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CA ROUEN (ch. civ. com.), 10 juin 2021

Nature : Décision
Titre : CA ROUEN (ch. civ. com.), 10 juin 2021
Pays : France
Juridiction : Rouen (CA), ch. civ. et com.
Demande : 20/01394
Date : 10/06/2021
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9112

CA ROUEN (ch. civ. com.), 10 juin 2021 : RG n° 20/01394 

Publication : Jurica

 

Extrait : « La société Axiance se borne à procéder par voie d'allégation en affirmant que les contrats de concession sont expirés. Elle affirme également vainement que les contrats de concession ne sont pas valables : elle se prévaut de l'article L. 330-3 du code de commerce, sans démontrer que les contrats de concession de la société Icynene Lapolla France sont des contrats de franchise au sens de cette disposition, de même qu'elle se borne à affirmer sans démontrer que les dispositions L. 420-1 du code de commerce s'appliquent aux relations de la société Icynene Lapolla France avec ses sociétés concessionnaires. Enfin, la société Axiance se prévaut de l'article L. 442-6 du code de commerce, dans sa version antérieure au 26 avril 2019, sans justifier en quoi les contrats de concessions des sociétés Chapisolation du Centre, Isol Drôme Ardèche et Isolat Rhône contiennent des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, ni établir l'applicabilité du paragraphe e de cette disposition.

Il résulte des développements qui précèdent qu'il existe une série d'indices que la création de la société Axiance est destinée à approvisionner les sociétés Chapisolation du Centre, Isol Drôme Ardèche, Isolat Rhône en matière première, provenant notamment de la société Covestro, en violation des engagements contractuels des trois sociétés concessionnaires. La société Icynene Lapolla France caractérise donc l'existence d'un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, qui doit conduire à confirmer l'ordonnance entreprise. ».

 

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 10 JUIN 2021

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 20/01394. N° Portalis DBV2-V-B7E-IORQ. DÉCISION DÉFÉRÉE : PRÉSIDENT DU TC DE ROUEN du 9 mars 2020 : R.G. n° 2019 00776.

 

APPELANTE :

SAS AXIANCE

[...], [...], représentée par Maître Sileymane S., avocat au barreau de ROUEN, postulant, assisté par Maître S. Christophe, avocat au barreau de ROUEN plaidant

 

INTIMÉE :

SAS ICYNENE LAPOLLA FRANCE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège. [...], [...], représentée par Maître Vincent M. de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN, postulant, assistée par Maître Valentin M., avocat au barreau de PARIS, plaidant

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 7 avril 2021 sans opposition des avocats devant Monsieur CHAZALETTE, Conseiller, rapporteur.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : Mme BRYLINSKI, Présidente, Mme MANTION, Conseillère, M. CHAZALETTE, Conseiller.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : M. GUYOT, Greffier

DÉBATS : A l'audience publique du 7 avril 2021, où l'affaire a été mise en délibéré au 10 juin 2021

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, Rendu publiquement le 10 juin 2021, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Mme BRYLINSKI, Présidente et par M. GUYOT, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Isolat France se présentait comme le leader français du polyuréthane projeté utilisé comme solution d'isolation thermique de bâtiments. Elle indiquait déployer son activité sur tout le territoire français à l'aide d'un réseau de concessionnaires exclusifs. Se disant victime d'une tentative de désorganisation préméditée de la part de certains de ses concessionnaires, notamment à travers la création d'une société coopérative dénommée Axiance, la société Isolat France a présenté une requête le 16 avril 2019, sur laquelle le président du tribunal de grande instance de Rouen a rendu, le 9 mai 2019, une ordonnance aux termes de laquelle il a commis la SCP A.-B., huissiers de justice, avec pour mission de :

« Se rendre, assisté en tant que besoin d'un représentant des forces de l'ordre, d'un serrurier et d'un informaticien ou expert en informatique :

- au siège social et établissement principal de la société Axiance, société coopérative par actions simplifiée à capital variable, immatriculée sous le numéro XXX, sis, [...], ou en tout autre lieu d'exploitation ;

- pour une période de deux mois, afin de permettre à l'huissier missionné de pouvoir réaliser sa mission sans être empêché durant la période de congé par une fermeture hivernale éventuelle de la société Axiance ;

À l'effet de se faire préciser l'identité et les qualités et fonctions de toute personne qu'il pourra y rencontrer, et :

- Constater la présence de cuves de stockage de mousse polyuréthane dans les lieux ;

- Décrire la marque des cuves, relever les numéros de lots affichés sur les cuves, photographier les cuves ;

- Accéder aux ordinateurs de la société Axiance et se faire remettre, en cas de besoin, tous mots de passe ou codes d'accès nécessaires aux opérations ;

- Connecter tous dispositifs informatiques nécessaires aux opérations ;

- Prendre copie, en deux exemplaires, dans quelque lieu visé ci-dessus et sur quelque support (papier, informatique ou électronique) qu'ils se trouvent et par quelques moyens que ce soit (photocopie, impression, sauvegarde informatique ou copie électronique) :

