CASS. COM., 31 mars 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9051
CASS. COM., 31 mars 2021 : pourvoi n° 19-14094 ; arrêt n° 367
Publication : Legifrance ; Bull. civ.
Extrait : « La cour d'appel de Paris dispose exclusivement du pouvoir juridictionnel de statuer sur les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées pour statuer sur l'article L. 442-6 du code de commerce, ce texte fût-il invoqué devant elle à titre subsidiaire ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE
ARRÊT DU 31 MARS 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : N 19-14.094. Arrêt n° 367 FS-P.
DEMANDEUR à la cassation : Société MHCS
DÉFENDEUR à la cassation : Madame Y. épouse Z.
Président : Mme Mouillard (président). Avocat(s) : SARL Cabinet Munier-Apaire, SCP Alain Bénabent.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
La société MHCS, société anonyme, dont le siège est [adresse], a formé le pourvoi n° N 19-14.094 contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (2e chambre), dans le litige l'opposant à Mme Y., épouse Z., domiciliée [adresse], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société MHCS, de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme Y., et l'avis écrit de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 mars 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mmes Darbois, Champalaune, Daubigney, Michel-Amsellem, M. Ponsot, Mme Boisselet, M. Mollard, conseillers, Mmes Le Bras, de Cabarrus, Lion, Comte, Lefeuvre, Tostain, Bessaud, Bellino, conseillers référendaires, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 décembre 2018), la société MHCS, qui fabrique et commercialise des champagnes, a conclu avec Mme Y., épouse Z. (Mme Z.), un contrat prenant effet au 1er octobre 1990, qualifié, par la première, de mandat pour la vente de ses champagnes, en vertu duquel Mme Z. jouait le rôle d'intermédiaire entre le mandant et la clientèle, s'agissant de la transmission des commandes, et, par la seconde, de contrat d'agence commerciale.
2. Le 15 décembre 2014, la société MHCS, reprochant des fautes graves à Mme Z., a résilié ce contrat.
3. Mme Z. a assigné la société MHCS devant le tribunal de commerce de Marseille en paiement de commissions sur le fondement des articles 1134 et 1147 du code civil, d'une indemnité de préavis et de clientèle sur le fondement des articles L. 134-1 à L. 134-17 du code de commerce et, subsidiairement, si le contrat n'était pas qualifié d'agence commerciale, en paiement d'une indemnité pour rupture brutale de la relation commerciale établie sur le fondement de l'article L. 442-6-I-5° de ce code.
4. Par un jugement du 18 février 2016, le tribunal de commerce de Marseille, après avoir retenu la qualification de contrat d'agence commerciale, a condamné la société MHCS au paiement, notamment, d'indemnités compensatrices de clientèle et de préavis.
5. La société MHCS a relevé appel à la fois devant les cours d'appel d'Aix-en-Provence et de Paris, demandant à la première de constater que la seconde était régulièrement saisie de l'appel du jugement précité, de se déclarer dépourvue du pouvoir juridictionnel de statuer sur le litige et de se dessaisir, en conséquence, de l'entier dossier au profit de la cour d'appel de Paris.
Examen des moyens :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Enoncé du moyen :
6. La société MCHS fait grief à l'arrêt de déclarer l'appel recevable, alors « qu'il résulte de la combinaison des articles L. 442-6, III, alinéa 5 et D. 442-3 du code de commerce que la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du même code, fut-il invoqué uniquement à titre subsidiaire ; que l'inobservation de ces textes est sanctionnée par une fin de non-recevoir d'ordre public ; qu'en déclarant recevable l'appel formé contre le jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille, devant lequel avait été formulée, à titre subsidiaire, une demande sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce, laquelle avait également été reprise à hauteur d'appel, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce. »
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Réponse de la Cour :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce :
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
7. Selon le second de ces textes, la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées dans les litiges relatifs à l'application du premier, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019. L'inobservation de cette règle est sanctionnée par une fin de non-recevoir.
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
8. Pour déclarer recevable l'appel formé contre le jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille, saisi à titre subsidiaire, d'une demande sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce, l'arrêt retient que la recevabilité de l'appel n'aurait pu être examinée qu'une fois tranchée la nature du contrat liant la société MHCS à Mme Z.
