarter ce fait de ceux laissant supposer l’existence d’un harcèlement et partant se dispenser d’apprécier si l’employeur était en mesure de le justifier par un élément objectif étranger à tout harcèlement, la cour d’appel qui retient que l’exposant ne démontre pas que ces objectifs ont « intentionnellement » été fixés de manière inatteignable pour le mettre en défaut par rapport aux années précédentes et à ses résultats provisoires de l’année 2014, a violé l’article L. 1152-1 du code du travail ;
2°/ que peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu’ayant retenu que sur une période de moins de deux mois, soit du 7 octobre au 4 décembre 2014, la supérieure hiérarchique de l’exposant ne lui avait adressé « que » trois mails le dimanche 19 octobre de 21 heures 42 à 22 heures 00 et trente-quatre mails le soir après 19 heures 00, la cour d’appel qui, pour écarter tout harcèlement, retient que le salarié ne démontre pas qu’il lui était imposé de les consulter immédiatement et d’y répondre avant le lendemain, s’est prononcée par des motifs inopérants comme ne permettant pas de conclure que ces agissements sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L. 1152-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, le second dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
5. Aux termes du premier texte visé, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
6. Il résulte du second de ces textes, que lorsque survient un litige, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
7. Pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral, l’arrêt, après avoir énoncé que le harcèlement moral n’est en soi, ni la pression, ni le surmenage, ni le conflit personnel ou non entre salariés, ni les contraintes de gestion ou le rappel à l’ordre voire le recadrage par un supérieur hiérarchique d’un salarié défaillant dans la mise en œuvre de ses fonctions, retient que les objectifs transmis en octobre 2014 l’ont été à la prise de poste de la responsable du salarié et que ce dernier ne démontre pas qu’ils ont intentionnellement été fixés de manière « inatteignables » pour le mettre en défaut par rapport aux années précédentes et à ses résultats provisoires de l’année 2014, en sorte que ce fait n’est pas établi. Puis, pour retenir que l’employeur démontre que les autres faits matériellement établis par le salarié étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, l’arrêt, s’agissant des mails reçus par le salarié de la part de sa responsable, énonce que le listing des mails reçus par M. X. de la part de Mme Z. du 7 octobre 2014 au 4 décembre 2014 ne fait apparaître que trois mails le dimanche 19 octobre de 21 heures 42 à 22 heures 00, tous les autres mails de ces trois mois (au nombre de quatre-vingt-dix-huit) étant adressés la semaine, dont uniquement trente-quatre le soir après 19 heures 00 et que M. X. ne démontre pas qu’il lui était imposé de les consulter immédiatement et d’y répondre avant le lendemain surtout s’il travaillait de son bureau en région parisienne et non de chez lui comme il lui a été demandé.
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
8. En statuant ainsi, alors que le harcèlement moral est constitué indépendamment de l’intention de son auteur, la cour d’appel qui a, en outre, statué par des motifs impropres à établir, s’agissant de l’envoi des mails au salarié, que l’employeur justifiait ses agissements par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, a violé les textes susvisés.
Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
9. Le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter ses demandes tendant au paiement d’heures supplémentaires, de repos compensateur et de congés payés afférents, de travail dissimulé et de non-respect de la durée maximale de travail alors « qu’il appartient au salarié qui demande le paiement d’heures supplémentaires d’étayer préalablement sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés, l’employeur étant alors tenu d’y répondre en fournissant au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que le juge ne peut rejeter une telle demande au motif que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de sa demande ; qu’au soutien de sa demande en paiement d’heures supplémentaires, l’exposant avait versé aux débats des tableaux dont le contenu était extrêmement précis comme indiquant, au titre des années considérées et pour chaque jour travaillé, les horaires effectués et le nombre d’heures supplémentaires accomplies ; que la cour d’appel qui, pour le débouter de l’ensemble de ses demandes retient qu’au-delà « des tableaux de type Word par lesquels il a récapitulé ses heures supplémentaires non vérifiables », il n’avait pas versé d’autres éléments les corroborant « sachant que travaillant à domicile avant son recadrage, il n’était pas contrôlé dans ses heures de travail et de pause », et, par motifs éventuellement adoptés des premiers juges que « nul ne peut se faire de preuve à lui-même » et que le salarié « ne prouv(e) aucunement avoir effectué des heures supplémentaires », a fait peser sur le salarié la charge de rapporter la preuve de l’existence et du nombre d’heures de travail accomplies et partant des heures supplémentaires dont il demandait le paiement, en violation de l’article L. 3171-4 du code du travail. »
Réponse de la Cour
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l’article L. 3171-4 du code du travail :
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
10. Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
11. Enfin, selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
12. Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
13. Pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, l’arrêt retient que le salarié verse aux débats des tableaux de type Word par lesquels il a récapitulé ses heures supplémentaires non vérifiables sans verser d’autres éléments les corroborant, sachant que travaillant à domicile avant son recadrage, il n’était pas contrôlé dans ses heures de travail et de pause. Il en déduit que le salarié ne fournit par conséquent pas les éléments suffisants pour étayer sa demande d’heures supplémentaires.