- De tous documents et messages électroniques à caractère non personnel relatif à l'approvisionnement en mousse polyuréthane de la société Axiance (identité des fournisseurs, commandes passées, éléments relatifs à la livraison des produits et à la certification CSTBat des produits) avec les mots clés suivants : Covestro, Covestro B.V, Isolat BMS, polyuréthane Baymer Spray AL 779 - Desmodur 44V20L, Foam Spray, polyuréthane Baymer Spray AL 800 - Desmodur 44V20L depuis le 5 décembre 2018 (date de création de la société Axiance, tel qu'il ressort des statuts constitutifs) et ce jusqu'au jour du constat ;

- De tous documents et messages électroniques à caractère non personnel relatif au fournisseur néerlandais et/ou échangés avec celui-ci (société Covestro BV Korte Gronningerweg 1 a 9607 PS Fowhol The Netherlands BTW NL001083193B01), et notamment l'adresse mail [...], figurant sur les boîtes mails présentes au lieu du constat depuis le 5 décembre 2018 (date de création de la société Axiance, tel qu'il ressort des statuts constitutifs) et ce jusqu'au jour du constat ;

- De tous documents et messages électroniques à caractère non personnel relatif aux commandes, au coût d'achat de la mousse polyuréthane, aux factures clients/adhérents de fa coopérative, échangés avec la société Isolat Rhône, la société Isoladmin, la société Isol Drôme Ardèche, la société Chapisolation du Centre et notamment avec tes adresses mails suivantes: [...]; [...]: [...] ; [...] et figurant sur les boîtes mails présentes au lieu du constat depuis le 5 décembre 2018 (date de création de la société Axiance, tel qu'il ressort des statuts constitutifs) et ce jusqu'au jour du constat.

- De tous documents et messages électroniques à caractère non personnel relatif à la création et constitution de la société coopérative Axiance et notamment échangés entre tes personnes suivantes : la société FortiusAltius, Madame X., la société BatiJem, la société Isolat Rhône, la société Isoladmin, la société Isol Drôme Ardèche, Monsieur Y., Monsieur Z., Monsieur W., la société Jodea, la société Maliloutin, Madame V., notamment avec les adresses mails suivantes : [...] ; [...] ; [...] ; [...] et figurant sur les boîtes mails présentes au lieu du constat depuis le 5 décembre 2018 (date de création de la société Axiance, tel qu'il ressort des statuts constitutifs) et ce jusqu'au Jour du constat.

- Des devis et factures clients/adhérents de la société Axiance, depuis le 5 décembre 2018 (date de création de la société Axiance, tel qu'Il ressort des statuts constitutifs) et ce jusqu'au jour du constat.

- Prendre copie des livres, registres, carnets de commande et d'expédition, factures, contrats et, en général, tous documents ayant traits aux faits incriminés qui seront trouvés sur les lieux des opérations ;

- Conserver sous séquestre l'original et la première copie des données de disques durs copiés ainsi que la première copie effectuée sur tes serveurs des documents et éléments de messagerie ;

- Relever tes adresses IP de tous ordinateurs, fixes ou portables, appartenant à la société

Et d'une manière générale :

- Recevoir toutes déclarations et tous documents ;

- Procéder à la conservation de preuves de quelque nature que ce soit, susceptibles d'établir un comportement de concurrence déloyale à l'encontre des requérantes ;

- Apposer leur sceau sur tous les documents recueillis ;

- En cas de difficultés rencontrées par l'huissier (difficultés techniques empêchant l'accès aux données recherchées, défaut de collaboration, délais inhérents au tri et à la vérification des documents), autoriser l'huissier, avec l'assistance de l'informaticien et/ou expert en informatique, à faire une copie des supports ou fichiers concernés en vue d'opérer ses constats de façon différée en son étude ;

- Dresser procès-verbal attestant du déroulement de toutes les opérations effectuées et des constatations dont il est chargé, accompagné d'une copie de toutes les pièces recueillies ;

- Remettre aux représentants de la société Axiance un exemplaire du procès-verbal, accompagné desdites pièces ;

- Conserver les mêmes pièces au rang des minutes de son étude ;

- Disons que l'ensemble des éléments (inventaire des pièces obtenues, copies de documents, copies de supports informatiques et/ou tous autres produits) recueillis par l'huissier constatant seront conservés par lui, en séquestre, sans qu'il puisse en donner connaissance à la requérante ;

- Le cas échéant, disons que les parties viendront devant le Tribunal de commerce de Rouen, en référé, à fin d'examen, en présence de l'huissier de justice, des pièces séquestrées, et qu'il soit statué sur la communication des dites pièces ;

- Le cas échéant, disons qu'en vue de cet examen, l'huissier de justice tiendra à disposition de la partie auprès de laquelle il les aura obtenus, sur un support informatique adapté, une copie des pièces séquestrées, afin que cette dernière puisse, pour les besoins de leur examen par le juge, sélectionner celles des seules pièces à la communication desquelles elle s'oppose ;

- Disons qu'une provision de 2.000 € HT sera versée par la requérante à l'huissier désigné ci-dessus avant toute exécution de sa mission ;

- Disons que l'huissier devra remettre à la requérante une copie certifiée conforme ;

- Disons qu'il nous en sera référé en cas de difficulté ;

- Disons que notre ordonnance sera exécutoire sur minute. »

La mesure a été exécutée par l'huissier instrumentaire le 18 juin 2019.