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
9. En statuant ainsi, alors que la cour d'appel de Paris dispose exclusivement du pouvoir juridictionnel de statuer sur les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées pour statuer sur l'article L. 442-6 du code de commerce, ce texte fût-il invoqué devant elle à titre subsidiaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation :
10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
11. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable l'appel formé par la société MHCS devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille vingt et un.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens produits par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société MHCS
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'appel recevable ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE « les conclusions déposées par Mme Y. épouse Z. devant le tribunal de commerce comme devant la cour se réfèrent, à titre subsidiaire, à l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce ; que pour la première fois, par conclusions du 2 octobre 2018, la société MHCS a soulevé l'irrecevabilité de l'appel devant la présente juridiction au regard de l'article D. 442-3 du code de commerce ; que ce moyen a été repris dans ses dernières conclusions du 12 octobre 2018, étant rappelé qu'avant l'ouverture des débats, l'ordonnance précitée a fait l'objet d'une révocation ; que l'article 914 du code de procédure civile prévoit que jusqu'à son dessaisissement, c'est-à-dire jusqu'à l'ouverture des débats, le conseiller de la mise en état est seul compétent pour déclarer un appel irrecevable ; que l'irrecevabilité de l'appel n'ayant pas été soulevée devant ce magistrat le moyen présentée par la société appelante est irrecevable et l'appel devant la présente juridiction est recevable ; qu'en outre, L. 442-6-I-5° du Code de commerce ne s'applique pas lors de la cessation des relations ayant existé entre un agent commercial et son mandant pour lesquelles la durée de préavis qui doit être respectée est fixée par l'article L. 134-11 du code de commerce en fonction du nombre d'années d'exécution du contrat (Com. 3 avril 2012, n° 11-13527) ; qu'il s'en déduit que la recevabilité de l'appel n'aurait pu être examinée qu'une fois tranchée la nature du mandat liant la société appelante à Mme Y. épouse Z. ; […] ; que c'est […] par une exacte application de l'article L. 134-1 du code de commerce que le tribunal, à la motivation duquel il convient de se référer pour le surplus, a retenu qu'avait été conclu entre la société MHCS et Mme Y. épouse Z. un contrat d'agent commercial ; qu'en conséquence, l'appel interjeté devant la présente cour aurait été déclaré recevable en toutes hypothèses » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1°/ ALORS QU'il résulte de la combinaison des articles L. 442-6, III, alinéa 5 et D. 442-3 du code de commerce que la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du même code, fut-il invoqué uniquement à titre subsidiaire ; que l'inobservation de ces textes est sanctionnée par une fin de non-recevoir d'ordre public ; qu'en déclarant recevable l'appel formé contre le jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille, devant lequel avait été formulée, à titre subsidiaire, une demande sur le fondement de l'article L.442-6 du code de commerce, laquelle avait également été reprise à hauteur d'appel, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce ;
2°/ ALORS QU'il résulte de la combinaison des articles L. 442-6, III, alinéa 5 et D. 442-3 du code de commerce que la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du même code, fut-il invoqué uniquement à titre subsidiaire ; que l'inobservation de ces textes est sanctionnée par une fin de non-recevoir d'ordre public, qui ne relève pas de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, ensemble l'article 125 du code de procédure civile ;
3°/ ALORS QU'il résulte de la combinaison des articles L. 442-6, III, alinéa 5 et D. 442-3 du Code de commerce que la Cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du même code ; que l'inobservation de ces textes est sanctionnée par une fin de non-recevoir d'ordre public ; que pour apprécier la recevabilité de l'appel et son pouvoir juridictionnel, la cour d'appel n'a pas à se prononcer sur le fond du litige, notamment, sur l'applicabilité de l'article L. 442-6 du code de commerce au litige qui lui est soumis ; qu'en affirmant que « la recevabilité de l'appel n'aurait pu être examinée qu'une fois tranchée la nature du mandat » (cf. arrêt p. 6, §6), soit après s'être prononcée sur le fond, sur la qualification du mandat litigieux, la Cour d'appel violé les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement rendu le 18 février 2016 en ce qu'il a jugé que le contrat conclu le 1er octobre 1990 entre la société MHCS et Mme M... Z. née Y. est un contrat d'agent commercial au sens des dispositions des articles L. 134-1 à L. 134-17 du code de commerce et d'avoir, en conséquence, condamné la société MHCS à payer à Mme Z. née Y. les sommes de :
- 2.372.625,37 € au titre de l'indemnité compensatrice de clientèle ;