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
14. En statuant ainsi, la cour d’appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute M. X. de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral, au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, du repos compensateur et des congés payés afférents, du travail dissimulé et du non-respect de la durée maximale de travail, l’arrêt rendu le 2 octobre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Grenoble ;
Remet, sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Chambéry ;
Condamne la société LPG Systems aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société LPG Systems et la condamne à payer à M. X. la somme de 3.000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille vingt.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour M. X.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LE POURVOI REPROCHE A L’ARRÊT CONFIRMATIF ATTAQUÉ D’AVOIR débouté l’exposant de l’intégralité de ses demandes et notamment celles tendant à voir juger que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et à voir condamner son employeur à lui payer diverses sommes au titre de la rupture abusive de son contrat de travail ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE Sur le bien-fondé du licenciement : qu’il est de principe que la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible maintien de l’intéressé au sein de l’entreprise même pendant la durée du préavis ; que l’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ; qu’en l’espèce, à l’appui de la lettre de licenciement, la société LPG SYSTEMS reproche à M. X. d’avoir refusé sa mutation définitive sur l’établissement sis à [...] conformément à la clause de mobilité figurant dans son contrat de travail ainsi que la solution alternative proposée dans un second temps en rapport avec ses compétences et qualifications spécifiques ; qu’il est de jurisprudence constante que l’employeur peut en principe imposer une mutation au salarié dont le contrat de travail comporte une clause de mobilité à la condition que celle-ci définisse de façon précise sa zone géographique d’application, qu’elle soit appliquée de bonne foi et que sa mise en œuvre soit dictée par l’intérêt de l’entreprise ; que le juge doit également contrôler que son application ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit du salarié à une vie personnelle et familiale ; que la bonne foi étant présumée, cet intérêt l’est aussi, et il incombe au salarié de démontrer que la décision de l’employeur a, en réalité, été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt ou bien qu’elle a été mise en œuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle ; que le refus par le salarié d’une nouvelle affectation aux termes de la clause de mobilité sans motif légitime peut être qualifié de faute grave ; qu’en l’espèce, aux termes du contrat à durée indéterminée de M. X. en date du 1er janvier 2011, l’article 2 intitulé « lieu de travail » précise que « M. X. est engagé pour travailler à Paris (75),... Cependant, il est entendu que pour des raisons relatives aux fonctions de M. X. et aux nécessités de l’entreprise, la société peut être amenée à modifier le lieu de travail qui pourrait s’exercer indifféremment à Valence (26), à [...] sans que cela constitue une modification du contrat de travail, même si cela doit entraîner un changement de résidence. Par ailleurs, la nature des fonctions de Web marketeur pourra le conduire à effectuer ponctuellement des déplacements en France sur les autres sites LPG, notamment à [...] où se situe la direction Marketing et au siège à valence (26). » ; qu’il n’est pas contesté que cet article constitue une clause de mobilité claire signée par les deux parties en connaissance de cause qui comporte une délimitation précise de la zone géographique visée par la mobilité éventuelle du salarié ; que les parties s’opposent s’agissant de l’intérêt de l’entreprise à faire jouer la clause de mobilité de M. X. ; que le seul fait que jusqu’alors les pôles marketing de la société étaient divisés en trois sites, Paris, Valence et [...] ne démontre pas qu’il n’était pas dans l’intérêt de l’entreprise de les réduire désormais à deux pôles dans un souci d’effectivité qui relève essentiellement du pouvoir de direction de l’employeur ; que la seule présence du supérieur hiérarchique de M. X. sur Valence constatée le 7 novembre 2016 ne caractérisant pas le caractère