CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 15 mars 2022
CERCLAB - DOCUMENT N° 9452
CA BESANÇON (1re ch. civ. com.), 15 mars 2022 : RG n° 21/00004
Publication : Jurica
Extrait : « Il résulte de la combinaison des articles L. 442-4 et D. 442-3 du code de commerce que, pour le ressort des cours d'appel de Besançon, Colmar, Dijon, Metz et Nancy le tribunal judiciaire de Nancy est exclusivement compétent pour connaître du contentieux relatif à l'application de l'article L. 442-6 devenu L. 442-1 du code de commerce, tandis que la cour d'appel de Paris est exclusivement compétente en appel.
Si la cour n'est pas expressément saisie par la société Praeconis d'une fin de non-recevoir tirée des dispositions précitées, celle-ci est d'ordre public et il appartient à la cour de la soulever d'office, étant observé que ce point a été soumis au débat contradictoire.
En application desdites dispositions, le moyen tiré de la non-conformité de la clause de résiliation pour transfert du portefeuille à l'initiative du courtier prévue à l'article 6.4 du contrat avec l'article L. 442-6 du code de commerce en ce qu'elle opérerait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties en faisant peser sur le courtier la preuve de son absence d'intérêt total ou partiel, direct ou indirect, dans le portefeuille transféré, est irrecevable pour être formée devant une juridiction dépourvue du pouvoir juridictionnel pour en connaître. »
COUR D’APPEL DE BESANÇON
- 172 501 116 00013 -
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 15 MARS 2022
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G n° 21/00004. N° Portalis DBVG-V-B7F-EKJL. Contradictoire. S/appel d'une décision du TRIBUNAL DE COMMERCE DE VESOUL en date du 22 février 2019 : RG n° 2016001376.Code affaire : 58Z - Demande relative à d'autres contrats d'assurance.
PARTIES EN CAUSE :
SCP B.-D. (L.J SAS ALLOFAIR)
sise [...], Représentée par Maître Ludovic P. de la SCP D. - P., avocat au barreau de BESANCON, Représentée par Maître Jérémie C. de la SELARL C. AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS,
APPELANTE
ET :
SAS PRAECONIS
société de courtage d'assurances sise [adresse], Représentée par Maître Elodie C., avocat au barreau de BESANCON, Représentée par Maître Bouya D., avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
SAS ALLOFAIR
sise [...], Représentée par Maître Ludovic P. de la SCP D. - P., avocat au barreau de BESANCON, Représentée par Maître Jérémie C. de la SELARL C. AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats :
PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre.
ASSESSEURS : Madame Bénédicte MANTEAUX et Monsieur Cédric SAUNIER, Conseillers.
GREFFIER : Madame Leila ZAIT, Greffier
Lors du délibéré :
PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre
ASSESSEURS : Madame Bénédicte MANTEAUX et Monsieur Cédric SAUNIER, Conseillers.
L'affaire, plaidée à l'audience du 1er février 2022 a été mise en délibéré au 15 mars 2022. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits, procédure et prétentions des parties :
En exécution du contrat de courtage et de l'annexe à la convention de courtage pour la présentation de contrats d'assurance signés le 1er mars 2014, avec prise de date rétroactive au 1er octobre 2013, avec la société MMC Developpement.com devenue SAS Praeconis, elle-même courtier en assurances et titulaire d'une délégation de gestion, la SAS Allofair a commercialisé le contrat intitulé « plan de protection hospitalisation » (PPH) moyennant une rémunération sous forme d'avances.
Suite à un contrôle initié par la direction départementale de la protection des populations de Paris ayant donné lieu à l'établissement d'un rapport en date du 6 mars 2014, la société Allofair a cessé la commercialisation des contrats litigieux et a saisi par, assignation délivrée le 7 avril 2016, le tribunal de commerce de Vesoul aux fins de condamnation de la société Praeconis à lui verser la somme totale de 389.623,39 euros au titre de reprises injustifiées de commissions, de la perte de portefeuille et d'indemnisation de son préjudice moral.
