CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 12 mai 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9073
CA PARIS (pôle 4 ch. 9-A), 12 mai 2021 : RG n° 20/00604
Publication : Jurica
Extrait : « S'agissant de la clause de l'article 9, relative à « l'indemnité d'ajustement », elle sanctionne le locataire souhaitant mettre un terme prématuré à la relation contractuelle ou ne versant pas les loyers. Elle n'est donc susceptible de jouer que vis-à-vis d'un preneur ne respectant pas une des conditions essentielles du contrat de location, alors que le loueur a déjà livré le véhicule, ce qui constitue son obligation principale. Le calcul de l'indemnité est strictement défini.
Ainsi, contrairement à ce qui est indiqué par le premier juge, la clause litigieuse n'a pas pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.En conséquence, elle n'est pas une clause abusive au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation.
Par ailleurs, le total, majoré de la TVA, de « l'indemnité d'ajustement » et de « l'indemnité 40 % », soit 8.264,62 euros, représente une somme inférieure à la différence de 11.895,58 euros entre ce que M. X. aurait dû payer et ce qu'il a effectivement payé, étant au demeurant rappelé qu'il n'a pas restitué le véhicule privant la société CGL de toute possibilité de le redonner en location.
Ainsi, les deux indemnités n'apparaissent pas manifestement excessives et il n'y a pas lieu de les réduire sur le fondement de l'article 1235-1 nouveau du code civil. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9-A
ARRÊT DU 12 MAI 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/00604 (6 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CBHWL. Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 septembre 2019 - Tribunal d'Instance de MEAUX - RG n° 11-19-000150.
APPELANTE :
La société COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D'EQUIPEMENTS (CGL) - SA
prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès-qualités audit siège N° SIRET : XXX, [...], [...], représenté par Maître Patrick G., avocat au barreau de PARIS, toque : D1321, substitué à l'audience par Maître Charles-Amadou D., avocat au barreau de PARIS, toque : D1321
INTIMÉ :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], [...], [...], DÉFAILLANT
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 mars 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente de chambre, Mme Agnès BISCH, Conseillère, M. Benoît DEVIGNOT, Conseiller.
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT : - DÉFAUT - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme Patricia GRANDJEAN, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Selon offre acceptée le 4 juin 2016, la SA Compagnie Générale de Location d'Equipements (CGL) a donné en location de longue durée à M. X. et à son épouse, Mme Y., un véhicule Renault Kadjar, à raison de 48 loyers d'un montant de 349,87 euros.
Les échéances des mois d'août à novembre 2017 étant restées impayées, la société CGL a adressé une mise en demeure par lettre du 7 novembre 2017, puis résilié le contrat par courrier du 22 décembre 2017.
Par ordonnance du 19 janvier 2018 signifiée les 27 février et 5 mars 2018, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Meaux a ordonné la remise du véhicule à la société CGL.
Par acte d'huissier du 16 janvier 2019, la bailleresse a fait assigner les époux X. devant le tribunal d'instance de Meaux.
Par jugement contradictoire du 11 septembre 2019, le tribunal a notamment :
- constaté l'extinction de l'instance à l'égard de Mme Y. ;
- condamné M. X. à payer à la société CGL la somme de 4.050,10 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2017 ;
- condamné M. X. aux dépens.
Pour statuer ainsi, le premier juge, après avoir constaté le désistement de la société CGL à l'égard de Mme Y., a estimé qu'en raison du défaut de paiement des loyers des mois d'août à novembre 2017, cette société avait pu résilier le contrat. Il a ajouté que l'accumulation de clauses pénales participait d'un déséquilibre manifeste au préjudice du consommateur, ce qui imposait que la clause 9 relative à l’« indemnité d'ajustement » soit déclarée non écrite. Il a aussi restreint à 100 euros la clause pénale due au titre de la résiliation du contrat. Il a considéré comme manifestement excessive la clause prévoyant une majoration de cinq points de l'intérêt moratoire, majoration qu'il a limitée aux dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier.
