CA BORDEAUX (4e ch. civ.), 30 novembre 2021
CERCLAB - DOCUMENT N° 9287
CA BORDEAUX (4e ch. civ.), 30 novembre 2021 : RG n° 19/00311
Publication : Jurica
Extrait : « L'appelant ne conteste pas la première somme mais critique la seconde qu'il soutient non justifiée, s'agissant notamment de la somme de 333,78 euros qui constitue selon lui une clause pénale abusive.
Même s'il soutient à juste titre que cette indemnité de recouvrement constitue une clause pénale, c'est à bon droit que la banque oppose qu'il ne peut élever de contestation sur le principe et le montant d'une créance qui a été admise au passif de la débitrice principale aux termes d'une décision qu'il a laissée devenir irrévocable à son égard. »
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2021
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/00311. N° Portalis DBVJ-V-B7D-K2GR. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 décembre 2018 (R.G. n° 2017F00817) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 16 janvier 2019.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse], représenté par Maître Valérie J. de la SCP BATS - L. - J., avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Alice L., de la SELARL de SAINT POL et ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
SA BPACA
prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [...] représentée par Maître Juliette A. de la SELARL ABR & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 2 novembre 2021 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Elisabeth FABRY, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Nathalie PIGNON, Présidente, Madame Elisabeth FABRY, Conseiller, Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller.
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte du 25 mars 2016, la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique (la Banque Populaire - la banque) a consenti à la SARL Hydrosculpt un crédit professionnel d'un montant de 140.000 euros remboursable en 84 mensualités moyennant un taux d'intérêt de 2,5 % l'an.
Par acte du même jour, le prêt a été garanti à la fois par un nantissement sur le fonds de commerce de la société Hydrosculpt au profit de la banque, et par l'engagement de caution de M. X., gérant de la société, dans la limite de 84.000 euros.
Par acte du 12 août 2016, M. X. s'est par ailleurs engagé en qualité de caution personnelle et solidaire pour garantir l'ensemble des engagements de la société Hydrosculpt auprès de la Banque Populaire, notamment au titre de son compte courant dans la limite de la somme de 6.000 euros.
Par jugement du 26 avril 2017, le tribunal de commerce de Bordeaux a prononcé l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Hydrosculpt. La SELARL M.-P.-L.-D. été désignée en qualité de mandataire liquidateur. La Banque Populaire a déclaré sa créance le 12 mai 2017.
Par courrier recommandé du 15 mai 2017, la banque a mis en demeure M. X. de lui régler la somme de 90.000 euros en sa qualité de caution solidaire de la société Hydrosculpt. M. X. a contesté cette mise en demeure par courrier du 29 mai 2017 au motif qu'elle aurait manqué à son obligation de conseil.
Sur requête de la banque, une injonction de payer la somme de 90.046,77 euros a été délivrée par ordonnance du président du tribunal de commerce de Bordeaux du 7 juillet 2017 à l'encontre de M. X. Ce dernier a formé opposition le 28 juillet 2017 à l'ordonnance, signifiée le 28 juillet 2017.
Par jugement contradictoire en date du 21 décembre 2018, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
- condamné M. X. à payer à la Banque Populaire la somme de 81.504,33 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2017, jusqu'au parfait paiement, au titre de l'engagement de caution en date du 25 mars 2016, aux fins de garantir les engagements de la société Hydrosculpt au titre du prêt « Equipement Amortissable » n°08826454,
- condamné M. X. à payer à la Banque Populaire la somme de 3.986,37 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2017, jusqu'à parfait paiement, au titre de l'engagement de caution en date du 12 août 2016 pour garantir l'ensemble des engagements de la société Hydrosculpt à l'égard de la Banque Populaire,
- débouté M. X. de toutes ses autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné M. X. à payer à la Banque Populaire la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X. au paiement des entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais relatifs à la procédure d'injonction de payer.
