CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 5 janvier 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9332
CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 5 janvier 2022 : RG n° 20/00737
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Le ministre de l'économie ayant introduit la présente action, a la charge de la preuve du déséquilibre significatif ».
2/ « La Cour observe que l'action du ministre chargé de l'économie tendant à saisir la juridiction commerciale de pratiques restrictives de concurrence n'est pas soumise à un régime de prescription spécial, tel que celui prévu à l'article L. 462-7 du code de commerce pour la saisine de l'autorité de la concurrence de pratiques anticoncurrentielles. Il y a donc lieu d'appliquer les règles de droit commun. S'agissant de la durée de la prescription, celle-ci est fixée à cinq années par l'article L.110-4 du code de commerce.
S'agissant de la détermination du point de départ du délai de prescription, il y a lieu d'appliquer l'article 2224 du code civil qui dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Pour se faire, il convient de se référer, comme l'y invitent les parties, à la nature et l'objet de l'action du ministre chargé de l'économie.
L'article précité habilite le ministre chargé de l'économie à saisir le juge compétent en vue de faire sanctionner les pratiques restrictives de concurrence par divers procédés. L'action du ministre chargé de l'économie vise en premier lieu à faire constater l'illicéité d'une pratique déterminée par application des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce ainsi qu'en demander la cessation. Elle a ainsi un effet d'exemplarité et d'information des partenaires, mais elle permet aussi de préciser les règles de bonnes relations commerciales entre partenaires économiques. En deuxième lieu, elle a une fonction répressive en ce qu'elle permet le prononcé d'une amende civile. En troisième lieu, elle tend à faire constater la nullité des clauses illicites ou des contrats illicites et d'en anéantir les effets entre les partenaires commerciaux en prévoyant la faculté de demander la répétition de l'indu au profit du partenaire lésé.
Si l'action du ministre permet ainsi de faire sanctionner les pratiques restrictives de concurrence par des demandes ayant des natures différentes, il a été reconnu à diverses reprises que cette action du ministre au titre d'une mission de gardien de l'ordre public économique pour protéger le fonctionnement du marché et de la concurrence, est autonome. Aussi, le ministre n'agissant ni comme partie au contrat ni sur le fondement de celui-ci, son action autonome ne se substitue pas à celles des partenaires victimes et revêt la nature d'une action en responsabilité extra-contractuelle (Com. 8 juillet 2008, n° 07-16.761 ; Bull IV n°143 ; CC décision 13 mai 2011, n° 2011-126 QPC ; Com. 18 octobre 2011, n°10-28.005 ; CEDH, Galec c/France du 17 janvier 2012 ; Civ. 1ère 6 juillet 2016, n°15-21.811).
Au regard de l'ensemble de ces éléments, et contrairement à ce qui est avancé par les sociétés intimées, la Cour retient qu'il y a lieu d'appliquer les dispositions de l'article 2224 du code civil pour déterminer le point de départ de la prescription suivant une appréciation unique quelque soit les demandes du ministre au soutien de son action. Aussi, la prescription de l'action du ministre a pour point de départ le jour où celui-ci est en mesure de connaître les faits lui permettant de caractériser une pratique restrictive et lui donnant le droit d'agir devant la juridiction compétente.
Il ressort des explications et des pièces versées aux débats par le ministre de l'économie que les éléments ayant mis en évidence ce qu'il qualifie des dysfonctionnements au sein du réseau Pizza Sprint, ont été recueillis en deux temps : - d'abord, dans le cadre d'une enquête relative aux délais de paiement en 2013, laquelle avait déjà permis de recueillir des éléments relatifs au fonctionnement du réseau PIZZA SPRINT (procès-verbal de déclaration de Mme. R., directrice administrative et financière de FRA MA PIZZ du 14 mars 2013, pièce n° 10), - et ensuite dans le cadre d'une enquête nationale sur les pratiques dans le secteur de la franchise de la restauration rapide et à thème, plus particulièrement sur les relations entre franchiseurs et franchisés, en 2014.
Dès lors, en introduisant son action devant le tribunal de commerce par assignation des 9, 13 et 15 mars 2017, la prescription n'est pas acquise concernant les contrats de franchise précités. »
3/ « L'article 2052, dans sa version postérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 applicable au présent litige, dispose que « la transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet ».
A l'appui de leur fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la transaction, les sociétés intimées Fra-Ma-Pizz et Pizza Center versent aux débats (pièces n°6.1 à 6.6) des extraits des « protocoles transactionnels » conclus avec les sociétés Pizz Center 1et 2, TSA Pizz, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4UPIZZ, P. Restauration fin 2016 et les jugements d'homologation de ces protocoles.
Ces protocoles ont été conclus dans le cadre de litiges individuels intentés devant le tribunal de commerce de Rennes par certaines parties aux contrats de franchise à l'occasion desquels le ministre de l'économie prétend avoir constaté des pratiques illicites au sens des dispositions de l'article L. 442-6-I, 1° et 2°,
Les extraits de ces protocoles ne permettent pas de connaître la teneur des concessions qualifiées de réciproques entre les parties à ces protocoles ni précisément leur objet. Il en ressort néanmoins que suivant une clause similaire dans chacun des protocoles produits, il est stipulé que le franchisé s'engage notamment à « renoncer initier ou à s'associer à toute autre action ou instance, et notamment à se rapprocher du Ministère de l'économie ou de toute autre administration concernant, la formation, la conclusion, l'interprétation, l'exécution des relations commerciales entre les parties (notamment des relations de franchise et d'approvisionnement), ou encore à s'associer directement ou indirectement à toute action ou instance Ministère de l'économie à l'encontre de FRA-MA-PIZZ et/ou LOGIS Pizza ».
Si les sociétés franchisées ayant conclu ces protocoles d'accord, à savoir les sociétés Pizz Center 1et 2, TSA Pizz, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4UPIZZ, P. Restauration, ne sont certes pas parties intervenantes dans la présente instance initiée par le ministre de l'économie, ce dernier non seulement n'est pas partie à ces protocoles mais son action, comme rappelé aux motifs qui précèdent, est autonome. En toute hypothèse, les pièces versées aux débats ne permettent pas de vérifier les chefs transigés et donc l'identité d'objet avec l'action en justice du ministre.
Dès lors, tout au plus les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center pourraient se prévaloir des sommes versées dans le cadre de ces protocoles d'accords pour se libérer de leurs obligations ayant le même objet que les prétentions du ministre de l'économie au titre de l'indemnisation du préjudice subi ou de la répétition de l'indu.
Dès lors, la fin de non-recevoir tirée des dispositions des articles 2052 du code civil et 122 du code de procédure civile soulevée par les sociétés intimées sera rejetée. »
4/ « Si dans sa décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011, le Conseil constitutionnel a jugé que l'amende civile prévue par l'article L. 442-6 du code de commerce est une sanction ayant le caractère d'une punition ce qui imposait de la soumettre au principe de légalité des délits et des peines et que « l'infraction » définie par le 2° du paragraphe I de l'article L. 442-6 est conforme à ce principe, l'action du ministre telle que prévue par le paragraphe III de ce même article au soutient de laquelle il est demandé le prononcé d'une amende n'en demeure pas moins une action civile.
En l'absence d'effet rétroactif de la loi de modernisation de l'économie, dite loi LME du 4 août 2008, l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce qui en est issu, instaurant une interdiction de la pratique du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, n'est pas applicable aux contrats en cours conclus avant son entrée en vigueur, le 6 août suivant.
En revanche, tel n'est pas le cas des contrats renouvelés postérieurement à l'entrée en vigueur de ladite loi, peu important que ceux-ci aient fait l'objet d'un renouvellement par tacite reconduction, que leurs stipulations n'aient pas été modifiées ou qu'il n'y ait pas eu de renégociations. En effet, le renouvellement tacite d'un contrat ne saurait faire obstacle à une loi d'ordre public économique et il appartient aux parties de mettre les dispositions contractuelles en conformité avec les dispositions nouvelles applicables lors du renouvellement, ce conformément aux dispositions des articles 2 et 6 du code civil. »
5/ « L'élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l'absence de négociation effective ou l'usage de menaces ou de mesures de rétorsion visant à forcer l'acceptation impliquant cette absence de négociation effective.
Il n'est pas contestable que le franchiseur occupe dans son réseau une place prépondérante dans la mesure où il en détermine unilatéralement les conditions d'accès ainsi que le mode de fonctionnement et les restrictions post-contractuelles qu'il retranscrit dans les clauses du contrat qu'il propose au franchisé. En outre, la franchise ouvre le plus souvent à des commerçants dépourvus de l'expérience nécessaire l'accès à des méthodes qu'ils n'auraient pu acquérir qu'après de longs efforts de recherche et les fait profiter de la réputation du signe. […]
Il en ressort que le réseau de franchise Sprint Pizza bénéficiait d'une notoriété certaine dans l'ouest de la France sur un marché particulièrement dynamique attirant principalement pour se lancer dans la franchise des entrepreneurs individuels ou d'anciens salariés du réseau en raison de la simplicité du concept et de la confiance suscitée par cette notoriété. La société Fra-Ma-Pizz et son dirigeant, M. X., jouissaient ainsi d'une notoriété particulière et profitaient de cette situation prépondérante de franchiseur pour imposer un contrat type de franchise au nom de l'homogénéité du réseau à des candidats entrepreneurs individuels.
En effet, il n'est pas contesté que les 30 contrats Sprint Pizza versés aux débats sont identiques et n'ont pas été négociés. Non seulement ils n'ont pas été effectivement négociés, mais ceux-ci n'étaient pas non plus négociables du fait de la désinformation des franchisés sur le fonctionnement réel du réseau.
Ainsi, même si le contrat de franchise sous enseigne Pizza Sprint était soumis pour sa signature au processus légal et habituel d'un projet transmis avec le DIP (cf. notamment pièce n° 10 ministre et pièces spécifiques franchisés), il ressort des explications et des pièces versées aux débats par les franchisés que ni le DIP ni le contrat de franchise soumis à la signature ne faisait état de l'existence de la société Pizza Center appartenant au groupe Pizza Sprint dirigé par M. X. exerçant sous l'enseigne Logis Pizza auprès duquel les franchisés devaient de fait exclusivement s'approvisionner contrairement aux apparences des clauses contractuelles, ni de la société Somainmag, appartement au même groupe pour l'aménagement des points de vente. De même, il n'est pas contesté que ni le DIP, ni la « Bible » ou le contrat de franchise ne faisaient état de l'existence d'animateurs de réseau sous la surveillance desquels les franchisés devaient étroitement se soumettre. Enfin, plusieurs franchisés ont conclu de nouveau contrats de franchise fin 2015 sans être informés de la cession imminente du réseau Pizza Sprint au principal réseau concurrent Domino's Pizza et du projet de conversion d'enseigne des points de ventes dès février 2016 ([…]).
Par ailleurs, les pièces du ministre et des franchisés mettent en évidence qu'une organisation du réseau avait été mise en place par M. X., consistant par diverses rappels à l'ordre et pressions à empêcher les franchisés de communiquer entre eux sur le fonctionnement du réseau ou de s'organiser au cours de l'exécution du contrat pour être force de proposition et à les soumettre dans la gestion commerciale de leur propre point de vente à une surveillance très étroite par les animateurs de réseau ou les clients mystères (notamment pièces communes franchisés n°3, 5,6,13).
Ainsi, […] Dès lors, le défaut d'information sur le fonctionnement réel du réseau, la position prépondérante du franchiseur sur les franchisés entrepreneurs individuels, l'attractivité apparente du réseau et les nombreux contrats types identiques signés, sont autant d'éléments mettant en évidence l'absence de marge réelle de négociation du contrat de franchise Pizza Sprint par les candidats à la franchise, et ce même pour certains franchisés ayant ouvert successivement plusieurs points de vente. »
6/ « L'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif peut notamment se déduire d'une absence totale de réciprocité ou de contrepartie à une obligation, ou encore d'une disproportion importante entre les obligations respectives des parties. Les clauses sont appréciées dans leur contexte, au regard de l'économie de la relation contractuelle. »
7/ « Il ressort des déclarations concordantes de l'ensemble des franchisés entendus dans le cadre de l'enquête (notamment pièces ministre, déclarations, n° 15, 16, 49, 66, 69, 73.1, 76, 80), que l'exclusivité de l'approvisionnement n'était pas un libre choix de leur part mais le résultat d'une forte pression, voir de menace de résiliation, de la part du franchiseur, notamment M. X., et par l'intermédiaire des animateurs de réseau. Comme le relève le ministre, il ressort de ces déclarations que l'approvisionnement théoriquement « libre » auprès de fournisseurs autres que Logis Pizza, se heurtait en réalité à des critères dissuasifs pour les franchisés, à savoir : - en amont : fiche technique des produits achetés et conditions de vente applicables à transmettre pour validation préalable du franchiseur et quasiment jamais obtenue, - contrôle visuel des animateurs réseau et alerte informatique en cas d'absence de commande par Logis Pizza. […]
Au regard de l'ensemble de ces éléments, la Cour constate que le franchiseur retirait un avantage excessif des clauses d'approvisionnement et de stock minimum qui n'étaient équilibrées ni par d'autres clauses du contrat ni ne trouvaient dans leur mise en œuvre de justification quant à la préservation de l'homogénéité du réseau ou à la transmission du savoir-faire. Il y a lieu d'en déduire l'existence d'un déséquilibre significatif entre les droits du franchiseur et les obligations des franchisés résultant de la combinaison de la clause d'approvisionnement et de stock minimum, tant dans leur rédaction que dans les pratiques développées par le franchiseur dans leur mise en œuvre. Le jugement sera infirmé sur ce point. »
7/ Sur les autres clauses examinées, V. les motifs de l’arrêt.
8/ « Au regard des motifs qui précèdent, la Cour prononce, dans les contrats de franchise versés aux débats et conclus entre la société Fra-Ma-Pizz et les franchisés, la nullité des clauses suivantes : - la clause intuitu personae (article 5/ article 23) ; - dans la version des contrats antérieure à 2012, la clause de résiliation (article 10), la clause pénale (article 14) et l'alinéa 1er de la clause relative à la cessation du contrat de franchise en ce qu'il vise la résiliation du contrat (article 11 alinéa 1er) ; Le déséquilibre significatif concernant la clause de stock minimum (article 6.2.4 stock/ article 10.1 stock) et la clause d'approvisionnement (article 6.2.4 approvisionnement/ article 10.2 produits petit matériel et matériel), ne résulte pas de la rédaction elle-même de ces clauses mais de leur mise en œuvre. Dès lors, il n'y a pas lieu d'en prononcer la nullité. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 4
ARRÊT DU 5 JANVIER 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 20/00737 (82 pages). N° Portalis 35L7-V-B7E-CBIEG. Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 octobre 2019 - Tribunal de Commerce de RENNES – R.G. n° 2017F00131.
APPELANTS :
Monsieur LE MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES
[...], [...], élisant domicile à la DGCCRF, sous-direction des affaires juridiques politiques de la concurrence et de la consommation, [...], [...], représenté par Madame D., Directrice régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités pôle C., assisté par Madame B., Directrice générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes
Monsieur B.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur S.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur H.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur F.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Madame N.
[...], [...], représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur R.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur P.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur C.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur M. L.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur X. P. ès qualités de liquidateur amiable de la SARL EMERAUDE PIZZA
à compter du 30 juin 2013, [...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur X. P.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur H. P.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur M.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Madame LE G. épouse H.
[...], [...], représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur H.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Madame K. épouse H.
[...], [...], représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur S. H.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Madame P. épouse H.
[...], [...], représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur X.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
Monsieur D.
[...], [...], représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SELARL FREDERIC B.
- MJO - Mandataires judiciaires prise en la personne de Maître Frédéric B. intervenant en lieu et place de Maître François H. agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MJM PIZZ dont le siège social est sis [...], [...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTES sous le numéro XXX, représenté par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assisté par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARL BS DISTRIBUTION
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LAVAL sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARLU PIZZ'PARTH
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NIORT sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARL P. NOYAL
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de RENNES sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARLU RENNA PIZZA
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LORIENT sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARL S & B SABLE
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés du MANS sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SASU SEMPER FI
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LA ROCHE SUR YON sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARLU M. RESTAURATION
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LA ROCHE SUR YON sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARLU LMJ CAPITAL anciennement dénommée DUTCHESNE DISTRIBUTION
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTES sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARLU H.
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de RENNES sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARL H. ARGENTRE
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de RENNES sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARL H. BERTHEVIN
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LAVAL sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARL H. DOL
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de SAINT -MALO sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARL H. LIFFRE
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de RENNES sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
SARLU H. VITRE
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de RENNES sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
EURL PIZZ AG
[...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de CAEN sous le numéro XXX, représentée par Maître Marie-Laure B.-N., avocat au barreau de PARIS, toque : B0936, assistée par Maître Philippe LE G. de la SELARL C. & LE G. AVOCATS, avocat au barreau de RENNES, toque : 94
INTIMÉES :
SASU FRA-MA-PIZZ
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés, en cette qualité audit siège [...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro XXX, représentée par Maître Arnaud G. de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, assistée par Maître Jean-Daniel B. de la SAS BREDIN PLAT, avocat au barreau de PARIS, toque : T12, et par Maître Sandrine R. de la SELARL S. Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : E1820
SASU DOMINO'S PIZZA FRANCE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro XXX, représentée par Maître Arnaud G. de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, assistée par Maître Jean-Daniel B. de la SAS BREDIN PLAT, avocat au barreau de PARIS, toque : T12, et par Maître Sandrine R. de la SELARL S. Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : E1820
SASU PIZZA CENTER FRANCE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro XXX, représentée par Maître Arnaud G. de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, assistée par Maître Jean-Daniel B. de la SAS BREDIN PLAT, avocat au barreau de PARIS, toque : T12, et par Maître Sandrine R. de la SELARL S. Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : E1820
SARLU FOOD COURT FINANCE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de RENNES sous le numéro XXX, représentée par Maître Jean-Didier M. de la SCP B. - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240, assistée par Maître Matthieu M. de la SELARL C. CONTENTIEUX D'AFFAIRES, avocat au barreau de RENNES, toque : 70 substitué par Maître Pierre-Alexandre LE M. de la SELARL M. - T. -S. - H. -G. -N. - G., avocat au barreau de VANNES, toque : 38
SARL SOMAINMAG
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...], [...], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de RENNES sous le numéro XXX, représentée par Maître Jean-Didier M. de la SCP B. - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240, assistée par Maître Matthieu M. de la SELARL C. CONTENTIEUX D'AFFAIRES, avocat au barreau de RENNES, toque : 70 substitué par Maître Pierre-Alexandre LE M. de la SELARL M. - T. -S. - H. -G. -N. - G., avocat au barreau de VANNES, toque : 38
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 15 septembre 2021, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, Mme Sophie DEPELLEY, Conseillère, Mme Camille LIGNIERES, Conseillère, qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience par Mme Sophie DEPELLEY, Conseillère dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Sihème MASKAR
ARRÊT : - Contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, - signé par Mme Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, et par Mme Mathilde BOUDRENGHIEN, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le réseau de restaurants Pizza Sprint, détenu jusqu'au 25 janvier 2016 par le groupe Pizza Sprint, était spécialisé dans la fabrication et la distribution de pizzas sur le marché de la livraison à domicile ou à emporter.
Il est passé de 3 points de vente en 1998 à 89 points de vente en 2015, dont 77 exploités en franchise.
Le groupe était composé de trois filiales détenues par la société holding Food Court Finances dirigé par M. X. :
- la société Fra-Ma-Pizz (ou ci-après « le franchiseur ») qui a développé le réseau de franchise sous l'enseigne Pizza Sprint, et qui détenait également des points de vente exploités en direct.
- la société Pizza Center France, (ci-après « la société Pizza Center ») ayant pour nom commercial « Logis Pizza », qui approvisionnait les points de vente du réseau en produits alimentaires et non alimentaires comme centrale d'achat,
- la société Somainmag qui a pour activité l'agencement de points de vente de restauration
Le 26 janvier 2016, la société Domino's Pizza France (ci-après « la société Domino's Pizza ») qui développe également un réseau de franchise de vente de pizzas sur place, à emporter ou à livrer, exploité sous l'enseigne « Domino's Pizza » (370 magasins à ce jour), s'est portée acquéreur de 100 % des titres composant le capital social des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center.
La société Somainmag, qui ne faisait pas partie du périmètre de la cession à Domino's Pizza, est restée une filiale de la société Food Court Finance.
Depuis le rachat des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France par la société Domino's Pizza, les points de vente sous enseigne Pizza Sprint sont passés sous enseigne Domino's Pizza pour les magasins détenus en propre.
Certains franchisés ne souhaitant pas passer sous enseigne Domino's Pizza, leur relation contractuelle s'est poursuivie sous l'enseigne Pizza Sprint suivant le contrat de franchise initial.
De 2013 à 2016, des agents de la DGCCRF ont enquêté sur les relations commerciales entretenues entre les franchiseurs et les franchisés de douze réseaux de franchise dont le réseau Pizza Sprint.
Durant cette enquête, plusieurs franchisés ont dénoncé à la DIRECCTE Bretagne certaines pratiques du réseau Pizza Sprint. Les représentants des sociétés Fra-Ma-Pizz et de ses filiales ont été également entendus. L'enquête a été complétée par des auditions et des demandes de prise de documents auprès de la société Fra-Ma-Pizz'et de ses filiales, des auditions des responsables de la société Domino's Pizza et la rencontre avec le président de l'association Franchisés Grand-Ouest, association dont l'objet est la défense des intérêts des franchisés Pizza Sprint, regroupant 40 franchisés représentant une soixantaine de magasins.
A l'issue de cette enquête, les agents de la DGCCRF ont estimé que les relations commerciales entre la société Fra-Ma-Pizz et les franchisés révélaient l'existence, dans le contrat liant Fra-Ma-Pizz aux franchisés, de clauses imposant aux franchisés des obligations venant limiter leur liberté et leur autonomie commerciale, hors de proportion avec les règles habituelles de fonctionnement d'une franchise et avec les usages nécessaires à la préservation de la marque exploitée. Pour les agents de la DGCCRF, de telles clauses ainsi que des pratiques pendant l'exécution des contrats de franchise sont porteuses d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa version en vigueur au moment des faits et confèrent à l'ensemble du contrat un caractère significativement déséquilibré et générant la soumission des franchisés résultant de la puissance de négociation du franchiseur.
Par actes des 9, 13 et 15 mars 2017, le ministre de l'économie et des finances (ci-après 'le ministre de l'économie' ou 'le ministre') a assigné devant le tribunal de commerce de Rennes les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France, Domino's Pizza France, Food Court Finance et Somainmag au visa de l'ancien article L. 442-6-I-2° du code de commerce et de l'ancien article L. 442-6-I-1° du code de commerce.
Trente-six personnes morales et physiques sont intervenues volontairement à titre principal à l'instance introduite par le ministre de l'économie. Trois personnes morales et physiques sont intervenues volontairement à titre accessoire à cette même instance (ci-après 'les franchisés').
Par jugement du 22 octobre 2019, le tribunal de commerce de Rennes, a :
Sur les demandes du ministre de l'économie et des finances :
- Déclare recevables les demandes du Ministre de l'économie et des finances, à l'exception de celles contre les sociétés :
o Food Court Finance ;
o Pizz Center 1 et 2 ;
o TSA Pizz Concarneau ;
o BMF Pizza ;
o Feoni Pizz;
o 4UPizz ;
o P. Restauration ;
o Pizz Le Mans.
- Rejette les demandes du Ministre de l'économie et des finances portant sur les accords de franchise de :
o DML CREATION,
o REDAVOR,
o EDDY PIZZ,
o R2 RESTAURATION,
o LES ARCS,
o CYRTOM,
o GALLIC,
o YLANO,
o ARYL,
o LPL COGNAC,
o SOYAUX
o LIMON RESTAURATION,
o FRIMA ' INVEST RESTAURATION,
o FBS RESTAURATION,
o B-SHOP,
o HENPIZZ,
o DDT RESTAURATION,
o AJ RESTAURATION,
o THORIGNE F. PIZZ,
o DUTCHESNE DISTRIBUTION,
o VADOM,
o SABRIA ALLISSIA,
o MLB PIZZ,
o HL PIZZ,
o MSC RESTAURATION,
o TAMAGE,
o 2LPR,
o BS DISTRIBUTION,
o CDV RESTAURATION,
o JB2R,
o OPIUM,
o LVMA,
o TBR RESTAURATION,
o DOS S. 1,
o FPA JANZE,
o MAP CAEN,
o DUBON,
o PIZZAREL,
o S&B SABLE,
o O. PIZZ,
o PIZZ AG,
o LES DAMES,
o M. PIZZ.
- Prononce, pour les contrats au sujet desquels la demande du Ministre a été jugée recevable :
o la nullité des clauses relatives à l'intuitu personae,
o la nullité des clauses relatives aux modalités de résiliation et de cessation,
Et ordonne à Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza France de modifier, en les rédigeant correctement, ces clauses, par avenant pour les contrats existants ou dans le corps du contrat pour les contrats à venir ;
- Ordonne à Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza France de permettre aux franchisés, grâce à un outil informatique adapté, de pratiquer leurs propres prix de vente,
- Déboute le Ministre de l'économie et des finances du surplus de ses demandes,
Sur les demandes des intervenants volontaires à titre accessoire :
- Déclare recevables les demandes en intervention volontaire accessoire de la société Jeremy PIZZ, la société Eddy Pizz, et de Mr Mickael C. ;
-Déboute la société Jeremy PIZZ, la société Eddy Pizz, et Mr Mickael C. du surplus de leurs demandes ;
Sur les demandes des intervenants volontaires à titre principal :
- Déclare recevables les demandes des 36 intervenants volontaires à titre principal qui appuient les demandes du Ministre,
- Déclare irrecevables les demandes des 27 intervenants volontaires suivants en ce qu'elles élèvent des prétentions spécifiques déjà soulevées dans des instances individuelles :
o La société BS DISTRIBUTION ;
o La société S & B SABLE ;
o La société DUTCHESNE DISTRIBUTION ;
o La société H. ARGENTRE ;
o La société H. BERTHEVIN ;
o La société H. DOL ;
o La société H. LIFFRE ;
o La société H. VITRE ;
o La société P. NOYAL ;
o La société PIZZ AG ;
o La société PIZZ' PARTH ;
o La société RENNA PIZZA ;
o La société SEMPER FI ;
o La société M. RESTAURATION ;
o Monsieur X. B. ;
o Monsieur B. S. ;
o Monsieur S. D. ;
o Monsieur S. H. ;
o Madame M. H. ;
o Monsieur A. G. ;
o Monsieur H. P. ;
o Monsieur O. H. ;
o Madame S. LE G., épouse H. ;
o Monsieur F. H. ;
o Madame C. K., épouse H. ;
o Monsieur F. M. ;
o Monsieur S. F..
- Déboute les intervenants volontaires à titre principal de leur demande de jonction ;
- Déboute les intervenants volontaires à titre principal du surplus de leurs demandes ;
Sur les demandes accessoires :
- Condamne Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza France aux entiers dépens de l'instance ;
- Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
- Liquide les frais de greffe à la somme de 1045.07 euros tels que prévu aux articles 695 et 701 du code de procédure civile.
Le ministre de l'économie et des finances a interjeté appel de ce jugement le 27 décembre 2019, enrôlé sous le RG n° 20/00737.
Les sociétés franchisées et leur gérant qui étaient intervenus volontairement à titre principal en première instance ont également interjeté appel de ce jugement, par déclaration reçue au greffe le 16 janvier 2020, enrôlée sous le RG n° 20/01677.
Par ordonnance du 16 juin 2020, la jonction des procédures a été ordonnée sous le n° RG n°20/00737.
[*]
Aux termes de ses dernières conclusions, déposées au greffe le 21 juin 2021 et signifié les 16 et 17 juin aux intimés, le ministre de l'économie demande à la Cour, au visa de l'article L. 442-6 du code de commerce, de :
1/ Confirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a déclaré illicites au regard de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce les trois clauses suivantes :
> La clause d'intuitu personae ;
> La clause de résiliation et de cessation du contrat ;
> La fixation unilatérale des prix de revente par le franchiseur.
