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CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 11 mars 2021

Nature : Décision
Titre : CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 11 mars 2021
Pays : France
Juridiction : Orléans (CA), ch. fin. et com.
Demande : 19/00792
Décision : 57-21
Date : 11/03/2021
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 5/03/2019
Numéro de la décision : 57
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CERCLAB - DOCUMENT N° 8854

CA ORLÉANS (ch. com. écon. fin.), 11 mars 2021 : RG n° 19/00792 ; arrêt n° 57-21

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Une clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base d'une année dite bancaire ou lombarde de trois-cent-soixante jours ne présente pas un caractère abusif en tant que telle, comme le soutiennent les intimés, mais seulement lorsqu'elle a un effet sur le coût du crédit et entraîne en conséquence un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat (V. par ex. Civ. 1, 9 septembre 2020, n° 19-14.934).

Dès lors qu'ils ne justifient ni même n'allègent, au soutien de leur demande principale tendant à l'entendre déclarer non écrite comme abusive, que la clause litigieuse a effectivement eu un effet sur le coût de leur crédit, M. et Mme X. ne peuvent qu'être déboutées de cette première demande. »

2/ « La mention d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année bancaire de 360 jours, non pas dans le contrat de prêt, mais dans l'offre de prêt, ce dont se prévalent M. et Mme X., est exclusivement sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts dans les termes de l'article L. 312-33 ancien du code de la consommation, lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale (v. par ex. Civ. 1re, 11 mars 2020, n° 19-10.875). »

 

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

ARRÊT DU 11 MARS 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 19/00792. Arrêt n° 57-21. N° Portalis DBVN-V-B7D-F4GR. DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLEANS en date du 6 février 2019.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS : - Timbre fiscal dématérialisé N° : XXX

Monsieur X.

né le [date] à [ville], [adresse], [...], Ayant pour avocat postulant Maître Sonia M. G., membre de la SELARL D. - M. G. - R., avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Maître Alexandre B., membre de la SELARL BFB Avocats, avocat au barreau de PARIS

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [ville], [adresse], [...], Ayant pour avocat postulant Maître Sonia M. G., membre de la SELARL D. - M. G. - R., avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Maître Alexandre B., membre de la SELARL BFB Avocats, avocat au barreau de PARIS

D'UNE PART

 

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé N°:YYY

SA CAISSE D'ÉPARGNE LOIRE CENTRE SA

Prise en la personne de son représentant légal [...], [...], Ayant pour avocat postulant Maître Hugues L., membre de la SCP Cabinet L. et Associés, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat postulant Maître Fabrice T.-C., avocat au barreau de PARIS, D'AUTRE PART

 

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 5 mars 2019

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 9 janvier 2020

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats à l'audience publique du jeudi 21 JANVIER 2021, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, en son rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, Madame Nathalie MICHEL, Conseiller,

Greffier : Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,

ARRÊT : Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 11 MARS 2021 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon offre acceptée le 14 août 2010, la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire-Centre (la Caisse d'épargne) a accordé à M. X et Mme Y., son épouse, un prêt immobilier d'un montant de 320.000 euros, remboursable, après un différé de paiement de 24 mois, en 300 mensualités avec intérêts au taux nominal de 3,59 % l'an (TEG mentionné à 4,49 %).

Exposant que le TEG figurant sur l'offre de prêt est irrégulier ( intérêts intercalaires et coût des assurances des périodes de préfinancement non pris en considération, frais de domiciliation non intégrés dans le calcul du TEG, taux de période erroné, TEG non proportionnel au taux de période mentionné, durée de la période non mentionnée, intérêts et TEG calculés sur une base de 360 jours), M. et Mme X. ont fait assigner la Caisse d'épargne devant le tribunal de grande instance d'Orléans le 7 août 2015 aux fins d'entendre annuler la clause de stipulation d'intérêts ou, subsidiairement, déchoir la Caisse d'épargne de son droit aux intérêts conventionnels.

Par jugement du 6 février 2019, le tribunal a :

- déclaré recevable la demande formée par les époux X. tendant à la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels

- rejeté l'ensemble des demandes formées par les époux X.

- rejeté la demande formée par la Caisse d'épargne tendant à la condamnation des époux X. à dommages et intérêts pour procédure abusive

- condamné solidairement les époux X. aux dépens de l'instance ainsi qu'à payer à la Caisse d'épargne une indemnité de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

M. et Mme X. ont relevé appel de cette décision par déclaration du 5 mars 2019, en ce qu'elle les a déboutés de toutes leurs demandes et les a condamnés aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité de procédure en application de l'article 700 du code de procédure civile.