M. X. a relevé appel du jugement par déclaration du 16 janvier 2019 énonçant les chefs du jugement expressément critiqués, intimant la Banque Populaire.
[*]
Aux termes de ses conclusions déposées en dernier lieu le 25 mars 2019 par RPVA, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M. X. demande à la cour de :
- infirmer le jugement
- statuant à nouveau,
- infirmer l'ordonnance d'injonction de payer
- à titre principal,
- déclarer nuls les actes de caution
- déclarer que la Banque Populaire ne peut s'en prévaloir
- à titre subsidiaire,
- déclarer les engagements souscrits le 25 mars 2016 et le 12 août 2016 disproportionnés,
- constater que son patrimoine ne lui permet pas de faire face à son obligation,
- déclarer que la Banque Populaire ne peut s'en prévaloir,
- en conséquence, débouter la Banque Populaire de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- à titre infiniment subsidiaire,
- constater que la clause pénale invoquée par la Banque Populaire est manifestement excessive, constitue une clause abusive, et qu'ainsi la Banque Populaire ne peut légitimement pas s'en prévaloir,
- constater qu'il n'est tenu qu'à hauteur de 60 % des sommes dues par la société emprunteuse au titre du contrat de prêt en date du 25 mars 2016,
- en conséquence, prononcer la réduction du montant dû par lui au titre de ses engagements de caution à la somme de 78.090,43 euros sous réserve pour la Banque Populaire de justifier des intérêts et frais accessoires dont elle se prévaut,
- lui accorder un délai de paiement de deux années ou un échelonnement de paiement sur deux années, tel que légalement prévu par le code civil,
- en tout état de cause,
- débouter la Banque Populaire de l'ensemble de ses demandes,
- dire et juger que la Banque Populaire a manqué à son devoir de mise en garde envers lui,
- condamner en conséquence la Banque Populaire à lui verser une somme égale à l'encours du prêt en réparation de son préjudice,
- ordonner la compensation des sommes que les parties pourraient se devoir,
- condamner la Banque Populaire à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens de l'instance.
M. X. fait valoir que les engagements de caution sont nuls en raison de la réticence dolosive de la Banque Populaire qui a manqué à son devoir d'information sur la portée de la garantie OSEO ; à titre subsidiaire, qu'ils sont manifestement disproportionnés par rapport à ses biens et revenus lors de la souscription comme au moment de l'appel en paiement ;
que la Banque Populaire ne peut s'en prévaloir ; qu'il n'est pas une caution avertie, qu'il existait un risque d'endettement et que la banque a manqué à son devoir de mise en garde.
[*]
Aux termes de ses conclusions déposées en dernier lieu le 7 juin 2019 par RPVA, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, la Banque Populaire demande à la cour de :
- considérer qu'aucun manquement ne lui est imputable au titre de l'information quant au périmètre de la garantie « Bpifrance »,
- considérer que les engagements de caution de M. X. sont réguliers et ne sont pas disproportionnés,
- considérer l'absence de faute imputable au titre du devoir de mise en garde,
- considérer que sa créance à l'encontre de M. X. en sa qualité de caution solidaire de la société Hydrosculpt est parfaitement fondée,
- en conséquence,
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de M. X. aux fins de réformation du jugement de première instance, et en statuant à nouveau :
- confirmer le jugement en l'ensemble de ses dispositions en ce qu'il a :
- condamné M. X. à lui payer la somme de 81.504,33 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2017, jusqu'au parfait paiement, au titre de l'engagement de caution en date du 25 mars 2016, aux fins de garantir les engagements de la société Hydrosculpt au titre du prêt « Equipement Amortissable » n°08826454,
- condamné M. X. à lui payer la somme de 3.986,37 euros, assorti des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2017, jusqu'au parfait paiement, au titre de l'engagement de caution « tous engagements » en date du 12 août 2016, pour garantir les engagements de la société Hydrosculpt à son égard,
- débouté M. X. de toutes ses autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné M. X. à lui payer la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X. au paiement des entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais relatifs à la procédure d'injonction de payer,
- y ajoutant,
- condamner M. X. à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure d'appel.