Par acte signifié le 25 septembre 2019, la société Axiance a fait assigner en référé rétractation la société Icynene Lapolla France exerçant sous l'enseigne Isolat France devant le président du tribunal de commerce de Rouen en sollicitant la rétractation de l'ordonnance du 9 mai 2019 et l'annulation des constatations et saisies opérées.

Par ordonnance du 9 mars 2020, le juge des référés du tribunal de commerce de Rouen a :

- dit que la société Icynene Lapolla France est fondée à poursuivre les actions engagées par la société Isolat France ;

- débouté la société Axiance de sa demande de rétractation de l'ordonnance sur requête du 9 mai 2019 ;

- ordonné à la SCP A. et B., huissiers de justice, de faire le tri dans les pièces saisies et de remettre à la société Icynene Lapolla France l'ensemble des éléments relatifs aux relations commerciales de la société Axiance postérieurs au 1er janvier 2018 ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- laissé à la charge de la société Axiance les entiers dépens.

[*]

La société Axiance a interjeté appel et, aux termes de ses dernières écritures en date du 2 avril 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour, sous le visa des articles 15, 114, 135, 145, 146 alinéa 2, 495, 496, 497, 812 et 901 du code de procédure civile, de :

- infirmer l'ordonnance entreprise ;

À titre principal,

- juger que la déclaration d'appel est régulière et débouter la société Isolat France de sa demande tendant au constat que la cour n'est saisie d'aucune demande ;

- juger que la cour est saisie de l'intégralité de son appel et de ses demandes ;

- débouter la société Icynene Lapolla France de sa demande de nullité de la déclaration d'appel ;

- constater que la société Icynene Lapolla France a déposé le 22 juillet 2020 des conclusions non conformes à l'article 954 du code de procédure civile ;

- déclarer, en conséquence, irrecevables les conclusions et pièces par elle signifiées ;

- déclarer, en conséquence, irrecevables les pièces par elle signifiées ;

- déclarer irrecevables ses conclusions ultérieures déposées le 10 août 2020 ;

Subsidiairement,

- juger que le recours à l'annexe à la déclaration d'appel constitue une nullité de forme ;

- juger que la déclaration d'appel et son annexe ont été formées et signifiées à l'intimée dans les délais ;

- juger que la société Icynene Lapolla France ne rapporte l'existence d'aucun grief ;

- juger que la cour est saisie de l'intégralité de son appel et de ses demandes ;

- débouter la société Icynene Lapolla France de sa demande de nullité de la déclaration d'appel ;

- juger que la société Icynene Lapolla n'a pas communiqué l'intégralité de ses pièces en violation du principe du contradictoire ;

- écarter des débats l'intégralité des pièces versées par l'intimée ;

Vu la dissolution de la société Isolat France ;

Vu l'obligation imposée par l'article 495, alinéa 3 du code de procédure civile, relative à la remise de la requête et de l'ordonnance au requis avant l'exécution des mesures, qui n'a pas été respectée en l'espèce ;

- rétracter l'ordonnance, rendue sur requête de la société Isolat France, le 9 mai 2019 ;

- annuler les constatations dressées par l'huissier instrumentaire et notamment le procès-verbal de constat de la SCP A. et B. du 18 juin 2019 et l'inventaire des pièces et des documents saisis ;

- ordonner à la SCP A. et B. de restituer à la société Axiance les éléments de toute nature appréhendés dans le cadre de l'exécution de l'ordonnance sur requête rendue le 9 mai 2019 ;

- faire interdiction en tant que de besoin sous astreinte de 10.000 € par infraction constatée à la société Isolat France de faire référence ou usage de quelque manière que ce soit aux éléments constatés ou saisis dans le cadre de l'exécution de l'ordonnance sur requête rendue le 9 mai 2019 et en particulier au contenu de l'inventaire dont il lui a été remis copie par l'huissier ;

Subsidiairement,

- compte tenu qu'elle n'a pas été mise en mesure de débattre contradictoirement de la mesure ordonnée sur requête dès lors qu'il ne lui a pas été transmis ni les pièces visées par la requête, ni copie du procès-verbal de constat, ni copie des pièces saisies, et ce en violation des dispositions des articles 16 et 173 du code de procédure civile ;

- rétracter l'ordonnance, rendue sur requête de la société Isolat France, le 9 mai 2019 ;

- annuler les constatations dressées par l'huissier instrumentaire et notamment le procès- verbal de constat de la SCP A. et B. du 18 juin 2019 et l'inventaire des pièces et des documents saisis ; en conséquence de quoi il est ordonné à la A. et B. de restituer à la société Axiance les éléments de toutes natures appréhendés dans le cadre de l'exécution de l'ordonnance sur requête rendue le 9 mai 2019 ;