- 474.525,07 € au titre de l'indemnité de préavis ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QU'« un contrat de mandat, similaire à celui dont bénéficiait M. Z., a pris effet le 1er octobre 1990 entre Mme Z. et la Maison Ruinart ; que ce contrat indiquait :
- Nature du contrat : agent commercial
- Durée : indéterminée à compter du 1er octobre 1990
- Objet : vendre pour le compte du mandant des vins de champagne
- Secteur : Bouches-du-Rhône
- Exclusivité : vins de champagne (à l'exécution du champagne Montaudon, dont Mme Z. assurait déjà la commercialisation),
- Clause de non-concurrence : deux ans - Rémunération :
14 % de commission sur le chiffre d'affaires réalisé (à l'exception du chiffre d'affaires réalisé concernant le Champagne Dom Ruinart)
15 % de commission sur le chiffre d'affaires réalisé uniquement avec le champagne Dom Ruinart
une allocation compensatrice spécifique aux agents commerciaux d'un montant égal à 50% sur l'ensemble des commissions perçues
- Résiliation : préavis 6 mois ;
que l'application du statut d'agent commercial ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties dans le contrat, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leurs conventions, mais des conditions dans lesquelles l'activité est effectivement exercée ; qu'il convient donc de rechercher, eu égard aux stipulations contractuelles comme aux modalités d'exécution du contrat, quel est le véritable statut de la personne qui se présente comme agent commercial ; que selon l'article L. 134-1 du code de commerce, l'agent commercial est un mandataire qui, de façon permanente, traite avec la clientèle au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels ou de commerçants ; que ce n'est donc que de manière exceptionnelles que l'agent commercial conclura un contrat, sa mission se cantonnant à la négociation des stipulations d'un contrat que son « mandant » finalisera lui-même par la suite ; qu'il convient de relever que le contrat passé entre les parties présente un caractère permanent n'a pas été conclu pour un acte ou plusieurs actes déterminés ce qui correspond à l'un des critères du contrat d'agent commercial ; que l'agent commercial doit avoir le pouvoir de négocier avec la clientèle en toute indépendance ; que la société appelante qui demande d'écarter des débats les nouvelles pièces produites par Mme Z. n'a pas expressément visé dans le dispositif de ses écritures les pièces dont elle sollicite le rejet ; que la demande présentée à ce titre est rejetée ; que Mme Z. produit des échanges de correspondances avec l'appelante faisant apparaître qu'elle disposait d'un pouvoir de négociation avec la clientèle ; que la société appelante ne remet aucun élément probant permettant de constater toute absence de pouvoir de négociation de son mandataire ; qu'en outre, l'agent doit respecter les prix fixés par son mandant et ne peut accorder des rabais qu'avec l'accord de celui-ci ; que comme dans tout contrat d'agents commerciaux, les commandes passées par Madame Z. devaient être validées par la société MHCS ; c'est ainsi, notamment que par courrier électronique du 26 février 2014 envoyé par la société MHCS à Mme Z., il était mentionné : « que proposez-vous qui connaissez le client et merci de ne pas indiquer au client que c'est la maison qui reviendra vers eux, c'est l'agent qui gère la relation commerciale » ; que par courrier électronique du 4 juin 2014, la société MHCS indiquait « vous n'appliquez pas les 15% sur les coffrets +2 verres à votre clientèle ? », ce qui laisse présumer une possibilité de négociation de tarifs par Mme E. de tarifs par Madame Z. ; que la société MHCS sollicitait son accord pour valider une commande ; que ce pouvoir de négociation est à nouveau établi par un courrier du 27 mars 2000 envoyé par l'appelante est ainsi libellé : « Nous accusons réception de votre liste de clients, sociétés et particuliers pour lesquels vous souhaitez des conditions spéciales. Après avoir examiné cette liste, nous vous donnons notre accord de principe pour l'année en cours afin de vous apporter une aide exceptionnelle à la vente » ; que par lettre du 10 janvier 2014, Mme Z. reprochait à la société appelante de ne pas avoir respecté ses instructions concernant les délais de facturation ; que dans un courrier électronique du 26 février 2014, la société MHCS rappelait à Mme Z. que « c'est l'agent qui gère la relation commerciale » ; que dans un courrier électronique du 29 juillet 2014, la société MHCS demandait son accord à Madame Z. pour le coût d'une bouteille ; que celle-ci répondait : « vous pensez bien que mon client ne va pas accepter de payer 150 euros pour avoir sa marchandise vendredi » ; que l'intimée justifie qu'elle pouvait sans l'accord de son mandant discuter et modifier les prix de vente avec les clients, les contrats ne prenant effet qu'avec l'accord de la société MHCS ; que Mme Z. avait la faculté de négocier les conditions de vente auprès des personnes qu'elle prospectait ; qu'il est donc démontré que Madame Z. disposait donc du pouvoir de négociation exigé par l'article L. 134-1 du code de commerce ; que la société MHCS, qui avait conclu un « contrat d'agent commercial » avec Mme Y. épouse Z. a reconnu que celui-ci avait perduré pendant toute la durée de ses activités puisque dans la lettre de rupture, elle indiquait « Nous amène à vous notifier par la présente lettre de résiliation, de « notre » contrat d'agent commercial », confirmant ainsi le statut découlant les prérogatives dont le mandataire était doté ; que l'appelante au cours des 15 années pendant lesquelles Mme Y. épouse Z. avait exercé son activité n'a jamais remis en cause sa qualité d'agent laquelle n'a été contesté que lorsque celui-ci a réclamé les indemnités prévues par la loi ; que c'est donc par une exacte application de l'article L. 134-1 du code de commerce que le tribunal, à la motivation duquel il convient de se référer pour le surplus, a retenu qu'avait été conclu entre la société MHCS et Mme Y. épouse Z. un contrat d'agent commercial ; qu'en conséquence, l'appel interjeté devant la présente cour aurait été déclaré recevable en toutes hypothèses » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en affirmant tout à la fois que « l'agent [devait] respecter les prix fixés par son mandant et ne [pouvait] accorder des rabais qu'avec l'accord de celui-ci » (cf. arrêt p. 7, §5) et que « l'intimée [justifiait] qu'elle pouvait sans l'accord de son mandant discuter et modifier les prix de vente avec les clients » (cf. arrêt p. 7, §12), la cour d'appel s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (INFINIMENT SUBSIDIAIRE)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement rendu le 18 février 2016 en ce qu'il a condamné la société MHCS à payer à Mme Z. née Y. les sommes de :
- 2.372.625,37 € au titre de l'indemnité compensatrice de clientèle ;
- 474.525,07 € au titre de l'indemnité de préavis ;
AUX MOTIFS QUE «la faute justifiant la cessation du contrat d'agent commercial est celle qui porter atteinte à la finalité du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ; qu'il appartient au mandant de démontrer l'existence d'une telle faute ; […] ; la société MHCS prétend […] que Mme Z. aurait violé la clause de non-concurrence qui lui était imposée ; que l'article 4 du contrat précise que : « après la signature du présent contrat, l'agent s'interdit de prendre de nouvelles représentations et s'intéresser directement à des maisons fabriquant ou vendant des articles similaires ou susceptibles de concurrencer les articles du mandant. Une telle attitude serait constitutive, de la part de l'agent, d'une faute grave et entraînerait la résiliation de plein droit du contrat, à ses torts exclusifs » ;
que les pièces 36 à 38 sur lesquelles elle se fonde n'ont aucun rapport avec le grief allégué, la pièce 36 étant une lettre circulaire adressée par Mme Z. postérieurement à la rupture du contrat passé avec la société MHCS dans laquelle elle indiquait représenter la marque Bollinger ; que la société MHCS produit une pièce n° 83 qui est une facture datée du 21 juillet 2014 établie par Mme Z. à « K. T. » et destinée à un traiteur pour la livraison de 84 bouteilles de champagne de marque "Blin" ; que cette unique pièce n'établit pas que Mme Z. aurait pris une nouvelle représentation ; que le terme « intéresser » est suffisamment imprécis et il ne peut être retenu que cet acte unique intervenu quelques mois avant la rupture du contrat, alors que les relations entre les parties s'étaient détériorées, constituerait une faute grave rendant impossible la poursuite du mandat d'intérêt commun ; qu'en outre, compte tenu du chiffre d'affaires réalisé par l'agent en 2014, le montant de la facture litigieuse à hauteur de 15 euros HT la bouteille est tout à fait dérisoire ; que la transgression de l'obligation de non-concurrence n'est donc pas établie ; que c'est donc par une exacte application de l'article L. 134-13 du code de commerce que les premiers juges, à la motivation desquels il est expressément référé pour le surplus, ont constaté que le mandant ne prouvait pas l'existence d'une faute grave de son agent le privant des indemnités légalement prévues » ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1°/ ALORS QUE la faute grave de l'agent commercial, exclusive d'indemnité compensatrice de rupture et de préavis, est celle qui – fut-elle ponctuelle – porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ; que tel est le cas du manquement, par l'agent commercial, à son obligation contractuelle de non-concurrence, traduisant un manquement à son obligation de loyauté ; que pour écarter l'existence d'une faute grave tirée de la violation, par Mme Z., de son obligation de non-concurrence, la cour d'appel a affirmé qu'il s'agissait là d'un « acte unique », intervenu quelques mois avant la rupture du contrat (cf. arrêt p. 10, §7) ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant tiré du caractère ponctuel de la faute, la cour d'appel a violé l'article L. 134-13 du code de commerce ;
2°/ ALORS QUE le faible montant du prix des produits concurrents commercialisés par un agent commercial en méconnaissance de son obligation de non-concurrence n'est pas de nature à écarter l'existence de ce manquement ; que pour retenir que « la transgression de l'obligation de non-concurrence n'était pas établie », la cour d'appel s'est fondée sur le montant prétendument « dérisoire » du prix unitaire des bouteilles de champagnes concurrentes commercialisées par Mme Z. ; qu'en statuant ainsi, par un motif impropre à écarter l'existence du manquement, par Mme Z., à son obligation de non-concurrence, la cour d'appel a violé l'article L. 134-13 du code de commerce.