Par jugement rendu le 22 février 2019, le tribunal :
- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes ;
- l'a condamnée à payer à la société Praeconis la somme de 92.334,66 euros au titre du solde du en exécution du contrat de courtage et celle de 50.036,74 euros au titre de l'indemnité consécutive au transfert de portefeuille ;
- l'a condamnée à payer 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens y compris les frais de greffe, taxés et liquidés à la somme de 81,12 euros ;
- a rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties ;
- a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré que :
- la société Allofair avait cessé la production des contrats susvisés, alors que l'autorité administrative n'avait notifié qu'une obligation de mise en conformité de son activité de commercialisation, de sorte qu'elle avait commis une faute contractuelle ayant généré de nombreuses résiliations de contrats ainsi que des refus de payer générateurs d'un préjudice pour la société Praeconis ;
- il en résultait que la société Allofair devait être condamnée, d'une part, au titre de la dégradation du portefeuille avec prise en compte des reprises sur commissions et, d'autre part, à l'indemnité due au titre du transfert de portefeuille prévue par l'article 6.4 du contrat.
Par déclaration parvenue au greffe le 27 mai 2019, la société Allofair a régulièrement interjeté appel de l'entier jugement.
Par ordonnance du 23 octobre 2019, le conseiller de la mise en état a déclaré l'instance interrompue suite à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Allofair ordonnée par jugement rendu le 25 septembre 2019 par le tribunal de commerce de Paris. L'instance a été reprise par conclusions transmises le 23 décembre 2020 par la SCP B.-D., prise en la personne de M. Xavier B. en qualité de mandataire liquidateur de la société.
[*]
Selon ses dernières conclusions transmises le 2 avril 2021, ce-dernier conclut à l'infirmation du jugement de première instance et demande à la cour de :
- débouter la société Praeconis de toutes ses demandes fins et conclusions ;
- la condamner à lui verser, en qualité de mandataire liquidateur, la somme de 389.623,39 euros correspondant à 229.523,09 euros au titre des reprises injustifiées de commissions, 140.100,30 euros au titre de la perte du portefeuille et 20.000 euros au titre du préjudice moral ;
- la condamner à lui verser 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Il fait valoir que :
- c'est à tort que le juge de première instance a imputé à la société Allofair le non-respect des dispositions relatives au démarchage et la cessation de la production plutôt que de la mettre en conformité, alors qu'il résulte de l'article 5.1 de la convention de courtage que les documents contractuels ont été rédigés par la société Praeconis, laquelle a par ailleurs commis des erreurs d'enregistrement et de gestion des contrats et de calcul des commissions liées notamment à des dysfonctionnements relatifs aux prélèvements SEPA, tandis qu'elle était informée des pratiques de démarchage téléphonique et ne lui a pas communiqué une grande partie des bordereaux de commissions justifiant des paiements ainsi que des reprises de commissions ;
- les modalités de résiliation des contrats et de calcul des reprises sur commissions consécutives n'ont pas été appliquées conformément au contrat ;
- suite aux manquements contractuels de la société Praeconis, elle est fondée à solliciter l'indemnisation de son préjudice lié aux reprises injustifiées de commissions, à la perte de valeur du portefeuille et à l'atteinte à sa réputation commerciale ;
- enfin, les bordereaux transmis par la société Praeconis à l'appui de sa demande reconventionnelle comportent de nombreuses erreurs et omissions, qu'elle n'applique pas le prorata temporis contractuel à ses demandes de reprise et que la clause prévue à l'article 6.4 du contrat faisant peser sur le courtier la preuve de son absence d'intérêt total ou partiel, direct ou indirect, dans le portefeuille transféré viole l'article L. 442-6 du code de commerce en ce qu'elle créée un déséquilibre entre les parties.
[*]
La société Praeconis a répliqué en dernier lieu par conclusions transmises le 6 avril 2021 pour demander à la cour, au visa de l'article 1134 devenu 1103 du code civil, de :
- débouter la SCP B.-D. ès qualités de l'ensemble de ses demandes ;
- fixer sa créance à la somme de 142.371,40 euros, soit 92.334,66 euros au titre du solde des sommes dues en exécution du contrat de courtage et 50.036,74 euros au titre de l'indemnité consécutive au transfert de portefeuille ;
- fixer sa créance à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la SCP B.-D. ès qualités aux entiers dépens.