L'avocat de la société CGL a interjeté appel le 24 décembre 2019.
[*]
Dans ses conclusions déposées par voie électronique le 6 février 2020, la société CGL requiert la cour de :
- infirmer le jugement, en ce qu'il a limité la condamnation de M. X. à un principal de 4.050,10 euros et l'a déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- statuant à nouveau, condamner M. X. à lui payer :
- la somme de 8.264,62 euros d'arriéré échu et impayé avant résiliation, ainsi que d'indemnité de résiliation, avec intérêt annuel égal à l'intérêt légal majoré de cinq points à compter du 22 décembre 2017 ;
- la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance ;
- y ajoutant, condamner M. X. à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;
- condamner M. X. aux dépens de première instance, y compris les dépens relatifs à la procédure de saisie-appréhension devant le juge de l'exécution, ainsi qu'aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me G., avocat.
La société CGL expose en substance :
- que, s'agissant d'une convention de location simple, les dispositions du code de la consommation relatives aux crédits à la consommation ne sont pas applicables ;
- qu'elle n'a pas pu reprendre le véhicule, lequel est resté en possession de M. X. ;
- qu'il n'existe aucun déséquilibre à ne prévoir la résiliation que du chef du locataire, une fois le véhicule livré ;
- que la différence de 11.895,58 euros entre ce que M. X. aurait dû payer et ce qu'il a effectivement payé est inférieure à la somme sollicitée de 8.264,62 euros.
[*]
M. X. n'ayant pas constitué avocat, la société CGL lui a fait signifier sa déclaration d'appel, ainsi que ses conclusions et son bordereau de pièces par acte d'huissier du 3 mars 2020, selon procès-verbal de recherches infructueuses de l'article 659 du code de procédure civile.
[*]
Conformément à l'article 455 du même code, il est renvoyé aux écritures de la société CGL pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens.
La clôture des débats a été prononcée le 9 mars 2021 par le magistrat de la mise en état pour l'affaire être plaidée à l'audience du 24 mars 2021 tenue en formation de conseiller rapporteur.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Il résulte du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
M. X. n'ayant pas versé les loyers des mois d'août à novembre 2017 inclus, la société CGL était légitime à résilier le contrat sur le fondement de l'article 11 qui prévoit que « la location pourra être résiliée de plein droit après l'envoi d'une mise en demeure restée partiellement ou totalement infructueuse, en cas de non-respect par le locataire de l'une quelconque des obligations lui incombant au titre du présent contrat, notamment en cas de non-paiement même partiel d'un seul terme de loyer à son échéance ».
L'appelante produit un décompte de sa créance (pièce n° 11), lequel fait apparaître un arriéré de 1.555,95 euros (1.399,48 euros de loyers impayés des mois d'août à novembre 2017 + 139,48 euros d'indemnité forfaire de 10 % à titre de clause pénale de l'article 5 + 16,52 euros d'intérêts pour la période allant du 25 août 2017 au 22 décembre 2017), mais dont elle ne sollicite pas le paiement en cause d'appel.
L'indemnité forfaitaire de 40 euros prévue à l'article 5 au titre des frais de recouvrement - et écartée par le premier juge - n'apparaît pas sur le décompte produit.
La société CGL sollicite un total de 8 264,62 euros se détaillant comme suit :
- une « indemnité d'ajustement » d'un montant de 3.505,08 euros sur le fondement de l'article 9 du contrat qui dispose :
« Article 9 - Fin de location anticipée à la demande du locataire
Après un an de location et avec l'accord préalable et exprès du bailleur, le locataire pourra mettre fin par anticipation à la location et restituer le véhicule chez le fournisseur ou à l'endroit qui lui sera notifié par le bailleur, moyennant le paiement d'une indemnité se composant :
D'un ajustement des loyers suivant la formule suivante (adaptée de la formule du Syndicat National des Loueurs de Voitures de Longue Durée) :
LTx0,38xDA
----------------
DC-4
LT : somme totale des loyers HT pour la durée contractuelle,
DA : durée en mois à échoir de la date de restitution à la date d'échéance contractuelle,
DC : durée contractuelle en mois.