2/ Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Rennes en ce qu'il a :
- Rejeté les demandes du Ministre de l'économie portant sur les accords de franchise des sociétés :
1/ DML Creation,
2/ Redavor,
3/ Eddy Pizz,
4/ R2 Restauration,
5/ Les Arcs,
6/ Cyrtom,
7/ Gallic,
8/ Ylano,
9/ Aryl,
10/ LPL Cognac,
11/ Soyaux,
12/ Limon Restauration,
13/ Frima-Invest Restauration,
14/ FBS Restauration,
15/ B-Shop,
6/ Henpizz,
17/ DDT Restauration,
18/ AJ Restauration,
19/ Thorigne F. Pizz,
20/ Dutchesne Distribution,
21/ Vadom,
22/ Sabria Allissia,
23/ MBL Pizz,
24/ HL Pizz,
25/ MSC Restauration,
26/ Tamage,
27/ 2LPR,
28/ BS Distribution,
29/ CDV Restauration,
30/ JB2R,
31/ Opium,
32/ LVMA,
33/ TBR Restauration,
34/ Dos S. 1,
35/ FPA Janze,
36/ MAP Caen,
37/ Dubon,
38/ Pizzarel,
39/ S&B Sable,
40/ O. Pizz,
41/ Pizz AG,
42/ Les dames,
43/ M. Pizz ;
- Déclarer irrecevables les demandes du Ministre de l'économie contre la société Food Court Finance, pour défaut de qualité à défendre ;
- Déclarer irrecevables les demandes du Ministre de l'économie relatives aux sociétés Pizza Center 1 et 2, TSA Pizz Concarneau, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4U Pizz et P. Restauration ;
- Déclarer irrecevables les demandes du Ministre relatives au contrat de franchise de la société Pizz Le Mans ;
- Dit, concernant l'obligation pour le franchisé de recourir à la société Somainmag pour l'aménagement des points de vente, société d'aménagement appartenant au même groupe que le franchiseur, qu'aucun déséquilibre significatif ne peut, sur ce sujet, être établi ;
- Dit que, concernant l'obligation pour le franchisé de s'approvisionner presqu'exclusivement auprès de la société Pizza Center France, société appartenant au même groupe que le franchiseur, sur ce point le déséquilibre significatif n'est pas non plus démontré ;
- Dit que, concernant l'obligation pour le franchisé de détenir un stock minimum, aucune soumission ni tentative de soumission ne peut être reprochée au franchiseur ;
- Dit que Ministre ne démontre pas que le franchiseur aurait surfacturé des publicités décidées par lui ;
- Dit que les clauses relatives aux « frais divers » et aux « frais de port et de conditionnement » ne créent pas à un déséquilibre significatif et à titre subsidiaire, ont une contrepartie ;
- Dit que la mise en œuvre des modalités de contrôle des points de vente ne constitue pas une soumission ou tentative de soumission de la part du franchiseur à un déséquilibre significatif ;
- Dit que le franchiseur n'a pas manqué à ses obligations d'assistance et de formation à l'égard de ses franchisés et le Ministre ne démontre pas en quoi ces manquements constitueraient une soumission ou une tentative de soumission à un déséquilibre significatif ;
- Dit que le Ministre est débouté de six de ses demandes principales relatives au déséquilibre significatif, dit que seulement trois de ses demandes présentent un déséquilibre significatif et dit que ces trois points ne suffisent pas à constituer la significativité du déséquilibre demandé par le Ministre.
3/ Et, en conséquence, statuer à nouveau et :
- Dire et juger l'action du Ministre chargé de l'économie intentée à l'encontre de la société Food Court Finance recevable ;
- Dire et juger que l'action du Ministre chargé de l'économie à l'encontre des sociétés Fra-Ma-Pizz ; Domino's Pizza ; Somainmag et Pizza Center France est recevable ;
- Dire et juger que l'enquête réalisée par les services de la DGCCRF est régulière et recevable ;
-Dire et juger que les soixante-sept contrats visés par le Ministre de l'économie dans ses conclusions doivent être mis dans la cause, et que les demandes du Ministre de l'économie en ce qui concerne ces contrats et les franchisés concernés, sont recevables et bien fondées ;
-Dire et juger que les demandes et prétentions formulées par le Ministre de l'économie a l'encontre des contrats de franchise conclus avec les sociétés EURL JBN Restauration et P. Restauration sont recevables ;
- Dire et juger que les prétentions et demandes du Ministre relatives aux contrats de franchise des sociétés Pizz Center 1 et 2, TSA Pizz Concarneau, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4U Pizz et P. Restauration sont recevables ;
- Dire et juger que l'action du Ministre relative aux pratiques commerciales analysées, issues des contrats de franchise, n'est pas prescrite ;
A titre principal, dire et juger que le cumul des clauses et pratiques visées par le Ministre de l'économie, sans justification d'une quelconque volonté de préservation de l'homogénéité du réseau ni contrepartie, est constitutif d'une pratique restrictive de concurrence, en particulier au regard des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ;
A titre principal, dire et juger que les obligations imposées aux franchisés dans le cadre du contrat de franchise conclu, contrat d'adhésion non négociable, entre la société Fra-Ma-Pizz et ses franchisés sont manifestement déséquilibrées au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, concernant les six demandes du Ministre rejetées et reproduites ci-dessous :
- l'obligation, dans les faits, de recourir à la société d'aménagement des points de vente du franchiseur ;
- l'obligation d'approvisionnement exclusif auprès de la société Pizza Center / Logis Pizza, appartenant au franchiseur ;
- l'obligation de détenir un stock minimum ;
- la facturation hors contrat de certains frais ;
- la mise en œuvre des modalités de contrôle des points de vente ;
- du défaut d'assistance et de formation des franchisés.
A titre principal, dire et juger que le franchiseur a manqué à ses obligations d'assistance et de formation à l'égard de ses franchisés et que ces manquements constituent une soumission ou une tentative de soumission à un déséquilibre significatif ;
A titre subsidiaire, dire et juger que les sommes perçues par la société Fra-Ma-Pizz en ce qui concerne le « forfait marketing », les « frais divers » et les « frais de port et de conditionnement » ne revêtent aucune contrepartie et contreviennent aux dispositions de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce ;
A titre subsidiaire, dire et juger que les rémunérations au titre des travaux d'aménagement des points de vente et des prestations de « Client Mystère » sont constitutives d'avantages manifestement disproportionnés au sens de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce ;
En conséquence, en vertu de l'article L. 442-6-III du code de commerce :
- Prononcer la nullité des clauses susvisées pour les contrats annexés ;
- Condamner les sociétés Fra-Ma-Pizz, Domino's Pizza, Food Court Finance, Pizza Center et Somainmag, in solidum, à une amende civile d'un montant de deux millions d'euros ;
- Ordonner aux sociétés Fra-Ma-Pizz, Domino's Pizza, Food Court Finance, Pizza Center et Somainmag, de cesser pour l'avenir les pratiques consistant a` imposer les obligations susvisées aux franchisés ;
- Condamner les sociétés Fra-Ma-Pizz, Domino's Pizza, Food Court Finance, Pizza Center et Somainmag, à restituer aux franchisés les sommes indûment perçues, sur la base du tableau annexé listant les franchisés concernés, à savoir la somme totale de 199.875 euros (123.150 € au titre du forfait marketing et 76.725 € au titre des frais divers et frais de port et de conditionnement) ;
- Condamner les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à publier à leurs frais, sous huit jours à compter du jugement à intervenir, le dispositif dudit arrêt dans Le Monde, Le Figaro, Les Echos et sur les pages d'accueil des sites internet de Pizza Sprint et de Domino's Pizza pour une durée d'un mois ;
- Rejeter l'ensemble des prétentions et demandes des sociétés défenderesses non rejetées par le jugement dont il est fait appel ;
-Condamner les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à payer au Trésor Public la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza aux entiers dépens.
[*]
Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 5 août 2021, les sociétés Domino's Pizza France, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center demandent à la Cour de :
Vu les articles 2, 9, 30 et suivants, 122, 132 et 132 du code de procédure civile,
Vu les articles 1101, 1116, 1134, 1147, 1152, 1178, 1184, 1224, 1304 alinéa 1, 1353 alinéa 1 et 2044 du code civil,
Vu les articles L. 110-4, L. 511-1 et suivants du code de commerce,
Vu les articles L. 442-6-I-1° et L. 442-6-I-2° et L. 442-6, III (ancien) du code de commerce,
Vu la jurisprudence,
Vu les pièces versées aux débats,
- Déclarer les sociétés Domino's Pizza, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France recevables et bien fondées en l'ensemble de leurs demandes, fins, et prétentions,
- Dire et juger irrecevables et mal fondés les appels interjetés par le Ministre de l'Economie et des Finances et les Franchisés,
Ce faisant :
I/ Sur les incidents :
- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes le 22 octobre 2019 en ce qu'il a :
- dit que le tribunal ne pouvait pas statuer sur les demandes relatives à des contrats de franchise non versées aux débats par le Ministre de l'économie et des finances et rejeté les demandes du Ministre de l'économie et des finances portant sur les accords de franchise non-produits, à savoir ceux des sociétés :
1/ DML Creation, (L.)
2/ Redavor, (H.)
3/ Eddy Pizz, (G.)
4/ R2 Restauration, (N.)
5/ Les Arcs, (G.)
6/ Cyrtom, (B.)
7/ Gallic, (G.)
8/ Ylano, (R.)
9/ Aryl, (R.)
10/ LPL Cognac,(P.)
11/ Soyaux, (P.)
12/ Limon Restauration, (L.)
13/ Frima-Invest Restauration, (B.)
14/ FBS Restauration, (B.)
15/ B-Shop,
16/ Henpizz, (C.)
17/ DDT Restauration, (D.)
18/ AJ Restauration, (B.)
19/ Thorigne F. Pizz, (M.)
20/ Dutchesne Distribution,(D.)
21/ Vadom, (H.)
22/ Sabria Allissia, (D.)
23/ MBL Pizz, (L.)
24/ HL Pizz, (L.)
25/ MSC Restauration, (M.)
26/ Tamage, (G.)
27/ 2LPR, (R.)
28/ BS Distribution, (S.)
29/ CDV Restauration, (D.)
30/ JB2R, (B.)
31/ Opium, (Le G.)
32/ LVMA, (M.)
33/ TBR Restauration,(B.)
34/ Dos S. 1, (Dos s.)
35/ FPA Janze, (P.)
36/ MAP Caen, (A.)
37/ Dubon, (D. B.)
38/ Pizzarel, (H.)
39/ S&B Sable, (B. S.)
40/ O. Pizz, (O.)
41/ Pizz AG, (G.)
42/ Les dames, (S.)
43/ M. Pizz, (H. et M.)
dit que le contrat de franchise suivant était conclu avant l'entrée en vigueur de la loi LME et déclaré irrecevables les demandes portant sur ce contrat de franchise : Pizz Le Mans ;
dit que les protocoles transactionnels conclus ont autorité de chose jugée et déclaré irrecevables les demandes du Ministre de l'économie relatives aux sociétés :
* Pizz Center 1 et 2 (J.)
* TSA Pizz Concarneau (A. Sab)
* BMF Pizza (M.)
* Feoni Pizz (S.)
*4U Pizz (R.)
* Paque Restauration (P.)
et que les demandes formulées par certains franchisés intervenus volontairement à titre principal dans le cadre de l'instance inscrite au RG n°2017F00131 étaient déjà formulées dans le cadre d'instances individuelles initiées en parallèle et déclarée irrecevables les demandes formulées par :
* personnes morales :
1) La société BS Distribution ;
2) La société S & B Sable ;
3) La société Dutchesne Distribution ;
4) La société H. Agentré ;
5) La société H.B. ;
6) La société H. Dol ;
7) La société H. Liffre ;
8) La société H. Vitre ;
9) La société P. Noyal ;
10) La société Pizz AG ;
11) La société Pizz'Parth ;
12) La société Renna Pizza ;
13) La société Semper Fi ;
14) La société M. Restauration.
* personnes physiques :
1) Monsieur X. B. ;
2) Monsieur B. S. ;
3) Monsieur S. D. ;
4) Monsieur S. H. ;
5) Madame M. H. ;
6) Monsieur A. G. ;
7) Monsieur H. P. ;
8) Monsieur O. H. ;
9) Madame S. Le G., épouse H. ;
10) Monsieur F. H. ;
11) Madame C. K., épouse H. ;
12) Monsieur F. M. ;
13) Monsieur S. F.
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes du 22 octobre 2019 en ce qu'il a :
dit que l'enquête mise en œuvre par la DGCCRF n'a pas donné prise à une grave violation du principe d'impartialité qui s'impose aux enquêteurs de la DGCCRF, de nature à remettre en cause le principe de l'égalité des armes et débouté les sociétés Domino's Pizza, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France de leurs demandes à ce titre ;
dit que les sociétés Domino's Pizza et Pizza Center France avaient qualité pour défendre et déclaré recevables les demandes formulées par le Ministre de l'économie à leur encontre;
dit que les contrats de franchise suivants étaient conclus après l'entrée en vigueur de la loi LME et déclaré recevables les demandes portant sur ces contrats de franchise :
* Contrat de franchise conclu avec la société JBN Restauration en août 2004 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société P. Restauration le 1er septembre 2004 ;
dit que la prescription n'était pas acquise et déclaré recevables les demandes portant sur les contrats suivants :
* Contrat de franchise conclu avec la société H. (H.) le 27 décembre 2010 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société H. (H.) le 23 juin 2011 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Renna Pizza (Heuloux) le 2 mars 2009 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Pizz'Parth (P.) le 17 janvier 2011 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Semper Fi (H.) le 17 janvier 2011 ;
fait droit à la demande de condamnation solidaire de la société Domino's Pizza ;
Au fond :
- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes le 22 octobre 2019 en ce qu'il a :
estimé que la condition de la preuve (1) d'une soumission ou tentative de soumission et (2) d'un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce n'était pas rapporté et rejeté les demandes du Ministre de l'économie relatives :
* à la clause d'aménagement des points de vente ;
* à la clause d'approvisionnement ;
* à la clause sur le stock minimum ;
* à la prétendue surfacturation des actions commerciales ;
*à la prétendue facturation hors contrat du « forfait marketing », des « frais divers » et des « frais de port et de conditionnement » ;
*aux modalités de contrôle des points de vente (contrôles qualité et hygiène, des tests de « client-mystère » et visites des animateurs réseau) ;
* au prétendu défaut de formation continue des franchisés et à la prétendue'double facturation de la formation initiale ;
estimé que le caractère significatif du déséquilibre n'était pas caractérisé ;
dit que le «forfait marketing», les «frais divers» et les «frais de port et de conditionnement » avaient bien fait l'objet de contreparties réelles et que les frais de formation initiale n'avaient pas été facturés deux fois et débouté le Ministre de l'économie de ses demandes sur le fondement de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce au titre de prétendus avantages sans contrepartie ;
débouté le Ministre de l'économie et des finances de sa demande de condamnation des sociétés Domino's Pizza, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France à payer la somme de 199.875 € au titre de la répétition de l'indu ;
débouté le Ministre de l'économie et des finances de sa demande de condamnation des sociétés Domino's Pizza, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France a` payer une amende de deux millions d'euros ;
débouté de leurs demandes les intervenants volontaires à titre principal, à savoir :
1) Madame L. N. ;
2) Monsieur X. R. ;
3) Monsieur M. P. ;
4) Monsieur P. C. ;
5) Monsieur J.-M. M.-L. ;
6) Monsieur X. P. ;
7) Maître F. B., es-qualités de mandataire judiciaire de la société MJM Pizz ;
8) Monsieur X. P., es-qualités de liquidateur amiable de la société Emeraude Pizza.
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes le 22 octobre 2019 en ce qu'il a :
débouté les sociétés Domino's Pizza, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France de leur demande tendant à voir constater que les demandes du Ministre de l'économie et des finances destinées à (i) obtenir l'annulation des clauses, outre celle relative au forfait marketing et celle relative aux frais divers, de port et de conditionnement, (ii) solliciter la cessation des pratiques pour l'avenir et (iii) à obtenir la publication du jugement à intervenir sont sans objet en ce qui concerne les contrats qui ne sont plus en vigueur ;
débouté les sociétés Domino's Pizza, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France de leur demande tendant à voir constater que l'article L. 442-6-I-2° du Code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief à l'encontre des Défenderesses dans la mesure où ce texte n'observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacré respectivement par (i) la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par (ii) le Pacte civil relatif aux droits politiques ;
débouté les sociétés Domino's Pizza, Fra-Ma-Pizz et Pizza Center France de leur demande tendant à voir constater que les demandes du Ministre de l'économie fondées non pas sur une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société Fra-Ma-Pizz ne peuvent relever de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ;
estimé que la condition de la preuve (1) d'une soumission ou tentative de soumission et (2) d'un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au sens de l'article L. 442-6-I-2° du Code de commerce était rapportée et, en dépit du fait qu'il ait jugé que la « significativité » du déséquilibre n'était pas constituée en l'espèce, a néanmoins prononcé, pour les contrats au sujet desquels il a estimé que la demande du Ministre de l'économie et des finances est recevable :
* la nullité des clauses relatives à l'intuitu personae ;
* la nullité des clauses relatives aux modalités de résiliation et de cessation
ordonné aux sociétés Domino's Pizza et Fra-Ma-Pizz de modifier, en les rédigeant correctement, ces clauses, par avenant pour les contrats existants ou dans le corps du contrat pour les contrats à venir ;
interdit la « pratique » liée à la prétendue fixation des prix de vente des franchisés par le franchiseur et ordonné aux sociétés Domino's Pizza et Fra-Ma-Pizz de permettre aux franchisés, grâce à un outil informatique adapté, de pratiquer leurs propres prix de vente ;
condamné les sociétes Domino's Pizza et Fra-Ma-Pizz aux entiers dépens de l'instance ;
Et statuant à nouveau
- Constater que les franchisés listés infra ont abandonné devant la Cour d'appel de céans toutes les prétentions qu'ils avaient formulées en première instance ;
* La société BS Distribution ;
* La société S & B Sable ;
* Monsieur Xuillaume B. ;
* Monsieur Benjamin S. ;
* La société Dutchesne Distribution ;
* Monsieur D. ;
* La société H. Agentré ;
* La société H.B. ;
* La société H. Dol ;
* La société H. Liffre ;
* La société H. Vitre ;
* La société P. Noyal ;
* La société H. ;
* Monsieur Sébastien H. ;
* Madame Marina H. ;
* La société Pizz AG ;
* Monsieur Alexandre G. ;
* La société Pizz'Parth ;
* Monsieur Hervé P. ;
* La société Renna Pizza ;
* Monsieur Olivier H. ;
* Madame Stéphanie Le G., épouse H. ;
* La société Semper Fi ;
* Monsieur Fabrice H. ;
* Madame Cristèle K., épouse H. ;
* La société M. Restauration ;
* Monsieur Franck M. ;
* Monsieur Sébastien F.
I/ Sur les incidents :
- Constater que l'enquête mise en œuvre par la DGCCRF a été réalisée exclusivement à charge et a donné prise à une grave violation du principe d'impartialité qui s'impose aux enquêteurs de la DGCCRF, de nature à remettre en cause le principe de l'égalité des armes ;
En conséquence, écarter des débats l'intégralité des pièces recueillies ou élaborées par les enquêteurs de la DGCCRF à la faveur de l'enquête qu'ils ont réalisée sans veiller a` respecter le principe d'impartialité qui gouverne leur intervention ;
- Constater que Ministre de l'économie et des finances ne produit pas les contrats de franchise conclus avec les sociétés suivantes :
1/ DML Creation, (L.)
2/ Redavor, (H.)
3/ Eddy Pizz, (G.)
4/ R2 Restauration, (N.)
5/ Les Arcs, (G.)
6/ Cyrtom, (B.)
7/ Gallic, (G.)
8/ Ylano, (R.)
9/ Aryl, (R.)
10/ LPL Cognac,(P.)
11/ Soyaux, (P.)
12/ Limon Restauration, (L.)
13/ Frima-Invest Restauration, (B.)
14/ FBS Restauration, (B.)
15/ B-Shop,
16/ Henpizz, (C.)
17/ DDT Restauration, (D.)
18/ AJ Restauration, (B.)
19/ Thorigne F. Pizz, (M.)
20/ Dutchesne Distribution, (D.)
21/ Vadom, (H.)
22/ Sabria Allissia, (D.)
23/ MLB Pizz, (L.)
24/ HL Pizz, (L.)
25/ MSC Restauration, (M.)
26/ Tamage, (G.)
27/ 2LPR, (R.)
28/ BS Distribution, (S.)
29/ CDV Restauration, (D.)
30/ JB2R, (B.)
31/ Opium, (Le G.)
32/ LVMA, (M.)
33/ TBR Restauration, (B.)
34/ Dos S. 1, (Dos s.)
35/ FPA Janze, (P.)
36/ MAP Caen, (A.)
37/ Dubon, (D. B.)
38/ Pizzarel, (H.)
39/ S&B Sable, (B. S.)
40/ O. Pizz, (O.)
41/ Pizz AG, (G.)
42/ Les dames, (S.)
43/ M. Pizz, (H. et M.)
En conséquence, rejeter les demandes du Ministre de l'économie et des finances au titre des demandes relatives aux contrats de franchise non-produits ;
- Constater que les contrats de franchise conclus avant l'entrée en vigueur de la LME ne peuvent être soumis à l'article L. 442-6 du code de commerce ;
En conséquence, déclarer irrecevables les demandes portant sur les contrats de franchise suivants :
* Contrat de franchise conclu avec la société JBN Restauration en août 2004 ;
*Contrat de franchise conclu avec la société P. Restauration le 1er septembre 2004 ;
*Contrat de franchise conclu avec la société Pizz Le Mans le 6 novembre 2007.
- Constater que Domino's Pizza n'a pas qualité à défendre ;
- Constater que la société Pizza Center France n'a pas qualité à défendre ;
En conséquence, déclarer irrecevables les demandes à l'encontre des sociétés Domino's Pizza et Pizza Center France ;
- Constater que la société Fra-Ma-Pizz a conclu des protocoles transactionnels au sens de l'article 2044 du Code civil avec les franchisés suivants :
* La société Pizza Center 1 et 2'(J.)
* La société TSA Pizz Concarneau'(A. sab)
* La société BMF Pizza (M.)
* La société Feoni Pizz'(S.)
* La société 4UPizz'(R.)
* La société P. Restauration (P.)
En conséquence, constater que le Ministre de l'économie et des finances est irrecevable s'agissant des contrats de franchise suivants :
* Contrat de franchise conclu avec la société Pizza Center 1 et 2 (J.)
* Contrat de franchise conclu avec la société Tsa Pizz Concarneau (A. Sab)
* Contrat de franchise conclu avec la société BMF Pizza (M.)
* Contrat de franchise conclu avec la société Feoni Pizz' (S.)
* Contrat de franchise conclu avec la société 4UPizz (R.)
* Contrat de franchise conclu avec la société P. Restauration (P.)
- Constater que l'action du Ministre de l'économie et des finances est prescrite s'agissant des contrats conclus depuis plus de cinq ans à la date de la délivrance de l'assignation ;
En conséquence, déclarer irrecevables les demandes du Ministre de l'économie et des finances portant sur les contrats de franchise suivants :
* Contrat de franchise conclu avec la société H. (H.) le 27 décembre 2010 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société H. (H.) le 23 juin 2011 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Renna Pizza (H.) le 2 mars 2009 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Pizz'Parth (P.) le 17 janvier 2011 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Semper Fi (H.) le 17 janvier 2011.
- Constater que l'intervention volontaire à titre principal de certains franchisés intervenants volontaires dans le cadre de la première instance est prescrite s'agissant des contrats conclus depuis plus de cinq ans à la date de leur intervention volontaire,
En conséquence, déclarer irrecevables les demandes d'intervention volontaire portant sur les contrats de franchise suivants :
* Contrat de franchise conclu avec la société H. (H.) le27 décembre 2010 ;
* contrat de franchise conclu avec la société H. (H.) le 23 juin 2011 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Renna Pizza (H.) le 2 mars 2009 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Pizz'Parth (P.) le 17 janvier 2011 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Semper Fi (H.) le 17 janvier 2011 ;
*Contrat de franchise conclu avec la société M. Restauration le 1er juillet 2005 et renouvelé le 1er juillet 2010 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société MJM Pizz le 14 février 2013 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Emeraude Pizza le 31 mai 2011 ;
* Contrat de franchise conclu avec la société Pizz Le Mans le 6 novembre 2007.
- Dire et juger que les franchisés listés infra sont dépourvus de qualité à agir.
En conséquence, déclarer irrecevables les prétentions de :
* Monsieur X. B. ;
* Monsieur B. S. ;
* Monsieur O. H. ;
* Madame S. Le G., épouse H. ;
* Monsieur S. F. ;
* Monsieur S. D. ;
* Monsieur S. H. ;
* Madame M. H. ;
* Monsieur A. G. ;
* Monsieur H. P. ;
* Monsieur F. H. ;
* Madame C. K., épouse H. ;
* Monsieur F. M. ;
* La société H. ;
* Monsieur M. P. ;
* Monsieur P. C. ;
* Monsieur J.-M. M.-L. ;
* Monsieur X. P.
Au fond,
II. A/ Sur les demandes du Ministre :
1/ A titre liminaire,
- Constater que les demandes du Ministre de l'économie tendant a` (i) obtenir l'annulation des clauses, outre celle relative au forfait marketing et celle relative aux frais divers, de port et de conditionnement, (ii) solliciter la cessation des pratiques pour l'avenir et (iii) à obtenir la publication du jugement à intervenir sont sans objet en ce qui concerne les contrats qui ne sont plus en vigueur ;
En conséquence, rejeter les demandes formulées par le Ministre de l'économie et des finances à ce titre.
2/ A titre principal,
- Constater que l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief à l'encontre des Défenderesses dans la mesure où ce texte n'observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacré respectivement par (i) la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par (ii) le Pacte civil relatif aux droits politiques ;
En conséquence, rejeter les demandes formulées par le Ministre de l'économie a` ce titre.
3/ A titre subsidiaire,
A titre préalable, si par extraordinaire la Cour d'appel de céans considérait que les sociétés Domino's Pizza et Pizza Center France ont qualité pour défendre dans le cadre de la présente instance, il lui est demandé de :
- Constater que les conditions de mise en cause de la responsabilité de la société mère pour les faits de sa filiale ne sont pas remplies et que le principe de l'autonomie de la personnalité morale fait, en toute hypothèse, obstacle à la mise en cause de la responsabilité de la société mère et /ou d'une autre société du groupe ;
En conséquence, rejeter la demande de condamnation in solidum à l'encontre des sociétés Domino's Pizza et Pizza Center France.
Sur les demandes principales du Ministre de l'économie et des finances sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce (déséquilibre significatif)
- Constater l'absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l'article L. 442-6-I-2° du Code de commerce ;
En conséquence, rejeter les demandes fondées sur L. 442-6-I-2° du code de commerce.
Si la cour d'appel de Paris venait à considérer que la démonstration de l'existence d'une soumission ou tentative de soumission exigée par l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce est caractérisée :
- Constater que les demandes du Ministre de l'économie et des finances fondées non pas sur une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société Fra-Ma-Pizz ne sauraient relever de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ;
- Constater l'absence de déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6-I-2°du code de commerce ;
En conséquence, rejeter l'ensemble des demandes du Ministre de l'économie et des finances fondées sur L. 442-6-I-2° du code de commerce.
Sur les demandes subsidiaires du Ministre de l'économie et des finances sur le fondement de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce (avantage sans contrepartie) :
- Constater l'absence d'avantage sans contrepartie au sens de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce,
En conséquence, rejeter l'ensemble des demandes du Ministre de l'économie et des finances fondées sur L. 442-6, I, 1° du code de commerce.
4/ A titre infiniment subsidiaire :
Si, par extraordinaire, la cour d'appel de céans estimait que les griefs concernant le « forfait marketing », les « frais divers » et les « frais de port et de conditionnement », formulés par le Ministre de l'économie, à titre principal, sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ou, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce, étaient fondés, il lui est demandé de :
- Constater l'absence de justification des sommes réclamées au titre de la répétition de l'indu ;
En conséquence, rejeter les demandes du Ministre de l'économie et des finances au titre de la répétition de l'indu,
Si par extraordinaire la cour d'appel de céans estimait que les griefs formulés par le Ministre de l'économie et des finances, à titre principal, sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ou, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce, étaient fondés et justifiaient le paiement d'une amende par les Concluantes, il lui est demandé de :
- Constater le caractère démesuré du montant de l'amende sollicitée par le Ministre de l'économie et des finances ;
En conséquence, cantonner le montant de l'amende civile à 3.000 euros.
II. B/ Sur les demandes des franchisés :
A titre préalable, si par extraordinaire la cour d'appel de céans considérait que les sociétés Domino's Pizza et Pizza Center France ont qualité pour défendre dans le cadre de la présente instance, il lui est demandé de :
-Constater que les conditions de mise en cause de la responsabilité de la société mère pour les faits de sa filiale ne sont pas remplies et que le principe de l'autonomie de la personne morale fait en toute hypothèse, obstacle à la mise en cause de la responsabilité de la société mère et / ou d'une autre société du groupe ;
En conséquence, débouter les franchisés de leur demande de condamnation in solidum formulée à l'encontre des sociétés Domino's Pizza et Pizza Center France.
1/ Sur le rejet des demandes d'annulation des clauses sur le fondement de l'article L. 442-6-I- 2° du code de commerce (déséquilibre significatif)
Si la cour d'appel de Paris considère que sont recevables les demandes des Franchisés, non signataires des contrats de franchise, alors :
a / A titre principal,
- Constater que l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ne saurait fonder un quelconque grief à l'encontre des concluantes dans la mesure où ce texte n'observe pas le principe de légalité des délits et des peines consacré respectivement par (i) la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par (ii) le Pacte civil relatif aux droits politiques,
En conséquence, débouter les franchisés de leurs demandes formulées à ce titre.
b/ A titre subsidiaire,
Constater l'absence de soumission ou de tentative de soumission au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce,
En conséquence, débouter les franchisés de leurs demandes fondées sur L. 442-6-I-2° du code de commerce.