Elle expose que :
- les « conditions générales plan protection hospitalisation » contractualisées entre les parties prévoient un mode de rémunération sous la forme du versement à la société Allofair d'une avance sur commissions à la souscription du contrat équivalente à une exécution de celui-ci durant douze mois, cette avance étant reprise en cas de résiliation du contrat ou d'impayé intervenu au cours de cette période, étant précisé que les contrats souscrits mais n'ayant fait l'objet d'aucun paiement par les adhérents n'ont jamais pris effet sans nécessité d'une résiliation ;
- la société Allofair ne produit pas les documents ayant justifié la mise en demeure lui ayant été adressée par la direction départementale de la protection des populations de Paris, de sorte qu'elle ne peut prétendre que des documents contractuels non conformes aux articles L. 121-21 et suivants du code de la consommation auraient été élaborés par la société Praeconis tandis que l'autorité administrative n'a visé que les pratiques commerciales utilisées lors du démarchage téléphonique ;
- la société Allofair ne produit aucun élément de nature à établir des erreurs dans l'enregistrement de la situation et de la gestion des contrats ;
- elle a remédié aux dysfonctionnements survenus lors de la migration des prélèvements vers le système SEPA au 1er février 2014 en présentant à nouveau les demandes de prélèvements, de sorte qu'aucune incidence sur les résiliations de contrats n'est intervenue ;
- elle produit des récapitulatifs des échanges intervenus via le système d'« échanges de données informatisé » (EDI), tandis que la société Allofair était en tout état de cause la première informée des résiliations opérées par ses clients ;
- la société Allofair n'établit ni la violation de la procédure de résiliation de contrat qu'elle invoque ayant donné lieu aux reprises de commissions, ni des erreurs de taux de reprise, tandis qu'elle-même a rectifié l'erreur du taux de commissionnement invoqué par la société Allofair ainsi que le calcul des commissions dues à celle-ci ;
- elle n'a donc commis aucune faute, étant ajouté que la société Allofair n'établit aucun lien de causalité avec son état de cessation des paiements tandis que la dégradation de son portefeuille est liée à sa violation des dispositions du droit de la consommation ;
- le détail des comptes qu'elle produit atteste des sommes lui restant dues par la société Allofair au titre des reprises sur commissions ;
- les conditions prévues par l'article 6.4 du contrat de courtage relatives à l'indemnité de transfert de portefeuille sont remplies en considération de la résiliation au mois d'octobre de 555 contrats, soit deux mois avant l'échéance annuelle, laquelle ne peut qu'être le fait du courtier ;
- enfin la société Allofair ne peut valablement invoquer l'article L. 442-6 du code de commerce dans la mesure où le contentieux relatif aux pratiques commerciales abusives est réservé à certaines juridictions spécialisées.
[*]
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2022 et l'affaire, appelée à l'audience du 1er février suivant, a été mise en délibéré au 15 mars 2022.
En application de l'article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Motifs de la décision :
Sur la fin de non-recevoir tirée de la compétence exclusive de juridictions spécialisées pour connaître du contentieux relatif à l'application de l'article L. 442-6 devenu L. 442-1 du code de commerce :
Il résulte de la combinaison des articles L. 442-4 et D. 442-3 du code de commerce que, pour le ressort des cours d'appel de Besançon, Colmar, Dijon, Metz et Nancy le tribunal judiciaire de Nancy est exclusivement compétent pour connaître du contentieux relatif à l'application de l'article L. 442-6 devenu L. 442-1 du code de commerce, tandis que la cour d'appel de Paris est exclusivement compétente en appel.
Si la cour n'est pas expressément saisie par la société Praeconis d'une fin de non-recevoir tirée des dispositions précitées, celle-ci est d'ordre public et il appartient à la cour de la soulever d'office, étant observé que ce point a été soumis au débat contradictoire.
En application desdites dispositions, le moyen tiré de la non-conformité de la clause de résiliation pour transfert du portefeuille à l'initiative du courtier prévue à l'article 6.4 du contrat avec l'article L. 442-6 du code de commerce en ce qu'elle opérerait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties en faisant peser sur le courtier la preuve de son absence d'intérêt total ou partiel, direct ou indirect, dans le portefeuille transféré, est irrecevable pour être formée devant une juridiction dépourvue du pouvoir juridictionnel pour en connaître.