abusif de la mise en œuvre de la clause de mobilité ; que, de la même façon, le fait que l’employeur s’interroge sur la manière dont mener la suppression du site de Paris, par proposition de promotion ou mise en œuvre de la clause de mobilité, ne démontre pas non plus ce caractère abusif, les stratégies de l’entreprise pour préserver son efficacité et ses finances, si elles respectent les droits des salariés, lui appartenant ; que M. X. a signé en toute connaissance de cause une clause de mobilité et ne conteste pas avoir disposé d’un délai de prévenance suffisant (deux mois) ni que son employeur lui ait proposé un autre poste qu’il a aussi refusé, lui permettant de ne se rendre à [...] que deux jours par semaine outre des déplacements déjà prévus par son contrat de travail, préservant ainsi sa vie personnelle ; que le fait que M. X. soit marié avec un jeune enfant à charge et que son épouse travaille, ne constitue pas une situation personnelle et familiale particulière mais au contraire tout à fait classique et il n’est pas démontré que la mise en œuvre de la clause de mobilité ait porté une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale ; qu’il convient de confirmer la licéité de la clause de mobilité ainsi que la régularité de ses conditions de mise en œuvre et de débouter M. X. à ce titre ; le licenciement de M. X. étant valablement fondé sur une faute grave ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE, Sur la demande d’indemnité pour licenciement abusif et ses conséquences : que Monsieur X. a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 avril 2015, clairement motivée, au motif exclusif que le salarié a refusé l’exécution de sa clause de mobilité ; qu’il revient alors au Conseil de vérifier si le refus exprimé par Monsieur X. est fautif ou pas ; qu’en l’espèce, il convient de remarquer que la clause de mobilité figure bien dans le contrat de travail de Monsieur X., en son article 2, le site de [...] étant clairement évoqué, que d’ailleurs et ce en contradiction avec les dires de Monsieur X., le premier contrat de travail conclu entre les parties, à durée déterminée énonce également que « la société peut être amenée à modifier le lieu de travail, sans que cela constitue une modification du contrat de travail, même si cela doit entraîner un changement de résidence » ; qu’alors cette spécificité liée au lieu de travail faisait partie intégrante du contrat, de la convention conclue entre les parties, que Monsieur X., ne pouvait n’y l’ignorer ni s’y soustraire ; que le Conseil considère ainsi cette clause de mobilité tout à fait licite, que Monsieur X. le concède sans l’énoncer puisqu’il indique que la société a commis un abus de droit en l’espèce, reconnaissant de facto que ce droit existe ; que Monsieur X. fonde l’abus de droit sur le caractère arbitraire de la mise en œuvre de cette clause de mobilité ; que par contre, il n’amène aucun élément probant à l’appui de sa demande, qu’il apparaît au Conseil légitime que la société veuille centraliser le marketing à [...] ; qu’en outre, pendant plusieurs semaines la société a recherché avec Monsieur X. des solutions pour limiter l’impact sur sa vie privée, de cette mutation, qu’ainsi il lui a été proposé de ne passer que deux jours par semaine à [...], lui laissant ainsi trois jours à son domicile en région parisienne, que pour se faire un nouveau poste était créé à son attention ; qu’en conséquence de ce qui précède, il ressort que l’abus de droit commis par la société LPG SYSTEMS n’est pas prouvé, qu’alors Monsieur X. a refusé abusivement l’exécution d’une clause de mobilité licite, qu’il a ainsi fait preuve d’insubordination à l’égard de son employeur, en contradiction avec son pouvoir de direction, qu’il s’agit d’une faute grave de sa part, qu’il sera débouté de ses demandes à titre d’indemnités pour licenciement abusif, de préavis, de congés payés afférents, indemnité conventionnelle de licenciement ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS D’UNE PART QU’ est sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour refus de mutation du salarié dont le contrat de travail comporte une clause de mobilité, si la mise en œuvre de cette clause porte atteinte à son droit à une vie personnelle et familiale et que cette atteinte n’est pas justifiée par la tâche à accomplir ni proportionnée au but recherché par l’employeur ; qu’après avoir retenu que le fait que l’exposant soit marié avec un