Si la cour d'appel de Paris venait à considérer que la démonstration de l'existence d'une soumission ou tentative de soumission exigée par l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce est caractérisée :
- Constater que les demandes des Franchisés fondées non pas sur une clause mais sur une pratique qui aurait été instaurée par la société Fra-Ma-Pizz ne sauraient relever de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce,
- Constater l'absence de déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce en ce qui concerne :
* la clause d'aménagement des points de vente ;
* la clause d'approvisionnement ;
* la clause sur le stock minimum ;
* la prétendue surfacturation des actions commerciales ;
* la prétendue facturation hors contrat du « forfait marketing », des « frais divers » et des « frais de port et de conditionnement » ;
* les modalités de contrôle des points de vente (contrôles qualité et hygiène, des tests de « client-mystère » et visites des animateurs réseau) ;
* le prétendu défaut de formation continue des franchisés et la prétendue double facturation de la formation initiale.
En conséquence, débouter les franchisés de l'ensemble de leurs demandes fondées sur L. 442-6-I-2° du code de commerce ;
2/ Sur le rejet de la demande d'annulation des contrats de franchise
a/ A titre principal,
- Constater l'impossibilité pour les franchisés de solliciter l'annulation des contrats de franchise conclus avec la société Fra-Ma-Pizz sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce,
En conséquence, débouter les Franchisés de leur demande d'annulation des contrats de franchise conclus avec la société Fra-Ma-Pizz sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce,
b/ A titre subsidiaire,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour d'appel de céans considérait que les franchisés ont la faculté de solliciter l'annulation des contrats de franchise conclus avec la société Fra-Ma-Pizz sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce :
- Constater que la demande d'annulation des contrats de franchise ne saurait uniquement résulter de la nullité de clauses de ces contrats, si nombreuses soient elles, faute pour les Franchisés de démontrer que ces clauses ont constitué la volonté impulsive et déterminante du consentement des parties à contracter ;
En conséquence, débouter les Franchisés de leur demande d'annulation des contrats de franchise conclus avec la société Fra-Ma-Pizz,
3/ Sur le rejet de la demande de résiliation des contrats de franchise
- Constater que les griefs invoqués par les Franchisés au soutien de leurs demandes de résiliation sont tous postérieurs à la réalisation de l'Opération d'Acquisition et que les demandes de résiliation des Franchisés sont donc mal-fondées dès lors qu'ils avaient quitté le réseau Pizza Sprint au jour de la réalisation de l'Opération d'Acquisition,
En conséquence, rejeter la demande des Franchisés de résiliation de leurs contrats de franchise aux torts exclusifs de la société Fra-Ma-Pizz, à savoir :
* Madame L. N. ;
* Monsieur X. R. ;
* Monsieur M. P. ;
* Monsieur P. C. ;
* Monsieur J.-M. M.-L. ;
* Monsieur X. P. ;
* Société MJM Pizz, représentée par Maître H. es-q. de mandataire liquidateur ;
* Société Emeraude Pizza, représentee par son liquidateur amiable, Monsieur X. P.
4/ A toutes fins utiles sur le rejet des demandes des franchisés sur le fondement de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce (avantage sans contrepartie)
- Constater l'absence d'avantage sans contrepartie au sens de l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce,
En conséquence, débouter les franchisées de l'ensemble de leurs demandes fondées sur L. 442-6-I-1° du code de commerce,
5/ Sur le rejet des demandes financières des franchisés
- A titre préalable, dire et juger que les sociétés Domino's Pizza France et Pizza Center France sont totalement étrangères aux faits qui fondent les griefs formulés par les Franchisés, de sorte qu'aucune demande de condamnation « in solidum » ne peut être formulée à leur encontre ;
En conséquence, rejeter la demande de condamnation in solidum formulée a` l'encontre des sociétés Domino's Pizza France et Pizza Center France,
Dans l'hypothèse extraordinaire où la Cour d'appel de céans prononcerait l'annulation des contrats de franchise, il lui est demandé de :
- Considérer que les sommes dues par la société Fra-Ma-Pizz au titre de la restitution en nature se compensent totalement avec les sommes dues par les Franchisés au titre de la restitution par équivalent,
En conséquence, prononcer la compensation entre les sommes que la société Fra-Ma-Pizz et les franchisés pourraient se devoir en exécution de l'arrêt à intervenir,
En toutes hypothèses :
- Rejeter les demandes financières des Franchisés fondées sur la résiliation des contrats de franchise ;
- Constater que les Franchisés ne justifient pas le fondement de leurs demandes d'indemnisation (nullité ou résiliation), ni même les contrats de franchise auxquels ces demandes se rattachent ;
- Constater que les Franchisés ne rapportent pas la preuve d'une faute de la société Fra-Ma-Pizz, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute invoquée et le préjudice allégué ;
En conséquence, rejeter l'ensemble des demandes financières formulées par les Franchisés ;
5/ En toute hypothèse :
- rejeter l'ensemble des prétentions et demandes du Ministre de l'économie et des Intervenants Volontaires non rejetées par le jugement entrepris (RG n°2017 F 00131),
-'Condamner d'une part, le Ministre de l'économie et des finances et, d'autre part, les Franchisés à verser aux sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza la somme de 50.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner d'une part, le Ministre de l'économie et des finances et, d'autre part, Franchisés aux dépens, dont distraction au profit de la SCP AFG, aux offres de droit.
[*]
Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 25 juin 2021, les sociétés Somainmag et Food Court Finance demandent à la Cour de :
Vu les articles 32 et 122 du CPC,
Vu l'article L. 442-6-I-1° et 2° du Code de commerce et la jurisprudence citée,
- Juger irrecevable l'action du Ministre de l'économie et des finances à l'égard de la société Food Court Finance et à l'égard de la société Somainmag, pour défaut d'intérêt a` agir et de qualité à défendre,
Vu les articles 1355 du Code civil,
Vu les jugements rendus par le tribunal de commerce le 18 décembre 2018,
- Juger irrecevable l'action du Ministre de l'économie et des finances à l'égard de la société Somainmag, s'agissant des demandes indemnitaires émises par ce dernier au profit des sociétés P. Noyal, H. Argentre, H. B., H. Dol, H. Liffre, H. Vitré, Renna Pizz, Pizz AG et Semper Fi ;
Vu les transactions intervenues,
- Juger irrecevable l'action du Ministre de l'Economie et des finances à l'égard de la société Somainmag, s'agissant des demandes indemnitaires émises par ce dernier au profit des sociétés Pizz Center 1 et 2, TSA Pizz Concarneau, BMF Pizza, Feoni Pizz, SARL 4U Pizz et SARL P. Restauration.
En tout état de cause,
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le Ministre de ses demandes à l'encontre des sociétés Food Court Finance et Somainmag,
-Rejeter l'ensemble des demandes du Ministre de l'économie à l'encontre de la société Food Court Finance et de la société Somainmag,
- Rejeter l'ensemble des demandes adverses,
- Condamner le Ministre de l'économie à régler à chacune des sociétés Food Court Finance et Somainmag la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions, déposées et notifiées le 24 juin 2021 la société BS Distribution, la société S & B Sable, M. X. B., M. B. S., La société LMJ Capital anciennement dénommée Dutchesne Distribution, M. Sébastien D., la société H. Argentré, la société H.B., la société H. Dol, la société H. Liffre, la société H. Vitré, la société P. Noyal, la société H., M. Sebastien H. Mme M. H., la société Pizz AG, M. A. G., La société Pizz'Parth, M. H. P., la société Renna Pizza, M. O. H., Mme S. Le G. épouse H., la société Semper Fi, M. F. H., Mme C. K. épouse H., la société M. Restauration, M. F. M., M. S. F., Mme L. N., M. X. R., M. M. P., M. P. C., La société B. MJO, représentée par Maître Frédéric B., intervenant en lieu et place de Maître François H., es-q de mandataire ad'hoc de la société MJM Pizz, M. Jean-Michel M.-L., M. X. P. ès qualités de liquidateur amiable de la société Emeraude Pizza, M. X. P., demandent à la Cour de :
- Déclarer recevable et bien fondé l'appel du Ministre de l'économie ;
Y faire droit en tous points ;
- Déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire principale des concluants ;
- Débouter les sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz, Domino's Pizza France, Food Court Finances et Somainmag de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
En conséquence :
- Prononcer l'annulation de chacune des clauses affectées d'un déséquilibre significatif, au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce ;
- Constater que l'annulation de l'ensemble de ces clauses vident les contrats de leur substance et, en conséquence, annuler les contrats de franchise,
- A défaut, prononcer leur résiliation aux torts exclusifs de la société Fra-Ma-Pizz ;
En tout état de cause,
A) S'agissant des intervenants volontaires à titre accessoire :
La société BS Distribution ;
La société S & B Sable ;
Monsieur X. B. ;
Monsieur B. S. ;
La société Dutchesne Distribution ;
Monsieur S. D. ;
La société H. Agentré ;
La société H.B. ;
La société H. Dol ;
La société H. Liffre ;
La société H. Vitré ;
La société P. Noyal ;
La société H. ;
Monsieur S. H. ;
Madame M. H. ;
La société Pizz AG ;
Monsieur A. G. ;
La société Pizz'Parth ;
Monsieur H. P. ;
La société Renna Pizza ;
Monsieur O. H. ;
Madame S. Le G., épouse H. ;
La société Semper Fi ;
Monsieur F. H. ;
Madame C. K., épouse H. ;
La société M. Restauration ;
Monsieur F. M. ;
Monsieur S/ F.
Leur décerner acte de leur intervention volontaire accessoire pour soutenir les demandes du Ministre de l'Economie ;
B) S'agissant des intervenants volontaires à titre principal :
- Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a jugé recevable leurs interventions ;
- L'infirmer en ce qu'elle les a déclarées mal fondées ;
Statuant a` nouveau,
29°) Concernant Madame N. :
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à verser à Madame N. :
a) 'Au titre de la perte des apports la somme de 4.120,14 €,
b) 'Au titre de la perte de revenus la somme 50.000 €,
c) 'Au titre du préjudice moral la somme de 30.000 €,
30°) Concernant Monsieur R.
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à verser à Monsieur R. :
a) Au titre de la perte de revenus la somme de 60.000 €,
b) Au titre du préjudice moral la somme de 30.000 €,
31°) Concernant Monsieur P.
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à verser à M Monsieur P. :
a) Au titre de la perte des apports la somme de 60.000 €,
b) Au titre de la perte de revenus la somme de 10.654 €,
c) Au titre des engagements de caution, la somme de 27.174,64 €,
d) Au titre du préjudice moral la somme de 30.000 €,
32°) Concernant Monsieur C.
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à verser à Monsieur C. :
a) Au titre de la perte des apports la somme 15.000 €,
b) Au titre de la perte de revenus la somme 22.000 €,
c) Au titre des engagements de caution, la somme de 26.107,48 €,
d) Au titre du préjudice moral la somme de 30.000 €,
33°) Concernant la société B. MJO, représentée par Maître B. es-q. de mandataire ad'hoc de la société MJM PIZZ
a) Au titre de la restitution du droit d'entrée
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 10.000 €,
b) Au titre de la restitution des redevances
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 6.944 €,
c) Au titre de pertes de marge sur les approvisionnements
Condamner in solidum les sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 16.665 €,
d) Au titre des prestations de marketing
Condamner in solidum les sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 2.250 €,
e) Au titre de la perte de la valeur du fonds
Condamner in solidum les sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 69.712 €,
34°) Concernant Monsieur M.
a) Au titre de la perte des apports
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 8.000 €,
b) Au titre de la perte de revenus
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 40.000 €,
c) Au titre des engagements de caution
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 67.087,87 € outre les intérêts, outre 500 € au titre des frais de procédure,
d) Au titre du préjudice moral
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 30.000 €,
35°) Concernant la société Emeraude Pizza, représentée par Monsieur Xuillaume P. en qualité de liquidateur amiable :
a) Au titre de la restitution du droit d'entrée
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 10.000 €,
b) Au titre de la restitution des redevances
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 15.034,91 €
c) Au titre des travaux surpayés
Condamner in solidum les sociétés Somainmag et Fra-Ma-Pizz à lui verser la somme de 4.467,75 €,
d) Au titre de pertes de marge sur les approvisionnements
Condamner in solidum les sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 84.345,69 €,
e) Au titre des prestations de marketing
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser les sommes de 3.600 € et 5.827,10 €,
f) Au titre de la perte de la valeur du fonds
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 118.286 €,
36°) Concernant M. Xuillaume P.
a) Au titre de la perte des apports
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 4.370,40 €,
b) Au titre de la perte de revenus
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui verser la somme de 48.000 €,
c) Au titre du préjudice moral
Condamner in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza a` lui verser la somme de 30.000 €,
- Ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal par années entières conformément à l'article 1343-2 du code civil, à dater de l'introduction des demandes des intervenants volontaires par voie de conclusions ;
- Condamner in solidum les sociétés Pizza Center France, Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizzaà verser à chacun des concluants la somme de 50.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Les condamner in solidum aux dépens, parmi lesquels seront compris l'ensemble des frais d'exécution (y compris les émoluments de l'huissier en application de l'article A. 444-32 du Code de commerce).
* * *
La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Le principe d'impartialité et l'enquête de la DGCCRF :
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center France et Domino's Pizza estiment que l'enquête mise en œuvre par la DGCCRF a été réalisée exclusivement à charge et a violé le principe d'impartialité qui s'impose à la DGCCRF et d'égalité des armes. Elles expliquent qu'une réunion entre la DIRECCTE Bretagne et certains franchisés du réseau Pizza Sprint a eu lieu le 25 avril 2016. Or, elles n'ont jamais été informées de cette réunion et aucun procès-verbal de celle-ci a été établi. Ainsi, elles considèrent que cette réunion a eu pour seul objectif de définir une stratégie commune et à maximiser les chances de succès de l'action de chacun des participants à la réunion. Elles en déduisent que les pièces produites aux débats par le ministre de l'économie doivent être intégralement écartées.
Le ministre de l'économie confirme l'existence de cette réunion et a admis qu'aucun procès-verbal n'a été dressé. Cependant, il considère, au regard de l'article L. 450-2 du code de commerce, que seuls les actes d'enquête donnent lieu à l'établissement d'un procès-verbal ou d'un rapport. Il relève que la réunion du 25 avril 2016 n'est pas un acte d'enquête car elle a eu pour objectif d'informer les franchisés sur le déroulement de la procédure après l'enquête menée par les agents de la DIRECCTE Bretagne et la procédure à suivre pour éventuellement intervenir volontairement dans l'action judiciaire engagée par le Ministre de l'économie. Il soutient que son assignation repose sur une enquête issue de la confrontation des éléments recueillis auprès des franchisés et des différents représentants du réseau Pizza Sprint. Ainsi, l'instruction de l'enquête a bien été menée à charge et à décharge. Il ajoute que c'est l'impartialité du juge (et non des parties) qui est la garantie du procès équitable.
Sur ce,
Pour permettre la révélation des pratiques restrictives de concurrence prohibées par le chapitre II, titre IV, du livre IV du code de commerce, des enquêtes peuvent être diligentées auprès des professionnels. Les articles L. 450-1 à L. 450-8 du code de commerce désignent les personnes compétentes pour enquêter et l'étendue de leur pouvoir.
Dans ce cadre, les sociétés intimées n'explicitent pas sur quel fondement les agents de la DGCCRF seraient tenus dans l'exercice de leur pouvoir d'enquête au principe d'impartialité relatif au procès équitable.
Il ressort au contraire du déroulement de l'enquête sur laquelle repose l'assignation du ministre de l'économie, partie à l'instance, qu'au cours de celle-ci a eu lieu la confrontation d'éléments recueillis tant auprès des franchisés qu'auprès des différents représentants du réseau Pizza Sprint sur la période de 2013 à 2016.
Le ministre de l'économie fait justement valoir que la réunion du 25 avril 2016 avait pour objet l'information sur le déroulement de la procédure, et non un constat ou un contrôle, de sorte qu'elle n'avait pas à faire l'objet d'un procès-verbal en application des articles L.450-1 et R.450-1 du code de commerce. En outre, il ne ressort pas des explications des sociétés intimées ou de leurs pièces versées aux débat (notamment un courrier du 5 juillet 2016 - pièce n°4.10 et 5.6) d'éléments permettant de relever une déloyauté de la part des services du ministre de l'économie dans l'administration de la preuve par l'organisation de cette réunion, sachant que les parties au contrat doivent être informées lorsque l'action engagée par l'autorité publique tend à la nullité des conventions illicites, à la restitution des sommes indûment perçues et à la réparation des préjudices que des pratiques restrictives de concurrence ont causés (Conseil constitutionnel, décision n°2011-126 QPC du 13 mai 2011).
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés intimées de leur demande d'écarter des débats les pièces produites par le ministre de l'économie.
Sur les demandes du ministre de l'économie relatives aux contrats de franchise non produits aux débats :
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center France et Domino's Pizza invoquent l'article 1353 alinéa 1er du code civil et les articles 9, 132 et 133 du code de procédure civile et rappellent que c'est au Ministre d'apporter la preuve de ses prétentions. Elles relèvent le fait que celui-ci ne produit pas aux débats quarante-sept des soixante-sept contrats de franchise pour lesquels il allègue qu'ils comportent des stipulations présentant un déséquilibre significatif. Elles estiment que les éléments rapportés par le ministre pour affirmer que les soixante-sept contrats sont identiques ne constituent pas des éléments objectifs, probants et pertinents puisque ce sont uniquement des déclarations émanant pour la plupart des sociétés franchisées et une liste communiquée aux enquêteurs de la DGCCRF par un représentant du réseau Pizza Sprint. Elles ajoutent que le contenu des contrats de franchise a été modifié pour se conformer aux évolutions législatives et aux modifications qui sont intervenues dans le réseau Pizza Sprint. Elles demandent que le jugement soit confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes du ministre de l'économie portant sur les contrats de franchise non produits aux débats.
Le ministre de l'économie admet qu'il ne produit que vingt contrats de franchise sur les soixante-sept sur lesquels il fonde sa demande. Cependant, il fait remarquer que, pour affirmer que chacun des soixante-sept contrats de franchise comportent des clauses créant un déséquilibre significatif, il s'appuie non pas sur la seule analyse des clauses contractuelles des contrats de franchise mais des analyses croisées de nombreuses pièces et déclarations. Il précise que c'est la mise en œuvre des clauses du contrat qui est contestée car elle se traduit par un déséquilibre significatif dans les droits et les obligations des parties. Il souligne que la société Fra-Ma-Pizz ne fournit pas aux débats des exemples de contrats ne comportant pas les clauses litigieuses. Aussi, il en déduit que ces contrats non produits ont été rédigés de la même façon et comportent chacun des clauses créant un déséquilibre significatif.
Sur ce,
Le ministre de l'économie ayant introduit la présente action, a la charge de la preuve du déséquilibre significatif.
Il produit aux débats les contrats de franchise suivants :
- P. restauration (M. P.) du 1er septembre 2004 et 13 mars 2013 (pièce n° 12 et 104)
- JBN Restauration (M. N.) août 2004 (pièce 14 et 105)
- Pizza Center (M. J.) du 14 novembre 2006 et 10 mai 2012 (pièce n°19 et 103)
- H. Argentré du 23 juin 2011 (pièce n° 108)
- H. B. du 12 juillet 2012 (pièce n°109)
- H. Noyal du 23 janvier 2014 (pièce n° 110)
- H. Vitré du 27 décembre 2010 (pièce n°111)
- H. Liffre du 31 mai 2013 (pièce n°112)
- H. Dol de Bretagne (pièce n° 113)
-TSA Pizz Concarneau (M. A. Saib) du 27 février 2009 (pièce n° 98)
- Semper Fi (M. H.) du 17 janvier 2011 (pièce n°99)
- BMF Pizza (M. M.) du 1er avril 2010 (pièce n°100)
- 4 UPIZZ (M. R.) du 22 février 2013 (pièce n°101)
- Renna Pizza (M. H.) du 2 mars 2009 (pièce n°102)
- Feoni Pizz (M. S.) du 1er juin 2011 (pièce n°106)
- Jeremy G. (M. X.) du 7 avril 2013 (pièce n°107)
- Pizz Parth (M. P.) du 1er octobre 2010 (pièce n° 114)
- Pizzayd'liz (M. A.) du 18 septembre 2015(pièce n°115)
Les intervenants volontaires ont produit les contrats suivants :
- Mme N. du 25 juillet 2015
- M. R. du 11 juillet 2014
- AnKenez Pizz (M. P.) du 9 octobre 2012
- Le Mans Pizz (Mme C.) du 6 novembre 2007
- MJM Pizz (M. M.) du 14 février 2013
- Emeraude Pizza (M. P.) du 31 mai 2011
Il n'est par ailleurs pas contesté que les contrats suivants ont été produits :
- Dutchesne Distribution (M. D.)
- BS Distribution (M. S.)
- S&B Sable (B. S.)
- Pizz AG (M. X.)
Dès lors, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes du ministre sur les contrats de franchise :
o DML CREATION,
o REDAVOR,
o EDDY PIZZ,
o R2 RESTAURATION,
o LES ARCS,
o CYRTOM,
o GALLIC,
o YLANO,
o ARYL,
o LPL COGNAC,
o SOYAUX
o LIMON RESTAURATION,
o FRIMA ' INVEST RESTAURATION,
o FBS RESTAURATION,
o B-SHOP,
o HENPIZZ,
o DDT RESTAURATION,
o AJ RESTAURATION,
o THORIGNE F. PIZZ,
o VADOM,
o SABRIA ALLISSIA,
o MLB PIZZ,
o HL PIZZ,
o MSC RESTAURATION,
o TAMAGE,
o 2LPR,
o CDV RESTAURATION,
o JB2R,
o OPIUM,
o LVMA,
o TBR RESTAURATION,
o DOS S. 1,
o FPA JANZE,
o MAP CAEN,
o DUBON,
o PIZZAREL,
o O. PIZZ,
o LES DAMES,
o M. PIZZ.
Et d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes du ministre concernant les contrats
- Dutchesne Distribution (M. D.)
- BS Distribution (M. S.)
- S&B Sable (B. S.)
- Pizz AG (M. X.)
' Sur la qualité à défendre des sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center, Domino's Pizza, Somainmag et Food Court Finance
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center France et Domino's Pizza se fondent sur les articles 32 et 122 du code de procédure civile pour soutenir que les prétentions du ministre de l'économie ne peuvent être formulées qu'à l'encontre de la personne morale qui a conçu la clause litigieuse, l'a insérée dans un contrat, a négocié celui-ci, est partie à celui-ci et qui, par son comportement, peut se voir imputer une violation de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce notamment par l'action ayant consisté à « soumettre » ou « tenter de soumettre » la victime à des obligations génératrices d'un « déséquilibre significatif ». Or, elles relèvent que les contrats de franchise ont été rédigés, négociés et conclus uniquement par et avec la société Fra-Ma-Pizz et non pas par ou avec les sociétés Pizza Center et Domino's Pizza. Elles rappellent que le principe d'autonomie des personnes morales membres d'un même groupe ne cède que s'il est démontré qu'il n'existe en réalité qu'une seule personne morale et/ou une confusion des patrimoines. Elles en déduisent que les actions du ministre contre les sociétés Pizza Center et Domino's Pizza sont irrecevables.
Les sociétés Somainmag et Food Court Finance' pour contester leur qualité à défendre et la recevabilité des demandes du ministre se fondent également sur les articles 32 et 122 du code de procédure civile. Elles font valoir que l'article L. 442-6 du code de commerce protège un « partenaire commercial » d'un certain nombre de pratiques. Pour elles, cette notion de partenariat doit être interprétée strictement : le contrat doit s'inscrire dans la durée et la relation commerciale doit être directe. Or, les deux sociétés n'ont pas participé aux relations commerciales car elles n'ont pas piloté, négocié, conclu ou exécuté les contrats litigieux. Au soutien de leurs prétentions, elles rappellent les principes d'autonomie des personnes morales et d'effet relatif des conventions.
Sur ce,
Selon l'article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.
L'ensemble des sociétés intimées ne soulèvent aucun moyen relatif à leur droit d'agir à l'encontre des prétentions émises par le ministre de l'économie à leur égard sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce interdisant certaines pratiques restrictives de concurrence, c'est à dire à leur qualité à se défendre à une telle action. En effet les moyens invoqués par les sociétés intimées ne tendent en réalité qu'à critiquer le bien-fondé de l'action du ministre de l'économie, à savoir si les éléments constitutifs des pratiques restrictives alléguées sont caractérisés à leur égard.
Dès lors, la fin de non-recevoir tirée de leur défaut de qualité à défendre des sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center, Domino's Pizza, Somainmag et Food Court Finance est rejetée.
Le jugement sera confirmé sur ce point sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action du ministre de l'économie à l'égard de la société Food Court Finance pour défaut de qualité à défendre.
Sur la prescription :
* Concernant la fin de non-recevoir soulevée par les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center et Domino's Pizza, tirée de la prescription de l'action du ministre concernant cinq contrats de franchise conclus avec les sociétés H. le 27 septembre 2010 et 23 juin 2011, Renna Pizza le 2 mars 2009, Pizz Parth le 17 janvier 2011 et Semper Fi le 17 janvier 2011,
Sur ce point, le jugement énonce que l'action du ministre est de nature civile et quasi-délictuelle, en sorte que sont applicables les règles de droit commun issues de l'article 2224 du code civil, à savoir que le délai de prescription est de cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer en l'occurrence à la date des premiers actes d'enquête. Les premiers juges ont retenu que c'est au moment de l'analyse du contrat de franchise communiqué par la société Fra-Ma-Pizz et les informations relatives au fonctionnement du réseau recueillis lors de l'intervention du 14 mars 2013 qui ont permis à la Dirrecte Bretagne de mettre en évidence des clauses susceptibles de créer un déséquilibre significatif dans les relations entre le franchiseur et les franchisés que le délai de prescription prend effet. Ils en ont déduit que le point de départ du délai de prescription applicable au ministre était le 14 mars 2013 et rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center et Domino's Pizza, pour solliciter la réformation du jugement sur ce point, exposent qu'en application de l'article L. 442-6-III du code de commerce dans sa version applicable au litige, le ministre peut demander quatre type de mesures, à savoir la cessation des pratiques consistant pour l'une des parties à « soumettre ou tenter de soumettre » son partenaire commercial à une obligation génératrice d'un déséquilibre significatif, l'annulation de la clause ou du contrat illicite, la répétition de l'indu et le prononcé d'une amende civile. Elles relèvent que ces sanctions reflètent la double finalité de l'action du ministre de l'économie qui est de préserver l'intérêt de la « victime » et de sauvegarder l'ordre public économique et que la dualité de la finalité de l'action du ministre de l'économie implique logiquement d'opérer une distinction entre les différentes sanctions possibles, afin de déterminer précisément le régime de la prescription applicable à son action, étant observé que les textes sont muets au sujet de la prescription des actions fondées sur l'article L. 442-6, I du code de commerce, de sorte qu'il est nécessaire de se référer aux solutions issues du droit commun. Aussi, elles estiment que lorsque le ministre de l'économie agit dans l'intérêt de la victime son action doit en toute logique être enserrée dans les mêmes limites que celles de la prétendue victime, sinon le ministre détiendrait plus de droits que cette dernière. A cet égard, en se référant à l'article 1304 alinéa 1 du code civil et à certaines décisions de la Cour de céans (CA Paris, 3 avril 2019, RG 16/16071 et 11 mars 2021, RG n°18/08014), elles soutiennent que le point de départ de la prescription de 5 ans de l'action du ministre en annulation d'une clause et la restitution de l'indu initiées sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2° est fixée au jour de la conclusion du contrat. Elles soutiennent également qu'admettre comme point de départ de la prescription le jour où débute l'enquête de la DGCCRF, revient en pratique à rendre l'action du ministre imprescriptible et confère à ce dernier une marge de man'uvre illimitée.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center et Domino's Pizza procèdent en outre à un raisonnement par analogie avec la matière pénale, compte tenu de la nature répressive du texte d'interdiction, matière dans laquelle le point de départ de la prescription de l'action publique est fixé au jour où l'infraction est constituée soit la conclusion du contrat selon elles. Elles estiment que le tribunal de commerce de Rennes extrapole la portée de l'expression « cessation des pratiques » mentionnée à l'article L. 442-6, III du code de commerce et qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération les « pratiques » postérieures à la conclusion du contrat, puisque l'infraction édictée par l'article L. 442-6-I-2° constitue une infraction instantanée, en ce que l'acte de soumission, élément matériel de l'infraction, se consomme par la conclusion du contrat.
Le ministre de l'économie réplique que son action n'est pas une action de nature pénale. S'appuyant sur une décision du Conseil constitutionnel du 13 mai 2011 et de la Cour Européenne des droits de l'Homme du 17 janvier 2012, il explique que son action est une action autonome de l'action des parties et non pas une action en substitution puisqu'elle répond à une finalité propre de défense de l'intérêt économique et de l'ordre public économique, et non à un objectif de défense des intérêts privés. Enfin, comme il considère que son action est de nature quasi délictuelle, la prescription applicable en matière contractuelle ne peut lui être opposée. Il se fonde sur l'article 2224 du code civil pour en déduire que la prescription applicable à l'action du ministre court à partir des premiers actes d'enquête et non à partir de la date à laquelle les contrats ont été conclus.