La Banque Populaire fait notamment valoir que sa créance est fondée ; qu'aucun manquement ne lui est imputable au titre de l'information quant au périmètre de la garantie Oséo devenue « Bpifrance » ; que l'appelant a paraphé l'ensemble des conditions générales de la garantie Bpifrance annexées au contrat de prêt qui lui sont donc parfaitement opposables ; que cette garantie lui a valu la protection de sa résidence principale puisqu'elle s'est engagée en contrepartie à ne prendre aucune hypothèque conventionnelle ou judiciaire en garantie du crédit ; que par ailleurs il ne peut se prévaloir d'un vice du consentement sur le périmètre de cette garantie alors que ses engagements de caution n'y font aucune référence ; qu'il n'existe aucune réticence dolosive ; que les engagements de caution de M. X. sont réguliers et ne sont pas disproportionnés ; qu'aucune faute ne lui est imputable au titre du devoir de mise en garde ; que sa créance est parfaitement fondée.
[*]
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance en date du 12 octobre 2021, et l'audience fixée au 2 novembre 2021.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur la demande principale :
M. X., pour s'opposer à la demande en paiement, invoque successivement :
- la nullité des engagements de caution ;
- la disproportion de ses engagements
- le manquement de la banque à son obligation de mise en garde
- le caractère abusif de la clause pénale.
Sur la nullité des engagements de caution :
L'appelant fait d'abord valoir que les actes sont nuls, son consentement ayant été vicié dans la mesure où il n'a pas été dûment informé sur la portée de la garantie OSEO dont il pensait qu'elle limiterait son engagement ; que la banque lui a fait parapher, sans qu'il ait le temps d'en prendre connaissance, des conditions générales qui sont en tout état de cause incompréhensibles pour un néophyte.
La banque est cependant fondée à opposer que l'appelant a paraphé l'intégralité des conditions générales de la garantie Bpifrance Financement (pièce 18 de l'intimée) qui lui sont dès lors opposables sans qu'il puisse sérieusement soutenir qu'il n'a pas eu le temps de les lire. C'est par ailleurs à bon droit que l'intimée relève que cette garantie lui a bien bénéficié dans la mesure où en contrepartie elle s'est engagée ne prendre aucune hypothèque sur sa résidence principale.
Aucun vice du consentement ne saurait en conséquence être retenu, alors même que cette garantie, dont les termes sont parfaitement clairs et explicites, n'a pas été érigée en condition des engagements de caution qui n'y font pas la moindre mention.
Le moyen sera rejeté.
Sur le caractère disproportionné des engagements :
Aux termes des dispositions de l'article L. 341-4 ancien du code de la consommation, en vigueur à la date de l'engagement et devenu l'article L. 343-4 à compter du 1er juillet 2016, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Ce texte est applicable à toute caution personne physique, qu'elle soit ou non commerçante ou dirigeante de société. La sanction de la disproportion est non pas la nullité du contrat, mais l'impossibilité pour le créancier de se prévaloir du cautionnement.
Il appartient à la caution de prouver qu'au moment de la conclusion du contrat, l'engagement était manifestement disproportionné à ses biens et revenus. L'appréciation de la disproportion se fait objectivement, en comparant, au jour de l'engagement, le montant de la dette garantie avec les biens et revenus de la caution tels que déclarés par elle, dont le créancier, en l'absence d'anomalies apparentes, n'a pas à vérifier l'exactitude.
Un cautionnement est disproportionné si la caution ne peut manifestement pas y faire face avec ses biens et revenus.
L'appelant conteste la proportionnalité de ses engagements de caution lors de leur signature. Bien qu'il ait souscrit deux engagements de caution, son argumentation vise plus spécifiquement l'engagement du 25 mars 2016, à hauteur de 84.000 euros.