jeune enfant à charge et que son épouse travaille ne constitue pas une situation personnelle et familiale « particulière mais au contraire tout à fait classique » et qu’il n’est pas démontré que la mise en œuvre de la clause de mobilité ait porté une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale, la cour d’appel qui retient que le licenciement de l’exposant, motivé par son refus de mutation en dépit de la clause de mobilité figurant dans son contrat de travail est fondé sur une faute grave, sans nullement rechercher si l’atteinte portée au droit de l’exposant à une vie personnelle et familiale, dont elle constatait la réalité, pouvait être justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché, n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L. 1121-1 du code du travail ensemble l’article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en l’espèce ;
ALORS D’AUTRE PART QUE lorsqu’ils sont saisis d’un moyen en ce sens, les juges du fond doivent rechercher si la véritable cause du licenciement ne réside pas dans un autre motif que celui invoqué dans la lettre de licenciement ; que l’exposant avait fait valoir que la véritable cause de son licenciement était la volonté de son employeur de supprimer son poste pour faire des économies ; qu’offrant d’en rapporter la preuve, l’exposant avait versé aux débats différents courriels du contrôleur de gestion (du 24 novembre 2014) et de la directrice des relations humaines (19 novembre 2014) ainsi que l’attestation de M. P..., ex Directeur général monde, dont il ressortait de manière très précise que l’employeur avait recherché et anticipé le refus de l’exposant de sa mutation à l’autre bout de la France et que la décision de mutation litigieuse et l’invocation de la clause de mobilité figurant au contrat de travail n’étaient qu’un prétexte afin de masquer en réalité un licenciement économique ; qu’en se bornant à relever que n’était pas démontré l’absence d’intérêt de l’entreprise à faire jouer la clause de mobilité de l’exposant, ni que la mise en œuvre de cette clause ait porté une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale, sans nullement répondre au moyen pertinent dont elle était saisie, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
ALORS ENFIN et en tout état de cause QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; que ne constitue pas une faute grave le fait pour un salarié, comptant 5 ans d’ancienneté dans l’entreprise, sans aucun passé disciplinaire, ayant toujours travaillé à Paris et, avec l’accord de son employeur, souvent à son domicile, de refuser sa mutation à Nice, imposée par l’employeur en vertu d’une clause de mobilité figurant au contrat de travail, en invoquant le fait qu’une telle décision de l’employeur, qui lui était parvenue la veille de la naissance de son premier enfant, portait atteinte à sa vie personnelle et familiale en menaçant au surplus l’emploi de sa compagne et en contraignant le couple à revendre le bien immobilier dont il s’était porté acquéreur ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé les articles 1234-1, 1234-5 et 1234-9 du Code du travail ;
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LE POURVOI REPROCHE A L’ARRÊT CONFIRMATIF ATTAQUÉ D’AVOIR débouté l’exposant de l’intégralité de ses demandes et notamment celles tendant à la condamnation de son employeur à lui payer diverses à titre d’indemnité pour harcèlement moral ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE, Sur le harcèlement moral : qu’aux termes de l’article L.1152-1 et L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ; que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral ; que, dans l’affirmative, il appartient à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le harcèlement moral n’est en soi, ni la pression, ni le surmenage, ni le conflit personnel ou non entre salariés, ni les contraintes de gestion ou le rappel à l’ordre voire le recadrage par un supérieur hiérarchique d’un salarié défaillant dans la mise en œuvre de ses fonctions ; qu’en l’espèce, M. X. invoque la pression subie de la part de sa nouvelle responsable, Mme Z., depuis son arrivée octobre 2014 caractérisée par : l’envoi excessif et incessant de mails y compris la nuit et le week-end, la demande de travaux le weekend pour le lundi matin, la demande de travaux visant à dévaloriser ses concurrents, la suppression discriminatoire et injustifiée de l’autorisation de travailler à domicile, la suppression sans concertation d’une gamme de produits qu’il avait sous sa responsabilité et représentant 60 % du nombre de ses références, l’annonce de la venue de M. X. durant une journée à [...] juste avant l’arrivée de son enfant et avant sa mutation, sa stigmatisation par la divulgation de son salaire à toute l’équipe, l’annonce de ses objectifs pour l’année 2014 en octobre 2014 au lieu de janvier 2014 ;