[*]

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 21 novembre 2019, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de leurs moyens, M. et Mme X. demandent à la cour, au visa des articles L. 312-1, L. 312-8, L. 312-33 et suivants, L. 313-1 et suivants, R. 313-1 et suivants du code de la consommation en vigueur à la date de conclusion du prêt, 1147 [ancien] et 1907 du code civil, L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, de :

- les recevoir en leur appel et les en déclarer bien fondés,

- les recevoir en leurs demandes et les en dire bien fondés,

- infirmer la décision du 6 février 2019 en ce qu'elle a rejeté l'ensemble de leurs demandes

- infirmer la décision du 6 février 2019 en ce qu'elle les a solidairement condamnés à payer à la Caisse d'épargne une indemnité de procédure de 1.500 euros ainsi qu'aux dépens,

Statuant à nouveau :

- constater les erreurs de calcul du TEG et du coût total du crédit litigieux

 -constater que les intérêts sont calculés sur la base d'une année bancaire

En conséquence :

A titre principal :

- déclarer abusive et par conséquent réputée non écrite la clause figurant dans l'offre de prêt litigieuse prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours et d'un mois de 30 jours,

- condamner la Caisse d'épargne à leur verser la somme de 43.323,59 euros correspondant aux intérêts indûment versés depuis la conclusion du prêt initial jusqu'au jour de la présente, sauf à parfaire,

- enjoindre la Caisse d'épargne, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un nouvel avenant et un nouveau tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal et cette imputation sur le capital restant dû des intérêts indûment perçus,

A titre subsidiaire :

- prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts du prêt litigieux

- prononcer la substitution du taux légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt, soit 0,65 %, au taux d'intérêt conventionnel

- condamner la Caisse d'épargne à leur verser la somme de 43.323,59 euros correspondant aux intérêts indûment versés depuis la conclusion du prêt initial jusqu'au jour de la présente, sauf à parfaire,

- enjoindre la Caisse d'épargne, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un nouvel avenant et un nouveau tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal et cette imputation sur le capital restant dû des intérêts indûment perçus,

A titre infiniment subsidiaire :

- prononcer la déchéance des intérêts conventionnels du prêt litigieux à hauteur du taux d'intérêt légal applicable au jour de la conclusion du contrat de prêt soit 0,65 %,

- condamner la Caisse d'épargne à leur verser la somme de 43.323,59 euros correspondant aux intérêts indûment versés depuis la conclusion du prêt initial jusqu'au jour de la présente, sauf à parfaire,

- enjoindre, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement à intervenir la Caisse d'épargne de produire un nouvel avenant et un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte :

> cette déchéance des intérêts

> cette imputation sur le capital restant dû des intérêts indûment perçus jusqu'à la date du jugement à intervenir

En tout état de cause :

- débouter la Caisse d'épargne de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions,

- condamner la Caisse d'épargne à leur verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Caisse d'épargne aux entiers dépens, en application de l'article 699 du code de procédure civile

[*]

Dans ses dernières conclusions notifiées le 16 décembre 2019, auxquelles il est pareillement renvoyé pour l'exposé de ses moyens, la Caisse d'épargne demande à la cour, au visa des articles 1103, 1134, 1144, 1147, 1304, 1356, 1907 du code civil, L. 313-1 et suivants, L. 312-2 et suivants, et R. 314-3 (anciennement R. 313-1, en vigueur au jour de la conclusion du contrat de prêt) du code de la consommation, de :

- débouter les époux X. de l'ensemble de leurs moyens, fins et prétentions,

- confirmer dans tout son dispositif le jugement du tribunal de grande instance d'Orléans du 6 février 2019, dont appel interjeté, sauf en ce qu'il ne lui a alloué, au titre des frais irrépétibles, qu'une somme de 1.500 euros,

Y ajoutant,

- condamner solidairement les époux X. à lui verser la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de cause de première instance qu'elle a effectivement été contrainte d'exposer,

En tout état de cause, reconventionnellement :

- condamner solidairement les époux X. à lui verser la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner solidairement les époux X. à lui verser la somme de 4.000 euros, au titre des frais irrépétibles de cause d'appel qu'elle a effectivement été contrainte d'exposer,

- les condamner solidairement aux entiers frais et dépens de l'instance

[*]

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 9 janvier 2020, pour l'affaire être initialement plaidée à l'audience du 30 janvier suivant à laquelle, à la demande des conseils respectifs des parties, elle a été renvoyée pour être finalement plaidée à l'audience du 21 janvier 2021 et mise en délibéré à ce jour.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

La cour observe à titre liminaire qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la recevabilité de l'appel, ni sur la recevabilité des demandes de M. et Mme X., qui ne sont pas contestées.