- faire interdiction en tant que de besoin sous astreinte de 10.000 € par infraction constatée à la société Isolat France de faire référence ou usage de quelque manière que ce soit aux éléments constatés ou saisis dans le cadre de l'exécution de l'ordonnance sur requête rendue le 9 mai 2019 et en particulier au contenu de l'inventaire dont il lui a été remis copie par l'huissier ;

Sur le défaut de réunion des conditions de recours aux dispositions de l'article 145 du code de procédure civile,

- rétracter l'ordonnance, rendue sur requête de la société Isolat France, le 9 mai 2019 ;

- annuler les constatations dressées par l'huissier instrumentaire et notamment le procès- verbal de constat de la SCP A. et B. du 18 juin 2019 et l'inventaire des pièces et des documents saisis ;

- en conséquence de quoi, ordonner à la SCP A. et B. de lui restituer les éléments de toutes natures appréhendés dans le cadre de l'exécution de l'ordonnance sur requête rendue le 9 mai 2019 ;

- condamner la société Isolat en tant que de besoin sous astreinte de 10.000 € par infraction constatée, à ne pas pouvoir faire référence ou usage de quelque manière que ce soit aux éléments constatés ou saisis dans le cadre de l'exécution de l'ordonnance sur requête rendue le 9 mai 2019 et en particulier au contenu de l'inventaire dont il lui a été remis copie par l'huissier ;

Très subsidiairement,

- soumettre au contradictoire les pièces issues de la saisie opérée ;

Et en tout état de cause,

- condamner la société Isolat France à lui verser la somme de 20.000 € au titre de la procédure abusive engagée ;

- condamner la société Isolat France à lui verser la somme de 15.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Isolat France aux entiers dépens.

[*]

La société Icynene Lapolla France, aux termes de ses dernières écritures en date du 6 avril 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour, sous le visa des articles 145, 480, 496, 562, 873 alinéa 1, 905-2 et 916 du code de procédure civile, de :

À titre principal,

- juger qu'elle n'est saisie d'aucune demande par la déclaration d'appel du 24 mars 2020 de la société Axiance qui n'a pas opéré dévolution ;

- condamner la société Axiance à lui verser la somme de 15.000 € ;

À titre subsidiaire si la cour s'estimait saisie,

- juger recevables ses pièces et conclusions d'intimé du 22 juillet 2020 et du 10 août 2020 ;

En conséquence,

- débouter la société Axiance de sa demande d'irrecevabilité de ses conclusions et pièces communiquées les 22 juillet 2020 et du 10 août 2020 ;

- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant condamner la société Axiance à lui verser la somme de 15.000 € ;

En tout état de cause,

- débouter la société Axiance de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société Axiance aux entiers dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Sur l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel :

En vertu du 1er alinéa de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

En vertu de l'article 901 du même code, dans rédaction antérieure au décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 applicable à la cause, la déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l'article 57, et à peine de nullité, [4°] les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

En l'espèce, la société Icynene Lapolla France fait valoir que la déclaration d'appel de la société Axiance du 24 mars 2020 ne contient pas les chefs de jugement critiqués et se borne à renvoyer à une annexe, alors qu'en outre les contraintes du Réseau privé virtuel des avocats (RPVA) ne le justifiaient pas compte tenu du nombre limité de caractères. La société Icynene Lapolla France en déduit que cette déclaration d'appel n'opère pas l'effet dévolutif prévu par l'article 562 précité, en précisant que dès lors qu'elle n'a pas soulevé la nullité de l'acte, elle n'est pas tenue de démontrer l'existence d'un grief.

La déclaration d'appel sous format normalisé indique que « l'appel du jugement est limité aux chefs du jugement expressément critiqués. La déclaration d'appel motivée, comportant les chefs de jugement critiqués figure en annexe de la présente » ; y est jointe cette annexe sous format « pdf » intitulée « déclaration d'appel » reprenant toutes les mentions prescrites par l'article 901 du code de procédure civile et détaillant les chefs du jugement critiqués.

Les deux documents forment un tout ayant fait l'objet d'un envoi unique à la cour par RPVA conformément aux prescriptions de l'article 930-1 du code de procédure civile, permettant parfaitement à l'intimé d'avoir complète connaissance de la portée de l'appel et de définir l'effet dévolutif de l'appel.

Dès lors l'intimée doit être déboutée de sa demande tendant à voir constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel.

 

Sur la recevabilité des conclusions de l'intimée :

La société Axiance soutient qu'à la suite de la demande du président de la chambre, la société Icynene Lapolla France a déposé un second jeu de conclusions qui cette fois-ci contenait le rappel des faits exigé par l'article 954 du code de procédure civile. La société Axiance en déduit que l'intimée a donc reconnu que ses conclusions du 22 juillet 2020 n'étaient pas conformes au texte susvisé. Dès lors, la société Axiance demande que les conclusions de l'intimé du 22 juillet 2020 soient déclarées irrecevables comme non conformes à l'article 954 du code de procédure civile et que, par voie de conséquence, les conclusions de l'intimée du 10 août suivant, signifiées après le délai fixé par le calendrier de procédure, soient également irrecevables, avec les pièces produites.