S’agissant des différents reproches du salarié : que listing des mails reçus par M. X. de la part de Mme Z. du 7 octobre 2014 au 4 décembre 2014 fait effectivement apparaître sur les 98 mails reçus sur une semaine, 34 lui ont été adressés le soir après 19:00 outre certains le week-end ; que ce fait apparaît par conséquent établi ; que M. X. accuse Mme Z. de lui demander des travaux urgents du vendredi pour le lundi mais le seul mail versé par le salarié aux débats du vendredi 24 octobre à 18:37, ne fait que fixer une réunion conférence téléphonique le lundi matin à 8:30 sans travail préparatoire ; que ce fait n’est donc pas établi ; que s’agissant des travaux destinés à dévaloriser ses concurrents, le mail fourni versé ne démontre pas les agissements allégués ; qu’il est établi qu’il a été rappelé à M. X. qu’il devait se rendre à l’adresse du bureau à Paris pour travailler ; qu’il n’est pas contesté que la vente en ligne cosmétiques LPG a été supprimée le 13 février 2015 compte tenu « des problèmes engendrés à l’export et le peu de retour sur investissement avec la précision que c’était sans lien avec l’équipe gérant les produits » ; que le mail versé aux débats par M. X. ne démontre pas son impossibilité de modifier la date de son déplacement à la journée à [...] en cas de naissance imminente de son enfant ; qu’il est établi que le montant du salaire de M. X. a été évoqué auprès des autres salariés ; qu’enfin, les objectifs transmis en octobre 2014 l’ont été à la prise de poste de sa responsable et M. X. ne démontre pas qu’ils ont intentionnellement été fixés de manière inatteignables pour le mettre en défaut par rapport aux années précédentes et à ses résultats provisoires de l’année 2014 ; que ce fait n’est pas établi ; qu’il résulte par conséquent de l’examen des faits susvisés des éléments précis et concordants permettant de présumer que M. X. a subi des agissements répétés de la part de son employeur pouvant caractériser un harcèlement moral ; qu’il apparaît néanmoins que l’employeur apporte une réponse circonstanciée à chacun des reproches du salarié ; qu’ainsi il résulte des éléments versés aux débats que le listing des mails reçus par M. X. de la part de Mme Z. du 7 octobre 2014 au 4 décembre 2014 ne fait apparaître que trois mails le dimanche 19 octobre de 21:42 à 22:00, tous les autres mails de ces trois mois (au nombre de 98) étant adressés la semaine, dont uniquement 34 le soir après 19:00 et M. X. ne démontre pas qu’il lui était imposé de les consulter immédiatement et d’y répondre avant le lendemain surtout s’il travaillait de son bureau en région parisienne et non de chez lui comme il lui a été demandé ; que rien dans le contrat de travail de M. X. ne l’autorise à travailler à son domicile, l’adresse de son bureau à Paris y étant même précisée et le seul rappel à Mme L... et M. X. de leur obligation de présence au bureau par Mme Z. ne constitue pas un agissement répété constitutif d’un harcèlement moral mais un simple recadrage qui au surplus ne concerne pas uniquement M. X. mais également une autre collègue ; que la décision de suppression de la vente en ligne cosmétiques LPG le 13 février 2015 relève du pouvoir de direction et d’organisation de l’employeur et M. X. ne démontre pas que cette décision ait eu un impact sur sa rémunération et qu’elle était uniquement destinée à lui nuire ; qu’enfin, la seule mention du salaire des salariés compte tenu des enveloppes budgétaires à gérer ne constitue pas une divulgation fautive ni taboue d’autant que dans le mail du 24 octobre 2015 à 15:35, M. X. ne s’offusque pas de la mention de sa rémunération mais au contraire s’étonne de celle élevée de sa collègue et sollicite avec humour (« smileys ») une augmentation ; que l’employeur démontre ainsi que les faits matériellement établis par M. X. sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que les demandes relatives au harcèlement doivent par conséquent être rejetées par voie de confirmation ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Sur