 

Sur la demande principale tendant à entendre déclarer abusive et, partant, non écrite, la clause de l'offre de prêt prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours :

En application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, pris dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, sont abusives, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Une clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base d'une année dite bancaire ou lombarde de trois-cent-soixante jours ne présente pas un caractère abusif en tant que telle, comme le soutiennent les intimés, mais seulement lorsqu'elle a un effet sur le coût du crédit et entraîne en conséquence un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat (V. par ex. Civ. 1, 9 septembre 2020, n° 19-14.934).

Dès lors qu'ils ne justifient ni même n'allègent, au soutien de leur demande principale tendant à l'entendre déclarer non écrite comme abusive, que la clause litigieuse a effectivement eu un effet sur le coût de leur crédit, M. et Mme X. ne peuvent qu'être déboutées de cette première demande.

 

Sur les demandes subsidiaires de nullité de la stipulation d'intérêts ou de déchéance du droit à intérêts :

La mention d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année bancaire de 360 jours, non pas dans le contrat de prêt, mais dans l'offre de prêt, ce dont se prévalent M. et Mme X., est exclusivement sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts dans les termes de l'article L. 312-33 ancien du code de la consommation, lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale (v. par ex. Civ. 1re, 11 mars 2020, n° 19-10.875).

Dans les instances introduites antérieurement à l'ordonnance du 17 juillet 2019, comme en l'espèce, il résulte de l'application combinée de l'article 1907, alinéa 2, du code civil et des articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, pris dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que le taux d'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel doit être calculé sur la base de l'année civile, sous peine de nullité de la stipulation de l'intérêt nominal et de sa substitution par le taux légal, dans les cas où l'emprunteur démontre que les intérêts ont effectivement été calculés sur la base d'une année de trois-cent-soixante jours et que ce calcul a généré à son détriment un surcoût d'un montant supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 (v. par ex. 27 novembre 2019, n° 18-19.097).

Au cas particulier, même à admettre, pour les seuls besoins du raisonnement, que M. et Mme X. se prévalent de la clause lombarde et du taux effectif global mentionnés, non pas seulement dans leur offre de prêt, mais dans leur contrat de prêt immobilier, ils ne démontrent, ni que les intérêts de leur prêt ont effectivement été calculés sur une autre base que celle de l'année civile, ni que ce calcul ou celui du taux effectif global ont généré à leur détriment un surcoût supérieur à la décimale prévue à l'article R. 313-1 du code de la consommation, puisqu'ils affirment au contraire, en page 21 de leurs écritures, que le taux effectif global mentionné à 4,49 % aurait du l'être à 4,50 %.

Dès lors, les appelants ne peuvent qu'être déboutés de l'intégralité de leurs prétentions, infondées.

 

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive :

L'exercice d'une action en justice constitue un droit, et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière.

Au cas particulier, si l'action de M. et Mme X. a effectivement été engagée et poursuivie en cause d'appel d'une manière à voir dégénérer en abus leur droit d'agir en justice, la Caisse d'épargne ne justifie ni même n'allègue d'aucun préjudice personnel.

Dans ces circonstances, sa demande de dommages et intérêts ne peut qu'être rejetée.

 

Sur les demandes accessoires :

M. et Mme X., qui succombent au sens de l'article 696 du code de procédure civile, devront supporter in solidum les dépens de l'instance.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, ils seront en outre condamnés in solidum à régler à la Caisse d'épargne, en sus de l'indemnité qui lui a été octroyée dans de justes proportions par les premiers juges, une indemnité de 2.500 euros pour ses frais irrépétibles d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

CONFIRME en tous ses chefs critiqués la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE in solidum M. X et Mme Y. épouse X. à payer à la SA Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum M. et Mme X. dépens.

Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER                    LE PRÉSIDENT