Il y a lieu de constater que cette prétention a déjà été soumise au conseiller de la mise en état qui l'a rejetée par ordonnance du 17 décembre 2020. Cette ordonnance a été déférée par la société Axiance à la cour, qui l'a confirmée par arrêt du 25 mars 2021.

Aucun élément ne permet de remettre en cause la réponse apportée par la cour à l'irrecevabilité soulevée dans les mêmes termes ; pour les mêmes motifs auxquels les parties sont renvoyées, l'irrecevabilité opposée par la société Axiance sera de nouveau rejetée, et les conclusions de la société Icynene Lapolla France déclarées recevables.

 

Sur le rejet des pièces de l'intimée :

La société Axiance fait valoir que la société Icynene Lapolla France n'a pas respecté le principe de la contradiction dans la communication de ses pièces, qui doivent être dès lors rejetées. La société Axiance reproche à la société Icynene Lapolla France d'avoir communiqué ses pièces par bordereau du 24 juillet 2020, renvoyant à un lien « WeTransfer ». Elle ajoute que l'intimée n'avait pas communiqué l'intégralité de ses pièces puisque le lien communiqué sous l'intitulé « pièce 16 à 25 », ne contenait en réalité que la pièce numéro 13, de sorte qu'elle n'a pas communiqué ses pièces dans les délais prévus par l'article 905-1 du code de procédure civile.

La société Axiance soutient en outre que le 22 juillet 2020, l'intimée a communiqué un bordereau et des pièces à une adresse électronique erronée.

La société Axiance assure par ailleurs qu'il est impossible que le courriel du 21 août 2020 lui ait été valablement adressé, dès lors que la pièce n° 1 représentait plus de 25 mégaoctets à elle-seule, soit une taille excédant la capacité d'une boîte à lettres électronique. La société Axiance affirme qu'à l'exception de la communication de pièces du 15 octobre 2020, l'intimée ne produit à aucun moment un accusé de réception.

La société Axiance se prévaut à tort des dispositions de l'article 905-1 du code de procédure civile qui règle seulement la signification de la déclaration d'appel.

Si l'article 906 du code de procédure civile prévoit que les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l'avocat de chacune des parties à celui de l'autre partie, cette prescription de ne peut être sanctionnée par l'irrecevabilité des pièces communiquées ultérieurement, dès lors que cette communication intervient en temps utile dans des conditions permettant le respect du principe de la contradiction.

En l'espèce, la société Icynene Lapolla France produit les accusés de réception de la communication de l'ensemble de ses pièces par l'intermédiaire du RPVA le 15 octobre 2020, après que les précédentes communications par l'intermédiaire du courrier électronique courant aient été critiquées par l'appelante. Il y a lieu d'observer que ces 33 pièces avaient déjà été communiquées en première instance et que les 10 pièces suivantes ont seulement pour objet la présente demande de rejet des pièces.

Après la communication de la totalité des pièces de la société Icynene Lapolla France du 15 octobre 2020, la société Axiance a pu conclure à nouveau les 20 octobre 2020 et 2 avril 2021, avant l'audience de plaidoiries du 7 avril 2021, de sorte que conformément à l'article 15 du code de procédure civile, la société Icynene Lapolla France a fait connaître en temps utile les éléments de preuve qu'elle produisait. La demande sera donc rejetée.

 

Sur la dissolution de la société Isolat France :

La société Axiance demande la rétractation de l'ordonnance du 9 mai 2019 et des actes postérieurs en soutenant que la société Isolat France a été radiée du registre des sociétés de Villefranche-Tarare le 29 juillet 2019 pour cause de dissolution sans liquidation et que l'intervention de l'huissier s'est faite sur la base d'une requête d'une société dissoute. La société Axiance ajoute que les 18 et 20 juin 2019, l'huissier instrumentaire a accompli sa mission à la demande alors que la requérante Isolat France avait transmis son patrimoine à la société Icynene Lapolla France le 27 mai 2019 et était dissoute au moment de l'exécution de la mission.

Cette prétention sera rejetée faute pour la société Axiance d'expliquer en quoi la dissolution d'une personne morale postérieurement à l'ordonnance prise à sa requête doit entraîner la rétractation de l'ordonnance intervenue, étant observée que l'appelante ne formule de ce chef aucune fin de non-recevoir.

Surabondamment, en vertu du 3e alinéa de l'article 1844-5 du code civil, en cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation. Les créanciers peuvent faire opposition à la dissolution dans le délai de trente jours à compter de la publication de celle-ci. La transmission du patrimoine n'est réalisée et il n'y a disparition de la personne morale qu'à l'issue du délai d'opposition.

En l'espèce, il résulte des pièces produites par la société Icynene Lapolla France que la société Icynene France (RCS YYY) est devenue associée unique de la société Isolat France pour avoir racheté la totalité de ses actions et a pris le 27 mai 2019 (pièce 2), publié le 21 juin 2019 au service de l'enregistrement de Lyon (pièce 2, page 3, pied de page), une décision de dissolution sans liquidation de la société Isolat France, visant expressément l'article 1844-5 précité, avec transmission universelle du patrimoine de la société Isolat France au profit de la société Icynene France. Par décision de l'associé unique du 31 mai 2019, la société Icynene France modifiait sa dénomination pour devenir la société Icynene Lapolla France. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la société Isolat France n'était dissoute ni à la date du 9 mai 2019, date de l'ordonnance litigieuse, ni à la date des 18 et 20 juin 2019 lorsque l'huissier a instrumenté, puisque la dissolution était seulement acquise le 21 juillet 2019, trente jours après la publication de la dissolution. La prétention de la société Axiance est donc sans fondement de ce chef également.