la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral : que Monsieur X. se fonde exclusivement sur la mauvaise qualité de ses relations avec sa nouvelle responsable, Madame Z., à compter du 1er octobre 2014, et du comportement excessif de cette personne à son encontre ; qu’il caractérise le harcèlement par l’envoi excessif et incessant de mails par Madame Z. ; qu’il revient au Conseil de vérifier si, le contenu de ces mails, peut constituer une manœuvre de harcèlement moral ; qu’à la lecture exhaustive de leurs échanges, il ne ressort aucun comportement excessif de Madame Z., bien en contraire, celle-ci ayant manifestement une appréciation positive de Monsieur X. ; qu’en outre, les exemples de harcèlement fournis par Monsieur X. sont inopérants, qu’ainsi annoncer une « conf call » le lundi matin, par mail du vendredi soir précédent, n’implique pas un travail préparatoire pendant le week-end, annonçant simplement un rendez-vous important de « brainstorming », qu’il n’est absolument pas compréhensible, à la lecture des mails invoqués par le demandeur, qu’il était demandé à Monsieur X. des travaux destinés à dévaloriser des concurrents, que les dates et heures d’envoi des mails de Madame Z. à son adresse, même hors son créneau d’horaire de travail, ne constituent aucunement une manœuvre de harcèlement moral à son encontre, Monsieur X. n’ayant aucune obligation ou contrainte de les traiter immédiatement, voire aucune possibilité d’en avoir pris connaissance tant qu’il n’a pas repris son travail ; qu’en conséquence de ce qui précède, le harcèlement moral dont s’estime victime Monsieur X. est insuffisamment prouvé, qu’il sera débouté de sa demande à ce titre ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS D’UNE PART QUE le harcèlement moral est constitué indépendamment de l’intention de son auteur ; qu’au nombre des faits caractérisant le harcèlement moral dont il avait été victime, l’exposant avait fait valoir l’envoi de l’avenant sur les objectifs deux jours après son rattachement à sa nouvelle supérieure hiérarchique alors que d’ordinaire cet avenant était donné en janvier et le fait que ce nouvel avenant avait « rogné » sur les conditions d’octroi de ses primes (conclusions d’appel p 19) ; que pour écarter ce fait de ceux laissant supposer l’existence d’un harcèlement et partant se dispenser d’apprécier si l’employeur était en mesure de le justifier par un élément objectif étranger à tout harcèlement, la cour d’appel qui retient que l’exposant ne démontre pas que ces objectifs ont « intentionnellement » été fixés de manière inatteignable pour le mettre en défaut par rapport aux années précédentes et à ses résultats provisoires de l’année 2014, a violé l’article L 1152-1 du code du travail ;
ALORS D’AUTRE PART QUE peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; Qu’ayant retenu que sur une période de moins de 2 mois, soit du 7 octobre au 4 décembre 2014, la supérieure hiérarchique de l’exposant ne lui avait adressé « que » trois mails le dimanche 19 octobre de 21h42 à 22h00 et 34 mails le soir après 19h00, la cour d’appel qui, pour écarter tout harcèlement, retient que le salarié ne démontre pas qu’il lui était imposé de les consulter immédiatement et d’y répondre avant le lendemain, s’est prononcée par des motifs inopérants comme ne permettant pas de conclure que ces agissements sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L 1152-1 du code du travail ;
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LE POURVOI REPROCHE A L’ARRÊT CONFIRMATIF ATTAQUÉ D’AVOIR débouté l’exposant de l’intégralité de ses demandes et notamment celles tendant au paiement des heures supplémentaires, du repos compensateur, outre congés payés y afférents, du travail dissimulé et du non-respect de la durée maximale de travail ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE Sur la convention de forfait et les heures supplémentaires : que les parties s’opposent sur l’application d’une convention forfait jours et le paiement d’heures supplémentaires ; qu’une convention de forfait en jours doit répondre à plusieurs conditions cumulatives pour être valide : l’accord écrit du salarié pour sa conclusion, une convention collective doit déterminer le nombre de jours travaillés dans la limite de 218 jours et l’employeur doit tenir un entretien annuel portant sur la charge de travail du salarié l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre activité professionnelle et vie