Sur ce,
L'article L. 442-6, III dans sa version en vigueur antérieure à l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 applicable au litige, dispose que :
III. - L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministre chargé de l'économie ou par le président de l'Autorité de la concurrence lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée au présent article.
Lors de cette action, le ministre chargé de l'économie et le ministère public peuvent demander à la juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Ils peuvent aussi, pour toutes ces pratiques, faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites et demander la répétition de l'indu. Ils peuvent également demander le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut être supérieur à cinq millions d'euros. Toutefois, cette amende peut être portée au triple du montant des sommes indûment versées ou, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 5 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France par l'auteur des pratiques lors du dernier exercice clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques mentionnées au présent article ont été mises en 'uvre. La réparation des préjudices subis peut également être demandée. Dans tous les cas, il appartient au prestataire de services, au producteur, au commerçant, à l'industriel ou à la personne immatriculée au répertoire des métiers qui se prétend libéré de justifier du fait qui a produit l'extinction de son obligation (...).
La Cour observe que l'action du ministre chargé de l'économie tendant à saisir la juridiction commerciale de pratiques restrictives de concurrence n'est pas soumise à un régime de prescription spécial, tel que celui prévu à l'article L. 462-7 du code de commerce pour la saisine de l'autorité de la concurrence de pratiques anticoncurrentielles. Il y a donc lieu d'appliquer les règles de droit commun.
S'agissant de la durée de la prescription, celle-ci est fixée à cinq années par l'article L.110-4 du code de commerce.
S'agissant de la détermination du point de départ du délai de prescription, il y a lieu d'appliquer l'article 2224 du code civil qui dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Pour se faire, il convient de se référer, comme l'y invitent les parties, à la nature et l'objet de l'action du ministre chargé de l'économie.
L'article précité habilite le ministre chargé de l'économie à saisir le juge compétent en vue de faire sanctionner les pratiques restrictives de concurrence par divers procédés. L'action du ministre chargé de l'économie vise en premier lieu à faire constater l'illicéité d'une pratique déterminée par application des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce ainsi qu'en demander la cessation. Elle a ainsi un effet d'exemplarité et d'information des partenaires, mais elle permet aussi de préciser les règles de bonnes relations commerciales entre partenaires économiques. En deuxième lieu, elle a une fonction répressive en ce qu'elle permet le prononcé d'une amende civile. En troisième lieu, elle tend à faire constater la nullité des clauses illicites ou des contrats illicites et d'en anéantir les effets entre les partenaires commerciaux en prévoyant la faculté de demander la répétition de l'indu au profit du partenaire lésé.
Si l'action du ministre permet ainsi de faire sanctionner les pratiques restrictives de concurrence par des demandes ayant des natures différentes, il a été reconnu à diverses reprises que cette action du ministre au titre d'une mission de gardien de l'ordre public économique pour protéger le fonctionnement du marché et de la concurrence, est autonome. Aussi, le ministre n'agissant ni comme partie au contrat ni sur le fondement de celui-ci, son action autonome ne se substitue pas à celles des partenaires victimes et revêt la nature d'une action en responsabilité extra-contractuelle (Com. 8 juillet 2008, n° 07-16.761 ; Bull IV n°143 ; CC décision 13 mai 2011, n° 2011-126 QPC ; Com. 18 octobre 2011, n°10-28.005 ; CEDH, Galec c/France du 17 janvier 2012 ; Civ. 1ère 6 juillet 2016, n°15-21.811).
Au regard de l'ensemble de ces éléments, et contrairement à ce qui est avancé par les sociétés intimées, la Cour retient qu'il y a lieu d'appliquer les dispositions de l'article 2224 du code civil pour déterminer le point de départ de la prescription suivant une appréciation unique quelque soit les demandes du ministre au soutien de son action.
Aussi, la prescription de l'action du ministre a pour point de départ le jour où celui-ci est en mesure de connaître les faits lui permettant de caractériser une pratique restrictive et lui donnant le droit d'agir devant la juridiction compétente.
Il ressort des explications et des pièces versées aux débats par le ministre de l'économie que les éléments ayant mis en évidence ce qu'il qualifie des dysfonctionnements au sein du réseau Pizza Sprint, ont été recueillis en deux temps :
- d'abord, dans le cadre d'une enquête relative aux délais de paiement en 2013, laquelle avait déjà permis de recueillir des éléments relatifs au fonctionnement du réseau PIZZA SPRINT (procès-verbal de déclaration de Mme. R., directrice administrative et financière de FRA MA PIZZ du 14 mars 2013, pièce n° 10),
- et ensuite dans le cadre d'une enquête nationale sur les pratiques dans le secteur de la franchise de la restauration rapide et à thème, plus particulièrement sur les relations entre franchiseurs et franchisés, en 2014.
Dès lors, en introduisant son action devant le tribunal de commerce par assignation des 9, 13 et 15 mars 2017, la prescription n'est pas acquise concernant les contrats de franchise précités.
Dès lors le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par les sociétés Fra-MA- PIZZ, Domino's Pizza France et Pizza Center tirée de la prescription de l'action du ministre de l'économie concernant les contrats H., Renna Pizza, Pizz Parth et Semper Fi,
* De l'action des intervenants volontaires H., Renna Pizza, Pizz 'Parth, Semper Fi, M. restauration,
La Cour constate que ces sociétés ne formulent plus de prétentions à hauteur d'appel telles que présentées en première instance autre que leur intervention accessoire à l'action du ministre.
Sur la recevabilité des demandes du ministre de l'économie relatives aux contrats de franchise des sociétés Pizz Center 1et 2, TSA Pizz, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4UPIZZ, P. Restauration ayant signé un protocole transactionnel :
Le tribunal a déclaré irrecevables les demandes du ministre de l'économie relatives aux sociétés précitées ayant mis un terme aux contrats qui les liaient avec la société Fra-Ma-Pizz en concluant des protocoles transactionnels aux motifs que le ministre de l'économie ne peut demander une amende civile ou la répétition de l'indu pour des contrats devenus inexistants, ni même demander la cessation de pratiques ou l'illicéité de clauses qui n'existent plus.
Le ministre de l'économie, à l'appui de sa demande de réformation du jugement sur ce point, fait valoir que l'application de la « jurisprudence Ikea » invoquée par les sociétés intimées (Com. 16 décembre 2014, n° 13-21.363 ; Bull IV n°186 ; CA Paris, 15 février 2017, RG n°15/00228) et rappelant que les parties à un contrat peuvent transiger sur l'indemnisation du préjudice subi par la suite de la brutalité d'une rupture de la relation commerciales à condition que cette transaction contienne des concessions réciproques qui ne présentent pas de caractère dérisoire, est limitée aux dispositions de l'article L. 442-6-I-5° soit à la pratique de la rupture brutale de la relation commerciale et non aux autres pratiques invoquées en l'espèce. En toute hypothèse, le ministre de l'économie souligne que son action est autonome et quasi-délictuelle, et que les protocoles transactionnels, par ailleurs incomplets, ne peuvent effacer ou annihiler les pratiques commerciales constatées lors des investigations. Il ajoute que l'article 2052 du code civil, dans sa dernière rédaction, fait seulement interdiction aux parties à la transaction d'intenter une nouvelle action ayant le même objet, et relève qu'il n'était pas partie à ces transactions et bénéficie d'une action autonome. Les sociétés intimées refusant de verser les protocoles aux débats, le ministre estime que les concessions réciproques ne peuvent être évaluées.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center France et Domino's Pizza ainsi que les sociétés Somainmag et Food Court Finance répliquent en se référant à la jurisprudence précitée qui, selon elles, interprète de manière générale la portée de l'article L. 442-6-III, que les accords transactionnels sont bien opposables au ministre de l'économie. Elles expliquent que, si le ministre était autorisé à solliciter la répétition d'une somme alors même que le franchisé ne dispose plus de créance du fait de la transaction, le résultat de l'action du ministre serait de nature à susciter l'enrichissement des franchisés. Tout en invoquant également l'article 2052 dans ses différentes versions, elles estiment que l'action du ministre est paralysée par l'existence d'une transaction conclue par la « victime » puisque le ministre ne peut revendiquer plus de droits que la « victime » elle-même. Elles précisent que la validité des protocoles transactionnels ne peut être contestée dès lors qu'ils ont été homologués. De l'ensemble de ces éléments, elles en déduisent que les demandes du ministre au titre des contrats conclus avec des franchisés qui ont transigé doivent être frappées d'irrecevabilité par application de l'article 2052 du code civile et l'article 122 du code de procédure civile.
Sur ce,
L'article 2052, dans sa version postérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 applicable au présent litige, dispose que « la transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet ».
A l'appui de leur fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la transaction, les sociétés intimées Fra-Ma-Pizz et Pizza Center versent aux débats (pièces n°6.1 à 6.6) des extraits des « protocoles transactionnels » conclus avec les sociétés Pizz Center 1et 2, TSA Pizz, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4UPIZZ, P. Restauration fin 2016 et les jugements d'homologation de ces protocoles.
Ces protocoles ont été conclus dans le cadre de litiges individuels intentés devant le tribunal de commerce de Rennes par certaines parties aux contrats de franchise à l'occasion desquels le ministre de l'économie prétend avoir constaté des pratiques illicites au sens des dispositions de l'article L. 442-6-I, 1° et 2°,
Les extraits de ces protocoles ne permettent pas de connaître la teneur des concessions qualifiées de réciproques entre les parties à ces protocoles ni précisément leur objet. Il en ressort néanmoins que suivant une clause similaire dans chacun des protocoles produits, il est stipulé que le franchisé s'engage notamment à « renoncer initier ou à s'associer à toute autre action ou instance, et notamment à se rapprocher du Ministère de l'économie ou de toute autre administration concernant, la formation, la conclusion, l'interprétation, l'exécution des relations commerciales entre les parties (notamment des relations de franchise et d'approvisionnement), ou encore à s'associer directement ou indirectement à toute action ou instance Ministère de l'économie à l'encontre de FRA-MA-PIZZ et/ou LOGIS Pizza ».
Si les sociétés franchisées ayant conclu ces protocoles d'accord, à savoir les sociétés Pizz Center 1et 2, TSA Pizz, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4UPIZZ, P. Restauration, ne sont certes pas parties intervenantes dans la présente instance initiée par le ministre de l'économie, ce dernier non seulement n'est pas partie à ces protocoles mais son action, comme rappelé aux motifs qui précèdent, est autonome. En toute hypothèse, les pièces versées aux débats ne permettent pas de vérifier les chefs transigés et donc l'identité d'objet avec l'action en justice du ministre.
Dès lors, tout au plus les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center pourraient se prévaloir des sommes versées dans le cadre de ces protocoles d'accords pour se libérer de leurs obligations ayant le même objet que les prétentions du ministre de l'économie au titre de l'indemnisation du préjudice subi ou de la répétition de l'indu.
Dès lors, la fin de non-recevoir tirée des dispositions des articles 2052 du code civil et 122 du code de procédure civile soulevée par les sociétés intimées sera rejetée.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable les demandes du ministre de l'économie relatives aux sociétés Pizz Center 1et 2, TSA Pizz, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4UPIZZ, P. Restauration.
Concernant les franchisés P. Noyal, H. Argentré, H. B., H. Dol, H. Liffre, H. Vitre, Renna Pizza, Pizz AG et Semper Fi, les sociétés Somainmag et Food Court Finance'expliquent que le tribunal de commerce de Rennes, dans le cadre de procédures individuelles concernant ces neuf franchisés, a rendu des jugements le 18 décembre 2018 pour lesquels les franchisés ont choisi de ne pas interjeter appel, de sorte que ces jugements ont acquis l'autorité de la chose jugée.
Les sociétés Somainmag et Food Court Finance rappellent que selon l'article 1355 du Code civil cette autorité de la chose jugée s'impose également au ministre qui ne peut faire valoir plus de droits que les franchisés eux-mêmes.
Cependant, non seulement le ministre n'était pas partie aux instances précitées mais comme rappelé ci-dessus, son action est autonome, en sorte que celle-ci est recevable à l'égard des franchisés précités.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il n'a pas déclaré irrecevables les demandes du ministre à l'égard de la société Somainmag concernant les sociétés précitées.
Sur la recevabilité des demandes du ministre de l'économie relatives aux contrats de franchise conclus avec les sociétés P. restauration, JBN N. et Pizz Le Mans avant l'entrée en vigueur de la loi LME :
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizz Center France et Domino's Pizza relèvent que le ministre de l'économie demande l'application de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce à des contrats de franchise conclus avant l'entrée en vigueur de ce texte, laquelle est intervenue le 1er janvier 2009. Elles considèrent, en s'appuyant sur les décisions du Conseil constitutionnel des 13 janvier 2011 et 30 novembre 2018, que ce texte est de nature répressive et qu'ainsi les principes fondamentaux de la matière pénale, tels que le principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère s'appliquent. Elles ajoutent que l'article 2 du code civil, dispose que la loi n'a pas d'effet rétroactif. En outre, elles expliquent que la cour d'appel de Paris dans deux arrêts du 22 novembre 2017 et du 5 juillet 2017 ainsi que la chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 janvier 2018 ont déclaré irrecevable toute demande fondée sur la loi LME formulée au titre de contrats conclus avant le 1er janvier 2009. Par ailleurs, elles expliquent qu'il importe peu que la mise en œuvre des clauses qui fondent la critique du ministre soit intervenue postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi LME puisque l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce sanctionne un délit instantané, qui est constitué au plus tard au moment de la signature du contrat. Selon elles, lorsqu'il est caractérisé, le déséquilibre significatif existe ab initio et n'apparaît pas a posteriori, au stade de la mise en œuvre d'une clause. Pour ces sociétés, la reconduction tacite des contrats ne permet pas non plus d'appliquer l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce car l'action litigieuse consistant à « soumettre » ou à « tenter de soumettre » un partenaire à un déséquilibre significatif ne se produit qu'une fois et ne peut exister qu'au moment de la formation initiale du contrat. Enfin, elles expliquent que même si les deux contrats litigieux ont été reconduits tacitement en 2009, cela signifie qu'en tout état de cause les griefs du ministre doivent être circonscrits à la période postérieure à la reconduction tacite.
Le ministre de l'économie estime, tout d'abord, en s'appuyant sur l'article 1er du code civil, que la LME, publiée au journal officiel le 5 août 2008, est entrée en vigueur le 6 août 2008. Puis, il explique que l'article L. 442-6 du code de commerce n'est pas un texte de nature pénale, comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans deux décisions du 13 janvier 2011 et du 18 mai 2016. Ensuite, il met en avant le fait que les contrats conclus en 2004 contenaient tous les deux une clause de tacite reconduction au bout de cinq ans et donc, la reconduction donnant naissance à un nouveau contrat, les contrats ont été conclus en 2009. Enfin, il soutient que son action est autonome, en ce qu'il ne représente pas les victimes, ni ne se substitue à elles. De plus, dès lors qu'il s'agit d'une action extra-contractuelle, c'est la loi en vigueur au moment du fait dommageable qui régit les conséquences d'un délit ou d'un quasi-délit. Dès lors que les clauses figurant dans les contrats et les pratiques mises en 'uvre par les sociétés défenderesses sont postérieures à l'entrée en vigueur de la LME, les contrats visés sont donc recevables.
Les sociétés franchisées expliquent que les pratiques incriminées sont notamment la fixation des prix des matières premières et des prestations de marketing qui ne sont pas mentionnées dans le contrat de franchise. Ces pratiques se sont produites à l'occasion de contrats de vente postérieurs à l'entrée en vigueur de la loi. Ainsi, la loi n'est pas appliquée de façon rétroactive. Les sociétés franchisées mettent aussi en avant le renouvellement des deux contrats.
Sur ce,
Si dans sa décision n° 2010-85 QPC du 13 janvier 2011, le Conseil constitutionnel a jugé que l'amende civile prévue par l'article L. 442-6 du code de commerce est une sanction ayant le caractère d'une punition ce qui imposait de la soumettre au principe de légalité des délits et des peines et que « l'infraction » définie par le 2° du paragraphe I de l'article L. 442-6 est conforme à ce principe, l'action du ministre telle que prévue par le paragraphe III de ce même article au soutient de laquelle il est demandé le prononcé d'une amende n'en demeure pas moins une action civile.
En l'absence d'effet rétroactif de la loi de modernisation de l'économie, dite loi LME du 4 août 2008, l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce qui en est issu, instaurant une interdiction de la pratique du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, n'est pas applicable aux contrats en cours conclus avant son entrée en vigueur, le 6 août suivant.
En revanche, tel n'est pas le cas des contrats renouvelés postérieurement à l'entrée en vigueur de ladite loi, peu important que ceux-ci aient fait l'objet d'un renouvellement par tacite reconduction, que leurs stipulations n'aient pas été modifiées ou qu'il n'y ait pas eu de renégociations. En effet, le renouvellement tacite d'un contrat ne saurait faire obstacle à une loi d'ordre public économique et il appartient aux parties de mettre les dispositions contractuelles en conformité avec les dispositions nouvelles applicables lors du renouvellement, ce conformément aux dispositions des articles 2 et 6 du code civil.
Le moyen porte sur les contrats de franchise conclus par la société Fra-Ma-Pizz avec la société P. Restauration le 1er septembre 2004 (pièce ministre n°12) et avec la société JBN Restauration en août 2004 (pièce ministre n°14). Il n'est pas contesté par les parties que ces contrats ont été conclus pour une durée de cinq ans et qu'ils ont été tacitement renouvelés en 2009.
Concernant le contrat de franchise signé le 6 novembre 2007, celui-ci a été signé entre la société Fra-Ma-Pizz et la société Le Mans Pizz, à cette époque représentée par M. X. lui-même.
Ce contrat figure en annexe 1 du contrat de location gérance signé le 29 mai 2009, entre la société FP Centre « loueur de fonds » représentée par M. X. et la société Pise Le Mans « locataire -gérant », représenté par M. C. et portant la clause suivante : « le droit non exclusif à l'utilisation du nom commerciale « PIZZA SPRINT », sous lequel est exploité le fonds de commerce objet du présent contrat, étant ici expressément rappelé que ce nom commercial correspond à une marque déposée par la société FRA MA PIZZ sur laquelle le LOUEUR DE FONDS bénéficie d'une licence au titre du contrat de franchise signé le 6 novembre 2007 avec la société FRA MA PIZZ. ». Ce contrat de location gérance a été renouvelé à plusieurs reprises et un avenant a été signé le 14 mai 2014. Il en résulte que le contrat de franchise signé le 6 novembre 2007 pour l'exploitation de ce fonds, sis [...], a nécessairement été renouvelé en 2012.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé recevables les demandes relatives aux contrats conclus avec les sociétés P. Restauration et JBN N. renouvelés en 2009 et de l'infirmer en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes du ministre de l'économie relatives au contrat de franchise Pizz Le Mans/ Pise Le Mans pour l'exploitation du fonds, sis [...].
De l'action des intervenants volontaires les sociétés BS Distribution, S&B Sable, Dutchesne Distribution devenue LMJ Capital, H. Argentre, H. B., H. Dol, H. Liffre, H. Vitre, P. Loyal, Pizz AG, Pizz'Parth, Renna Pizza, Semper Fi, M. Restauration, MM. B., S., D., H., G., P., H.,H., M., et F., Mmes Marina H., Stéphanie Le G. épouse H., Cristèle K. épouse H. en leur intervention volontaire accessoire
La Cour observe qu'ils ne formulent plus de prétentions à hauteur d'appel telles que présentées en première instance autre que leur intervention accessoire à l'action du ministre de l'économie qui est recevable.
Préalablement, la Cour observe à l'examen des contrats de franchise soumis à son appréciation suivant les pièces versées aux débats par le ministre (pièces n°12,14, 98 à107) ou les franchisés eux-mêmes (pièces spécifiques n° 3), qu'il a existé deux versions du contrat de franchise Sprint Pizza, le changement de rédaction ayant eu lieu en 2012. Pour les développements ci-après, il sera fait référence à la 'version n°1"des contrats antérieurs à 2012 (exemple pièce n°99 contrat signé le 17 janvier 2011 par M. H. pour la société Semper Fi), puis 'version n° 2" pour les autres contrats (exemple pièce n° 103 contrat conclu le 10 mai 2012 avec la société Pizz center 2 dont le gérant est M. J.)
Sur le déséquilibre significatif invoqué par le ministre de l'économie et les franchisés :
Le ministre de l'économie fait valoir que le dispositif légal sanctionne tant les clauses que les pratiques, qui par nature et par définition existent et devraient pouvoir être modifiées par les parties pendant toute la durée de la relation contractuelle. Aussi, il estime qu'un ensemble de clauses et pratiques constatées au cours de son enquête concernant les contrats de franchise Pizza Sprint outrepassent les prérogatives « normales » d'un franchiseur, et vont au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger le savoir-faire concédé par le franchiseur et garantir l'homogénéité de franchise, créant par leur effet cumulé un déséquilibre significatif au profit exclusif du franchiseur et limitant corrélativement de manière exagérée la liberté et autonomie des franchisés, à savoir :
Aux termes de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2019-359 du 24 avril 2019 applicable au litige : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : [...] 2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».
Les sociétés intimées soutiennent que ce texte n'est pas compatible avec le principe de légalité des délits et des peines consacré par l'article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et libertés fondamentales (CEDH) et l'article 15 du pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 (Pacte de New York), aux motifs qu'il serait imprécis et donc imprévisible pour les opérateurs économiques.
Toutefois, il résulte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme que le principe de légalité des délits et des peines consacrés par les articles 7 de la CEDH et 15 du pacte de New York, implique que les infractions et les peines qui les répriment doivent être clairement définies par la loi, au sens d'accessibilité et de prévisibilité (arrêts de la Cour EDH G.I.E.M. S.R.L. et autres c. Italie, § 242 ; Cantoni c. France, § 29 ; Kafkaris c. Chypre, § 140 ; Del Ri'o Prada c. Espagne, § 91 ou Perinc'ek c. Suisse, § 134). S'agissant de la prévisibilité, le justiciable doit pouvoir savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente, au besoin à l'aide de l'interprétation qui en est donnée par les tribunaux et le cas échéant après avoir recouru à des avocats, les actes et omissions qui peuvent engager sa responsabilité pénale et la peine qu'il peut encourir de ce chef (arrêts de la Cour EDH Cantoni c. France, § 29 ; Kafkaris c. Chypre, § 140 ; Del Ri'o Prada c. Espagne, § 79). Au regard de cette jurisprudence et de celle des juridictions françaises concernant les conditions d'application des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, les sociétés intimées ne démontrent pas en quoi ce texte serait contraire au principe de légalité des délits et des peines.
Les deux éléments constitutifs de cette pratique restrictive de concurrence sont, en premier lieu, la soumission ou la tentative de soumission et, en second lieu, l'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif.
Sur l'existence d'une soumission ou tentative de soumission :
Selon le ministre de l'économie, la condition de « soumission ou tentative de soumission » est notamment appréciée au regard de l'absence de pouvoir réel de négociation dans la relation commerciale qui peut être établie par un faisceau d'indices révélant l'existence d'un rapport de force. Il fait valoir en substance que les enseignes Pizza Sprint et Domino's Pizza sont leaders dans le secteur de la restauration rapide de la pizza et que leur cocontractant sont le plus souvent des très petites entreprises (TPE) voire des sociétés unipersonnelles qui ne disposent pas de services juridiques ou de cabinet d'avocat pour les accompagner et les aider. Il en déduit que les franchisés sont dans une situation de faiblesse incontestable face à un franchiseur qui bénéficie d'une notoriété indéniable. S'agissant des contrats du réseau Pizza Sprint, il relève que l'enquête a permis d'examiner les conditions dans lesquelles les discussions commerciales se sont déroulées et a mis en évidence l'absence effective de négociation de par l'uniformité des clauses contractuelles relevées comme déséquilibrées et des pratiques commerciales déséquilibrées imposées à tous les franchisés. Il précise que le contrat de franchise, par sa nature, est un contrat type d'adhésion et n'a pas pu faire l'objet de négociations entre le franchiseur et les franchisés. Il ajoute, qu'il est démontré que les mesures de rétorsions pratiquées par le franchiseur rendaient impossible toute modification des clauses et des pratiques par les franchisés au cours de l'exécution du contrat.
Les franchisés insistent sur le fait qu'ils sont pour l'essentiel des entrepreneurs individuels et aucun d'entre eux n'a obtenu de négociation concernant les contrats de franchise qui sont des contrats d'adhésion. Ils relèvent que beaucoup d'entre eux étaient d'anciens salariés et donc dans une situation de subordination et que le déficit structurel de rapport de force était aggravé par la volonté de M. X. de mettre en œuvre un système verrouillé à sa seule main. Il interdisait notamment aux franchisés d'entrer en contact les uns avec les autres, menaçaient ceux qui voulait s'exprimer et mettait une pression continue sur les franchisés pour tout contrôler de l'approvisionnement aux prix des prestations et des pizzas. Dès que M. X. a cédé le contrôle du groupe, il est souligné que la pression a baissé sur les franchisés qui se sont rendus compte de certains abus. Les franchisés font également observer que le document d'information pré-contractuel (DIP) ne laissait pas imaginer au candidat à la franchise la façon dont la franchise allait être mise en œuvre.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center et Domino's Pizza, relèvent préalablement que ni les textes, ni la jurisprudence ne qualifient le franchisé de partie faible, de sorte que le franchisé doit être considéré comme un opérateur économie lambda, qu'ainsi si le franchiseur a une obligation précontractuelle d'information, le franchisé a l'obligation de se renseigner par ailleurs. Aussi, elles soutiennent que le premier élément constitutif du déséquilibre significatif, à savoir la soumission ou tentative de soumission, n'est pas démontré. Selon elles, d'une part le ministre ne démontre pas que les franchisés aient été dans l'impossibilité de pouvoir négocier le contrat de franchise. A cet égard, elles relèvent que le fait que le contrat de franchise soit qualifié ou non d'adhésion n'a pas d'importance, si le contrat n'a pas été négocié encore faut-il démontrer également qu'il n'était pas négociable. Or elles soulignent qu'aucune des pièces versées aux débats par le ministre n'a trait aux conditions dans lesquelles sont intervenues les discussions entre les franchisés et le franchiseur au moment de la conclusion du contrat, rien ne permet d'attester que les franchisés aient fait part de leur volonté de négocier le contrat et se seraient vus opposer un refus. D'autre part, les sociétés intimées soutiennent que le ministre ne démontre pas que les franchisés n'ont pas librement consenti aux clauses litigieuses. A cet égard, elles relèvent notamment qu'aucun élément n'est versé aux débats permettant de démontrer que les franchisés étaient dans une situation économique leur imposant de signer le contrat de franchise, c'est à dire que sans signature dudit contrat, le cocontractant aurait remis en cause la pérennité des relations ou qu'il n'existait pas d'autres alternatives sur le marché de sorte que les franchisés étaient contraints de conclure avec le franchiseur. Il est en outre souligné qu'en application des articles L. 330-3 et R. 330-1 du code de commerce, les franchisés ont bénéficié avant la signature du contrat d'une information précontracutelle comprenant notamment communication du contrat de franchise.
Les sociétés intimées soulignent en outre que seule la preuve de pressions ou menaces au moment de la conclusion du contrat est susceptible de caractériser la condition de soumission ou tentative de soumission. Elles font valoir qu'à cet effet, le ministre tente de se prévaloir de griefs liés à l'exécution du contrat ou de « pratiques », qui non seulement ne sont pas établis mais qui ne relèvent pas de la phase de négociation du contrat.
Sur ce,
L'élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l'absence de négociation effective ou l'usage de menaces ou de mesures de rétorsion visant à forcer l'acceptation impliquant cette absence de négociation effective.
Il n'est pas contestable que le franchiseur occupe dans son réseau une place prépondérante dans la mesure où il en détermine unilatéralement les conditions d'accès ainsi que le mode de fonctionnement et les restrictions post-contractuelles qu'il retranscrit dans les clauses du contrat qu'il propose au franchisé. En outre, la franchise ouvre le plus souvent à des commerçants dépourvus de l'expérience nécessaire l'accès à des méthodes qu'ils n'auraient pu acquérir qu'après de longs efforts de recherche et les fait profiter de la réputation du signe.
L'enquête menée par la DGCCRF (pièces n° 5 à 9) corroborée par les analyses de marché produites en annexe n°2 du document d'informations précontractuelles (DIP) a mis en évidence que :
- la franchise dans le secteur de la restauration rapide connaît une forte croissance,
- le secteur de la pizza bénéficie d'un développement notable eu égard à la consommation croissante de ce produit, sachant que les français sont les deuxièmes plus gros consommateurs de pizza au monde (10 kg par an et par habitant), juste après les Etats-Unis (18 kg par an /habitants),
- pour le fabricant, une pizza comporte peu de risques alimentaires et ne nécessite pas de grandes connaissances chez les personnes recrutées, peu de réclamations concernant ce produit,
- ce dynamisme du marché et le faible risque, attirent de nombreux candidats à la franchise à se lancer dans la pizza,
- que l'enseigne Pizza Sprint (90 points de vente essentiellement dans l'ouest de la France) occupe une place importante aux côtés de Pizza Hut (106 points de vente en France) et la Boîte à Pizza (136 points de vente en France).
Il en ressort que le réseau de franchise Sprint Pizza bénéficiait d'une notoriété certaine dans l'ouest de la France sur un marché particulièrement dynamique attirant principalement pour se lancer dans la franchise des entrepreneurs individuels ou d'anciens salariés du réseau en raison de la simplicité du concept et de la confiance suscitée par cette notoriété. La société Fra-Ma-Pizz et son dirigeant, M. X., jouissaient ainsi d'une notoriété particulière et profitaient de cette situation prépondérante de franchiseur pour imposer un contrat type de franchise au nom de l'homogénéité du réseau à des candidats entrepreneurs individuels.
En effet, il n'est pas contesté que les 30 contrats Sprint Pizza versés aux débats sont identiques et n'ont pas été négociés. Non seulement ils n'ont pas été effectivement négociés, mais ceux-ci n'étaient pas non plus négociables du fait de la désinformation des franchisés sur le fonctionnement réel du réseau.
Ainsi, même si le contrat de franchise sous enseigne Pizza Sprint était soumis pour sa signature au processus légal et habituel d'un projet transmis avec le DIP (cf. notamment pièce n° 10 ministre et pièces spécifiques franchisés), il ressort des explications et des pièces versées aux débats par les franchisés que ni le DIP ni le contrat de franchise soumis à la signature ne faisait état de l'existence de la société Pizza Center appartenant au groupe Pizza Sprint dirigé par M. X. exerçant sous l'enseigne Logis Pizza auprès duquel les franchisés devaient de fait exclusivement s'approvisionner contrairement aux apparences des clauses contractuelles, ni de la société Somainmag, appartement au même groupe pour l'aménagement des points de vente. De même, il n'est pas contesté que ni le DIP, ni la « Bible » ou le contrat de franchise ne faisaient état de l'existence d'animateurs de réseau sous la surveillance desquels les franchisés devaient étroitement se soumettre. Enfin, plusieurs franchisés ont conclu de nouveau contrats de franchise fin 2015 sans être informés de la cession imminente du réseau Pizza Sprint au principal réseau concurrent Domino's Pizza et du projet de conversion d'enseigne des points de ventes dès février 2016 (contrat Pizza Sprint de M. H. conclu le 29 juin 2015, contrat de M. A. signé le 18 septembre 2015, contrats de M. Le N. et Mme D. signés fin 2015, pièces ministre n° 113, 115, 39 et 40).
Par ailleurs, les pièces du ministre et des franchisés mettent en évidence qu'une organisation du réseau avait été mise en place par M. X., consistant par diverses rappels à l'ordre et pressions à empêcher les franchisés de communiquer entre eux sur le fonctionnement du réseau ou de s'organiser au cours de l'exécution du contrat pour être force de proposition et à les soumettre dans la gestion commerciale de leur propre point de vente à une surveillance très étroite par les animateurs de réseau ou les clients mystères (notamment pièces communes franchisés n°3, 5,6,13).
Ainsi, M. H., gérant de 4 points de vente, déclarait le 25 février 2016 à la Direccte Bretagne (pièce n°76) :
« (...) Je me rends compte maintenant que j'ai plus d'échanges avec les autres franchises que la relation commerciale que j'avais avec le franchiseur et ses différentes sociétés, étaient au bénéfice du franchiseur beaucoup plus qu'au bénéfice des franchises.
Nous faisions confiance dans la franchise et c'est pour cela que j'ai ouvert plusieurs PIZZA SPRINT.
En ce qui concerne les ouvertures de mes points de vente sur la période de janvier 2011 (V.) à octobre 2015 (D.), je n'ai eu aucune informations préalables, notamment en ce qui concerne les prévisionnels de marchés.
Pour chaque ouverture, il a fallu réclamer à plusieurs reprises les contrats de franchise pour les avoir.
Cela n'a pas été vrai pour D., qui a été ouvert le 6 octobre 2015, soit peu de temps avant l'annonce de la cession a DOMINO'S PIZZA.
Pour cette ouverture de D., M. X. m'a laissé investir dans ce point de vente alors même qu'une lettre d'intention avait été signée dès avril avec DOMlNO'S PIZZA. II aurait donc dû, loyalement, m'en informer. Je considère que je suis victime d'une tromperie et depuis 1'ouverture, le chiffre d'affaire sur ce point de vente baisse. (...)
Vous me parlez de la clause d'approvisionnement qui figure dans tous mes contrats de franchise. Cette clause m'est imposée par FRA MA PIZZ et m'impose de réaliser l'ensemble de mes achats auprès de LOGIS PIZZA. J'ai toujours respecté cette clause et même si en apparence, je pouvais m'approvisionner ailleurs, cela était en réalité très compliqué.
Je pensais que j'achetais à des conditions qui sont favorables aux franchisés. (...)
Cf également pièces Ministre n° 65 et 66, déclaration de M. S. ; pièces n°69 et 70 déclarations de M. A. SAB et les déclarations de M. P. pièce n°11.
Dès lors, le défaut d'information sur le fonctionnement réel du réseau, la position prépondérante du franchiseur sur les franchisés entrepreneurs individuels, l'attractivité apparente du réseau et les nombreux contrats types identiques signés, sont autant d'éléments mettant en évidence l'absence de marge réelle de négociation du contrat de franchise Pizza Sprint par les candidats à la franchise, et ce même pour certains franchisés ayant ouvert successivement plusieurs points de vente.
Sur l'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties :
L'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif peut notamment se déduire d'une absence totale de réciprocité ou de contrepartie à une obligation, ou encore d'une disproportion importante entre les obligations respectives des parties.
Les clauses sont appréciées dans leur contexte, au regard de l'économie de la relation contractuelle.
Sur les clauses d'approvisionnement et de stock minimum :
Le ministre de l'économie fait valoir pour l'essentiel que la clause d'approvisionnement telle que rédigée au contrat de franchise (article 10.2 - exemple contrat de franchise au nom de M. J. pièce n°103), sous l'apparence d'une liberté d'approvisionnement se heurtait en réalité à des critères dissuasifs pour les franchisés de s'approvisionner ailleurs qu'auprès de Logis Pizza (société Pizza Center appartenant à M. X.), tant en amont (fiche technique des produits achetés et conditions de vente applicables à transmettre au franchiseur pour validation préalable) qu'en aval de l'approvisionnement (contrôle visuel des animateurs réseau et alerte informatique en cas d'absence de commande). Il relève que cette obligation dans les faits de s'approvisionner auprès de Logis Pizza concernait de nombreux produits, quand bien même ils n'entraient pas dans la composition des pizzas ou n'étaient pas de nature à préserver l'identité du réseau Pizza Sprint. Il insiste en outre sur le fait que les prix pratiqués par Logis Pizza étaient supérieurs à ceux pratiqués par des grossistes tiers (jusqu'à 30 % de différences tarifaires) compromettant la capacité des franchisés à optimiser leur gestion.
Par ailleurs, le ministre de l'économie soutient que le contrat de franchise comporte également une clause d'approvisionnement minimum contraignant le franchisé à un minimum d'achat auprès de Logis Pizza. Il soutient en substance que cette clause couplée à l'approvisionnement exclusif auprès de Logis Pizza, au-delà de la nécessité de garantir l'intégrité du savoir-faire mise en œuvre dans le cadre de la franchise Pizza Sprint, permet à la société Pizza Center détenue par le franchiseur de garantir non seulement son activité mais aussi de bénéficier de remises commerciales, négociées sur la base d'engagements de volumes d'achat par le franchiseur, sans en faire bénéficier les franchisés. Il en déduit que la mise en œuvre de la clause imposant de détenir un stock minimum induit des obligations à la charge unique des franchisés, pour le compte de la société Pizza Center France, sans aucune réciprocité de la part du franchiseur. Il ajoute qu'alors que le franchisé n'a quasiment aucune maîtrise sur son approvisionnement, sur la fixation de ses prix (marge du fournisseur substantielle), ni sur la gestion de son stock, le contrat de franchise ne prévoit en contrepartie des obligations du franchisé aucune disposition relative à la gestion d'incident d'approvisionnement, des procédures de rappels ou de retraits en cas d'alertes relatives à un risque alimentaire.
Le ministre de l'économie fait ainsi valoir que l'obligation de s'approvisionner exclusivement auprès de la société Pizza Center/Logis Pizza appartenant au franchiseur et l'obligation de détenir un stock minimum, résultant du contrat de franchise, sont manifestement déséquilibrées au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce.
Les franchisés ajoutent sur la clause d'approvisionnement que les modalités concrètes relatives aux approvisionnements ne sont nullement décrites dans le DIP ou le contrat de franchise. Ils expliquent que dans les faits, le franchiseur imposait au franchisé de procéder à ses achats par l'intermédiaire d'une société appartenant au groupe Pizza Sprint exerçant sous l'enseigne Logis Pizza, en traquant lors des visites de magasins les achats pouvant provenir d'autre fournisseur, en menaçant de résilier le contrat sous prétexte d'absence de conformité de fiche technique, ou en refusant ou ne répondant pas aux demandes d'autorisation de prendre des produits chez un autre fournisseur. Ils soulignent que la prétendue nécessité de conformité aux fiches techniques des produits était utilisée par le franchiseur pour conserver sa mainmise sur le système, tel que pour l'ingrédient indispensable du pâton pour la fabrication des pizzas. Ils relèvent en outre que la centrale d'achat n'avait pas vocation à permettre aux franchisés de bénéficier de coûts d'approvisionnement plus bas avec les économies d'échelles, mais en plus elle avait pour objet de les assujettir à des charges importantes, en conservant les gains sur les achats groupés et d'appliquer une sur-marge sur les ventes aux franchisés. Ils soutiennent que ce « système », qui a perduré plusieurs mois après la cession intervenue en janvier 2016, constitue d'évidence un avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu, ou d'un déséquilibre significatif au profit du franchiseur.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center et Domino's Pizza font d'abord valoir la validité en droit de la clause d'approvisionnement dans un contrat de franchise, elle est légitime et justifié lorsque le franchiseur est autorisé à prendre les mesures propres à la préservation de l'identité et la réputation du réseau et du savoir-faire, ce qui est tout particulièrement le cas lorsque l'attrait du réseau pour le consommateur repose en effet sur son homogénéité, les produits utilisés étant essentiels au goût des pizzas et à l'image de l'enseigne à l'égard de sa clientèle.
Les sociétés intimées soutiennent ensuite que l'insertion de la clause litigieuse dans le contrat est légitime en ce qu'elle ne crée aucun déséquilibre significatif. Elles relèvent que la clause prévoit que le franchiseur, en cette qualité, définit une gamme de produits nécessaires aux franchisés dans l'exercice de leur activité sous enseigne et « correspondant aux normes de qualité et de traçabilité du réseau » et que pour faciliter l'approvisionnement des franchisés pour cette liste de produits, le franchiseur a référencé des fournisseurs dont il estime que les produits correspondent aux normes susvisées. Il est souligné que le critère essentiel est le respect des critères de l'enseigne définis par le franchiseur à la suite des moyens financiers et humains déployés pour développer et tester le concept, en particulier les recettes de pizzas. Elles ajoutent que pour ce faire, la clause n'impose pas au franchisé de s'adresser exclusivement aux fournisseurs référencés par le franchiseur, mais prévoit au contraire expressément la faculté offerte aux franchisés auprès des fournisseurs de leur choix.
Les sociétés intimées réfutent les allégations du ministre suivant lesquelles, l'exécution de la clause d'approvisionnement permettrait de caractériser un déséquilibre significatif, et font valoir à cet effet que :
- le ministre n'apporte pas la preuve que des franchisés ont demandé à s'approvisionner auprès de fournisseurs extérieurs et ont essuyé un refus, il ne démontre pas davantage que les franchisés qui auraient demandé à s'approvisionner auprès de fournisseurs extérieurs auraient été sanctionnés, (demandes notamment autorisées en 2016 et 2017)
- les contrôles critiqués par le ministre, opérés par les animateurs du réseau n'ont pas pour finalité de vérifier que les franchisés s'approvisionnent bien auprès de Pizza Center France mais uniquement de vérifier que les produits vendus aux clients sont conformes au concept: en termes notamment de qualité, de goût et de visuel ; il est logique que, dans ce cadre, les animateurs vérifient donc que le process d'approvisionnement est respecté par les franchisés et, si besoin, que les franchisés ont bien obtenu l'accord préalable du franchiseur en cas d'approvisionnement auprès de fournisseurs extérieurs aux fournisseurs référencés, conformément aux engagements contractuels pris,
- il n'est pas étayé par le ministre que de nombreux produits composant la gamme portant le logo Pizz Sprint ne seraient pas substituables, alors que ceux concernés sont peu nombreux et sont inhérents à l'image de l'enseigne et qui se retrouvent dans tous les points de vente,
- il importe par ailleurs que les franchisés respectent la gamme de produits du réseau afin que la promesse client soit respectée : le client doit toujours être assuré de trouver les mêmes produits et de même qualité quelque soit le point de vente sous l'enseigne du réseau,
- les prix pratiqués par Pizza Center France sont cohérents au regard des prix du marché et qu'aucune pièce produite par le ministre ne permet d'établir une surfacturation de l'ordre de 30 à 40 % par rapport aux concurrents.
Sur la clause de l'obligation de détenir un stock minimum, les sociétés intimées soutiennent que l'exigence d'un stock minimum vise à assurer le bon fonctionnement ordinaire du point de vente pour éviter les ruptures de stocks préjudiciables au chiffre d'affaires du franchisé et à l'image de l'enseigne à l'égard des consommateurs et ce dans l'intérêt de tous les membres du réseau. L'intérêts étant de protéger le franchisé et le réseau afin que chaque point de vente sous l'enseigne soit en capacité d'offrir à la clientèle l'entièreté de l'offre. Il est souligné que compte tenu de la connaissance et l'expérience du franchiseur, la clause prévoit seulement que le franchisé devra détenir en permanence le montant de ce stock en point de vente, correspondant à une semaine d'exploitation et que le franchiseur évalue, s'agissant du contrat examiné, à une valeur comprise entre 3.000 HT et 5.000 HT. Il est relevé que cette clause n'impose pas au franchisé d'acheter un minimum de commandes auprès des fournisseurs référencés par le franchiseur, à savoir auprès de Pizza Centre France, mais seulement de respecter un stock minimum d'encours de fabrication, ce pour éviter les ruptures de stock.
Les sociétés intimées soutiennent par ailleurs que le ministre ne rapporte pas la preuve que le franchiseur imposait aux franchisés un minimum de commandes, ni que cette obligation aurait fait l'objet d'un contrôle ni que le non-respect de ce minimum aurait été assortie de sanction de la part du franchiseur. Elles soulignent en outre un procès d'intention formulé à l'encontre de Pizza center France sur le fait que la clause de stock minimum couplée à la clause d'approvisionnement quasi-exclusive aurait pour objectif de permettre à Pizza Center France de négocier des avantages à ce titre dont elle serait seul bénéficiaire, alors que :
- Pizza Center France en tant qu'acheteur, bénéficie des conditions offertes par ses fournisseurs et n'a pas à les répercuter aux franchisés, cela n'est pas juridiquement sanctionnable ou même contestable,
- Pizza Center France a pris des engagements de volumes qu'elle a supportés et assumés seule puisque les franchisés ne sont tenus à aucun engagement de volume et peuvent s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs
Pour l'ensemble de ces raisons, les sociétés intimées estiment qu'aucun déséquilibre significatif ne résulte ni de l'insertion de ces clauses, ni de leur exécution qui est en définitive la seule alléguée et non démontrée par le ministre de l'économie.
Sur ce,
Les clauses de stock et d'approvisionnement sont ainsi rédigées dans les deux versions successives du contrat de franchise :
Version n° 1 du contrat de franchise
Au chapitre 6.2 Assistance technique et commerciale - communication du savoir-faire (...)
article 6.2.4 Gestion et administration de l'activité commerciale (...)
* Stock
Le Franchisé s'engage à détenir en permanence un stock minimum d'encours de fabrication disponible d'une semaine d'exploitation environ soit pour une valeur minimum comprise entre 3.000 et 5.000 HT selon l'évaluation du Franchiseur ;
* Approvisionnement
Le franchiseur sélectionne, chaque année, des listes de produits et de fournisseurs correspondants aux normes de qualité et de traçabilité du réseau, décrites dans la bible.
Le Franchisé s'engage à respecter les critères définis.
Il est cependant libre de s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs, dès lors que les produits intègrent l'ensemble des critères définis dans la bible et notamment :
- les caractéristiques de qualité et de traçabilité fixées,
- les caractéristiques de conservation et de stockage,
- les compositions qui doivent être strictement identiques à celles visée dans la Bible,
- le fait que les fabricants des produits qui doivent être les mêmes que ceux éventuellement visés dans la Bible, le Franchisé conservant de s'approvisionner auprès du fournisseur revendeur de son choix si l'ensemble des critères de la Bible sont respectés
Le franchisé s'interdit expressément de s'approvisionner auprès de fournisseurs n'assurant pas le transport des produits sous température dirigée.
Le Franchisé s'engage à communiquer et tenir à disposition du Franchiseur les fiches techniques des produits qu'il achète, ainsi que les conditions de vente applicables.
Version n° 2 du contrat de franchise
10 APPROVISIONNEMENT
10.1 Stock
Le Franchisé s'engage à détenir en permanence un stock minimum d'encours de fabrication correspondant à une semaine d'exploitation et à une valeur comprise entre 3.000 et 5.000 euros HT selon l'évaluation du Franchiseur.
10.2 Produits, petit matériel et matériel
Le Franchiseur sélectionne, chaque année, des listes de produits (matières premières, petit matériel et matériel) correspondant aux normes de qualité et de traçabilité du réseau, décrites dans la bible et il référence les fournisseurs correspondants. Le Franchisé s'engage a s'approvisionner conformément à cette liste de produits et de fournisseurs.
Toutefois, le Franchisé est libre de s'approvisionner auprès des fournisseurs de son choix, des lors que les produits répondent a l'ensemble des critères définis dans la bible et notamment aux critères suivants :
- les caractéristiques de qualité et de traçabilité fixées, -
- les caractéristiques de conservation et de stockage,
- les compositions qui doivent être strictement identiques à celles visées dans la Bible
- le transport des produits sous température dirigée,
- Les normes de sécurité du matériel pour les personnes utilisatrices
Avant toute commande de produit non référencées, le Franchisé s'engage à adresser au Franchiseur une fiche technique du produit ainsi que les conditions de vente applicables et à recueillir l'accord écrit du Franchiseur.
La Cour relève que la clause d'approvisionnement telle que rédigée ne prévoit pas un approvisionnement exclusif. Il est organisé une sélection de produit par le franchiseur suivant des normes de qualité et de traçabilité définies dans la « bible » que le franchisé s'engage à respecter soit en s'approvisionnant chez « les » fournisseurs référencés par le franchiseur, soit auprès du fournisseur choisi par le franchisé à condition de respecter les critères définis dans la bible, et de communiquer une fiche technique au franchiseur dans la version 1, de demander l'autorisation préalable du franchiseur dans la version 2 après communication de cette fiche. La Cour observe que le processus de la clause d'approvisionnement dans la seconde version du contrat est plus contraignante que dans la première.
Outre le fait que la clause d'approvisionnement insérée au contrat ne prévoit pas expressément un approvisionnement exclusif, il y a lieu de rappeler que le DIP ne contenait pas non plus d'information particulière sur l'organisation de l'approvisionnement, ni sur l'existence de la société Pizza Center France. Il n'apparaît pas que le candidat à la franchise disposait de la Bible avant la signature du contrat de franchise.
Or, il ressort des éléments versés aux débats que contrairement à ce que laissait présager la rédaction de la clause d'approvisionnement, en pratique, la société Pizza Center France était non seulement le seul fournisseur référencé par le franchiseur mais également que les franchisés devaient s'approvisionner exclusivement ou quasi-exclusivement auprès de ce fournisseur qui était en lien direct avec le franchiseur pour appartenir au même groupe.
Ainsi le responsable opérationnel de la société Pizza Center France faisait le 25 avril 2016 les déclarations suivantes (pièce n°23 Ministre) :
« (...) Le fonctionnement de la société PIZZA CENTER France est inchangé depuis votre intervention en date du 25 février 2013.
Ce qui a récemment changé est que le réseau PIZZA SPRINT a été cédé a DOMINO'S PIZZA France le 26 janvier dernier.
La société PIZZA CENTER France fait donc toujours partie du réseau PIZZA SPRINT mais est détenue par DOMINO'S PIZZA.
La société PIZZA CENTER France a pour activité le référencement et la négociation commerciale avec les fournisseurs de matières premières et de produits destinés aux points de vente PIZZA SPRINT. Nous testons les produits des Fournisseurs et les référençons au sein du réseau PIZZA SPRINT pour les franchises du réseau.
Ces référencements concernent aussi bien les denrées alimentaires (matières premières notamment) que les produits ou équipements à utiliser dans les points de vente portant enseigne PIZZA SPRINT. Nous sommes en mesure d'approvisionner les magasins pour tout ce qui touche à exploitation des points de vente (habillement, ustensiles de cuisine, grilles de cuisson, produits d'entretien ...).
(...)
Question : Les points de vente sous enseigne PIZZA SPRINT peuvent ils s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs ?
Réponse : Non. Nous nous assurons que cela ne se produise pas et faisons un point tous les lundi matin. Si le point de vente ne commande pas, nous essayons de vérifier ce qui se passe. Nous le signalons au franchiseur et aux animateurs réseau afin qu'ils vérifient. Nous pouvons, sur la validation de FRAMAPIZZ, avoir à accepter qu'ils s'approvisionnent ailleurs. A ce jour, le cas ne s'est pas produit.
Depuis la cession, certains franchisés ne commandent plus auprès de PIZZA CENTER France. Nous en avons [informé] le franchiseur »
Cf. dans le même sens la déclaration de Mme G., directrice de la société Pizza Center France le 25 février 2013 (pièce ministre n°21)
Aussi, Mme Le G., gérante du point de vente Pizza Sprint de [ville F.] déclarait (pièce ministre n°16) :
« L 'entreprise est en activité depuis 2011, elle appartenait auparavant au créateur de la franchise en propre. J'ai moi-même repris l'entreprise au 1er janvier 2012.
J'ai signé un contrat de franchise au démarrage de l'activité. Il n 'a pas changé depuis, sauf une modification relative au montant des royalties 3,5 % au lieu de 5 % en raison d'une situation économique difficile sur la région de [ville F.].
Ma comptabilité est gérée par un cabinet comptable.
Les membres du réseau ont l'obligation de se fournir par le siège, qui possède la centrale. Nous n 'avons pas du tout de marge de manœuvre pour les produits surgelés, les produits d'entretien. Sur les produits frais nous pouvons négocier avec un primeur local. Mais cela ne représente qu'1 % de Ia marchandise (salade, tomates, champignons...). A [ville F.] nous avons également un fournisseur différent pour le café, et les boissons. Ce qui s'est fait en accord avec le siège de la franchise. La seule obligation était de garder la gamme de produits proposés par l'enseigne.
Pour les produits secs et les produits surgelés il faut commander au minimum 20 colis à chaque fois. Il est impossible de valider la commande en deçà de ces seuils. C 'est un point à améliorer par l'enseigne à mon sens.
La centrale d'achat procède à des augmentations tarifaires assez importantes de manière régulière depuis un an, c'est-à-dire environ tous les deux mois. Ces augmentations concernent tous les produits (alimentaires, jouets des menus enfants, emballages...). Elles sont éventuellement répercutées sur les prix de vente consommateurs (sur décision de la franchise). Mais lorsque c'est impossible elles sont absorbées par la SARL.
Les nouveaux tarifs nous sont envoyés par mail dès qu'un changement de prix intervient.
Nous n 'avons aucun pouvoir de décision en matière de prix de vente magasins, de produits, et de marketing (affiches, flyers etc.). Ainsi les augmentations de tarifs d'achat matière sont obligatoirement absorbées par la SARL si la franchise ne décide pas de les augmenter.
Pour ce qui est des offres promotionnelles (...)
Nous avons souvent des arrêts de produits, car dès qu'une anomalie est signalée par l'un des établissements, un retrait des produits est organisé par la franchise. Nous devons être remboursés via des avoirs. En conséquence il nous arrive d'être en rupture et de ne pouvoir satisfaire nos clients puisque les minimums de commande sont importants et qu'il nous est interdit de nous approvisionner ailleurs, sauf cas très exceptionnel. Les avoirs concernent uniquement les produits, pas les dépenses marketing qui pourraient y être liées. ll y a donc perte financières à chaque retrait de produit. (...). »
M. S., gérant de la société Feoni Pizz, déclarait le 19 janvier 2016 (pièce n° 66) : « si nous souhaitons mettre en place un produit extérieur à LOGIS PIZZA, il nous faut obtenir 1'accord de FRA MA PIZZ et les compositions doivent être strictement identiques. Dans cette approche, nous devons fournir tellement de justificatifs (fiches techniques, conditions de vente...) que les démarches s'avèrent impossibles dans les faits. On ne peut même pas essayer de passer outre puisque nous sommes continuellement contrôlés sur ces aspects par les animateurs de réseau.
Nous sommes également indirectement contrôlés par les services de commandes de LOGIS PIZZA qui n'hésitent pas à nous appeler si nous ne passons pas commandes. »
De même que M. R., gérant de la société 4U Pizz, déclarait le 26 février 2016 (pièce n°80) : S'agissant de la clause d'approvisionnement qui figure dans mon contrat de franchise, elle m'impose d'obtenir l'aval du franchiseur si je veux m'approvisionner ailleurs (produits, matériels et petits matériels).
Je sais que certains franchisés ont tenté d'obtenir cet accord pour des matières premières et se sont toujours vu opposer un refus de Monsieur X.
Personnellement, j'ai toujours acheté auprès de LOGIS PIZZA sauf pour certains produits que je prends chez METRO. J'ai toutefois été rappelé à l'ordre par Monsieur X. pour avoir acheté du bœuf haché strictement identique et de même marque à celui de LOGIS PIZZA mais à 1 euro moins cher du kg. Monsieur X. m'a indiqué que je n'avais pas le droit avec pour argument le fait que le transport par sac isotherme avec des pains de glace n'était pas suffisant.
Ce constat par rapport à ce différentiel de prix ne vaut pas exclusivement pour la viande puisque j'ai fait récemment des comparatifs de prix et je me suis aperçu d'écarts très importants notamment sur le nutella, le miel, l'origan et la mozzarella.
Par exemple, pour la mozzarella achetée auprès du même fournisseur SPLO que celui du franchiseur, la différence de prix est de 3,82 €/kg contre 4,76 €/kg chez LOGIS PIZZA. Je vous précise qu'en plus, à 3,82 €/kg, la qualité est supérieure et d'origine française.
Vous me demandez si ces restrictions d'approvisionnement imposées dans le cadre de la franchise peuvent être justifiées par la nécessité de préserver une homogénéité dans le produit fini vendu au consommateur. Pour moi, je réalise aujourd'hui que je peux trouver ailleurs les mêmes produits et même, comme je vous l'ai dit ci-dessus, avec des caractéristiques meilleures.
Il ressort des déclarations concordantes de l'ensemble des franchisés entendus dans le cadre de l'enquête (notamment pièces ministre, déclarations, n° 15, 16, 49, 66, 69, 73.1, 76, 80), que l'exclusivité de l'approvisionnement n'était pas un libre choix de leur part mais le résultat d'une forte pression, voir de menace de résiliation, de la part du franchiseur, notamment M. X., et par l'intermédiaire des animateurs de réseau. Comme le relève le ministre, il ressort de ces déclarations que l'approvisionnement théoriquement « libre » auprès de fournisseurs autres que Logis Pizza, se heurtait en réalité à des critères dissuasifs pour les franchisés, à savoir :
- en amont : fiche technique des produits achetés et conditions de vente applicables à transmettre pour validation préalable du franchiseur et quasiment jamais obtenue,
- contrôle visuel des animateurs réseau et alerte informatique en cas d'absence de commande par Logis Pizza. »
Ces constats sont également corroborés par des exemples d'échanges de courriels entre les franchisés et le franchiseur sur l'approvisionnement extérieur ou le rôle des animateurs de réseau (pièces communes franchisés n° 5, 3, 6, 13 et 18 ou pièce n° 20 ministre), ou au travers des rapports de visite des animateurs cités par les sociétés intimées (pièce n° 20, conclusions page 189 et suivantes).
Par ailleurs, il ressort des déclarations concordantes des franchisés que la clause de stock minimum les contraignaient en pratique à un minimum d'achat auprès de Logis Pizza.
Ainsi M. P., gérant du point de vente de T. déclarait le 5 juin 2013 (pièce ministre n°17) : « A chaque commande nous avons un minimum de colis obligatoire (20 pour les surgelés et 22 pour le sec). Si par exemple je n'ai besoin que de 14 colis je ne peux pas valider la commande sur l'extranet de la société. Pour les produits secs j'ai réussi à ne passer commande que tous les 15 jours. »
Mme G., gérante du point de vente Pizza Sprint de [ville F.] déclarait (pièce ministre n°16) : « Pour les produits secs et les produits surgelés il faut commander au minimum 20 colis à chaque fois. Il est impossible de valider la commande en deçà de ces seuils. C'est un point à améliorer par l'enseigne à mon sens. »
Ces déclarations sont corroborées par les conditions générales de vente Logis Pizza et le logiciel de commandes (pièces communes franchisés n° 22 et 23) mettant en évidence que les franchisés étaient astreints de faire une commande minimum de 20 colis par « famille de produits » secs/surgelés. Les franchisés qui ne passaient pas suffisamment commande étaient relancés par Logis Pizza (pièce ministre n° 73).