La société Axiance fait par ailleurs valoir que la dénonciation du procès-verbal de constat est intervenue par huissier de justice le 3 octobre 2019 à la demande de la société Isolat France et non au nom de la société Icynene Lapolla France. Cette prétention sera rejetée faute pour la société Axiance d'expliquer en quoi la dissolution d'une personne morale postérieurement à l'ordonnance prise à sa requête doit entraîner la rétractation de l'ordonnance intervenue, étant observée que l'appelante ne formule de ce chef aucune fin de non-recevoir. Surabondamment, le procès-verbal de constat a été dénoncé une nouvelle fois par huissier de justice le 21 novembre 2019 à la requête de la société Icynene Lapolla France de sorte que l'irrégularité alléguée n'a entraîné aucun grief au préjudice de la société Axiance.

La société Axiance soutient que la pièce 2 de la société Icynene Lapolla France mentionne qu'une société Abington Gate Europe SARL, basée au Luxembourg, est nommée aux fonctions de mandataire ad hoc, avec pouvoir pour exercer toutes actions judiciaires, tant en demande qu'en défense et représenter la société dissoute. La société Axiance en déduit que la société Icynene Lapolla France n'a pas d'intérêt à agir dans la procédure en lieu et place de la société Abington Gate Europe. La société Axiance ajoute qu'en l'absence de rétractation de l'ordonnance litigieuse, la poursuite de son exécution conduirait à communiquer des documents à une société étrangère.

Cette prétention sera rejetée faute pour la société Axiance de fonder son moyen en droit, étant observé que l'appelante ne formule de ce chef aucune fin de non-recevoir. Surabondamment, ainsi qu'il résulte de la décision de dissolution du 27 mai 2019, du procès-verbal de décision de l'associé unique de la société Icynene France du 31 mai 2019 (pièce 3) et de l'extrait Kbis de la société Icynene Lapolla France à la date du 22 juillet 2019 (pièce 4), la société Abington Gate Europe SARL est associée unique et président de la SASU Icynene Lapolla France. Elle est donc mandataire de celle-ci, sans se confondre ni se substituer à elle.

 

Sur la nullité de la mesure diligentée pour violation des dispositions de l'article 495, alinéa 3 :

En vertu du 3e alinéa de l'article 495 du code de procédure civile, copie de la requête et de l'ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée. La société Axiance réclame la nullité de la mesure en soutenant que la pièce 5 produite par la société Icynene Lapolla France est illisible de sorte que sa lecture ne permet aucunement de justifier sur respect des dispositions applicables. Ce moyen manque en fait et sera rejeté, le procès-verbal de signification du 18 juin 2019 établissant de manière lisible que la requête et l'ordonnance litigieuses étaient dénoncées, préalablement au constat, à M. U., président de la société Axiance, qui s'en voyait remettre copies.

 

Sur la nullité de la mesure diligentée pour violation des dispositions de l'article 173 :

En vertu de l'article 173 du code de procédure civile, les procès-verbaux, avis ou rapports établis, à l'occasion ou à la suite de l'exécution d'une mesure d'instruction sont adressés ou remis en copie à chacune des parties par le greffier de la juridiction qui les a établis ou par le technicien qui les a rédigés, selon le cas.

La société Axiance soutient qu'elle ne s'est pas vue communiquer les pièces visées par la requête ni la copie du procès-verbal de constat réalisé ainsi que la liste et le contenu des pièces saisies, alors même que l'ordonnance litigieuse du 9 mai 2019 précisait que l'huissier devait lui remettre un exemplaire du procès-verbal des opérations accompagné des pièces recueillies.

Ce moyen manque ne fait et sera rejeté, le procès-verbal de signification du 3 octobre 2019, réitéré le 21 novembre 2019, permettant de constater qu'elle s'est vue dénoncer et remettre en copie le procès-verbal de constat de l'huissier instrumentaire des 18 et 20 juin 2019, une clef USB, et un disque dur effectués sur les lieux du constat par le technicien informatique. En outre, la société Axiance n'est pas fondée à critiquer la date de cette dénonciation en relevant qu'elle est intervenue après son assignation en référé rétractation du 25 septembre 2019, dès lors que ni l'article 173 précité ni le dispositif de l'ordonnance du 9 mai 2019 ne fixaient de délai pour la remise des pièces en copie et dès lors que la décision de faire assigner en référé rétractation sans avoir encore les pièces saisies résulte de sa seule volonté.

 

Sur le rejet des pièces 12, 13, 15 à 19, 22 à 36, 38 à 45 de la société Icynene Lapolla France :

La société Axiance affirme que ces pièces proviennent de saisies intervenues auprès d'autres sociétés, et ont été obtenues postérieurement à l'ordonnance du 9 mai 2019. Elles devraient donc être rejetées.