C'est ainsi qu'il fait valoir que la fiche patrimoniale, dactylographiée, a été établie un mois avant l'engagement ; qu'elle a été remplie par la banque et non par lui ; que sa compagne figure à tort comme co-emprunteur ; que ses revenus n'avaient pas être pris en compte dans les revenus 2014 (57.927 euros) alors que la banque n'aurait dû retenir que les siens, consistant alors en une allocation chômage de 1.724 euros ; que de plus la banque n'a fait aucune demande sur les impôts locaux, les factures et les dépenses alimentaires, dont l'absence de mention constitue une véritable anomalie qui aurait dû la conduire à réaliser de plus amples investigations ; que la fiche indique faussement une épargne disponible de 200.000 euros alors que dans l'intervalle il avait déboursé le 23 février 2016 une somme de 75.000 euros au titre d'un apport en compte courant (à la demande de la banque qui a fait de cet apport une condition déterminante du prêt - pièces 35 37 de l'appelant) de sorte qu'il ne disposait plus, à la date de souscription de l'engagement, que d'une somme de 27.479 euros sur ses comptes bancaires ; qu'il n'est toujours pas en mesure de faire face aux engagements souscrits, étant dans une situation professionnelle précaire (sans emploi puis en contrats à durée déterminée (14.961 euros déclarés en 2016), sans aucune épargne, avec deux enfants à charge.
La fiche établie le 13 février 2016 (pièce 3 de la banque) mentionne un revenu net annuel pour le couple de 57.927, une épargne disponible de 200.000 euros avec pour charge un solde de prêt travaux de 4.500 euros. Le fait qu'elle soit dactylographiée est indifférent dès lors que M. X. en a expressément confirmé la teneur en la signant et en certifiant l'exactitude des renseignements portés, omettant, à ses risques et périls, de mentionner les charges dont il tente de se prévaloir désormais.
Même sans tenir compte des revenus de Mme M. (dont le détail ne figure pas sur la fiche) l'épargne disponible suffit à elle seule à écarter la disproportion, alors que son affectation partielle au compte courant associé de M. X. laissait subsister un solde théorique de 125.000 euros encore très supérieur à l'engagement de 84.000 euros, et qu'en tout état de cause, le montant d'un compte courant doit être pris en compte dans l'estimation du patrimoine.
La banque produit par ailleurs une seconde fiche patrimoniale datée [d’août 2016] (sa pièce 13), établie à l'occasion du second engagement de caution du même jour dans la limite de 6.000 euros, faisant mention d'un revenu net annuel de 57.927 euros, d'une épargne disponible de 100.000 euros, et d'un solde d'emprunt de 4.000 euros.
L'appelant ne formule aucune observation sur cette fiche dont il ne ressort non plus aucune disproportion manifeste entre la situation financière de M. X. et le montant de son engagement.
Le jugement qui a écarté le moyen sera donc confirmé.
Sur le manquement de la banque à son obligation de conseil et de mise en garde :
M. X. soutient ensuite que la banque a manqué à son obligation de conseil et de mise en garde à l'égard tant de l'emprunteuse que de la caution lorsqu'elle a octroyé ce prêt à la société Hydrosculpt, ce devoir impliquant qu'elle s'attarde tant sur les capacités financières de la société que sur la rentabilité du réseau Waterbike alors qu'elle se présente comme la banque de référence de la franchise ; qu'il se déduit de sa prise de garantie BPI France qu'elle connaissait les risques ; que son devoir de mise en garde était renforcé par le fait qu'il s'agissait d'un crédit affecté ; qu'elle devait obtenir les éléments permettant de vérifier la notoriété du réseau.
Le banquier dispensateur de crédit est tenu à l'égard d'une caution non avertie d'un devoir de mise en garde à raison de ses capacités financières et des risques de l'endettement résultant de l'octroi des prêts garantis.