En outre, des tableaux de comparatifs sont produits aux débats par le ministre (pièces n° 116 et 117) faisant état de ratios de marges (opérationnelle, brute et nette) réalisées par Logis Pizza sur les produits substantiellement supérieures aux autres entreprises intervenant dans le secteur d'activité (Brake, Lazzaro Pizza, Metro, Promocash...). Les franchisés produisent également des tableaux comparatifs des prix de produits pour la confection des pizzas, notamment le pâton, entre ceux pratiqués à différentes périodes entre 2015 et 2017 par la société Pizza Center France avant et après son rachat par la société Domino's et ceux pratiqués par la société Transgoumet auprès des franchisés en mai 2018, mettant en évidence des prix nettement plus bas (pièces communes n°26, 74 à 80).
Si les sociétés intimées produisent une étude (pièce n°16) pour démontrer que les pièces du ministre et des franchisés ne permettent pas d'établir un prix supérieur de 30 % à 40 % tel qu'allégué par le ministre, il n'en demeure pas moins que les éléments avancés par le ministre et les franchisés sont des indices sérieux sur le bon niveau de rentabilité de la société Pizza Center au travers de ses différentes marges.
Aussi, si les sociétés intimées font valoir que les prix de la société Pizza Center étaient « cohérents » avec le marché, rien n'établit cependant d'une part que les produits Logis Pizza avaient une spécificité particulière au regard du savoir-faire Sprint Pizza tel que décrit à l'article 6 du contrat de franchise, et d'autre part que les franchisés bénéficiaient d'un avantage concurrentiel à s'approvisionner exclusivement ou quasi-exclusivement auprès de la société Pizza Center pour les produits sélectionnés dans la « bible » autres que les signes distinctifs. Il est noté que le contrat de franchise (article 6.2.4 - qualité de fabrication - version n°1, article 11 – qualité - version n°2) prévoyait par ailleurs des visites mystères très régulières outre d'hygiène pour s'assurer de l'unicité de l'image du réseau autrement que par un approvisionnement exclusif.
La Cour observe que si pour préserver l'unité du réseau et s'assurer du savoir-faire, le franchiseur pouvait sélectionner des produits répondant notamment à des critères de qualité et de sécurité auprès de divers fournisseurs référencés, en revanche l'impossibilité « de fait » pour les franchisés de s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs que la société Pizza Center France, pour les mêmes produits sélectionnés couplée à une obligation de stock minimum des franchisés sur des familles de produits, ne trouve pas de justification dans l'unité du réseau ou le développement du savoir-faire, si ce n'est de permettre essentiellement à la société Pizza Center France, filiale du groupe Pizza Sprint, de bénéficier elle-même de remises commerciales négociées sur la base d'engagements de volumes d'achat et de mise en avant des produits dont les franchisés ne retiraient aucun avantage (cf. les déclarations de M. X. pièce ministre n° 21 et de M. D. pièce n°25 et contrat de partenariat pièce n°48).
Ainsi M. P., gérant la société P. restauration ayant plusieurs points de vente, déclarait le 16 décembre 2013 (pièce ministre n° 11) :
« (...) Le contrat de franchise prévoit que le franchiseur communique chaque année une liste de fournisseurs alternatifs à Logispizza mais dans les faits, je ne l'ai jamais reçue. Je procède à des achats de dépannage à hauteur de 2 % environ auprès de Promocash ou Metro, où j'achète également toutes les boissons sauf le rosé et le vin rouge, fournis par Logis Pizza.
Lorsque je procède à ces achats ponctuels, je peux constater que les prix pratiqués par Logispizza sur les mêmes références sont systématiquement plus élevés. Le contrat prévoit qu'il est possible de se fournir ailleurs qu'auprès de Logispizza mais que les produits doivent entre « identiques ou similaires ». Pour autant, lors du contrôle périodique du point de vente, I'animateur réseau de Pizza Sprint ne manquera pas de relever les références achetées hors réseau Pizza Sprint et d'en réclamer les fiches techniques. En l'absence de celle-ci, nous recevons une LRAR du siège précisant que nous ne respectons pas la Charte du réseau car le produit n'est pas valide par le franchiseur, qui a l'habitude de maîtriser les matières premières via la plate-forme Logispizza.
Pour passer nos commandes de matières premières, nous nous connectons sur le site internet Pizza Sprint et devons payer Logispizza par LCR à 30 jours ; nous sommes livrés le lendemain ou à.. J+2, il s'agit d'un transporteur extérieur.
Nous devons commander au moins 20 colis pour les surgelés et, autant pour l'épicerie. Je n'ai jamais bénéficié d'aucune ristourne lors de commandes importantes. Je dois avoir, dans chaque point de vente, entre 3.000 et 5.000 euros de stocks.
Les prix d'achats des matières premières achetées auprès de Logispizza augmentant régulièrement, ce qui explique aussi que nous trouvons presque tous les produits « de base » moins chers dans d'autres réseaux de commercialisation. (...) »
Enfin, il ressort des pièces versées aux débats par le ministre et les franchisés, que ces derniers étaient soumis par la tête de réseau, d'une part à une très forte incitation à suivre une politique tarifaire unique dans le réseau (pièces ministre n° 97 déclaration de M. N., n° 11 déclarations de M. P., n° 10 déclarations de Mme R. directrice financière et administrative Pizza Sprint ; pièces franchisés n° 29 à 31, 39 et 40, 104 et 105 et pièces ministre n° 94, 95 courriels reçus de la société Fra-Ma-Pizz) d'autre part à l'utilisation d'un système informatique ne leur permettant pas aisément d'établir eux-mêmes leurs prix (article 9 du contrat de franchise, pièce ministre n° 81 déclarations de M. P., pièce n° 41 franchisés courriel de Mme R.). Il ressort également des pièces versées aux débats que les franchisés étaient soumis à des campagnes promotionnelles décidées unilatéralement par le franchiseur avec des commandes d'éléments marketing imposés aux franchisés et à leurs frais et qui ne leur étaient pas toujours favorables (pièce franchisé n°107, pièces ministres déclarations n° 52, 73.1, 75).
Autrement dit, les franchisés non seulement ne retiraient pas d'avantage commercial spécifique à s'approvisionner auprès de la société té Pizza Center France, mais en outre ils subissaient une réelle contrainte dans leur liberté de gestion commerciale de leur entreprise, dépassant la simple assistance du franchiseur ou la nécessité de préserver l'unité du réseau ou de transmettre le savoir-faire (essentiellement orienté sur les signes distinctifs) et compromettant leur qualité d'entrepreneur indépendant telle que rappelée dans le contrat de franchise (article 3 version n°1, article 20 version n°2) et mis en évidence dans les différentes déclarations des franchisés
Ainsi M. P., gérant la société P. restauration ayant plusieurs points de vente, déclarait le 16 décembre 2013 (pièce ministre n° 11) :
« Je considère que le modèle de franchise Pizza Sprint ne permet pas au gérant indépendant d'être réellement indépendant, puisque ma marge de manœuvre est beaucoup trop restreinte par rapport aux exigences de M. X., gérant de la franchise Framapizz. En effet, il gère également le bureau d'études Somainmag, qui aménage les points de vente et la plate-forme d'approvisionnement Logispizza, auprès de qui nous devons acheter la majeure partie de nos matières premières.
Ce cumul est problématique, en ce sens que le franchise voit sa liberté entrepreneuriale bordée, alors même qu'il est censé être un commerçant indépendant. Pour ma part, j'ai commencé la démarche pour vendre un à un mes magasins Pizza Sprint, ayant trop de difficultés à payer mes charges sociales. »
Or, les sociétés intimées rappellent elles-mêmes pour le contrat de franchise « qu'il existe un rapport d'interdépendance entre le franchiseur et le franchisé qui se traduit par une recherche d'équilibre dans le contrat de franchise. L'équilibre ne signifie pas pour autant l'égalité, car les deux parties ne se placent pas au même niveau :
- le franchisé est un commerçant indépendant responsable de sa gestion ayant choisi librement sa stratégie de développement
- le franchiseur, initiateur du concept et garant de l'identité et de la réputation du réseau doit jouer le rôle d'instructeur, de moteur et de contrôleur de la bonne application du concept et du respect de l'image » (conclusions page170 citant la Fédération Française de la Franchise FFF).
Au regard de l'ensemble de ces éléments, la Cour constate que le franchiseur retirait un avantage excessif des clauses d'approvisionnement et de stock minimum qui n'étaient équilibrées ni par d'autres clauses du contrat ni ne trouvaient dans leur mise en œuvre de justification quant à la préservation de l'homogénéité du réseau ou à la transmission du savoir-faire. Il y a lieu d'en déduire l'existence d'un déséquilibre significatif entre les droits du franchiseur et les obligations des franchisés résultant de la combinaison de la clause d'approvisionnement et de stock minimum, tant dans leur rédaction que dans les pratiques développées par le franchiseur dans leur mise en œuvre.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
Sur la clause d'aménagement initial des points de vente :
Le ministre de l'économie fait valoir que la clause d'aménagement du point de vente des franchisés, si elle semble laisser la possibilité pour les franchisés de recourir aux services d'un autre architecte que celui agrée par le franchiseur (la société Somainmag, dont le gérant est M. X.), en pratique les conditions et le coût de l'agrément sont tels que les franchisés sont rapidement dissuadés de faire jouer la concurrence ce qui limite fortement leur capacité concurrentielle et qui participe à la fragilité de leur situation économique. Il prétend en outre que l'architecte « agréé » par le franchiseur n'est autre qu'une des sociétés appartenant au franchiseur lui-même qui, de surcroît, surfacture les prestations réalisées pour l'aménagement des nouveaux points de vente (+ 7%), générant dès lors un surcoût pour les franchisés nouvellement installés. Il en déduit que la contrainte exercée sur les membres du réseau de franchise Pizza Sprint est établie, tout comme le caractère manifestement déséquilibré de cette clause et de sa mise en œuvre.
Les franchisés soutiennent que dans les faits les franchisés étaient fortement incités à recourir aux services de la société Somainmag afin qu'elle intervienne, ne laissant aucune place à un autre architecte. Ils précisent que la quasi-totalité des franchisés ont été contraints de faire appel à cette société qui en choisissant les corps d'état, contraignait les entreprises sélectionnées de lui verser une commission.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza font valoir que la clause d'aménagement du point de vente prévoit clairement une alternative entre l'architecte agrée par le franchiseur, et un architecte choisi par le franchisé après agrément par le franchiseur. Elles prétendent que le ministre ne démontre pas que les franchisés seraient « découragés » de recourir à un architecte autre que Somainmag compte tenu des conditions et du coût de l'agrément, en procédant simplement par affirmation. Elles ajoutent que certains franchisés du réseau ont fait appel à d'autres architectes que Somainmag et aucune sanction n'a été prise à leur égard. Elles soutiennent que la surfacturation des travaux d'aménagement n'est pas non plus démontrée par le ministre.
Les sociétés Somainmag et Food Court Finance soulèvent en premier lieu l'irrecevabilité de l'action du ministre à l'égard de la société Somainmag, s'agissant des demandes indemnitaires émises par ce dernier au profit de certains franchisés aux motifs que des jugements ou transactions sont intervenus sur ce point. Sur le fond, elles concluent au rejet des prétentions du ministre faute de preuve.
Sur ce,
La Cour observe que le ministre de l'économie ne formule aucune demande indemnitaire au profit des franchisés concernant la clause d'aménagement du point de vente dont il sollicite la nullité sur le fondement du déséquilibre significatif.
La clause d'aménagement initial du point de vente (article 6.2.4 du contrat version n°1, article 8 du contrat version n°2) organise formellement le choix pour le franchisé de faire procéder à l'aménagement du point de vente conformément à la « bible » soit par l'architecte agréé par le franchiseur, soit par l'architecte de son choix, à la condition de le faire agréer par le franchiseur.
Il n'est pas contesté que le cabinet d'architecte agrée par le franchiseur est la société Somainmag, filiale du groupe Sprint Pizza et gérée par M. X. S'il ressort des déclarations des franchiseurs lors de l'enquête, que ces derniers étaient fortement incités à choisir l'architecte agrée, d'autant plus que la procédure d'agrément était à leur frais, il n'est pas contesté que plusieurs franchiseurs ont eu recours à l'architecte de leur choix, ne mettant ainsi pas en évidence une véritable obligation à la charge des franchisés de recourir à la société Somainmag pour l'aménagement de leur point de vente. Comme l'a relevé le tribunal, les franchisés ayant eu recours à la société Somainmag n'ont émis aucune contestation sur la réalité et la qualité de la prestation, et ont pu y trouver un intérêt pratique, une simplicité opérationnelle proposée par le franchiseur. Par ailleurs la pratique de la surfacturation alléguée par le ministre n'est pas suffisamment étayée.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a considéré que le déséquilibre significatif n'était pas établi concernant la clause d'aménagement des points de vente et du recours aux services de la société Somainmag.
Sur la clause Intuitu personae :
Les articles 5 et 23 intitulés « Intuitu Personae » dans les deux versions du contrat de franchise stipulent :
« Le présent contrat a été conclu en considération des éléments suivants :
- la répartition actuelle du capital du Franchisé,
- la personnalité des dirigeants effectifs du Franchisé,
- l'engagement du Franchisé de respecter strictement l'image et la cohérence du réseau de franchise,
- le respect par le Franchisé de l'image attachée aux signes distinctifs, et les conditions d'utilisation visées aux présentes,
- la non-divulgation par le Franchisé, à des personnes étrangères au réseau de franchise PIZZA SPRINT, le savoir-faire et plus généralement toutes informations confidentielles qui lui sont ou seront connues en raison du présent contrat,
- le respect par le Franchisé des directives nécessaires à l'évolution du Réseau PIZZA SPRINT.
En conséquence, le présent contrat, conclu intuitu personae ne pourra être cédé ou transmis sous quelle que forme que ce soit, et même par fusion, scission ou apport partiel d'actif, sans l'accord préalable et exprès du Franchiseur.
Le Franchisé s'engage à informer le Franchiseur de tout projet ayant une incidence sur la répartition actuelle de son capital ou de celui de son principal actionnaire, ou dans l'identité de ses dirigeants effectifs au minimum 2 mois avant la réalisation de l'opération projetée.
Le Franchiseur aura alors la possibilité de constater la rupture anticipée du présent contrat de ce fait sous la seule réserve de manifester son intention par lettre recommandée avec avis de réception, adressée au minimum un mois avant l'opération projetée. »
Le ministre de l'économie fait valoir que le contrat de franchise est un contrat intuitu personae si bien qu'il ne peut être cédé sans l'accord des parties. Selon lui, ce principe se comprend notamment du fait que le franchisé, tout comme le franchiseur s'accordent à signer un contrat en fonction de leurs profils respectifs :
- pour le franchisé, l'intuitu personae est fonction de ses qualifications, de sa motivation à intégrer le réseau,
- pour le franchiseur, l'intuitu personae réside dans l'identité du réseau qu'il incarne et dans les perspectives de développement de ce dernier
Dès lors, selon le ministre la clause intuitu personae doit, en principe, s'entendre comme bilatérale et comme s'imposant aussi bien au franchisé qu'au franchiseur. Aussi, il estime que la clause précitée est déséquilibrée en ce qu'elle ne prévoit la rupture anticipée qu'au seul bénéfice du franchiseur, sans réciprocité pour le franchisé, et de surcroît suivant une rédaction large puisqu'elle ne permet pas d'appréhender clairement ce qu'il faut entendre par l'acceptation 'incidence' ou ce qu'elle recouvre augmentant ainsi le champ des possibles. Le ministre fait en outre remarquer que le déséquilibre significatif de cette clause s'est matérialisé lors de la cession de la société Fra-Ma-Pizz à Domino's Pizza sans aucune information des franchisés et alors que cette cession a emporté des conséquences notables sur le devenir de leurs points de vente.
Les franchisés soutiennent en substance que la dimension totalement unilatérale de cette disposition constitue manifestement un déséquilibre significatif ou à tout le moins un avantage sans contrepartie.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza relèvent d'abord que la position du ministre de l'économie, suivant laquelle le contrat de franchise est un contrat intuitu personae si bien qu'il ne peut être cédé sans l'accord des parties, est erronée en droit. Elles soulignent qu'il importe de distinguer deux séries d'hypothèses selon que l'opération examinée emporte ou non changement de la personnalité morale du cocontractant. En premier lieu, en cas de cession de tout ou partie des titres d'une société, comme en l'espèce le franchiseur, et/ou de changement de ses dirigeants, la personne morale (le franchiseur) subsiste, conformément au principe d'autonomie de la personne morale et que dès lors, il est nul besoin de l'accord des franchisés pour autoriser la cession des titres du franchiseur ou un changement de ses dirigeants, et ce que le contrat de franchise soit ou non conclu intuitu personae (Com. 29 janvier 2013, pourvoi n°11-23.676 ; Bull IV, n° 19). Il est relevé toutefois, que le contrat de franchise peut comporter une clause, qui tenant compte de l'intuitu socii, permet expressément de mettre fin au contrat de franchise en cas de changement dans la composition du capital social du franchiseur ou de changement de ses dirigeants. En second lieu, en cas de changement de la personne morale du cocontractant franchiseur (tels la cession du contrat, ou les opérations de fusion-absorption et apport partiel d'actifs) l'accord du cocontractant est toujours requis et pouvant intervenir par avance (suivant une clause contractuelle), au moment de la cession, ou ultérieurement, et ce en application de la jurisprudence ou de l'article 1216 du code civil. Les sociétés intimées insistent sur le fait, qu'en l'espèce, il y a eu cession de la totalité des titres de la société Fra-ma-Pizz, et qu'en conséquence la personne morale du franchiseur est demeurée inchangée, de sorte que les franchisés du réseau Pizza Sprint n'avaient pas à donner leur autorisation à cette cession de titres, le contrat ne comportant pas de clause concernant l'intuitu socii.
Ensuite, les sociétés intimées soutiennent que la clause litigieuse n'a manifestement rien de déséquilibrée, dès lors qu'il est habituel que le contrat de franchise comporte une clause prévoyant un intuitu personae et un intuitu socii au profit du seul franchiseur et que la clause litigieuse se justifie au regard de l'existence même du réseau, en ce que la personnalité du dirigeant de la société franchisée est déterminante de la volonté du franchiseur de contracter et que l'enseigne et le savoir-faire du franchiseur sont déterminants de la volonté du franchisé de contracter.
Sur ce,
La Cour constate que la clause intuitu personae figurant au contrat de franchise Sprint Pizza est rédigée en considération de la personne du franchisé. Elle rappelle l'impossibilité de cession ou transmission du contrat sans l'accord préalable et exprès du franchiseur. Cette clause prévoit également l'obligation du franchisé et le droit du franchiseur suivants :
« Le Franchisé s'engage à informer le Franchiseur de tout projet ayant une incidence sur la répartition actuelle de son capital ou de celui de son principal actionnaire, ou dans l'identité de ses dirigeants effectifs au minimum 2 mois avant la réalisation de l'opération projetée.
Le Franchiseur aura alors la possibilité de constater la rupture anticipée du présent contrat de ce fait sous la seule réserve de manifester son intention par lettre recommandée avec avis de réception, adressée au minimum un mois avant l'opération projetée. »
Cette clause intuitu personae prévue au bénéfice du franchiseur se justifie effectivement dans son principe par le fait que ce dernier a accepté de confier l'exploitation de son concept à une personne dont il a pu précisément juger les aptitudes, la personnalité, le parcours professionnel et le financement afin de préserver la réputation du réseau et favoriser son développement.
Toutefois, la Cour observe en premier lieu que telle que rédigée dans ses derniers alinéas, l'obligation d'information du franchisé porte sur « tout projet » ayant une « incidence » sur la répartition du capital ou dans l'identité de ses dirigeants avec le droit corrélatif pour le franchiseur de la possibilité de constater la rupture anticipée du contrat de franchise et ce sans frais. Comme le relève le ministre, l'emploi du terme « incidence » est imprécis en ce qu'il ne permet pas d'appréhender la nature et le degré de l'effet du projet sur l'actionnariat ou la personne du franchisé susceptible de motiver de la part du franchiseur la résiliation anticipée du contrat de franchise, ce qui est une conséquence grave pour ce dernier.
En second lieu, la Cour observe que la clause intuitu personae n'est prévue qu'au seul bénéfice du franchiseur. Or l'économie du contrat de franchise Sprint Pizza, comme de tout contrat de franchise, suppose également une prise en considération du franchiseur par le franchisé, qui a fait le choix de rejoindre le réseau, sur la base d'un certain nombre de critères tels que le concept de franchise, de la notoriété de la marque, de la solidité de la tête de réseau, des perspectives de développement de l'enseigne. Aussi, sans qu'il y ait nécessairement un changement de la personne morale, un changement dans la structure de l'actionnariat du franchiseur ou un changement de dirigeant sont de nature à avoir également « une incidence » sur ces critères de choix du franchisé, tel le rachat par un réseau concurrent, et bouleverser l'équilibre de son entreprise, ce qui est d'autant plus problématique dans le cas où en l'espèce, le franchisé ne peut résilier le contrat à son initiative sans frais.
Dès lors la clause intuitu personae figurant au contrat de franchise Pizza Sprint, en ce qu'elle permet au franchiseur de décider de la fin anticipée du contrat de franchise sans frais pour tout projet ayant une « incidence » sur la répartition actuelle du capital ou de celui du principal actionnaire, ou dans l'identité des dirigeants du franchisé, et en ce qu'elle ne prévoit pas de réciprocité pour le franchisé, crée un déséquilibre significatif entre les droits du franchiseur et les obligations du franchisé.
Ce déséquilibre significatif s'est par ailleurs vérifié dans les circonstances de l'espèce.
En effet, courant 2015 les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center se sont rapprochées de la société Domino's Pizza, un protocole a été signé le 13 octobre 2015, puis l'ensemble des titres (100 %) composant le capital social des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center a été cédé à la société Domino's Pizza le 26 janvier 2016 pour un montant d'environ 35 millions d'euros (conclusions franchisés page 25).
Lors de cette opération de rachat, la franchise Pizza Sprint n'a pas été dissoute, les sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center sont demeurées, et un organigramme opérationnel Pizza Sprint a été constitué. Toutefois, il n'est pas contesté que le projet à court terme était la conversion du réseau Sprint Pizza à l'enseigne Domino's Pizza (Déclarations de M. V., directeur opération de Domino's Pizza France, le 24 mars 2016, pièce ministre n° 5 ; courrier de M. X. le 24 novembre 2015 pièce ministre n° 20 ; pièce franchisés n° 55 article AC Franchise du 13 octobre 2015, courrier de M. X. au fournisseur Pizza Center du15 octobre 2015 pièce franchisés n° 61). Aux termes des contrats de franchise, le franchiseur Print Pizza n'avait aucune obligation d'information des franchisés qui n'ont effectivement pas été mis au courant de ce projet de cession et des conséquences sur le devenir du réseau, alors même que certains franchisés avaient conclu des nouveaux contrats de franchise quelques mois avant la cession (Contrat Pizza Sprint de M. H. conclu le 29 juin 2015, contrat de M. A. signé le 18 septembre 2015, contrats de M. Le N. et Mme D. signés fin 2015, pièces ministre n° 113, 115, 39 et 40).
Les franchisés ont été mis devant le fait accompli lors d'un séminaire du 13 octobre 2015 qui ne comportait pas cette information à l'ordre du jour (pièce n° 58 - invitation au séminaire du 13 octobre 2015) et alors que la conversion de l'enseigne était confirmée pour février 2016 par un courrier de M. X. le 23 octobre 2015, les franchisés n'avaient aucune information juridique et financières concrètes sur le devenir de leur contrat de franchise Sprint Pizza et de leur activité (courrier de M. X. des 23 octobre 2015 pièce franchisés n°62).
Ainsi, M. J., gérant de la société Pizz Center ayant plusieurs points de vente, déclarait le 7 mars 2016 (pièce ministre n° 18) :
« Lors de la réunion annuelle du réseau, qui s 'est déroulée par 13 octobre 2015, nous avons appris le rachat de la marque PIZZA SPRINT par DOMINO'S PIZZA ENTREPRISE (DPE) effectif en janvier 2016. Aucune information préalable ne nous a été communiquées. Aucun détail sur les conséquences de ce rachat ne nous a été donné le jour de cette réunion, ce qui a plongé la franchise dans une grande inquiétude sur son devenir.
Le plan de conversion nous a été adressé par courrier sans aucun courrier de présentation, ni document d'informations précontractuelles.
Selon le discours officiel, il n'est pas envisagé une disparition de la marque PIZZA SPRINT qui doit toujours faire l'objet d'un développement commercial. Cependant, des documents, notamment l'annonce réalisée sur le site de DOMINO stipulant une conversion des restaurants PIZZA SPRINT d 'ici à la fin de l 'année 2017.
Pour illustrer l'objectif de conversion des magasins et la disparition de l'enseigne PIZZA SPRINT, j'ai eu en la visite non sollicitée en novembre 2015, d'un franchisé du réseau DOMINO, me menaçant de l'implantation d'un concurrent DOMINO sur V. si je persistais à refuser la conversion de mon magasin.
Mon refus d'intégrer la franchise DOMINO se fonde sur plusieurs points :
- un coût à l'adhésion (royalties et services marketing) passant de 4 % à 12,5 % pour mon établissement de V.) et de 5,5 % at 11% pour mon établissement de C.,
- une très mauvaise réputation de l'enseigne au point de vue des franchisés, mise à jour notamment par le collectif PEPERONI.
- une qualité produit moindre pour le consommateur, qui ne correspond pas aux objectifs de mes sociétés.
Afin de trouver une issue à cette situation, j'ai engagé une procédure de médiation avec DOMINO le 19 février 2016, demandant notamment une sortie de mon contrat PIZZA SPRINT sans application des indemnités dues au franchiseur et de la clause de non-concurrence.
La rupture du contrat PIZZA SPRINT aux conditions actuelles serait synonyme de la fin de mon activité. »
Dans le même sens, déclarations de M. X., locataire-gérants de plusieurs établissements à enseigne Pizza Sprint le 18 décembre 2015 (pièce ministre n°62) ;
Devant l'incertitude de leur situation, 43 franchisés, représentant une soixantaine de magasins (sur 77 franchisés) ont constitué une association pour faire valoir leurs intérêts (pièce franchisés n°59). Ainsi M. B., gérant de la société Pizz Parth déclarait le 29 février 2016 (pièce ministre n°81) :
« Le but de cette association est de défendre les franchisés de PIZZA SPRINT, ceux qui souhaitent conserver l'enseigne et ceux qui souhaitent passer DOMINO'S dans des conditions acceptables.
Nous nous sommes déjà réunis à plusieurs reprises depuis fin octobre 2015 et nous réfléchissons à la procédure à éventuellement engager pour permettre aux franchisés de faire valoir leurs droits.
Je vous signale que l'association a adressé plusieurs courriers à Monsieur Andrew R. lui demandant des explications et éléments relatifs aux conditions de conversion et à l'avenir de la franchise PIZZA SPRINT.
Suite à ces échanges, Monsieur Bart de V. accompagné de Monsieur X. nous a reçu le 19 janvier 2016. De cette réunion, il n'en est absolument rien ressorti et nous n'avons obtenu aucune information ni garantie supplémentaire.
II a fallu attendre le 25 janvier 2016 pour que Monsieur De V. adresse un courrier à l'ensemble des franchisés PIZZA SPRINT indiquant que ceux-ci avaient le choix de rester sous enseigne PIZZA SPRINT ou de passer DOMINO'S PIZZA. Ce n'est pas pour autant que des informations précises ont été communiquées aux franchises pour leur signifier les conditions de la conversion.
L'association est revenue a la charge sur ce dernier point et aucune réponse n'a été apportée par DOMINO'S PIZZA.
Aujourd'hui, nous sommes toujours dans l'expectative. »
Il n'est pas contesté par les parties que de janvier 2016 à juillet 2018, le réseau à enseigne Sprint Pizza est passé de 89 magasins à 11, puis à 4 magasins en avril 2020.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté le déséquilibre significatif résultant de la clause intuitu personae.
Sur les clauses de résiliation et de cessation du contrat de franchise :
Dans la version n° 1 du contrat de franchise, les clauses n° 10, 11 et 14 stipulent :
10 Résiliation
Le présent contrat pourra être résilié par le Franchiseur en cas :
- D'inexécution parle Franchisé de l'une quelconque des clauses et conditions du présent contrat et notamment le non-paiement d'une facture au Franchiseur ou aux fournisseurs référencés, le paiement d'une redevance, la violation des clauses d'exclusivité, le non- respect des normes de qualité et ce, un mois après mise en demeure restée sans effet d'avoir à respecter le contrat signifié par lettre recommandée avec accusé de réception, et précisant l'intention de faire jouer la présente clause,
- De condamnation pénale du Franchisé à raison de l'exploitation du fonds de commerce, de l'entreprise ou de la société, par simple lettre recommandée avec accusé de réception,
- Du non-respect par le Franchisé des lois relatives notamment à l'activité professionnelle, à la gestion et au fonctionnement de l'entreprise,
- De violation d'une obligation ou de l'esprit du présent contrat par le Franchisé malgré une mise en demeure restée infructueuse pendant un délai (1) mois
De même, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire du Franchisé, le présent contrat sera résilié de plein droit après une mise en demeure adressée à l'administrateur restée plus d'un mois sans réponse.
