CASS. CIV. 1re, 1er février 2023
CERCLAB - DOCUMENT N° 10034
CASS. CIV. 1re, 1er février 2023 : pourvoi n° 21-13029 ; arrêt n° 86
Publication : Legifrance ; Bull. civ.
Extrait : « 5. Vu l'article L. 224-63 du code de la consommation : 6. Il résulte de ce texte que, à peine de forclusion de son action en responsabilité pour avarie, le consommateur peut formuler des réserves à la livraison des objets transportés ou des protestations dans les dix jours de leur réception. La livraison s'entend de la remise physique des biens au destinataire ou à son représentant, qui l'accepte.
7. Pour condamner Mme X. au paiement du prix, l'arrêt retient que le contrat de déménagement a pris fin par le dépôt en garde-meubles et que, par application des stipulations contractuelles, Mme X., qui était absente le jour de la livraison et ne s'est pas manifestée dans les dix jours suivants, doit payer la somme convenue dès le dépôt des meubles en garde-meubles et avant d'opposer éventuellement des protestations et réserves.
8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que Mme X. n'avait pas été mise en mesure de vérifier l'état de ses biens transportés et, le cas échéant, d'assortir son acceptation de réserves, puis de prendre effectivement possession de la chose livrée, de sorte que la livraison n'était pas intervenue et que le contrat n'avait pas pris fin, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 1er FÉVRIER 2023
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : W 21-13.029. Arrêt n° 86 F-B.
DEMANDEUR à la cassation : Madame X.
DÉFENDEUR à la cassation : Société d'Exploitation des déménagements de Petriconi
M. CHAUVIN, président.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mme X., domiciliée [Adresse 2] (Italie), a formé le pourvoi n° W 21-13.029 contre l'arrêt rendu le 6 janvier 2021 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant à la société d'Exploitation des déménagements de Petriconi, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de Mme X., de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société d'Exploitation des déménagements de Petriconi, après débats en l'audience publique du 13 décembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 6 janvier 2021), suivant lettre de voiture du 20 septembre 2017, Mme X. a confié à la société d'exploitation des déménagements de Petriconi (la société de Petriconi) le déménagement de son mobilier jusqu'au garde-meubles de cette entreprise.
2. En raison du non-paiement de la facture, la société de Petriconi a refusé à Mme X. l'accès à son mobilier afin d'en vérifier l'état après son transfert.
3. Elle a assigné Mme X. en paiement.
Examen du moyen :
Sur le moyen, pris en sa première branche :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Enoncé du moyen :
4. Mme X. fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à la société de Petriconi la somme de 4 500 euros à titre de paiement du prix du contrat de déménagement, avec intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2018, de prononcer la résolution judiciaire du contrat de garde-meubles,et de la condamner à verser à la société de Petriconi la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour le retard relatif à l'inexécution du contrat de déménagement et la somme de 150 euros par mois à compter du 27 septembre 2017 au jour où les meubles seront retirés, à titre de dommages-intérêts pour la conservation du mobilier en garde-meubles, alors « que l'exécution du contrat de transport ne prend fin qu'à la livraison, laquelle s'entend de la remise physique de la marchandise au client ou à son représentant, qu'elle ait lieu au domicile du client ou au garde-meubles du transporteur ; que pour condamner Mme X., l'arrêt retient qu'elle était absente le jour de la livraison et que le contrat de déménagement a pris fin par le dépôt au garde-meubles de la société de Petriconi ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'en l'absence de Mme X., aucune livraison n'avait pu s'effectuer, de sorte que le contrat de déménagement n'avait pas pris fin, la cour a violé l'article L. 224-63 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
5. Vu l'article L. 224-63 du code de la consommation :
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
6. Il résulte de ce texte que, à peine de forclusion de son action en responsabilité pour avarie, le consommateur peut formuler des réserves à la livraison des objets transportés ou des protestations dans les dix jours de leur réception. La livraison s'entend de la remise physique des biens au destinataire ou à son représentant, qui l'accepte.
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
7. Pour condamner Mme X. au paiement du prix, l'arrêt retient que le contrat de déménagement a pris fin par le dépôt en garde-meubles et que, par application des stipulations contractuelles, Mme X., qui était absente le jour de la livraison et ne s'est pas manifestée dans les dix jours suivants, doit payer la somme convenue dès le dépôt des meubles en garde-meubles et avant d'opposer éventuellement des protestations et réserves.