Même si M. X., ancien salarié, néophyte en matière de financement, peut être considéré comme une caution non avertie, l'intimée est fondée à faire valoir qu'il n'a jamais sollicité son pôle franchise dans le cadre de ses négociations avec le franchiseur pour lesquelles il a effectué seul toutes les démarches, de sorte qu'il ne peut lui imputer un manquement à un devoir de conseil ou de mise en garde dans le cadre de ses relations avec cette société. C'est aussi à bon droit qu'elle oppose que le banquier n'est tenu d'un devoir de mise en garde que si l'octroi du crédit comporte un risque d'endettement, et qu'il n'est tenu d'aucune obligation dans le cas contraire, y compris si l'emprunteur est profane.
En l'espèce, au jour du contrat, le crédit apparaissait adapté aux capacités financières de l'emprunteur au regard des éléments produits. Au vu du dossier comprenant un prévisionnel comptable de l'activité par le cabinet d'expertise comptable de M. X. pour justifier de la rentabilité économique de l'opération (pièces 14 et 15 de l'intimée), la valeur du fonds était en adéquation avec la somme empruntée et les prévisions constituaient un objectif raisonnable, avec une capacité d'autofinancement qui couvrait largement les échéances annuelles du prêt. Rien ne justifiait en conséquence que la banque, tenue au demeurant d'un devoir de non immixtion, pousse plus avant ses investigations.
En conséquence, faute pour M. X. d'établir la preuve d'un crédit excessif, générateur d'un risque d'endettement pour la société empruntrice, cependant qu'il n'est ni démontré, ni d'ailleurs allégué, que la banque aurait eu, sur ses revenus, son patrimoine et ses facultés de remboursement, des informations qu'il aurait ignorées, le jugement qui a rejeté le moyen sera confirmé, et M. X. débouté de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de l'encours du prêt.
Sur le montant de la créance :
La banque a déclaré, au passif de la société, les sommes de :
- 3.986,97 euros à titre chirographaire au titre du solde débiteur du compte courant professionnel ;
- 135.840,55 euros à titre privilégié au titre du prêt (pièce 5 de l'intimée).
L'appelant ne conteste pas la première somme mais critique la seconde qu'il soutient non justifiée, s'agissant notamment de la somme de 333,78 euros qui constitue selon lui une clause pénale abusive.
Même s'il soutient à juste titre que cette indemnité de recouvrement constitue une clause pénale, c'est à bon droit que la banque oppose qu'il ne peut élever de contestation sur le principe et le montant d'une créance qui a été admise au passif de la débitrice principale aux termes d'une décision qu'il a laissée devenir irrévocable à son égard.
Le moyen sera rejeté.
Le jugement qui a condamné M. X. au paiement des sommes de 3.986,37 et 81.504,33 euros (135.840,55 X 60 %) majorées des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2017 sera donc confirmé.
Sur les délais :
A titre subsidiaire, M. X. formule une demande de délais de paiement.
Aux termes de l'article 1244-1 ancien du code civil, devenu l'article 1343-5 depuis le 1er octobre 2016, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier.
Pour remplir les conditions de ce texte, le débiteur de l'obligation doit établir à la fois sa situation personnelle objective qui l'empêcherait de satisfaire à ses obligations, et son comportement pour parvenir à y satisfaire.
Or, en l'espèce, M. X. se prévaut de sa situation financière en 2018, sans aucun justificatif actualisé. Alors qu'il a déjà disposé de plus de 4 années depuis son assignation pour s'organiser et procéder au paiement, il n'est nullement établi que deux années supplémentaires puissent être valablement utilisées à ces fins.
Sa demande sera donc rejetée.
Sur les demandes accessoires :
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la Banque Populaire les sommes, non comprises dans les dépens, exposées par elle dans le cadre de l'appel. M. X. sera condamné à lui payer une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X. sera condamné aux entiers dépens d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 décembre 2018 par le tribunal de commerce de Bordeaux,
Condamne M. X. à payer à la Banque Populaire une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne M. X. aux entiers dépens de la procédure.
Le présent arrêt a été signé par Mme Pignon, présidente et par M. Goudot, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.