Le présent contrat sera résilié de plein droit en cas de cessation d'activité du Franchisé.
11 Conséquences de la cessation du contrat de Franchise
Aucune indemnité ne sera due au Franchisé à l'expiration ou à la résiliation du présent contrat
(...)
14 Clause pénale
En cas de cessation anticipée du contrat imputable au Franchisé, notamment pour manquement à ses obligations contractuelles, celui-ci sera tenu de verser au franchiseur, sans préjudice de toute autre indemnité, une pénalité (...), de 5 % du chiffre d'affaires de référence, multiplié par le nombre d'années qui restent à courir jusqu'au terme du contrat.
Dans la version n°2 du contrat de franchise, les clauses n°19 et 24 stipulent :
19 Résiliation
Le présent contrat pourra être résilié de plein droit à la demande de l'une des parties en cas d'inexécution par l'autre partie d'une quelconque de ses obligations.
Sauf faute grave qui impliquera une résiliation immédiate, la résiliation prendra effet un mois après envoi d'une mise en demeure restée infructueuse adressée par lettre recommandée avec
avis de réception.
En cas de résiliation à l'initiative du franchiseur, le franchisé devra lui verser une indemnité égale au montant des redevances qui auraient été exigibles jusqu'au terme normal du contrat, ce montant étant déterminé sur la base de la moyenne des redevances dues au franchiseur au cours du dernier trimestre avant la résiliation.
En toute hypothèse, quel que soit le montant des redevances dues, l'indemnité ne saurait être inférieure à 50.000 €.
24 Cession du contrat
Aucune indemnité ne sera due au Franchisé à l'expiration du présent contrat qu'elle qu'en soit la cause.
Le ministre de l'économie faire valoir en substance que si ces clauses prévoient une possibilité pour l'une ou l'autre partie de résilier le contrat, elle ne prévoit en revanche une indemnité de résiliation qu'au seul bénéfice du franchiseur, aucune clause ne prévoyant l'obligation réciproque à la charge du franchiseur dans le cas où celui-ci ne respecterait pas ses propres obligations. Il ajoute que cette absence de réciprocité dans les modalités de résiliation est confirmée par la clause relative à la cessation du contrat, laquelle prévoit qu'aucune indemnité ne sera due à l'expiration du contrat qu'elle qu'en soit la cause.
Les franchisés relèvent en particulier dans la version n° 1 du contrat de franchise que n'importe quel manquement est susceptible d'aboutir à la résiliation du contrat, y compris un manquement « à l'esprit » de celui-ci ou le simple non-paiement d'une facture de fournisseurs référencés, à savoir la société Pizza Center, et ce moyennant une pénalité importante. Ils soulignent que la possibilité de saisine du juge par le franchisé en cas de manquement du franchiseur, crée un déséquilibre significatif, ou à tout le moins un avantage sans contrepartie.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza répliquent pour l'essentiel que s'agissant du contrat conclu le 10 mai 2012 pris pour référence par le ministre, l'article 19 prévoit bien deux types d'obligations distinctes mise en cause en l'espèce, la faculté bilatérale, c'est à dire pour chacune des deux parties, de résilier le contrat en cas de manquement par l'autre partie à l'une de ses obligations contractuelles et l'indemnisation résultant de la résiliation anticipée du contrat de franchise. Elles soutiennent que cette clause est exempte de tout reproche en ce qu'elle peut être mise en œuvre par chacune des parties en cas de manquement par l'autre partie à l'une de ses obligations. Elles précisent que selon la jurisprudence au visa de l'article 1184 ancien du code civil, le fait qu'un contrat stipule une faculté de résiliation au bénéfice d'une seule des parties n'est pas constitutif d'un déséquilibre significatif dès lors que la clause résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques et que les parties ont la possibilité de demander en justice la résolution du contrat avec des dommages-intérêts. Elles ajoutent qu'il est admis en jurisprudence qu'une clause pénale puisse être stipulée au seul bénéfice d'une des parties, sans que cette dissymétrie ne constitue un déséquilibre significatif au sens de l'article L. 442-6 du code de commerce et que par ailleurs le juge dispose d'un pouvoir d'appréciation du quantum fixé aux termes de la clause pénale. Enfin, elles soutiennent que la rédaction du contrat doit s'interpréter comme excluant toute indemnité du franchisé lorsque la résiliation du contrat de franchise lui est imputable ou lorsqu'elle résulte de la seule cessation du contrat de franchise à son terme.
Sur ce,
La clause n°19 dans la version n° 2 du contrat de franchise prévoit bien une faculté pour chacune des parties de résilier le contrat en cas de manquement par l'autre partie à l'une de ses obligations contractuelles. La clause pénale contenue à cet article a pour objet de sanctionner l'inexécution par le franchisé de ses obligations contractuelles et d'en fixer le montant de l'indemnité due par avance. Le fait que cette clause pénale soit stipulée pour le seul défaut d'exécution des obligations du franchisé n'empêche pas ce dernier d'obtenir une indemnisation en cas d'inexécution par le franchiseur de ses obligations et d'en déterminer lui-même le montant. Par ailleurs, il n'est pas démontré que le montant minimum de la pénalité stipulée au profit du franchiseur soit manifestement abusif et en toute hypothèse pourra être soumis au pouvoir modérateur du juge.
En outre il résulte de la lecture combinée de cette clause n° 19 avec l'alinéa 1er de la clause n° 24, que le contrat doit s'interpréter comme excluant toute indemnité du franchisé lorsque la résiliation du contrat de franchise lui est imputable ou lorsqu'elle résulte de la cessation du contrat de franchise à son terme.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, la Cour constate que ces clauses n'induisent pas de déséquilibre significatif au sens des dispositions de l'article L. 442-6-I-2°. Le jugement sera infirmé sur ce point.
En revanche, s'agissant de la clause n° 10 Résiliation prévue au contrat de franchise dans sa version initiale, la Cour observe que non seulement la rédaction ne prévoit pas de faculté pour chacune des parties de résilier le contrat en cas de manquement par l'autre partie à l'une de ses obligations contractuelles, mais prévoit une faculté de résiliation au seul bénéfice du franchiseur pour des manquements du franchisé dont certains ne résultent pas directement des obligations du contrat de franchise, à savoir le non-paiement d'une facture aux fournisseurs référencés ou la violation de 'l'esprit' du contrat. Cette clause prévoit également la possibilité du franchiseur de résilier le contrat avec toutes les conséquences graves pour le franchisé (paiement d'une clause pénale, arrêt de son activité...), pour le non-paiement 'd'une redevance' ou non-respect par le franchisé des lois relatives notamment à l'activité professionnelle à la gestion et au fonctionnement de l'entreprise sans autre précision. Il est également prévu une résiliation de plein droit du contrat de franchise après simple mise en demeure adressée à l'administrateur restée plus d'un mois sans réponse. La rédaction de la clause pénale n° 14 doit s'interpréter en ce que la clause pénale s'applique pour l'ensemble de ces 'manquements'. Enfin l'alinéa 1er de la clause n°11, tel que rédigé et lu en combinaison avec la clause n°10, signifie que le franchisé ne pourrait obtenir d'indemnité en cas de résiliation du contrat aux torts du franchiseur.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, la Cour constate que les clauses n°10 et 14, ainsi que l'alinéa 1er de la clause n° 11 en ce qu'elle vise la résiliation, induisent un déséquilibre significatif entre les droits du franchiseur et les obligations des franchisés.
Sur la mise en œuvre du contrôle des points de vente :
Le ministre de l'économie fait valoir en substance que pour les contrôles par les laboratoires, les clients « Mystères » et les animateurs de réseau imposés par le franchiseur, les franchisés n'ont pas la possibilité de faire intervenir leur propre prestataire pour la réalisation de ces contrôles, ni la possibilité de décider des points à vérifier ou encore celle de négocier les tarifs de ces prestations, et constituent un déséquilibre significatif dans la relation commerciale. Le ministre précise que ses demandes n'ont pas pour objet de démontrer, in abstracto, le défaut de validité de clauses permettant les contrôles, par les franchisés, du respect du concept et du savoir-faire, mais bien, de démontrer que la mise en œuvre des contrôles exercés par le franchiseur Fra-Ma-Pizz constitue un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.
Les franchisés précisent que ce système mis en place était uniquement destiné à accroître les marges du franchiseur.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza répliquent pour l'essentiel que les clauses relatives aux contrôles d'hygiène et visites mystères, ainsi que la pratique des contrôles d'animateur de réseau sont valables et que le ministre ne démontre aucun déséquilibre significatif.
Sur ce,
S'agissant des contrôles d'hygiène, le ministre non seulement ne conteste pas la validité de la clause prévoyant de tels contrôles par « un organisme tiers habilité », mais ne démontre pas davantage que le prestataire habituel était imposé aux franchisés, en ce que ces derniers auraient essuyé un refus de recourir à un autre prestataire ou auraient été sanctionnés. Il y a lieu de relever qu'en la matière, comme le relève le franchiseur, les points de contrôle sont standardisés.
S'agissant des contrôles par le client mystère, de même le ministre non seulement ne conteste pas la validité de la clause prévoyant des visites « par un organisme tiers soumis à l'agrément du franchiseur », mais ne démontre pas davantage que le prestataire habituel était imposé aux franchisés, en ce que ces derniers auraient essuyé un refus de recourir à un autre prestataire ou auraient été sanctionnés.
S'agissant du contrôle des animateurs de réseau, il n'est pas contesté que leurs contrôles ont été réalisés sans que leur existence n'ait été mentionnée dans les différents documents remis aux franchisés (DIP, Bible ou contrat de franchise). Si ces contrôles dont il a été constaté ci-dessus visaient essentiellement à vérifier l'approvisionnement des achats auprès de la société Pizza Center et renforcé le déséquilibré constaté concernant la clause d'approvisionnement, le principe même de leur intervention n'a pas été contesté par les franchisés et ne peut constituer en soi un déséquilibre significatif dans le cadre de l'obligation d'animation du réseau par le franchiseur.
Le jugement sera confirmé sur ces points.
Sur la fixation des prix de vente et la maîtrise des actions promotionnelles :
Le ministre de l'économie soutient en substance qu'en dépit du principe d'indépendance du franchisé rappelé dans les contrats de franchise conclus entre la société Fra-Ma-Pizz et ses franchisés, le franchiseur contrôlait strictement les prix de vente et la politique de promotions appliquées aux consommateurs, avec une pratique de surfacturation des publicités, limitant ainsi la capacité concurrentielle de ses franchisés et fragilisant leur situation économique. Il estime que le fait pour le franchisé de ne pas pouvoir fixer librement ses prix ni déterminer sa politique commerciale constitue un déséquilibre significatif.
Sur ce,
En premier lieu, comme le soutiennent les sociétés intimées, le ministre de l'économie et les franchisés ne démontrent pas l'existence d'une pratique de prix imposés telle que réprimée par les dispositions de l'article L. 442-5 ancien du code de commerce. En second lieu, les pratiques telles que dénoncées par le ministre, ne peuvent en elles-mêmes caractériser un déséquilibre significatif, mais ont été retenues par la Cour comme un élément d'appréciation dans la caractérisation du déséquilibre significatif résultant des clauses d'approvisionnement et de stocks minimum.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a ordonné aux sociétés intimées de permettre aux franchisés, grâce à un outil informatique adapté, de pratiquer leurs propres prix de vente.
Sur la formation dispensée au sein du réseau Pizza Sprint et sa facturation :
Le ministre de l'économie relève que le contrat de franchise prévoit que le droit d'entrée dans le réseau correspond à la rémunération de la formation initiale et de l'assistance initiale, et dans le même temps au titre de l'article relatif à la formation initiale la facturation des frais déboursés par le franchiseur pour assurer l'assistance suivant l'ouverture du point de vente (75 euros par jour). Il précise qu'au élément probant ne permet en l'espèce d'attester que le franchiseur s'est attaché, au sein du réseau, à faire suivre des formations régulières et adaptées au bénéfice de ses franchisés, ce qui démontre selon lui le manquement du franchiseur aux obligations qui lui incombent au titre du contrat de franchise et la caractérisation d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties auquel s'ajoute par ailleurs un doublon de facturation de la formation initiale.
Les franchisés prétendent également que les formations n'ont pas eu lieu.
Sur ce,
Comme le soutient à juste titre la société Fra-Ma-Pizz non seulement la double facturation de la même prestation de formation n'est pas démontrée dès lors que le droit d'entrée et la rémunération des débours ne portent pas sur la même prestation, mais encore les allégations du ministre à l'appui de sa demande ne relèvent pas de pratiques restrictives de concurrence, ni du déséquilibre significatif, mais tout au plus si les manquements étaient démontrés d'une action en responsabilité pour inexécution contractuelle d'une partie envers son cocontractant.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le ministre de ses demandes sur ce point fondées sur le déséquilibre significatif.
Sur la facturation des frais accessoires :
Le ministre de l'économie fait valoir en substance que des frais accessoires, tels le forfait marketing, les frais divers et les frais de port et conditionnement, étaient facturés aux franchisés alors que l'enquête a démontré que ces frais ne figuraient dans aucun document contractuel (DIP, bible, contrat de franchise) et ne correspondaient à aucune prestation réelle. Pour le forfait marketing, le ministre prétend que jusqu'en 2013 et à la régularisation des 'avenant marketing' les prestations liées au marketing étaient inclues dans les redevances de franchise et facturées avec celles-ci, que les sommes perçues mensuellement au titre du forfait marketing s'ajoutaient aux facturations déjà réglées par les franchisés au moment de chaque campagne promotionnelle et faisaient doublons avec les frais de publicité liés à la mise en place et à la diffusion des publicités. Pour les autres frais, le ministre soutient qu'ils étaient déjà intégrés dans les tarifs des produits tel que cela ressortait des conditions générales de vente et étaient sans aucune corrélation avec la valeur ou la quantité des supports publicitaires délivrés.
Le ministre souligne que la théorie du consensualisme ne peut suffire à valider le bien-fondé de ces facturations au regard du droit des pratiques restrictives de concurrence, du seul fait de l'existence de facturations récurrentes adressées aux franchisés. Il relève que :
- l'absence de contestation expressément manifestée par le cocontractant ne signifie aucunement son accord sur le paiement des « frais » litigieux,
- la situation de dépendance dans laquelle se trouvent les franchisés à l'égard du franchiseur les empêchent indubitablement de contester les factures qu'ils trouveraient pourtant dénuées de contreparties,
- les frais de « forfait marketing » de 150 euros mensuel étaient au départ prélevés en même temps que les royalties et non payés par une démarche volontaire des franchisés,
- les « frais de port et de conditionnement » (20 euros) figuraient sur les factures de supports marketing commandés par le franchisé et étaient payés, en ligne, au moment de la commande desdits supports induisant une impossibilité pour le franchisé de ne pas les payer,
- les « frais divers » (25 euros) figuraient sur les factures de supports marketing commandés par le franchisé et étaient payés, en ligne, au moment de la commande desdits supports induisant une impossibilité pour le franchisé de ne pas les payer,
- la tentative de régularisation d'avenants aux contrats est la reconnaissance implicite du franchiseur que ces frais n'étaient pas prévus initialement dans les contrats de franchise,
Le ministre en déduit que la facturation par le franchiseur de ces frais accessoires avaient pour dessein d'imposer des frais non justifiés aux franchisés, fragilisant davantage leurs capacités concurrentielles et leur situation économique et de participer au déséquilibre significatif observé au sein du réseau de franchise Sprint Pizza.
Les franchisés ajoutent pour l'essentiel que le contrat de franchise était présenté de manière volontairement trompeuse sur les frais accessoires et que ceux-ci ont été imposés aux franchisés suivant diverses manoeuvres techniques et d'intimidation par la société Fra-Ma-Pizz.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza répliquent sur le forfait marketing et font valoir essentiellement que :
- la redevance de franchise prévue au contrat, proportionnelle au chiffre d'affaires (en fonction d'un pourcentage fixé au contrat) rémunère uniquement 'la mise à disposition du savoir-faire et l'assistance du franchiseur' et non pas les services marketing qui ne procèdent ni du savoir-faire, ni de l'assistance ; la rémunération liée au marketing est donc distincte des prestations rémunérées par la redevance de franchise dont elle n'est pas le doublon,
- l'annexe 3 du contrat de franchise établit une liste des prestations marketing assurées par Fra-Ma-Pizz qui ne sont donc pas comprises dans la redevance principale susvisée,
- ces prestations ont toujours fait l'objet d'une facturation séparée,
- les franchisés se sont toujours acquittés d'une somme pour la rémunération des coûts de conception des campagnes publicitaires et les prestations marketing réalisées par le franchiseur, celle-ci ayant tout d'abord été fixée à 200 euros HT tous les deux mois puis à 150 euros HT par mois,
- l'avenant au contrat de franchise proposé et conclu en 2014 est uniquement venu formaliser une situation déjà existante, mise en œuvre entre le franchiseur et les franchisés depuis la conclusion de leur contrat,
- les prestations réalisées par le franchiseur au bénéfice du réseau et de l'enseigne sont bien réelles et effectives, de sorte que le forfait marketing recouvre bien des contreparties réelles et justifiées,
Sur les autres frais, les sociétés intimées expliquent que le franchiseur, au titre de sa prestation marketing assure la conception et le développement des campagnes publicitaires, les franchisés font ensuite leurs commandes de produits marketing et supports publicitaires qui sont centralisées par le franchiseur auprès du fournisseur, puis le franchiseur les reconditionne pour faire des envois individualisés aux franchisés. Les sociétés intimées soutiennent que non seulement les autres frais divers facturés ont une contrepartie réelle mais également que cette organisation a un impact sur la baisse des frais de port.
Les sociétés intimées en déduisent qu'aucun déséquilibre significatif n'est résulté de la perception du forfait marketing, des frais divers et des frais de port et conditionnement.
Sur ce,
Préalablement, il appartient à la Cour d'examiner si la perception non contestée des frais de marketing, et des frais divers, de port et de conditionnement de la part du franchiseur auprès des franchisés correspondait à une prestation réellement exécutée par celui-ci.
* Sur le forfait marketing
La Cour observe que dans les différentes versions du contrat de franchise les prestations marketing réalisées par le franchiseur sont décrites dans l'annexe 3 du contrat. A cette annexe, sont listées les prestations de marketing centralisées que la société Fra-Ma-Pizz s'engage à réaliser pour le franchisé et pour lesquelles il est expressément indiqué que les impressions et la fabrication de tout type de support tels que répertoriés sont à la charge du franchisé.
Il est également stipulé dans les différentes versions du contrat de franchise au titre de la redevance que celle-ci est due par le franchisé « en contrepartie de la mise à disposition du savoir-faire et de l'assistance apportée par le franchiseur pendant toute la durée de l'exécution du contrat ». Comme le relèvent les sociétés intimées, il ressort de ces dispositions que la rémunération des prestations de marketing n'est pas comprise au titre de la perception de la redevance.
Il n'est pas non plus contesté que jusqu'à la proposition par le franchiseur de conclure un avenant au contrat de franchise concernant le Pack Marketing, les modalités de rémunérations des prestations de marketing n'étaient pas expressément stipulées au contrat de franchise, néanmoins elles ont toujours fait l'objet d'une facturation séparée :
- de mai 2010 à janvier 2013, le forfait marketing de 150 euros HT a été facturé sur la même facture que les royalties,
- à compter de février 2013, le franchiseur a isolé la facturation du forfait marketing de 150 euros HT dans une facture unique dont le montant est resté inchangé,
Si la perception de ces frais était concomitante à celle de la redevance, la facturation séparée et sans artifice d'intitulé a alerté certains franchisés qui ont contesté le montant de ce forfait, voir même refusé la clause concernant le forfait dans l'avenant contractuel (ex : déclarations de MM P. et H. pièces ministre n° 81, 85 et 73-1).
Il ressort en outre des explications du franchiseur et des exemples de prestations marketing versées aux débats (pièces Fra-Ma-Pizz n° 8.1 à 8.35) que le forfait marketing devait rémunérer les prestations « intellectuelles » du franchiseur liées à la création et à la conception de la publicité ou de l'opération marketing d'une manière générale, et que les frais supplémentaires supportés par les franchisés lors de leurs commandes correspondaient à la réalisation des supports nécessaires à la mise en œuvre et à la diffusion des publicités.
Les pièces versées aux débats par le ministre, notamment les déclarations des franchisés, ne permettent pas de mettre en évidence que non seulement le forfait marketing ne correspondait à aucune prestation réelle notamment par un doublon de facturation, ni que le montant de ce forfait était manifestement disproportionné aux prestations de marketing réellement réalisées.
* Sur les frais divers, de port et de conditionnement
Les pièces versées aux débats par le ministre, notamment les conditions générales de vente Fra-Ma-Pizz sur les produits marketing et les déclarations des franchisés, ne permettent pas de contredire utilement le franchiseur en ce qu'il explique centraliser les demandes de supports commandés par les franchisés, reçoit les livraisons en gros des fournisseurs qui intègrent les frais de ports dans les prix des produits selon les CGV et une fois les colis réceptionnés, le franchiseur reconditionne ces livraisons en autant de colis individualisés à l'attention des franchisés, met les colis à la disposition de la plate-forme logistique dédiée aux produits 'secs' qui procède alors au transport desdits colis auprès des franchisés. Les franchisés soutiennent que le franchiseur facture des prestations d'imprimerie à des tarifs manifestement sans aucun rapport avec les coûts effectif, mais sans étayer leurs allégations d'éléments précis.
Dès lors les pièces versées aux débats et les explications des parties ne permettent pas non plus de mettre en évidence que les autres frais accessoires ne correspondaient à aucune prestation réelle notamment par un doublon de facturation ou que ces frais étaient manifestement disproportionnés aux prestations réellement réalisées par le franchiseur.
Comme l'a retenu le tribunal, il n'est donc pas démontré de déséquilibre significatif au sens des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° au titre de la perception par le franchiseur de frais accessoires.
Sur l'avantage sans contrepartie invoqué par le ministre et les franchisés :
Selon l'article L. 442-6-I-1° du code de commerce, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 applicable au litige, « engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers d'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu [...].»
Le caractère manifeste, exigé par le législateur, traduit la circonstance que seuls des avantages qui apparaissent, avec un niveau d'évidence suffisant, disproportionnés aux services rendus, sont prohibés. Si la preuve en incombe à la victime prétendue, la société mise en cause doit justifier sa position.
Le ministre de l'économie ainsi que les franchisés soutiennent que les pratiques mises en œuvre par la société Fra-Ma-Pizz consistant à facturer des frais au titre du forfait marketing, de frais divers, et de frais de conditionnement, mais aussi de frais relatifs à la formation dispensée au sein du réseau Pizza Sprint, sont abusives en ce que ces frais sont facturés en dehors du contrat cadre régissant les relations entre le franchiseur et ses franchisés et en ce qu'elles revèlent une absence de contrepartie pour les franchisés qui sont tenus de les payer.
Toutefois, il résulte des motifs qui précèdent que les pièces versées aux débats et les explications de chacune des parties ne mettent pas en évidence que les frais litigieux ne correspondaient à aucun service rendu ou disproportionnés aux services rendus. Il en est de même pour la rémunération des travaux d'aménagement des points de vente et des prestations de « client Mystère ».
Comme l'a retenu le tribunal, le ministre de l'économie et les franchisés échouent à démontrer l'existence d'avantage sans contrepartie au bénéfice de la tête de réseau au sens des dispositions de l'article L. 442-6-I-1° précité.
Sur les demandes du ministre de l'économie sur le fondement de l'article L. 442-6, III :
Les sociétés intimées soutiennent d'une part que les demandes du ministre sont sans objet en ce que plus aucun des 67 contrats contenant les clauses litigieuses ne sont encore en vigueur, le franchiseur Fra-Ma-Pizz n'a plus vocation à conclure de nouveaux contrats de franchise pour le réseau Sprint Pizza, les franchisés du réseau sont parfaitement informés de l'instance en cours.
D'autre part, elles font valoir qu'en vertu du principe de l'autonomie de la personne morale et de l'effet relatif des conventions, la société mère Domino's Pizza et la société Pizza Center sont totalement étrangères aux griefs du ministre dans la mesure où elles n'ont pas conçu les contrats de franchise litigieux, n'ont pas participé aux discussions qui ont précédé leur conclusion, ni signé ces contrats intervenus bien avant l'opération d'acquisition.
Le ministre de l'économie considère qu'il est possible, sans violer le principe de personnalité des délits et des peines, de retenir la responsabilité de l'ensemble des sociétés d'un groupe compte tenu de leur rôle respectif dans l'élaboration et l'exécution des contrats litigieux.
Concernant la société Domino's Pizza, il explique qu'elle a maintenu, à l'identique, les pratiques en vigueur au sein du réseau Pizza Sprint, qu'appartenant à un groupe mondial important, elle a certainement étudié au préalable l'organisation du réseau de franchise qu'elle s'était engagée à racheter et ne peut être totalement extérieure aux faits qui fondent ses griefs.
Concernant la société Pizza Center, le ministre de l'économie souligne que les pièces commerciales fournies par M. D., responsable opérationnel de cette société, a permis de conforter la démonstration du déséquilibre significatif de la relation commerciale avec la société Pizza Center France en application des clauses d'approvisionnement exclusif, de celle relative à l'obligation de détenir un stock minimum, de la pratique des prix de vente imposés par le franchiseur, de la surfacturation des actions commerciales et de la pratique de livraisons imposées aux franchisés.
Les sociétés franchisées, concernant la société Domino's Pizza, expliquent que cette dernière est, depuis janvier 2016, l'actionnaire unique de la société Fra-Ma-Pizz et de la société Pizza Center qui n'ont pas d'autonomie effective. Elles précisent que la société Domino's Pizza a contribué à soumettre les franchisés à des obligations créant un déséquilibre significatif en refusant de modifier les clauses des contrats de franchise frappées d'un tel déséquilibre.
Concernant la société Pizza Center, les sociétés franchisées relèvent qu'elle a directement et immédiatement bénéficié du système mis en 'uvre par la société Fra-Ma-Pizz et a directement soumis les franchisés à des déséquilibres significatifs lors de chacune des commandes passées.
Sur ce,
Concernant les clauses et pratiques pour lesquelles un déséquilibre significatif a été constaté, la Cour observe que :
- la société Fra-Ma-Pizz a rédigé et contracté les clauses litigieuses avec les franchisés et organisé diverses pratiques ayant contribué au déséquilibre des clauses,
- la société Pizza Center France a directement participé aux pratiques ayant induit un déséquilibre significatif des clauses de stock minimum et d'approvisionnement des contrats de franchise,
- la société Domino's Pizza, société mère mais également tête du réseau Domino's Pizza, a directement bénéficié lors de la prise de contrôle des sociétés Fra-Ma-Pizz et Pizza Center, du déséquilibre significatif de la clause intuitu personae pour la conversion du réseau Sprint Pizza à l'enseigne Domino's Pizza et n'a pas dans l'organisation opérationnelle du groupe immédiatement cessé les pratiques concernant l'approvisionnement exclusif et le stock minimum.
Eu égard à ces constatations :
* Sur la nullité des clauses imposant des obligations aux franchisés créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties :
Au regard des motifs qui précèdent, la Cour prononce, dans les contrats de franchise versés aux débats et conclus entre la société Fra-Ma-Pizz et les franchisés, la nullité des clauses suivantes :
- la clause intuitu personae (article 5/ article 23)
- dans la version des contrats antérieure à 2012, la clause de résiliation (article 10), la clause pénale (article 14) et l'alinéa 1er de la clause relative à la cessation du contrat de franchise en ce qu'il vise la résiliation du contrat (article 11 alinéa 1er),
Le déséquilibre significatif concernant la clause de stock minimum (article 6.2.4 stock/ article 10.1 stock) et la clause d'approvisionnement (article 6.2.4 approvisionnement/ article 10.2 produits petit matériel et matériel), ne résulte pas de la rédaction elle-même de ces clauses mais de leur mise en œuvre. Dès lors, il n'y a pas lieu d'en prononcer la nullité.
En conséquence,
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a prononcé la nullité des clauses relatives aux modalités de résiliation et de cessation.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité de la clause intuitu personae et débouté le ministre de l'économie de sa demande de nullité des autres clauses.
* Sur la cessation des pratiques :
Le jugement sera confirmé en qu'il a ordonné aux sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza de modifier, en les rédigeant correctement, les clauses intuitu personae, par avenant pour les contrats existants ou dans le corps du contrat pour les contrats à venir.
En outre, la Cour enjoint aux sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France de cesser la pratique consistant à insérer au contrat de franchise une clause de stock minimum couplée à une clause d'approvisionnement formellement non exclusive mais permettant par des règles de contrôles d'imposer de fait aux franchisés un approvisionnement exclusif ou quasi-exclusif auprès d'un fournisseur appartenant au même groupe de sociétés que le franchiseur,
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le ministre de ses autres demandes de cessation de pratiques.