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que Mme X. n'avait pas été mise en mesure de vérifier l'état de ses biens transportés et, le cas échéant, d'assortir son acceptation de réserves, puis de prendre effectivement possession de la chose livrée, de sorte que la livraison n'était pas intervenue et que le contrat n'avait pas pris fin, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation :
9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de la disposition relative au prix du contrat de déménagement entraîne la cassation de l'ensemble des chefs de dispositif de l'arrêt, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société d'Exploitation des déménagements de Petriconi aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société d'Exploitation des déménagements de Petriconi et la condamne à payer à Mme X. la somme de 3.000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille vingt-trois.
Le conseiller rapporteur le président
Le greffier de chambre
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour Mme X.
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mme X. fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à verser à la SARL De Petriconi la somme de 4.500 euros à titre de paiement du prix du contrat de déménagement, avec intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2018, d'avoir prononcé la résolution judiciaire du contrat de garde-meubles, de l'avoir condamnée à verser à la SARL De Petriconi la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour le retard relatif à l'inexécution du contrat de déménagement et la somme de 150 euros par mois à compter du 27 septembre 2017 au jour où les meubles seront retirés, à titre de dommages-intérêts pour la conservation du mobilier en garde-meubles ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1°) Alors que l'exécution du contrat de transport ne prend fin qu'à la livraison, laquelle s'entend de la remise physique de la marchandise au client ou à son représentant, qu'elle ait lieu au domicile du client ou au garde-meubles du transporteur ; que pour condamner Mme X., l'arrêt retient qu'elle était absente le jour de la livraison et que le contrat de déménagement a pris fin par le dépôt au garde-meubles de la SARL De Petriconi ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'en l'absence de Mme X., aucune livraison n'avait pu s'effectuer, de sorte que le contrat de déménagement n'avait pas pris fin, la cour a violé l'article L. 224-63 du code de la consommation ;
2°) Alors que la circonstance que le mobilier ait été déposé au garde-meubles du déménageur en l'absence du client ne prive pas ce dernier du droit, lorsqu'il prend livraison de ses biens, de vérifier leur état avant de payer le prix convenu, afin d'être en mesure de décider d'accepter la réception, éventuellement sous réserves, ou de la refuser ; qu'en jugeant que Mme X. devait, dès le dépôt au garde-meubles de la SARL De Petriconi, réalisé en son absence, payer la somme convenue avant d'opposer éventuellement des réserves, la cour a violé les articles L. 224-63 et R. 212-1 du code de la consommation, ensemble l'article 1217 du code civil ;
3°) Alors que la circonstance que le mobilier ait été déposé au garde-meubles du déménageur en l'absence du client ne prive pas ce dernier du droit, lorsqu'il prend livraison de ses biens, de vérifier leur état avant de payer le prix convenu, afin d'être en mesure de décider d'accepter la réception, éventuellement sous réserves, ou de la refuser ; qu'en jugeant que la SARL De Petriconi était fondée à invoquer son droit de rétention, lequel ne faisait cependant pas obstacle à l'usage, par Mme X., de son droit de vérification des meubles avant paiement, la cour, qui s'est fondée sur des motifs impropres à caractériser l'obligation de Mme X. de payer le prix convenu avant de vérifier l'état de ses biens, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 224-63 et R. 212-1 du code de la consommation, ensemble l'article 1217 du code civil ;
4°) Alors qu'en cas de doute, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs s'interprètent dans le sens le plus favorable au consommateur ; qu'en jugeant qu'il résulte des articles 11 et 17 des conditions générales de vente que Mme X. devait payer la somme convenue avant d'opposer éventuellement des protestations et réserves, cependant que les conditions générales de vente ne prévoient aucune modalité du paiement du prix convenu et ne précisent pas s'il doit intervenir avant ou après la vérification des meubles, de sorte qu'en présence d'un doute sur ce point, l'interprétation la plus favorable à Mme X. devait prévaloir, la cour a violé l'article L. 211-1 du code de la consommation ;
5°) Alors que dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal ; qu'en condamnant Mme X. au paiement d'une somme de 500 euros de dommages et intérêts pour le retard de paiement du contrat de déménagement, après l'avoir déjà condamnée au paiement du principal avec intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure, la cour a violé l'article 1231-6 du code civil.