En vertu de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. En l'espèce, cette demande ne figure pas au dispositif des conclusions de la société Axiance, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer.

 

Sur l'absence de motif légitime :

En vertu de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

La société Icynene Lapolla France, filiale du groupe nord-américain Icynene Lapolla, expose qu'elle a développé un procédé d'isolation par projection de mousse polyuréthane afin de proposer des solutions thermiques performantes pour tous types de bâtiments neuf ou en rénovation et de démocratiser les solutions d'isolation thermique. Elle souligne que ce procédé bénéficie d'une certification QB délivrée par le CSTBat pour l'isolation par polyuréthane projeté des murs et des sols.

Elle indique qu'elle s'approvisionne exclusivement en mousse de polyuréthane auprès de la société Covestro BV, société de droit néerlandais située aux Pays-Bas, depuis plus de huit années, et que, pour la commercialisation de ses solutions thermiques et la réalisation de l'isolation thermique selon ces solutions, elle a créé un réseau de 28 concessionnaires exclusifs en France de ses solutions, sous enseigne Isolat France.

Elle souligne que chaque concessionnaire du réseau conclut un contrat de concession exclusif au titre duquel, il s'engage à respecter un certain nombre d'engagements essentiels qui fondent l'uniformité du réseau et qui garantissent le maintien de la certification :

- respecter des prescriptions de stockage, d'installation et de mise en œuvre des produits, matériels, ou services fournis par le concédant, ainsi que plus généralement par le soin apporté à l'état de ses locaux, en veillant à ce que le personnel applique strictement les méthodes faisant l'originalité du savoir-faire transmis par le concédant en matière d'isolation ;

- ne s'approvisionner en produits d'isolation, matériels, consommables et fournitures de chantier présents dans le catalogue « produits » qu'auprès du concédant, à l'exception des produits ou services nécessaires à l'activité de la concession et qui ne seraient pas fournis par le concédant ;

- ne pas acquérir dans le capital d'une entreprise concurrente, des participations financières qui donneraient le pouvoir d'influencer le comportement économique de celle-ci,

- ne pas utiliser le savoir-faire et les documents transmis par le concédant à d'autres fins que l'exploitation de la concession.

Dans ce cadre, il résulte des pièces versées aux débats et spécialement des pièces produites à l'appui de la requête critiquée que la société Icynene Lapolla France établit que :

- la société Isolat France a consenti des contrats de concessions exclusifs prévoyant une obligation d'approvisionnement exclusif (Chapisolation du Centre, Isol Drôme Ardèche, Isolat Rhône) et une obligation de ne pas acquérir dans le capital d'une entreprise concurrente, des participations financières qui donneraient le pouvoir d'influencer le comportement économique d'Isolat France (Chapisolation du Centre, Isol Drôme Ardèche) ou une obligation de ne pas prendre une participation dans une activité identique ou similaire à l'activité d'isolation par projection de mousse in situ (Isolat Rhône), ainsi qu'une obligation de ne pas utiliser le savoir-faire et les documents transmis par Isolat France à d'autres fins que l'exploitation de la concession (Chapisolation du Centre, Isol Drôme Ardèche, Isolat Rhône) (pièces 2, 11, 27 de la requête) ;

- alors que les sociétés Chapisolation du Centre, Isol Drôme Ardèche, Isolat Rhône représentaient 27 % du chiffre d'affaires de la société Isolat France, celle-ci a enregistré une baisse importante de leurs commandes à compter de décembre 2018 (pièce 33 de la requête), avec des défauts de paiement concomitants (pièces 20 à 23 de la requête) ;

- M. Y. et M. Z., dirigeants des sociétés Isol Drôme Ardèche et Isolat Rhône, ont créé une SAS ISOLADMIN le 18 avril 2018 (pièce 17 de la requête), qui a souscrit au capital de la société coopérative Axiance (pièces 24, 25 de la requête) ; les autres associés fondateurs de la société Axiance sont la société Chapisolation du Centre, Mme X., ancienne cadre salariée de la société Isolat France, la SARL Batijem, ancien concessionnaire de IF et une SARL Fortiusaltius (pièces 25, 28 de la requête);

- Isolat France a rencontré des difficultés d'approvisionnement par la société Covestro, son fournisseur exclusif, qui n'était soudainement pas en mesure de fournir la quantité habituelle de mousse polyuréthane (pièce n°35 de la requête).

La société Axiance se borne à procéder par voie d'allégation en affirmant que les contrats de concession sont expirés. Elle affirme également vainement que les contrats de concession ne sont pas valables : elle se prévaut de l'article L. 330-3 du code de commerce, sans démontrer que les contrats de concession de la société Icynene Lapolla France sont des contrats de franchise au sens de cette disposition, de même qu'elle se borne à affirmer sans démontrer que les dispositions L. 420-1 du code de commerce s'appliquent aux relations de la société Icynene Lapolla France avec ses sociétés concessionnaires. Enfin, la société Axiance se prévaut de l'article L. 442-6 du code de commerce, dans sa version antérieure au 26 avril 2019, sans justifier en quoi les contrats de concessions des sociétés Chapisolation du Centre, Isol Drôme Ardèche et Isolat Rhône contiennent des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, ni établir l'applicabilité du paragraphe e de cette disposition.