Cette indemnité, calculée hors taxes, sera majorée de la TVA en vigueur et le cas échéant des sommes dues au terme de la location telles que précisées à l'article 12. »
- une « indemnité 40 % » d'un montant de 3.382,10 euros prévue à l'article 11 du contrat et due à titre de sanction de l'inexécution par le locataire de ses obligations, étant précisé qu'elle correspond à 40 % des loyers postérieurs à la résiliation et s'ajoute à l’« indemnité d'ajustement » ;
- la TVA à hauteur de 1.377,44 euros.
S'agissant de la clause de l'article 9, relative à « l'indemnité d'ajustement », elle sanctionne le locataire souhaitant mettre un terme prématuré à la relation contractuelle ou ne versant pas les loyers.
Elle n'est donc susceptible de jouer que vis-à-vis d'un preneur ne respectant pas une des conditions essentielles du contrat de location, alors que le loueur a déjà livré le véhicule, ce qui constitue son obligation principale.
Le calcul de l'indemnité est strictement défini.
Ainsi, contrairement à ce qui est indiqué par le premier juge, la clause litigieuse n'a pas pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
En conséquence, elle n'est pas une clause abusive au sens de l'article L. 212-1 du code de la consommation.
Par ailleurs, le total, majoré de la TVA, de « l'indemnité d'ajustement » et de « l'indemnité 40 % », soit 8.264,62 euros, représente une somme inférieure à la différence de 11.895,58 euros entre ce que M. X. aurait dû payer et ce qu'il a effectivement payé, étant au demeurant rappelé qu'il n'a pas restitué le véhicule privant la société CGL de toute possibilité de le redonner en location.
Ainsi, les deux indemnités n'apparaissent pas manifestement excessives et il n'y a pas lieu de les réduire sur le fondement de l'article 1235-1 nouveau du code civil.
En revanche, la somme de 168,58 euros sollicitée au titre des frais engagés n'entre pas dans le principal de la créance.
En conséquence, infirmant le jugement, M. X. est condamné à payer à la société CGL la somme de 8.264,62 euros.
L'article 11 du contrat qui dispose que « Jusqu'à la date du règlement effectif, les indemnités dues en application des articles 9, 10 et 11 produiront de plein droit des intérêts de retard calculés au taux légal majoré de 5 points » instaure une clause pénale qui doit être écartée comme étant manifestement excessive.
En effet, le manquement du débiteur dans l'exécution de ses obligations a déjà été sanctionné par deux indemnités, étant rappelé que l'article L. 313-3 du code monétaire et financier prévoit, pour assurer l'exécution d'une condamnation pécuniaire, la majoration de cinq points du taux de l'intérêt légal à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire.
La condamnation ci-dessus est donc augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2017, date de la présentation de la mise en demeure du 22 décembre 2017 restée infructueuse.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut mis à disposition au greffe,
- Infirme le jugement dont appel, sauf en ce qu'il a constaté l'extinction de l'instance entre Mme Y. et la SA Compagnie Générale de Location d'Equipements ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
- Condamne M. X. à payer à la SA Compagnie Générale de Location d'Equipements, à titre principal, la somme de 8.264,62 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2017 ;
- Condamne M. X. aux dépens de première instance et d'appel (y compris ceux de la procédure de saisie-appréhension devant le juge de l'exécution) - dont distraction, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile, au profit de Maître Patrick G., avocat au barreau de Paris ;
- Condamne M. X. à payer à la SA Compagnie Générale de Location d'Equipements la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente