CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. com.), 2 février 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9415
CA SAINT-DENIS DE LA RÉUNION (ch. com.), 2 février 2022 : RG n° 19/02843
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Pour rappel, la cour d'appel a sollicité les observations des parties sur la recevabilité des demandes formulées fondées en cause d'appel sur les dispositions de l'article L. 442-6 devenu L. 442-1 du code de commerce au regard des dispositions de l'article D. 442-3 du même code. »
2/ « Ainsi, selon l'article D. 442-3 du code de commerce, la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formées contre les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019. L'inobservation de cette règle est sanctionnée par une fin de de non-recevoir qui revêt un caractère d'ordre public et doit donc être relevée d'office, étant précisé que la cour de Paris dispose exclusivement du pouvoir juridictionnel de statuer sur les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées pur statuer sur l'article L. 442-6 du code de commerce, ce texte dût-il invoqué devant elle à titre subsidiaire.
S'agissant de l'hypothèse où le recours est formé contre une décision rendue par une juridiction de premier degré non spécialement désignée, ce qui est le cas en l'espèce, il appartient à la cour d'appel de déclarer l'appel recevable et de relever d'office l'excès de pouvoir commis par la juridiction en statuant sur ces demandes, qui, en ce qu'elles ne relevaient pas de leur pouvoir juridictionnel, étaient irrecevables.
En l'espèce, il ressort des éléments du dossier que, dès l'assignation devant le tribunal mixte de commerce de Saint Denis de la Réunion, la société RFS a, notamment, demandé aux premiers juges de « constater que l'augmentation importante du coût du gaz fréon a entraîné un déséquilibre économique dans les relations contractuelles des parties » et visé les articles 1103, 1104, 1217, 131 et 1343-2 du code civil mais aussi l'article L. 441-6 du code de commerce dans son dispositif.
Cette référence aux dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce s'est maintenu tout le long de la procédure de première instance et a perduré à hauteur de cour.
Dans ces conditions, la cour, étant saisie d'un recours contre une décision de première instance non spécialement désignée, doit annuler ladite décision pour excès de pouvoir et déclarer irrecevables les demandes formées par la société RFS comme portées devant une juridiction dépourvue du pouvoir d'en connaître. »
COUR D’APPEL DE SAINT-DENIS DE LA RÉUNION
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 2 FÉVRIER 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 19/02843. N° Portalis DBWB-V-B7D-FI5R. Appel d'une décision rendue par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT-DENIS DE LA RÉUNION en date du 23 SEPTEMBRE 2019 suivant déclaration d'appel en date du 5 NOVEMBRE 2019 : R.G. n° 2018J05218.
APPELANTE :
SARL RÉUNION FROID SERVICE
[...], [...], [...], Représentant : Maître Aude C. de la SELARL C. - S.-B., avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-RÉUNION
INTIMÉE :
SAS VINDEMIA SERVICES
[...], [...], [...], Représentant : Maître Jacques B. de la SELAS F., avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DATE DE CLÔTURE : 16 novembre 2020
DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 6 octobre 2021 devant Mme PIEDAGNEL Sophie, Conseillère, qui en a fait un rapport, assistée de Mme Nathalie BEBEAU, Greffière, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué, à l'issue des débats, que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 2 février 2022. Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère
Qui en ont délibéré
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 2 février 2022.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR
Par acte sous signature privée du 27 juillet 2015, la SARL Réunion Froid Service (la société RFS) (le prestataire) et la SAS Vindémia Services (la société Vindémia) (le client) ont conclu un « contrat de prestations de services d'entretien et de maintenance froid industriel », option P3 : « entretien, intervention de dépannage et recharge de fréon. Les pièces de rechange font l'objet d'un devis », pour une durée d'un an à compter du 1er août 2015, renouvelable par tacite reconduction pour une période indéterminée, sauf résiliation par l'une des parties trois mois avant l'échéance, par lettre commandée avec accusé de réception, et ce, sur quatre sites, à savoir « J. C » à [ville S. C.], « J. S. M. » à [ville S. M.], « J. S. B. » à [ville S. B.] et « J. P. » au [ville P.].
Invoquant une envolée du prix du gaz fréon, l'impossibilité de réviser le contrat et la rupture de celui-ci, par acte d'huissier en date du 11 décembre 2018, la société RFS a fait assigner la société Vindémia devant le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion aux fins de condamnation de cette dernière à lui payer, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, les sommes de 208.652,34 euros au titre des factures relatives aux recharges du gaz fréon, 39.083,92 euros au titre de prestations non régularisées, 100.000 euros à titre de dommages et intérêts et 5.000 euros au titre des frais irrépétibles.
La société Vindémia a conclu au débouté des prétentions de la société RFS et a sollicité le paiement d'une indemnité de procédure de 8.000 euros.
C'est dans ces conditions que, par jugement rendu le 23 septembre 2019, le tribunal mixte de commerce de Saint Denis de la Réunion a :
- débouté la SARL Réunion Froid Service de l'ensemble de ses demandes
- l'a condamnée à payer à la SAS Vindémia Services la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
- laissé les dépens à la charge de la SARL Réunion Froid Service.
Par déclaration au greffe en date du 5 novembre 2019, la société RFS a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt avant dire droit en date du 19 mai 2021, la cour d'appel a sollicité les observations des parties sur la recevabilité des demandes formulées fondées en cause d'appel sur les dispositions de l'article L. 442-6 devenu L. 442-1 du code de commerce au regard des dispositions de l'article D. 442-3 du même code, renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience rapporteur du 6 octobre 2021 et réservé l'ensemble des demandes et les dépens.
[*]
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 16 octobre 2020, la société RFS demande à la cour, au visa des articles 1103, 1104, 1171, 1217, 1231 et 1343-2 du code civil et L. 441-6, du code de commerce, de :
- déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par la société RFS
Y faisant droit
- statuer sur les demandes formulées par la société RFS conformément aux écritures déposées et reçues le 12 octobre 2020
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions
- dire que la société RFS a conclu le 27 juillet 2015 avec la société Vindémia, un contrat d'entretien et de maintenance des installations frigorifiques pour les sites de J. C., S. M., S. B. et P.
- dire que les prestations exécutées au titre dudit contrat incluent la recharge du gaz fréon
- dire que la société RFS a exécuté des prestations de recharge en gaz fréon pour le compte de la société Vindémia qui n'ont jamais été réglées par celle-ci
- dire que la société RFS a exécuté des prestations de maintenance et de réparation qui n'ont pas été réglées par la société Vindémia
- dire que les dispositions de la clause figurant à l'article 2.4 du contrat conclu entre les deux parties relatives à la fourniture sans facturation supplémentaire de tous les fluides frigorigènes doit être considérée comme abusive et non-écrite
- dire que l'augmentation importante du coût du gaz fréon a entraîné un déséquilibre économique dans les relations contractuelles des parties
- dire qu'en vertu de l'article 8 dudit contrat, la société RFS a initié une renégociation du contrat
- dire qu'au cours de ces négociations, la société Vindémia a fait preuve de mauvaise foi en laissant croire à la société RFS que la variation du coût du fréon ferait l'objet d'une disposition contractuelle
En conséquence,
- condamner la société Vindémia à verser à la société RFS la somme de 247.736,26 euros au titre des impayés avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir
- prononcer l'anatocisme
- condamner la société Vindémia à verser à la société RFS la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts
- condamner la société Vindémia à verser à la société RFS la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens
-o rdonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir, conformément aux dispositions de l'article 515 du code de procédure civile.
[*]
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 septembre 2020, la société Vindémia demande à la cour, au visa de l'article 1134 du code civil, de :
- dire l'appel interjeté par la société RFS mal fondé, l'en débouter
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel
- condamner la société RFS à payer à la société Vindémia la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
[*]
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l'exposé de leurs prétentions et moyens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 novembre 2020 et l'affaire a reçu fixation pour être plaidée à l'audience rapporteur du 3 mars 2021 puis du 6 octobre 2021. Le prononcé de l'arrêt, par mise à disposition du greffe, a été fixé au 2 février 2022.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Pour rappel, la cour d'appel a sollicité les observations des parties sur la recevabilité des demandes formulées fondées en cause d'appel sur les dispositions de l'article L. 442-6 devenu L. 442-1 du code de commerce au regard des dispositions de l'article D. 442-3 du même code.
Dans ses observations transmises par voie électronique le 30 septembre 2021, la société RFS fait valoir que pour l'essentiel que
- si les dernières conclusions de l'appelant font effectivement mention de l'article L. 442-1 du code de commerce, ces dispositions n'ont été citées que pour appuyer la thèse du déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, fondée sur l'article 1171 du code civil et mise en avant dès la première instance par la société RFS
- les sanctions applicables sont différentes selon le fondement juridique invoqué et permettent de distinguer très clairement les demandes fondées sur l'article L. 442-1 du code de commerce de celles fondées sur l'article 1171 du code civil : l'article L. 442-1 du code de commerce prévoit qu'en cas de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, la responsabilité de l'auteur est engagée et que cela l'oblige à réparer le préjudice causé ; l'article 1171 du code civil prévoit qu'en cas de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, la clause litigieuse est réputée non-écrite
- depuis la première instance, la société RFS a demandé à la juridiction de « dire que les dispositions de la clause figurant à l'article 2.4 du contrat conclu entre les deux parties relatives à la fourniture sans facturation supplémentaire de tous les fluides frigorigènes, doit être considérée comme abusive et non-écrite » : dès lors, seule la sanction prévue par l'article 1171 du code civil est demandée par la société RFS
- il n'est en aucun cas demandé que la responsabilité de la société Vindémia soit engagée ni une réparation du préjudice subi sur le fondement du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties
- l'article L442-1 du code de commerce n'est pas non plus invoqué à titre subsidiaire et ne fait pas l'objet d'une demande distincte dans les conclusions de l'appelant
- en tout état de cause, dans un arrêt récent du 29 mars 2017, la Cour de cassation a jugé que le fait de systématiquement sanctionner par une fin de non-recevoir l'appel formé contre une décision rendue par une juridiction non spécialement désignée, en application de la règle de l'article L. 442-6 du Code de commerce (devenu L. 442-1), était source d'insécurité juridique et conduisait au maintien de décisions rendues par des juridictions non spécialisées, les recours devant les autres cours d'appel que celle de Paris étant déclarés irrecevables ; la Haute juridiction a ainsi estimé qu'il apparaissait « nécessaire d'amender cette jurisprudence » et a jugé que « seuls les recours formés contre les décisions rendues par les juridictions du premier degré spécialement désignées sont portés devant la cour d'appel de Paris » ; en conséquence, la Cour retient « qu 'il appartient aux autres cours d'appel, conformément à l'article R311-3 du code de l'organisation judiciaire, de connaître de tous les recours formés contre les décisions rendues par les juridictions situées dans leur ressort qui ne sont pas désignées par le second texte, qu 'il en est ainsi même dans l'hypothèse où celles-ci auront, à tort, statué sur l 'application du premier, auquel cas elles devront relever, d'office, l'excès de pouvoir commis par ces juridictions en statuant sur des demandes qui, en ce qu 'elles ne relevaient pas de leur pouvoir juridictionnel, étaient irrecevables » ; dans cet arrêt, la Cour de cassation retient qu'en statuant ainsi, « alors que, saisie de l'appel d'un jugement rendu par le tribunal de Saint-Denis de La Réunion, juridiction non spécialement désignée située dans son ressort, il lui appartenait de déclarer l'appel recevable et d'examiner la recevabilité des demandes formées devant ce tribunal puis, le cas échéant, de statuer dans les limites de son propre pouvoir juridictionnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés » (Cass. com., 29 mars 2017, n°15-17659).
Sur quoi,
D'une part,
Aux termes de l'article L. 442-6 du code de commerce dans sa numérotation et version applicable au litige :
« I. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
1° D'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Un tel avantage peut notamment consister en la participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au financement d'une opération d'animation commerciale, d'une acquisition ou d'un investissement, en particulier dans le cadre de la rénovation de magasins ou encore du rapprochement d'enseignes ou de centrales de référencement ou d'achat. Un tel avantage peut également consister en une globalisation artificielle des chiffres d'affaires, en une demande d'alignement sur les conditions commerciales obtenues par d'autres clients ou en une demande supplémentaire, en cours d'exécution du contrat, visant à maintenir ou accroître abusivement ses marges ou sa rentabilité ;
2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;
3° D'obtenir ou de tenter d'obtenir un avantage, condition préalable à la passation de commandes, sans l'assortir d'un engagement écrit sur un volume d'achat proportionné et, le cas échéant, d'un service demandé par le fournisseur et ayant fait l'objet d'un accord écrit ;
4° D'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente ;
5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure. Lorsque la rupture de la relation commerciale résulte d'une mise en concurrence par enchères à distance, la durée minimale de préavis est double de celle résultant de l'application des dispositions du présent alinéa dans les cas où la durée du préavis initial est de moins de six mois, et d'au moins un an dans les autres cas ;
6° De participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence ;
7° (Abrogé) ;
8° De procéder au refus ou retour de marchandises ou de déduire d'office du montant de la facture établie par le fournisseur les pénalités ou rabais correspondant au non-respect d'une date de livraison ou à la non-conformité des marchandises, lorsque la dette n'est pas certaine, liquide et exigible, sans même que le fournisseur n'ait été en mesure de contrôler la réalité du grief correspondant ;
9° De ne pas communiquer ses conditions générales de vente, dans les conditions prévues à l'article L. 441-6, à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour l'exercice d'une activité professionnelle ;
10° De refuser de mentionner sur l'étiquetage d'un produit vendu sous marque de distributeur le nom et l'adresse du fabricant si celui-ci en a fait la demande conformément à l'article L. 112-6 du code de la consommation ;
11° D'annoncer des prix hors des lieux de vente, pour un fruit ou légume frais, sans respecter les règles définies aux II et III de l'article L. 441-2 du présent code ;
12° De passer, de régler ou de facturer une commande de produits ou de prestations de services à un prix différent du prix convenu résultant de l'application du barème des prix unitaires mentionné dans les conditions générales de vente, lorsque celles-ci ont été acceptées sans négociation par l'acheteur, ou du prix convenu à l'issue de la négociation commerciale faisant l'objet de la convention prévue à l'article L. 441-7, modifiée le cas échéant par avenant, ou de la renégociation prévue à l'article L. 441-8.
II.-Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour un producteur, un commerçant, un industriel ou une personne immatriculée au répertoire des métiers, la possibilité :
a) De bénéficier rétroactivement de remises, de ristournes ou d'accords de coopération commerciale ;
b) D'obtenir le paiement d'un droit d'accès au référencement préalablement à la passation de toute commande ;
c) D'interdire au cocontractant la cession à des tiers des créances qu'il détient sur lui ;
d) De bénéficier automatiquement des conditions plus favorables consenties aux entreprises concurrentes par le cocontractant ;
e) D'obtenir d'un revendeur exploitant une surface de vente au détail inférieure à 300 mètres carrés qu'il approvisionne mais qui n'est pas lié à lui, directement ou indirectement, par un contrat de licence de marque ou de savoir-faire, un droit de préférence sur la cession ou le transfert de son activité ou une obligation de non-concurrence postcontractuelle, ou de subordonner l'approvisionnement de ce revendeur à une clause d'exclusivité ou de quasi-exclusivité d'achat de ses produits ou services d'une durée supérieure à deux ans.
L'annulation des clauses relatives au règlement entraîne l'application du délai indiqué au deuxième alinéa de l'article L. 441-6, sauf si la juridiction saisie peut constater un accord sur des conditions différentes qui soient équitables.
III. - L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministre chargé de l'économie ou par le président de l'Autorité de la concurrence lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée au présent article.