Il résulte des développements qui précèdent qu'il existe une série d'indices que la création de la société Axiance est destinée à approvisionner les sociétés Chapisolation du Centre, Isol Drôme Ardèche, Isolat Rhône en matière première, provenant notamment de la société Covestro, en violation des engagements contractuels des trois sociétés concessionnaires. La société Icynene Lapolla France caractérise donc l'existence d'un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, qui doit conduire à confirmer l'ordonnance entreprise.

 

Sur le caractère manifestement disproportionné de la mesure :

La société Axiance affirme, au visa de l'article 147 du code de procédure civile, que les mesures ordonnées excèdent ce qui est suffisant à la solution du litige et affirme qu'elles s'assimilent à une mesure de perquisition destinée à récupérer, sous couvert de prétendue concurrence déloyale, la totalité de ses informations commerciales et financières, parfois sans rapport avec les allégations de la demanderesse.

Ce moyen sera rejeté, dès lors que la mesure englobe les personnes morales et physiques participant à l'établissement du réseau concurrent en violation des engagements contractuels dont l'existence est soupçonnée par la société Icynene Lapolla France, et comprend les renseignements juridiques, techniques, financiers et commerciaux dans ce seul cadre.

 

Sur l'absence de circonstance justifiant une dérogation au principe du contradictoire :

La société Axiance soutient que, dans la requête, la société Icynene Lapolla France s'est bornée à formuler une affirmation péremptoire non corroborée par des éléments de preuve pour justifier une dérogation au principe de la contradiction.

Ce moyen manque en fait et sera rejeté, la requérante ayant justifié sa demande de dérogation au principe du contradictoire en évoquant la nécessité d'un effet de surprise, notamment au regard de la facilité à décoller les étiquettes apposées sur les cuves de mousses et à supprimer les courriels.

 

Sur la remise des pièces issues de la saisie :

L'ordonnance du 9 mai 2019 prévoyait que les parties devaient, à l'audience de référé du tribunal de commerce de Rouen, examiner en présence de l'huissier de justice les pièces séquestrées afin qu'il soit statué sur leur communication. Elle prévoyait également que l'huissier instrumentaire tiendrait à disposition de la société Axiance, sur un support informatique adapté, une copie des pièces séquestrées, afin que cette dernière puisse, pour les besoins de leur examen par le juge, sélectionner celles des seules pièces à la communication desquelles elle s'oppose.

Dans ces conditions, il y aura lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a ordonné à l'huissier instrumentaire de faire le tri dans les pièces saisies et de remettre à la société Icynene Lapolla France l'ensemble des éléments relatifs aux relations commerciales de la société Axiance postérieurs au 1er janvier 2018. Cette disposition ne permet pas d'assurer le respect du contradictoire. Les modalités prévues par le juge de la requête seront donc appliquées.

 

Autres demandes :

La société Icynene Lapolla France réclame une somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile. En vertu de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. En l'espèce, cette demande ne figure pas au dispositif des conclusions de la société Axiance : il n'y figure qu'une demande tendant à la condamnation de la société Axiance au paiement d'une somme de 15.000 € sans autre précision, alors qu'au surplus l'article 700 n'est pas mentionné au nombre des articles fondant les prétentions. Il n'y a pas donc lieu de statuer de ce chef.

La demande de la société Axiance en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive sera rejetée, alors que la société Icynene Lapolla France a obtenu gain de cause au principal. La société Axiance, qui succombe, sera tenue aux entiers dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement en dernier ressort,

Dit que la cour est régulièrement saisie par l'effet dévolutif de l'appel ;

Déboute la société Axiance de ses demandes tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions et pièces de la société Icynene Lapolla France

Confirme la décision entreprise sauf en ce qu'elle a ordonné à l'huissier instrumentaire de faire le tri dans les pièces saisies et de remettre à la société Icynene Lapolla France l'ensemble des éléments relatifs aux relations commerciales de la société Axiance postérieurs au 1er janvier 2018 ;

Statuant à nouveau sur la disposition infirmée :

Dit que les parties devront, à l'audience de référé du tribunal de commerce de Rouen, examiner en présence de l'huissier de justice les pièces séquestrées afin qu'il soit statué sur leur communication ;

Dit que la SCP A., B., huissiers de justice associes, tiendra à disposition de la société Axiance, sur un support informatique adapté, une copie des pièces séquestrées, afin que cette dernière puisse, pour les besoins de leur examen par le juge, sélectionner celles des seules pièces à la communication desquelles elle s'oppose ;

Dit qu'il appartient à la société Icynene Lapolla France de saisir à nouveau le juge des référés du tribunal de commerce de Rouen pour qu'il soit ainsi statué sur la remise des documents saisis et séquestrés ;

Y ajoutant,

Condamne la société Axiance aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER                                LA PRESIDENTE