Sur les demandes formées par la société Allofair au titre des reprises injustifiées de commissions, de la perte de portefeuille et d'indemnisation de son préjudice moral :
Aux termes de l'article 1315 ancien du code civil applicable au litige, devenu l'article 1353 du même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
L'article 1134 ancien du code civil applicable au litige (devenu les articles 1103 et 1004 du même code) dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Enfin, et en application de l'article 1147 devenu 1231-1 du code précité applicable au litige, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En l'espèce, la convention de courtage et son annexe signées entre la société MMC Developpement.com et la société Allofair le 1er mars 2014 autorise cette dernière à présenter le contrat d'assurance intitulé « plan protection hospitalisation » à sa clientèle, sur la base de documents contractuels et précontractuels « exclusivement rédigés ou validés par MMC Developpement.com » moyennant un commissionnement sous forme de précompte ou de précompte escompté correspondant à la première année de chaque contrat souscrit, susceptible de reprise en cas de résiliation avant sa seconde échéance anniversaire, au taux de 100 % en cas de cessation du contrat avant la troisième échéance mensuelle encaissée et au prorata temporis sur douze mois à compter de la quatrième échéance mensuelle encaissée.
La convention prévoit en outre une clause d'acquisition de la commission précomptée escomptée en cas de résiliation pour transfert du portefeuille à l'initiative du courtier, laquelle pourra être constatée par tout moyen, avec présomption irréfragable de transfert si le taux de chute constaté au cours d'une année calendaire pour un portefeuille dépasse 30 % déduction faite des résiliations enregistrées au cours de la première année de chaque adhésion.
Comme l'a relevé le juge de première instance par d'exacts motifs non remis en cause par l'appelante, l'arrêt de la commercialisation des contrats susvisés par la société Allofair n'est pas consécutif à une injonction de l'autorité administrative mais au courrier d'« information avant injonction » daté du 12 mars 2014 lui ayant été adressé par la direction départementale de la protection des populations de Paris, par lequel cette dernière l'a informée des manquements relatés au rapport du contrôle du 6 mars 2014 mentionnant une non-conformité du démarchage téléphonique à l'exigence d'engagement par signature prévue par l'article L. 121-27 du code de la consommation, un défaut de formulaire détachable de renonciation joint au contrat tel que prévu par l'article L. 121-24 du même code et le caractère trompeur, au sens de l'article L. 121-21 du code précité du délai de rétractation mentionné sur la note de formalisation du devoir de conseil accessible par lien hypertexte depuis le courriel adressé aux prospects.
Indépendamment de la détermination de l'auteur des documents précités et étant par ailleurs observé que le manquement aux règles relatives au démarchage téléphonique ne peut résulter en tout état de cause que de l'activité de la société Allofair elle-même, ce courrier, invitant cette dernière à présenter ses observations dans le délai d'un mois avant éventuelle injonction de mise en conformité, ne constituait aucunement une obligation administrative de cesser toute commercialisation des produits concernés.
La société Allofair ne saurait donc valablement invoquer une faute de la société Praeconis à l'origine de la cessation de cette commercialisation qu'elle a elle-même décidée unilatéralement.
Par ailleurs, la société Allofair, à laquelle incombe la charge de la preuve de la violation des obligations contractuelles qu'elle invoque, ne produit aucun élément de nature à établir des erreurs d'enregistrement et de gestion des contrats ainsi que des doublons de prélèvements liés à la mise en œuvre du système SEPA imputables à la société Praeconis, de tels faits à caractère fautif ne résultant pas des seuls échanges de courriels intervenus entre les parties aux mois de février et mai 2014.
De même, la société Allofair ne fonde sur aucun élément probant ses moyens tirés des erreurs de calcul des commissions et du défaut de communication de certains bordereaux de commissions, tandis que la société Praeconis justifie d'une correction intégrée dans ses décomptes relative au taux de commissionnement dû au titre de l'année 2015 en application de l'article 3 de la convention de courtage, soit 20 % au lieu de 17,50 %, sans que la société Allofair, qui se limite à affirmer le caractère non pertinent du nouveau calcul au regard des dispositions contractuelles, ne produise d'élément précis de nature à remettre en cause celui-ci.
Au surplus, la société Allofair ne fournit aucun élément de nature à établir un lien de causalité entre la perte de clients résultant des faits reprochés à la société Praeconis et son état de cessation des paiements dont la cour constate que la date a été fixée au 11 septembre 2019, soit plus de cinq ans après les échanges intervenus en 2014 qu'elle invoque au soutien de ses prétentions.