Lors de cette action, le ministre chargé de l'économie et le ministère public peuvent demander à la juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Ils peuvent aussi, pour toutes ces pratiques, faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites et demander la répétition de l'indu. Ils peuvent également demander le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut être supérieur à 2 millions d'euros. Toutefois, cette amende peut être portée au triple du montant des sommes indûment versées. La réparation des préjudices subis peut également être demandée. Dans tous les cas, il appartient au prestataire de services, au producteur, au commerçant, à l'industriel ou à la personne immatriculée au répertoire des métiers qui se prétend libéré de justifier du fait qui a produit l'extinction de son obligation.
La juridiction peut ordonner la publication, la diffusion ou l'affichage de sa décision ou d'un extrait de celle-ci selon les modalités qu'elle précise. Elle peut également ordonner l'insertion de la décision ou de l'extrait de celle-ci dans le rapport établi sur les opérations de l'exercice par les gérants, le conseil d'administration ou le directoire de l'entreprise. Les frais sont supportés par la personne condamnée.
La juridiction peut ordonner l'exécution de sa décision sous astreinte.
Les litiges relatifs à l'application du présent article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret.
IV. - Le juge des référés peut ordonner, au besoin sous astreinte, la cessation des pratiques abusives ou toute autre mesure provisoire. »
L'article D. 442-3 du même code précisant :
« Pour l'application de l'article L. 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre.
La cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris. »
Le décret n° 2012-1444 du 24 décembre 2012, en vigueur le 1er janvier 2013, a fixé, en son article 1er les juridictions de première instance compétentes pour connaître de l'article L442-6 du Code de commerce. Il s'agit des tribunaux de commerce de Marseille, Bordeaux, Tourcoing, Lyon, Nancy, Paris et Rennes et du tribunal mixte de commerce de Fort de France.
Ainsi, selon l'article D. 442-3 du code de commerce, la cour d'appel de Paris est seule investie du pouvoir de statuer sur les appels formées contre les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019. L'inobservation de cette règle est sanctionnée par une fin de de non-recevoir qui revêt un caractère d'ordre public et doit donc être relevée d'office, étant précisé que la cour de Paris dispose exclusivement du pouvoir juridictionnel de statuer sur les décisions rendues par les juridictions spécialement désignées pur statuer sur l'article L. 442-6 du code de commerce, ce texte dût-il invoqué devant elle à titre subsidiaire.
S'agissant de l'hypothèse où le recours est formé contre une décision rendue par une juridiction de premier degré non spécialement désignée, ce qui est le cas en l'espèce, il appartient à la cour d'appel de déclarer l'appel recevable et de relever d'office l'excès de pouvoir commis par la juridiction en statuant sur ces demandes, qui, en ce qu'elles ne relevaient pas de leur pouvoir juridictionnel, étaient irrecevables.
En l'espèce, il ressort des éléments du dossier que, dès l'assignation devant le tribunal mixte de commerce de Saint Denis de la Réunion, la société RFS a, notamment, demandé aux premiers juges de « constater que l'augmentation importante du coût du gaz fréon a entraîné un déséquilibre économique dans les relations contractuelles des parties » et visé les articles 1103, 1104, 1217, 131 et 1343-2 du code civil mais aussi l'article L. 441-6 du code de commerce dans son dispositif.
Cette référence aux dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce s'est maintenu tout le long de la procédure de première instance et a perduré à hauteur de cour.
Dans ces conditions, la cour, étant saisie d'un recours contre une décision de première instance non spécialement désignée, doit annuler ladite décision pour excès de pouvoir et déclarer irrecevables les demandes formées par la société RFS comme portées devant une juridiction dépourvue du pouvoir d'en connaître.
L'équité commandant de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société Vindémia, il convient de lui accorder de ce chef la somme de 6.000 euros pour la procédure d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;
ANNULE le jugement rendu le 23 septembre 2019 par le le tribunal mixte de commerce de Saint Denis de la Réunion ;
DECLARE la SARL Réunion Froid Service irrecevables en ses demandes ;
CONDAMNE la SARL Réunion Froid Service à payer à la SAS Vindémia Services la somme de 6.000 euros ;
LA CONDAMNE aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Mme Sophie PIEDAGNEL, Conseillère, et par Mme Nathalie BEBEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE SIGNE LA PRÉSIDENTE