personnelle et familiale ainsi que sur sa rémunération ; qu’en l’espèce l’article 4 du contrat de travail du 1er janvier 2011 mentionne application d’un forfait en jours en application de la convention collective de la métallurgie fixé à 218 jours par année civile complète compte tenu d’un droit intégral à congés payés y compris les éventuels congés d’ancienneté ; que, toutefois, la société LPG SYSTEMS ne démontre pas avoir réalisé l’entretien annuel obligatoire prévu à l’article L.3121-46 du code du travail ; que par conséquent il sera confirmé que la convention en forfait jours n’est pas applicable en l’espèce et que les dispositions des articles L.3121-22 et L. 3171-4 du code du travail relatives aux heures supplémentaires s’appliquent ; que, par application de l’article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande ; qu’ainsi, si la preuve des horaires de travail effectués n’incombe spécialement à aucune des parties et si l’employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient aussi à ce dernier de fournir préalablement des éléments suffisamment précis de nature à étayer sa demande et à permettre également à l’employeur d’y répondre ; qu’en l’espèce, M. X. verse aux débats au soutien de sa demande, des tableaux de type Word par lesquels il a récapitulé ses heures supplémentaires non vérifiables sans verser d’autres éléments les corroborant, sachant que travaillant à domicile avant son recadrage, il n’était pas contrôlé dans ses heures de travail et de pause ; que M. X. ne fournit par conséquent pas les éléments suffisants pour étayer sa demande d’heures supplémentaires et il sera débouté de sa demande à ce titre ainsi que des demandes associées par voie de confirmation
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Sur la demande au titre des heures supplémentaires et ses conséquences : que Monsieur X. sollicite le paiement d’heures supplémentaires au motif principal que sa convention en forfait jours est inopérante en l’espèce ; que le Conseil rappelle que trois conditions sont nécessaires et suffisantes pour qu’une convention de forfait en jours soit licite, à savoir que le contrat de travail du salarié le prévoit, qu’un accord d’entreprise ou de branche en précise la mise en œuvre, que le salarié et l’employeur organisent un entretien annuel pour évaluer la charge de travail et son incidence sur la vie privée du salarié (cf article L.3121-46 du Code du travail) ; qu’en l’espèce, si les deux premières conditions sont bien remplies, il ressort qu’aucun entretien spécifique annuel n’était organisé entre la société LPG SYSTEMS et Monsieur X. sur la mise en œuvre de sa convention forfait ; qu’en conséquence, il ressort que la convention de forfait en jours de Monsieur X. n’est pas applicable, qu’il est ainsi soumis à un horaire de travail, qu’il est éligible à l’éventuel paiement d’heures supplémentaires ; qu’il doit ainsi être fait application des dispositions de l’article L.3171-4 du Code du travail ; que sur l’horaire de travail de Monsieur X., la société LPG SYSTEMS amène la convention de forfait jours, indiquant alors l’absence totale de contrôle de son temps de travail ; qu’en face, Monsieur X. amène au Conseil un état informatique établi par lui-même, indiquant de façon arbitraire et non vérifiable un décompte d’heures supplémentaires, sans aucun autre élément extérieur laissant présumer des dépassements de l’horaire légal hebdomadaire de travail ; que, d’une part, le Conseil rappelle que nul ne peut se faire de preuve à lui-même, conformément aux dispositions de l’article 1331 du Code civil, que d’autre part Monsieur X. n’amène aucun élément objectif laissant supposer l’accomplissement d’heures supplémentaires, à la demande même implicite de son employeur, que Monsieur X. a travaillé longtemps à domicile, rendant ainsi difficile le contrôle de la durée de son travail ; qu’en conséquence, Monsieur X. ne prouvant aucunement avoir effectué des heures supplémentaires, il sera débouté de sa demande à ce titre et des demandes incidentes de repos compensateur et d’indemnité pour travail dissimulé, et de non-respect de la durée maximale de travail ; Sur la demande au titre de la prime d’objectifs : qu’il ressort du dossier, qu’en janvier 2015, Monsieur X. a touché une prime d’objectifs à hauteur de 1.500 €uros, qu’il ne justifie en rien être éligible d’une prime d’un montant supérieur, qu’alors il sera débouté de sa demande à ce titre ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS D’UNE PART QU’il appartient au salarié qui demande le paiement d’heures supplémentaires d’étayer préalablement sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés, l’employeur étant alors tenu d’y répondre en fournissant au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que le juge ne peut rejeter une telle demande au motif que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de sa demande ; qu’au soutien de sa demande en paiement d’heures supplémentaires, l’exposant avait versé aux débats des tableaux dont le contenu était extrêmement précis comme indiquant, au titre des années considérées et pour chaque jour travaillé, les horaires effectués et le nombre d’heures supplémentaires accomplies ; que la Cour d’appel qui, pour le débouter de l’ensemble de ses demandes retient qu’au-delà « des tableaux de type Word par lesquels il a récapitulé ses heures supplémentaires non vérifiables », il n’avait pas versé d’autres éléments les corroborant « sachant que travaillant à domicile avant son recadrage, il n’était pas contrôlé dans ses heures de travail et de pause », et, par motifs éventuellement adoptés des premiers juges que « nul ne peut se faire de preuve à lui-même » et que le salarié « ne prouv(e) aucunement avoir effectué des heures supplémentaires », a fait peser sur le salarié la charge de rapporter la preuve de l’existence et du nombre d’heures de travail accomplies et partant des heures supplémentaires dont il demandait le paiement, en violation de l’article L.3171-4 du Code du travail ;
ALORS D’AUTRE PART QU’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu’après avoir constaté qu’en l’espèce, au soutien de sa demande en paiement d’heures supplémentaires, le salarié avait versé aux débats des tableaux de type Word par lesquels il a récapitulé les heures supplémentaires qu’il avait accomplies, la Cour d’appel qui, pour conclure que le salarié ne fournissait pas les éléments suffisants pour étayer sa demande, retient que ces heures supplémentaires ne seraient pas vérifiables et que le salarié n’avait pas versé d’autres éléments les corroborant « sachant que travaillant à domicile avant son recadrage, il n’était pas contrôlé dans ses heures de travail et de pause », s’est prononcée par des motifs inopérants comme ne caractérisant nullement en quoi les éléments produits par le salarié et notamment les tableaux de type Word ci-dessus visés dont le contenu était extrêmement précis comme indiquant, au titre des années considérées et pour chaque jour travaillé, les horaires effectués et le nombre d’heures supplémentaires accomplies, n’étaient pas suffisamment précis quant aux horaires réalisés pour permettre à l’employeur d’y répondre et n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L.3171-4 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QU’il appartient en toutes circonstances à l’employeur de contrôler et d’être en mesure de rapporter la preuve des horaires de travail effectivement accomplies par le salarié ; qu’après avoir retenu que la convention de forfait en jours n’était pas applicable, la cour d’appel qui retient, pour conclure que l’exposant, qui versait aux débats des tableaux de type Word par lesquels il a récapitulé les heures supplémentaires qu’il avait accomplies, ne fournissait pas les éléments suffisants pour étayer sa demande tendant au paiement des heures supplémentaires qu’il avait accomplies, que ces heures supplémentaires ne seraient pas vérifiables en l’absence d’autres éléments les corroborant, que « travaillant à domicile avant son recadrage, il n’était pas contrôlé dans ses heures de travail et de pause » et, par motifs adoptés, que l’employeur « amène la convention de forfait jours, indiquant alors l’absence totale de contrôle de son temps de travail » et que « Monsieur X. a travaillé longtemps à domicile, rendant ainsi difficile le contrôle de la durée de son travail », s’est prononcée par des motifs inopérants comme insusceptibles de justifier, non seulement en quoi les éléments produits par le salarié, dont les tableaux de type Word ci-dessus visés, n’étaient pas suffisamment précis quant aux horaires réalisés pour permettre à l’employeur d’y répondre, mais aussi en quoi l’employeur n’aurait pas été en mesure d’y répondre et fondé à ne pas fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés et n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L.3171-4 du Code du travail ;