* Sur les demandes de restitutions :
Le déséquilibre significatif ou l'avantage sans contrepartie n'ayant pas été constaté concernant la clause d'aménagement des points de vente, de formation, des visites de contrôles, client mystère et d'animateur de réseau, ainsi que les frais de forfait marketing, divers, de ports et de conditionnement, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le ministre de ces demandes à ce titre et en particulier de restitution à l'égard des sociétés Fra-Ma-Pizz, Domino's Pizza, Food Court Finance et Somainmag.
* Sur l'amende :
La faculté, pour le ministre, de demander au juge le prononcé d'une amende civile est laissée à son appréciation, selon le principe d'opportunité des poursuites. Il appartient, ensuite, au juge saisi d'une telle demande, d'apprécier, au cas par cas, en premier lieu, s'il y a lieu de prononcer une amende civile et en second lieu quel quantum de sanction doit être fixé. Cette appréciation doit être effectuée au cas par cas, nulle peine automatique ne pouvant résulter d'un texte.
S'agissant des critères à prendre en considération pour la fixation du quantum, l'amende civile doit viser à prévenir et dissuader les pratiques restrictives prohibées, ainsi qu'à éviter leur réitération. La gravité du comportement en cause et le dommage à l'économie en résultant doivent donc être pris en compte, ainsi que la situation individuelle de l'entreprise poursuivie, en vertu du principe d'individualisation des peines.
Le déséquilibre significatif mis en œuvre dans les clauses et pratiques déloyales relatives à l'ntuitu personae, l'approvisionnement exclusif et le stock minimum par les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center et Domino's Pizza au détriment des franchisés a causé un dommage à l'économie du système de distribution de la franchise devant reposer sur un équilibre entre les droits et obligations du franchiseur initiateur et garant du réseau et du franchisé, commerçant indépendant et responsable de la gestion de son activité. Compte tenu de la gravité des manquements, de leur durée sur plusieurs années, du trouble à l'ordre public économique, de l'importance des sociétés en cause dans le secteur de la franchise et de la restauration rapide, et de la fonction dissuasive de l'amende, il y a lieu de prononcer une amende civile à hauteur de 500.000 euros.
En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté le ministre de sa demande relative à l'amende, et les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center et Domino's Pizza seront condamnées in solidum au paiement d'une amende civile de 500.000 euros
Le jugement sera confirmé en ce qu'aucune amende n'est prononcée à l'égard des sociétés Food Court Finance et Somainmag.
* Sur les demandes du ministre dirigées contre les sociétés Food Court Finance et Somainmag :
Le ministre sera débouté de l'ensemble de ses demandes dirigées contre les sociétés Food Court Finance et Somainmag.
* Sur la publicité :
Il y a lieu d'ordonner aux frais des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza, la publication de l'extrait suivant du présent arrêt : « Par arrêt du 15 décembre 2021, la Cour d'appel de Paris a condamné in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France au paiement d'une amende civile de 500.000 euros pour des pratiques restrictives de concurrence au sein du réseau Pizza Sprint sanctionnées par l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2019-359 du 24 avril 2019 », dans le délai de 15 jours du présent arrêt, :
- sur les sites internet PIZZA SPRINT et DOMINO'S PIZZA, pendant une durée d'un mois, à compter de la première mise en ligne et qu'il sera procédé à cette publication en partie supérieure de la page d'accueil du site de façon visible et en toute hypothèse au-dessus de la ligne flottaison, sans mention ajoutée, en police de caractères « times new roman' », de taille « 12 », droits, de couleur noire et sur fond blanc, dans un encadré de 468 x 120 pixels, en-dehors de tout encart publicitaire, le texte devant être précédé du titre COMMUNICATION JUDICIAIRE en lettres capitales de taille 14
- dans les journaux suivants : Le Monde, Le Figaro, Les Echos et Ouest France, pendant une durée de quinze jours, en noir sur fond blanc et suivant une police d'écriture de type Times New Roman et de taille 12, dans la limite de 5.000 euros par publication,
Sur les demandes des franchisés :
La Cour constate que les sociétés BS Distribution, S&B Sable, Dutchesne Distribution devenue LMJ Capital, H. Argentre, H. B., H. Dol, H. Liffre, H. Vitre, P. Loyal, Pizz AG, Pizz'Parth, Renna Pizza, Semper Fi, M. Restauration, MM. B., S., D., H., G., P., H.,H., M., et F., Mmes Marina H., Stéphanie Le G. épouse H., Cristèle K. épouse H., disant intervenir à titre accessoire ne formulent plus de demandes dans le cadre de la présente procédure d'appel, se contentant de « soutenir les demandes du ministre ».
Pour les franchisés intervenant à titre principal, à savoir Mme N., M. R., M. P., M. C., M. M.-L., M. P. à titre personnel et en qualité de liquidateur amiable de la société Emeraude Pizza, M. B. es-qualités de mandataire judiciaire de la société MJM Pizz :
Les franchisés demandent d'abord l'annulation des clauses affectées d'un déséquilibre significatif au sens des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° et l'annulation consécutive de leur contrat de franchise compte tenu du nombre et du caractère substantiel de ces clauses. A défaut, ils sollicitent la résiliation de leur contrat de franchise aux torts de la société Fra-Ma-Pizz. A cet effet, ils invoquent en substance les manquements de celle-ci dans la transmission et l'actualisation du savoir-faire, le défaut d'animation et de développement du réseau et l'approvisionnement. Ils constatent qu'en 2020 la franchise Pizza Sprint est réduite à 4 magasins, aucun magasin pilote, un animateur inexpérimenté et dépourvu de moyens, un dirigeant absent et deux sociétés Pizza Center et Fra-Ma-Pizz dans une situation financière désespérée. En conséquence, les sociétés franchisées ainsi que leur dirigeant à titre personnel sollicitent la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center et Domino's Pizza à leur verser différentes sommes au titre de restitution et de dommages-intérêts.
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Domino's Pizza et Pizza Center font valoir sur la demande d'annulation de leur contrat de franchise que les franchisés n'ont pas la faculté de formuler cette demande sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce, cette prérogative étant réservée au ministre et qu'en toute hypothèse les franchisés ne démontrent pas que les conditions relatives à l'annulation de leurs contrats de franchise seraient remplies, à savoir que les clauses annulées étaient déterminantes et essentielles de la volonté des parties de contracter. Sur la demande de résiliation des contrats de franchise, les sociétés intimées constatent que l'ensemble des manquements allégués par les franchisés à l'encontre du franchiseur sont postérieurs à la réalisation de l'opération d'acquisition, date à laquelle les contrats de franchise en cause avaient déjà cessé et que les franchisés étaient déjà sortis du réseau.
Sur ce,
La Cour n'a constaté un déséquilibre significatif et la nullité consécutive que des clauses suivantes du contrat de franchise :
- la clause intuitu personae (article 5/ article 23)
- dans la version des contrats antérieure à 2012, la clause de résiliation (article 10), la clause pénale (article 14) et l'alinéa 1er de la clause relative à la cessation du contrat de franchise en ce qu'il vise la résiliation du contrat (article 11 alinéa 1er),
La partie victime d'un déséquilibre significatif, au sens de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce, étant fondée à faire prononcer la nullité de la clause du contrat qui crée ce déséquilibre, s'agissant d'une clause illicite qui méconnaît les dispositions d'ordre public de ce texte, et donc a fortiori les franchisés victimes peuvent demander l'annulation consécutive du contrat de franchise si les conditions en sont remplies.
Or, en l'occurrence, non seulement les franchisés ne démontrent pas en quoi les clauses ci-dessus annulées sont déterminantes et essentielles pour entraîner l'annulation du contrat de franchise, mais comme le relèvent les sociétés intimées, l'annulation desdites clauses ont pour effet de rétablir l'équilibre du rapport contractuel notamment en ce qu'elles limitaient les modalités de commercialisation des franchisés et leur liberté d'entreprendre. Par ailleurs, pour les contrats conclus pour les sociétés PizzLe Mans le 6 novembre 2007, Emeraude Pizza le31 mai 2011 et MJM Pizz le 14 février 2013, la demande formulée par conclusions des 24 mai 2017 et 25 juillet 2018 est prescrite.
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté les franchisés de leur demande d'annulation du contrat de franchise.
Sur la demande de résiliation des contrats de franchise aux torts du franchiseur, comme le relèvent à juste titre les sociétés intimées, les manquements invoqués par les franchisés (conclusions pages 106 à 122) ne sont étayés que par des faits postérieurs à l'opération d'acquisition du réseau Sprint Pizza par la société Domino's Pizza en janvier 2016, date à laquelle les sociétés franchisées soit faisaient l'objet d'une liquidation judiciaire soit avaient cédé leur fonds de commerce.
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté les franchisés de leur demande de résiliation du contrat de franchise aux torts de la société Fra-Ma-Pizz.
Sur les demandes spécifiques à chacun des franchisés à titre de dommages-intérêts :
* Sur les demandes de Mme N.
Mme N. a signé avec la société Fra-Ma-Pizz un contrat de franchise le 25 juillet 2014 et exploitait en location-gérance un point de vente Pizza Sprint. Elle a été placée en liquidation judiciaire le 21 juillet 2015 (clôturée le 12 janvier 2016) et considère que cet échec est de la responsabilité du franchiseur qui ne l'a pas formée, a établi un CAHT prévisionnel hors de toute réalité et que l'activité n'a jamais été rentable. Elle reproche au franchiseur de lui avoir fait perdre son emploi salarié et avoir subi une baisse de revenu en raison des agissements de la société Fra-Ma-Pizz. Elle ajoute que les multiples difficultés rencontrées au cours de l'exécution du contrat, l'orientation autoritaire de M. X., son absence de loyauté à l'égard des franchisés, le mépris manifesté à leur égard, le temps passé à tenter en vain d'obtenir des réponses sur l'évolution de l'activité, l'importance des conséquences sur leur situation personnelle et professionnelle, la longue durée de la procédure, lui ont causé un préjudice moral.
Elle demande la condamnation in solidum de la société Fra-Ma-Pizz et de la société Domino's Pizza à lui verser :
- au titre de la perte des apports la somme de 4.120,14 euros
- au titre de la perte de revenus la somme de 50.000 euros
- au titre du préjudice moral la somme de 30.000 euros
Les explications de Mme N. et les pièces versées aux débats ne permettent pas d'établir de faits et manquements précis à l'encontre des sociétés intimées en lien de causalité avec la liquidation judiciaire de son activité.
En revanche, compte tenu du fonctionnement du réseau dans la mise en œuvre des clauses d'approvisionnement et de stock minimum tel que constaté aux motifs ci-dessus, il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation d'un préjudice moral à hauteur de 10.000 euros.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme N. de ses demandes de dommages-intérêts au titre de la perte de son apport et de ses revenus.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté Mme N. de sa demande de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral, et la société Fra-Ma-Pizz sera condamnée à lui payer la somme de 10.000 euros à ce titre.
* Sur les demandes de M. R.
M. R. a signé avec la société Fra-Ma-Pizz un contrat de franchise le 11 juillet 2014 pour exploiter en location-gérance un point de vente Sprint Pizza au Mans. Il a été placé en liquidation judiciaire le 3 novembre 2015 (clôturée le 27 février 2018). Il considère que cet échec est de la responsabilité du franchiseur qui ne l'a pas formée, a établi un CAHT prévisionnel hors de toute réalité et que l'activité n'a jamais été rentable. Il reproche au franchiseur de lui avoir fait perdre son emploi salarié et avoir subi une baisse de revenu en raison des agissements de la société Fra-Ma-Pizz. Il ajoute que les multiples difficultés rencontrées au cours de l'exécution du contrat, l'orientation autoritaire de M. X., son absence de loyauté à l'égard des franchisés, le mépris manifesté à leur égard, le temps passé à tenter en vain d'obtenir des réponses sur l'évolution de l'activité, l'importance des conséquences sur leur situation personnelle et professionnelle, la longue durée de la procédure, lui ont causé un préjudice moral.
Il demande la condamnation in solidum de la société Fra-Ma-Pizz et de la société Domino's Pizza à lui verser :
- au titre de la perte de revenus la somme de 60.000 euros
- au titre du préjudice moral la somme de 30.000 euros
Les explications de M. R. et les pièces versées aux débats ne permettent pas d'établir de faits et manquements précis à l'encontre des sociétés intimées en lien de causalité avec la liquidation judiciaire de son activité.
En revanche, compte tenu du fonctionnement du réseau dans la mise en oeuvre des clauses d'approvisionnement et de stock minimum tel que constaté aux motifs ci-dessus, il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation d'un préjudice moral à hauteur de 10.000 euros.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. R. de ses demandes de dommages-intérêts au titre de la perte de ses revenus.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. R. de sa demande de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral, et la société Fra-Ma-Pizz sera condamnée à lui payer la somme de 10.000 euros à ce titre.
* Sur les demandes de M. P.
M. P. était gérant et associé unique de la société Ankenez Pizz immatriculée le 21 août 2012 pour l'exploitation d'un magasin à enseigne Pizza Sprint à Ancenis. Un contrat de franchise a été signé le 9 octobre 2012. La société Ankenez Pizz a été placée en redressement judiciaire par jugement du 13 novembre 2013 puis en liquidation judiciaire par jugement du 28 mai 2014 clôturée le 23 avril 2015). Il considère que cet échec est de la responsabilité du franchiseur qui ne lui a pas dispensé une formation adéquate, notamment sur la gestion du personnel ou sur les commandes fournisseurs ou sur le logiciel de Logis Pizza, et que son activité n'a jamais été rentable. Il ajoute que les multiples difficultés rencontrées au cours de l'exécution du contrat, l'orientation autoritaire de M. X., son absence de loyauté à l'égard des franchisés, le mépris manifesté à leur égard, le temps passé à tenter en vain d'obtenir des réponses sur l'évolution de l'activité, l'importance des conséquences sur leur situation personnelle et professionnelle, la longue durée de la procédure, lui ont causé un préjudice moral. En conséquence, il demande la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui payer :
- au titre de la perte des apports la somme de 60.000 euros
- au titre de la perte de revenus la somme de 10 654 euros
- au titre de son engagement de caution, la somme de 27 174,64 euros
- au titre du préjudice moral la somme de 30.000 euros
Les explications de M. P. et les pièces versées aux débats ne permettent pas d'établir de faits et manquements précis à l'encontre des sociétés intimées en lien de causalité avec la liquidation judiciaire de son activité.
En revanche, compte tenu du fonctionnement du réseau dans la mise en oeuvre des clauses d'approvisionnement et de stock minimum tel que constaté aux motifs ci-dessus, il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation d'un préjudice moral à hauteur de 10.000 euros.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. P. de ses demandes de dommages-intérêts au titre de la perte des apports, de ses revenus et de son engagement de caution.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. P. de sa demande de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral, et la société Fra-Ma-Pizz sera condamnée à lui payer la somme de 10.000 euros à ce titre.
* Sur les demandes de M. C.
M. C., ancien salarié de la société Fra-Ma-Pizz, a constitué deux sociétés Pise Le Mans et SEVE immatriculées les 22 mai 2009 et 21 juin 2013 pour exploiter en location-gérance deux points de vente Sprint Pizza au Mans et un contrat de franchise a été signé le novembre 2007. Les deux sociétés ont été placées en redressement judiciaire les 3 juin 2014 et 12 décembre 2013, puis en liquidation judiciaire le 3 juin 2014 (clôturée le 31 mai 2016) et 10 décembre 2013 (clôturée le 20 janvier 2015). Il considère que cet échec est de la responsabilité du franchiseur qui ne lui a remis de DIP, ni dispensé de formation et que l'activité n'a jamais été rentable contrairement au prévisionnel. Il ajoute que les multiples difficultés rencontrées au cours de l'exécution du contrat, l'orientation autoritaire de M. X., son absence de loyauté à l'égard des franchisés, le mépris manifesté à leur égard, le temps passé à tenter en vain d'obtenir des réponses sur l'évolution de l'activité, l'importance des conséquences sur leur situation personnelle et professionnelle, la longue durée de la procédure, lui ont causé un préjudice moral.
En conséquence, il demande la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui payer :
- au titre de la perte des apports la somme de 15.000 euros
- au titre de la perte de revenus la somme de 22.000 euros
- au titre de son engagement de caution, la somme de 26 107, 48 euros
- au titre du préjudice moral la somme de 30.000 euros
Les explications de M. C. et les pièces versées aux débats ne permettent pas d'établir de faits et manquements précis à l'encontre des sociétés intimées en lien de causalité avec la liquidation judiciaire de son activité.
En revanche, compte tenu du fonctionnement du réseau dans la mise en oeuvre des clauses d'approvisionnement et de stock minimum tel que constaté aux motifs ci-dessus, il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation d'un préjudice moral à hauteur de 10.000 euros.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. C. de ses demandes de dommages-intérêts au titre de la perte des apports, de ses revenus et de son engagement de caution.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. C. de sa demande de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral, et la société Fra-Ma-Pizz sera condamnée à lui payer la somme de 10.000 euros à ce titre.
* Sur les demandes de M. B. pour la société MJM Pizz et de M. M.
La société MJM Pizz a été constituée par M. M., gérant et associé unique, pour l'exploitation d'un point de vente sous l'enseigne Pizza Sprint. Un contrat de franchise a été signé le 14 février 2013. La société MJM Pizz a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 23 juillet 2014. Par ordonnance du 10 octobre 2014, la cession du fonds de commerce de la société MJM à la société Fra-Ma-Pizz a été ordonnée pour la somme de 90.000 euros. La clôture pour insuffisance d'actif de la société MJM a été prononcée le 17 janvier 2019. Le 21 mars, un jugement rectificatif a désigné la société B. MJO en la personne de Maître B. en qualité de mandataire ad'hoc.
Maître le B. et M. M. considèrent que l'échec de la société MJM Pizz est de la responsabilité de la société Fra-Ma-Pizz qui n'a dispensé aucune formation adéquate, notamment sur la gestion du personnel, sur les commandes fournisseurs et le logiciel Logis Pizza. L'activité n'a jamais été rentable. M. M. précise que M. X. lui a fait à plusieurs reprises la promesse de rachat de son fonds de commerce dans le seul but qu'il continue l'activité malgré le manque de rentabilité. Il ajoute que les multiples difficultés rencontrées au cours de l'exécution du contrat, l'orientation autoritaire de M. X., son absence de loyauté à l'égard des franchisés, le mépris manifesté à leur égard, le temps passé à tenter en vain d'obtenir des réponses sur l'évolution de l'activité, l'importance des conséquences sur leur situation personnelle et professionnelle, la longue durée de la procédure, lui ont causé un préjudice moral.
En conséquence, Maître B. demande la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui payer :
- au titre de la restitution du droit d'entrée, la somme de 10.000 euros
- au titre de la restitution des redevances, la somme de 6.944 euros
- au titre de perte de marges sur les approvisionnements, la somme de 16.665 euros (in solidum avec la société Pizza Center également)
- au titre des prestations marketing, la somme de 2.250 euros
- au titre de la perte de la valeur du fonds, la somme de 69.712 euros
Au vu de ce qui précède, les demandes d'annulation ou de résiliation du contrat de franchise ont été rejetées. Les explications et les pièces versées aux débats ne permettent pas d'établir de faits et manquements précis à l'encontre des sociétés intimées en lien de causalité avec la liquidation judiciaire de la société MJM Pizz. Il n'est pas non plus produit de pièces pour déterminer le quantum de perte de marges alléguée sur les approvisionnements. Par ailleurs, le fonds de commerce a été cédé en 2014.
En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Maître B. mandataire ad'hoc de la société MJM Pizz de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts.
Et M. M. demande à titre personnel la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui payer :
- au titre de la perte des apports la somme de 8.000 euros
- au titre de la perte de revenus la somme de 40.000 euros
- au titre de son engagement de caution, la somme de 67 087,87 euros
- au titre du préjudice moral la somme de 30.000 euros
Les explications et les pièces versées aux débats ne permettent pas d'établir de faits et manquements précis à l'encontre des sociétés intimées en lien de causalité avec l'échec de l'activité gérée par M. M..
En revanche, compte tenu du fonctionnement du réseau dans la mise en oeuvre des clauses d'approvisionnement et de stock minimum tel que constaté aux motifs ci-dessus, il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation d'un préjudice moral à hauteur de 10.000 euros.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. M. de ses demandes de dommages-intérêts au titre de la perte des apports, de ses revenus et de son engagement de caution.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. M. de sa demande de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral, et la société Fra-Ma-Pizz sera condamnée à lui payer la somme de 10.000 euros à ce titre.
Sur les demandes de M. P. à titre de liquidateur amiable de la société Emeraude Pizza et à titre personnel :
La société Emeraude Pizza a été constituée le 17 juin 2011 par M. P., gérant et unique associé, pour l'exploitation d'un point de vente Sprint Pizza. Un contrat de franchise a été signé le 31 mai 2011. M. P. expose qu'il n'a pas bénéficié de formation, que M. X. avait une approche très autoritaire, interdisait aux franchisés de prendre contact les uns les autres, et que l'activité n'était pas rentable notamment en raison du poste achat trop élevé pour permettre de dégager une marge. Pour l'ensemble de ces raisons, il explique avoir cessé son activité, cédé son fonds de commerce le 26 juin 2013 pour la somme de 130.000 euros et placé la société en liquidation amiable le 30 juin 2013. Il ajoute que les multiples difficultés rencontrées au cours de l'exécution du contrat, l'orientation autoritaire de M. X., son absence de loyauté à l'égard des franchisés, le mépris manifesté à leur égard, le temps passé à tenter en vain d'obtenir des réponses sur l'évolution de l'activité, l'importance des conséquences sur leur situation personnelle et professionnelle, la longue durée de la procédure, lui ont causé un préjudice moral.
En conséquence, en sa qualité de liquidateur amiable de la société Emeraude Pizza, M. P. demande la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui payer :
- au titre de la restitution du droit d'entrée, la somme de 10.000 euros
- au titre de la restitution des redevances, la somme de 15034,91 euros
- au titre de perte de marges sur les approvisionnements, la somme de 84.345,69 euros ((in solidum avec la société Pizza Center également)
- au titre des prestations marketing, les sommes de 3.600 euros et 5.827 euros
- au titre de la perte de la valeur du fonds, la somme de 118.286 euros
-au titre des travaux surpayés, la somme de 4.467,75 euros (in solidum avec la société Somainmag également)
Au vu de ce qui précède les demandes d'annulation et résiliation du contrat ont été rejetées. La surfacturation des travaux n'est pas établie ainsi que le préjudice sur les prestations marketing. Il n'est pas non plus produit de pièces suffisantes pour établir la pratique de la part de la société Pizza Center d'une marge supérieure de 40 % au prix de vente du marché pour l'ensemble des approvisionnements. Le fonds de commerce a en outre été cédé en 2013.
En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. P. de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts en qualité de liquidateur amiable de la société Emeraude Pizza.
Et M. P. demande à titre personnel la condamnation in solidum des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza à lui payer :
- au titre de la perte des apports la somme de 4.s370 euros
- au titre de la perte de revenus la somme de 48.000 euros
- au titre du préjudice moral la somme de 30.000 euros
Les explications et les pièces versées aux débats ne permettent pas d'établir de faits et manquements précis à l'encontre des sociétés intimées en lien de causalité avec l'échec de l'activité gérée par M. P.
En revanche, compte tenu du fonctionnement du réseau dans la mise en œuvre des clauses d'approvisionnement et de stock minimum tel que constaté aux motifs ci-dessus, il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation d'un préjudice moral à hauteur de 10.000 euros.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. P. de ses demandes de dommages-intérêts au titre de la perte des apports et de ses revenus.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. P. de sa demande de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral, et la société Fra-Ma-Pizz sera condamnée à lui payer la somme de 10.000 euros à ce titre.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile :
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné les sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza aux dépens de première instance et débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En appel,
Les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France seront condamnées in solidum au paiement des dépens d'appel.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France seront déboutées de leur demande et condamnées in solidum à verser :
- au ministre de l'économie la somme de 3.000 euros conformément à sa demande,
- à Mme N. et MM. R., C., P., M. et P. la somme de 2.000 euros chacun et aux intervenants volontaires à titre accessoire chacun la somme de 200 euros
L'équité commande de débouter les sociétés Food Court Service et Somainmag de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
INFIRME le jugement en ce qu'il a :
- déclaré irrecevable l'action du ministre de l'économie à l'égard de la société Food Court Finance
- déclaré irrecevables les demandes du ministre concernant les sociétés Pizz Center 1 et 2, TSA Pizz, BMF Pizza, Feoni Pizz, 4UPizz, P. restauration, Pizz Le Mans/Pise Le Mans l'exploitation du fonds, sis [...],
- débouté le ministre de l'économie de ses demandes concernant les sociétés Dutchesne Distribution, BS Distribution, S&B Sable, Pizz AG,
- prononcé la nullité des clauses relatives aux modalités de résiliation et de cessation,
- ordonné aux sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza France de permettre aux franchisés, grâce à un outil informatique adapté, de pratiquer leurs propres prix de vente,
- débouté le ministre de ses demandes de cessation des pratiques concernant les clauses de stock minimum et d'approvisionnement,
- débouté le ministre de sa demande de prononcé d'une amende à l'égard des sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France,
- débouté Mme N. et MM. R., C., P., M. et P. de leur demande à titre personnel de dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
DECLARE RECEVABLES les sociétés BS Distribution, S&B Sable, Dutchesne Distribution devenue LMJ Capital, H. Argentre, H. B., H. Dol, H. Liffre, H. Vitre, P. Loyal, Pizz AG, Pizz'Parth, Renna Pizza, Semper Fi, M. Restauration, MM. B., S., D., H., G., P., H.,H., M., et F., Mmes Marina H., Stéphanie Le G. épouse H., Cristèle K. épouse H. en leur intervention volontaire accessoire,
DÉCLARE RECEVABLES l'action du ministre de l'économie à l'encontre de la société Food Court Finance mais le déboute de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre ;
DIT que les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France ont enfreint les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2019-359 du 24 avril 2019, et en conséquence :
DÉCLARE NULLE la clause des contrats versés aux débats suivante :
- dans la version des contrats antérieure à 2012, la clause de résiliation (article 10), la clause pénale (article 14) et l'alinéa 1er de la clause relative à la cessation du contrat de franchise en ce qu'il vise la résiliation du contrat (article 11 alinéa 1er),
ENJOINT aux sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France de cesser la pratique consistant à insérer au contrat de franchise une clause de stock minimum couplée à une clause d'approvisionnement formellement non exclusive mais permettant par des règles de contrôle d'imposer de fait un approvisionnement exclusif ou quasi exclusif auprès d'un fournisseur appartenant au même groupe de sociétés que le franchiseur,
CONDAMNE in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France au paiement d'une amende civile de 500.000 euros,
ORDONNE aux frais des sociétés Fra-Ma-Pizz et Domino's Pizza, la publication de l'extrait suivant du présent arrêt : « Par arrêt du 15 décembre 2021, la Cour d'appel de Paris a condamné in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France au paiement d'une amende civile de 500.000 euros pour des pratiques restrictives de concurrence au sein du réseau Pizza Sprint sanctionnées par l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2019-359 du 24 avril 2019 », dans le délai de 15 jours du présent arrêt :
- sur les sites internet PIZZA SPRINT et DOMINO'S PIZZA, pendant une durée d'un mois, à compter de la première mise en ligne et qu'il sera procédé à cette publication en partie supérieure de la page d'accueil du site de façon visible et en toute hypothèse au-dessus de la ligne flottaison, sans mention ajoutée, en police de caractères « times new roman », de taille « 12 », droits, de couleur noire et sur fond blanc, dans un encadré de 468x120 pixels, en-dehors de tout encart publicitaire, le texte devant être précédé du titre COMMUNICATION JUDICIAIRE en lettres capitales de taille 14
- dans les journaux suivants : Le Monde, Le Figaro, Les Echos et Ouest France, pendant une durée de quinze jours, en noir sur fond blanc en police de caractère « Times New Roman » et de taille 12, dans la limite de 5.000 euros par publication,
DEBOUTE le ministre de l'économie de ses autres demandes,
CONDAMNE la société Fra-Ma-Pizz à payer à Mme N., MM. R., C., P. Martin et P. la somme de 10.000 euros chacun à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral,
CONDAMNE in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France aux dépens d'appel,
CONDAMNE in solidum les sociétés Fra-Ma-Pizz, Pizza Center France et Domino's Pizza France à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile :
- au ministre de l'économie la somme de 3000 euros
- à Mme N. et MM. R., C., P., M. et P. la somme de 2.000 euros chacun
- aux sociétés BS Distribution, S&B Sable, Dutchesne Distribution devenue LMJ Capital, H. Argentre, H. B., H. Dol, H. Liffre, H. Vitre, P. Loyal, Pizz AG, Pizz'Parth, Renna Pizza, Semper Fi, M. Restauration, et à MM. B., S., D., H., G., P., H., H., M., et F., Mmes Marina H., Stéphanie Le G. épouse H., Cristèle K. épouse H., la somme de 200 euros chacun,
REJETTE toute autre demande.
La greffière La présidente