En l'absence de toute faute contractuelle caractérisée de la société Praeconis, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées par la société Allofair au titre de l'indemnisation de son préjudice lié aux reprises injustifiées de commissions, à la perte de valeur du portefeuille et à l'atteinte à sa réputation commerciale.
Sur les demandes reconventionnelles formées par la société Praeconis au titre du solde des sommes dues en exécution du contrat de courtage et au titre de l'indemnité consécutive au transfert de portefeuille :
La société Praeconis produit aux débats, d'une part, l'extrait informatique du compte courant de la société de courtage Allofair mentionnant, au titre de la période du 10 mars 2014 au 10 juillet 2016, un solde débiteur de 92.334,66 euros et d'autre part, l'intégralité des bordereaux de commissions mensuels afférents.
Néanmoins, l'examen de ces bordereaux conduit à constater que les taux appliqués aux commissionnements ne sont pas conformes à l'article 6.4 du contrat de courtage fixant la reprise en cas de résiliation du contrat avant sa seconde échéance anniversaire, au taux de 100 % en cas de cessation du contrat avant la troisième échéance mensuelle encaissée et au prorata temporis sur douze mois à compter de la quatrième échéance mensuelle encaissée.
La société Praeconis n'oppose aucun élément aux observations formulées par la société Allofair, alors même que les incohérences invoquées affectent des pièces établies exclusivement par celle qui s'en prévaut.
Par ailleurs, il résulte du défaut d'explicitation de la nomenclature des bordereaux susvisés et de l'absence de communication de l'ensemble des éléments contractuels de chacun des clients attestant des dates de conclusion et de résiliation de chacun des contrats concernés ainsi que de l'assiette de calcul des commissions que la cour ne dispose d'aucun élément justifiant du bien-fondé des sommes réclamées au titre des reprises sur commissions.
Dès lors et à défaut pour la société Praeconis d'établir la réalité de l'obligation en paiement dont elle se prévaut, le jugement critiqué sera infirmé et cette dernière sera déboutée de sa demande formée au titre du solde des sommes dues en exécution du contrat de courtage.
Par ailleurs, tant la pièce n° 22 communiquée par la société Praeconis consistant en deux tableaux sommaires sans explication que les volumineux extraits de fichiers informatiques sous forme de tableurs dont cette dernière entend déduire un taux de chute des contrats supérieur à 30 % et procéder au calcul de l'indemnité afférente sont dépourvus de force probante, en ce qu'il ont été établis par la société Praeconis elle-même et ne sont accompagnés d'aucun élément objectif de nature à en conforter le contenu.
Le jugement dont appel sera en conséquence infirmé et la société Praeconis sera déboutée de sa demande au titre de l'indemnité consécutive au transfert de portefeuille.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par ces motifs,
La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :
Déclare irrecevable le moyen soulevé par la SCP B.-D., prise en la personne de M. Xavier B., en qualité de mandataire liquidateur de la SAS Allofair, tiré de la non-conformité de la clause de résiliation pour transfert du portefeuille à l'initiative du courtier prévue à l'article 6.4 du contrat de courtage signé le 1er mars 2014 avec l'article L. 442-6 du code de commerce en ce qu'elle opérerait un déséquilibre significatif entre les parties.
Confirme, dans les limites de l'appel, le jugement rendu entre les parties le 22 février 2019 par le tribunal de commerce de Vesoul sauf en qu'il a condamné la SAS Allofair à payer à la SAS Praeconis la somme de 92.334,66 euros au titre du solde des sommes en exécution du contrat de courtage et la somme de 50.036,74 euros au titre de l'indemnité consécutive au transfert de portefeuille.
Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant :
Déboute la SAS Praeconis de ses demandes formées au titre du solde des sommes dues en exécution du contrat de courtage et de l'indemnité consécutive au transfert de portefeuille.
Condamne la SCP B.-D., prise en la personne de M. B., en qualité de mandataire liquidateur de la SAS Allofair, aux dépens d'appel.
Et, vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
Ledit arrêt a été signé par M. Edouard Mazarin, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Leila Zait, greffier.
Le greffier, le président de chambre