CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA LYON (1re ch. civ. A), 10 décembre 2020

Nature : Décision
Titre : CA LYON (1re ch. civ. A), 10 décembre 2020
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 1re ch. A
Demande : 18/03620
Date : 10/12/2020
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 17/05/2018
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 8695

CA LYON (1re ch. civ. A), 10 décembre 2020 : RG n° 18/03620 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Cependant, l'année civile compte douze mois et les intérêts dus pour une échéance mensuelle représentent un douzième de l'intérêt conventionnel : aussi, calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à calculer ces intérêts sur la base d'un douzième de l'intérêt conventionnel ou sur la base d'un mois normalisé de 30,41666 jours et d'une année de 365 jours.

Ainsi, le calcul des intérêts de chaque mensualité, tel que défini par la clause précitée, n'est pas en soi, contraire aux prescriptions légales sus-mentionnées.

Il en résulte que cette clause ne peut pas créer de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE A

ARRÊT DU 10 DÉCEMBRE 2020

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 18/03620. N° Portalis D. - V - B7C – LWTL. Décision du tribunal de grande instance de Lyon (4e ch.), Au fond du 13 avril 2018 : R.G. n° 15/9382.

 

APPELANTE :

Mme X. épouse Y.

née le [date] à [ville], [...], [...] , représentée par la SCP JACQUES A. ET PHILIPPE N., avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 475, et pour avocat plaidant la SELARL SR AVOCATCONSEIL, avocat au barreau de LYON, toque : 1414

 

INTIMÉE :

SA CRÉDIT LYONNAIS

[...], [...], représentée par Maître Pierre B., avocat au barreau de LYON, toque : 140

 

Date de clôture de l'instruction : 28 mai 2019

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 4 novembre 2020

Date de mise à disposition : 10 décembre 2020

Audience présidée par Annick ISOLA, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Séverine POLANO, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré : - Anne WYON, président - Françoise CLEMENT, conseiller - Annick ISOLA, conseiller

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Suivant offre du 27 juillet 2010, acceptée le 9 août 2010, la société Le Crédit lyonnais (la banque) a consenti à Mme X. épouse Y. un prêt immobilier d'un montant de 199.200 euros, remboursable en 300 échéances, le taux effectif global (TEG) stipulé étant de 4,07 %.

Le 27 juillet 2015, estimant que des erreurs affectaient le TEG, Mme Y. a assigné la banque en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels devant le tribunal de grande instance de Lyon.

Par jugement du 13 avril 2018, le tribunal a débouté Mme Y. de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée à payer à la banque la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

[*]

Mme Y. a relevé appel de cette décision le 17 mai 2018.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 15 février 2019, elle demande, en substance, à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- juger que la clause stipulant le calcul des intérêts conventionnels sur 360 jours constitue une clause abusive,

- prononcer la nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel visé dans l'offre de prêt et substituer au taux d'intérêt conventionnel le taux légal en vigueur en 2010 (0,65 %),

A titre subsidiaire,

- prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels et substituer au taux d'intérêt conventionnel le taux légal en vigueur en 2010 (0,65 %),

A titre infiniment subsidiaire,

- ordonner la déchéance partielle des intérêts du prêt,

- condamner la banque à lui verser la somme de 2.930,80 euros,

En toute hypothèse,

- juger que le taux applicable au prêt est de 0,65 %,

- condamner la banque à lui rembourser les sommes trop perçues correspondant à l'écart entre les intérêts versés au taux conventionnel et les intérêts calculés sur la base du taux légal au titre du prêt souscrit, soit la somme de 29.841,81 euros pour la période du 17 septembre 2010 au 31 mars 2016,

- juger que la créance dont elle est titulaire sur la banque au titre du prêt a produit intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure du 3 juillet 2015, se capitalisant dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- condamner la banque à lui payer une somme de 4.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la banque aux dépens distrait au profit de Maître N.

[*]

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 3 mai 2019, la banque demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué,

- débouter Mme Y. de toutes ses demandes,

- condamner Mme Y. à lui payer 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens avec application de l'article 699 du même code au bénéfice de Maître B., avocat,

- subsidiairement, limiter la restitution d'intérêts mise à sa charge à une somme forfaitaire symbolique,

- plus subsidiairement, dire que le taux d'intérêt légal substitué au taux conventionnel est sujet aux variations que la loi lui apporte.

[*]

Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 mai 2019.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

A titre liminaire, il sera rappelé que les « demandes » tendant à voir « constater » ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour ; il en est de même des « demandes » tendant à voir « dire et juger » ou « dire » lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.

Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En cause d'appel, Mme Y. soutient que la clause suivante figurant dans l'offre de prêt est abusive :

« Les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. En cas de remboursement anticipé, les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exact de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an. Ajustement de la première échéance : la première échéance du prêt est toujours calculée en jours exacts. De ce fait, son montant peut être différent des autres mensualités des intérêts intercalaires et des cotisations d'assurance (le cas échéant) qui peuvent être perçus et donc rajoutés et ce, dans le cas où le nombre de jours entre le début de l'amortissement et la première échéance n'est pas égal à 30 jours ».

Cependant, l'année civile compte douze mois et les intérêts dus pour une échéance mensuelle représentent un douzième de l'intérêt conventionnel : aussi, calculer les intérêts courus entre deux échéances sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à calculer ces intérêts sur la base d'un douzième de l'intérêt conventionnel ou sur la base d'un mois normalisé de 30,41666 jours et d'une année de 365 jours.

Ainsi, le calcul des intérêts de chaque mensualité, tel que défini par la clause précitée, n'est pas en soi, contraire aux prescriptions légales sus-mentionnées.

Il en résulte que cette clause ne peut pas créer de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive.

Par ailleurs, Mme Y. poursuit la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et, à titre subsidiaire, la déchéance du droit aux intérêts, totale ou, à défaut, partielle.

La nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels ne peut pas être prononcée pour sanctionner le formalisme de l'offre de prêt exigé à l'article L. 312-8 du code de la consommation et le jugement qui a rejeté cette demande mérite dès lors confirmation.

Mme Y. reproche à la banque les erreurs suivantes :

- le calcul des intérêts sur la base de 360 jours,

- l'omission dans le TEG stipulé de certains frais (intérêts intercalaires et de la prime de raccordement d'assurance).

Pour que soit prononcée la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, l'emprunteur doit établir que les erreurs qu'il allègue ont entraîné une inexactitude affectant le TEG figurant au contrat d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa version applicable à l'espèce.

Il en est de même en cas d'utilisation de l'année lombarde.

Mme Y. soutient que le taux d'intérêt est de 3,589 % au lieu de 3,54 % et que le TEG réel est supérieur de 0,022 à celui stipulé dans l'offre.

Ainsi, même à supposer établies les erreurs qu'elle invoque, celles-ci n'ont pas entraîné d'erreur supérieure à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation dans sa version applicable à l'espèce.

Il s'en déduit que sa demande en déchéance du droit aux intérêts, qu'elle soit totale ou partielle, ne peut prospérer et il convient de confirmer le jugement qui a rejeté l'intégralité des demandes de Mme Y.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la banque.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Rejette les demandes de Mme Y. au titre d'une clause abusive ;

Rejette la demande de Mme Y. au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à ce titre à la société Crédit lyonnais la somme de 3.000 euros ;

Condamne Mme Y. aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître B., avocat, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                                LE PRÉSIDENT