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CA DOUAI (ch. 2 sect. 2), 16 novembre 2023

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (ch. 2 sect. 2), 16 novembre 2023
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 2e ch. sect. 2
Demande : 22/01750
Date : 16/11/2023
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 11/04/2022
Référence bibliographique : 5889 (L. 221-3 C. consom.), 5944 (domaine, site internet)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10524

CA DOUAI (ch. 2 sect. 2), 16 novembre 2023 : RG n° 22/01750 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « Il convient également de rappeler qu'aux termes de l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions de l'article L. 221-9 sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels, dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

En l'espèce, la société Axecibles ne conteste pas avoir conclu avec Mme X. un contrat hors établissement.

Il apparaît que l'objet d'un tel contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale de Mme X., dès lors que celle-ci dirige une galerie d'art, une telle activité étant manifestement sans rapport avec l'objet du contrat litigieux, relatif à la création d'un site internet, sa mise à jour, son hébergement et son référencement.

Encore faut-il, pour que Mme X. soit éligible aux règles propres aux contrats conclus hors établissement, qu'elle démontre employer un nombre de salariés inférieur ou égal à cinq. Or l'existence d'un tel effectif n'est pas démontrée ni même alléguée, de sorte qu'elle sera nécessairement déboutée de sa demande en nullité fondée sur les dispositions du code de la consommation, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef par substitution de motifs. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 16 NOVEMBRE 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 22/01750. N° Portalis DBVT-V-B7G-UG3O. Jugement (R.G. n° J2020000035) rendu le 11 janvier 2022 par le tribunal de commerce de Lille Métropole.

 

APPELANTE :

Madame X., exerçant sous l'enseigne « Galerie X. »

née le [date] à [Localité 3], de nationalité française, demeurant [Adresse 1], représentée par Maître René Despieghelaere, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

 

INTIMÉES :

SAS Locam

agissant poursuites et diligence de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, ayant son siège social, [Adresse 2], représentée par Maître Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, assistée de Maître Éric Bohbot, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

SAS Axecibles

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, ayant son siège social, [Adresse 4], représentée par Maître Guillaume Boureux, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, assistée de Maître Michel Apelbaum, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

 

DÉBATS à l'audience publique du 11 avril 2023, tenue par Samuel Vitse magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Samuel Vitse, président de chambre, Nadia Cordier, conseiller, Agnès Fallenot, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2023 après prorogation du délibéré initialement fixé au 29 juin 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Nadia Cordier, conseiller, en remplacement de Samuel Vitse, président empêché et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 mars 2023

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme X. exerce une activité de vente de tableaux, publications de revues artistiques et vente de livres par correspondance à l'enseigne Gallerie X.

Par acte sous seing privé du 1er juin 2018, un contrat a été conclu avec la société Axecibles aux fins de création d'un site internet, sa mise à jour, son hébergement et son référencement, un tel site étant destiné à présenter et à vendre en ligne les œuvres proposées par Mme X.

Par acte sous seing privé du même jour, un contrat de location a été conclu avec la société Locam, aux termes duquel celle-ci concède au preneur une licence d'utilisation des éléments du site internet précité par affichage, chargement, exécution, transmission et stockage. Un tel contrat, qui désigne la société Axecibles en qualité de fournisseur, prévoit le versement de quarante-huit loyers mensuels de 888 euros incluant la maintenance encaissée par le fournisseur.

Le site internet précité a été réceptionné le 3 octobre 2018.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 6 août 2019, la société Locam a mis en demeure Mme X. de s'acquitter des loyers impayés d'avril à juillet 2019 et l'a informée qu'à défaut de paiement dans le délai de huit jours, les loyers à échoir jusqu'au terme du contrat seraient également dus.

Par acte du 18 novembre 2019, la société Locam a assigné Mme X. devant le tribunal de commerce de Lille Métropole aux fins de voir condamner celle-ci à lui payer la somme de 41 086,19 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, au titre du contrat de location.

Par acte du 19 mai 2020, Mme X. a parallèlement assigné la société Axecibles devant le même tribunal aux fins de voir prononcer la nullité du contrat de prestation de services et consécutivement celui de location.

Les instances ont été jointes.

Par jugement du 11 janvier 2022, le tribunal de commerce de Lille Métropole a :

- débouté Mme X. de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné Mme X. à payer à la société Locam la somme de 37.296 euros au titre des loyers, majorée des intérêts au taux légal à compter du 6 août 2019 ;

- condamné la même à payer à la société Locam la somme de 3.729,20 euros au titre de la clause pénale prévue au contrat ;

- débouté la société Axecibles de sa demande de dommages et intérêts ;

- condamné Mme X. à payer la somme de 3.000 euros à la société Locam et celle de 4.000 euros à la société Axecibles au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la même aux entiers dépens.

Par déclaration du 11 avril 2022, Mme X. a relevé appel de l'ensemble des chefs de cette décision.

[*]

Par conclusions notifiées par voie électronique le 20 juin 2022, Mme X. demande à la cour de :

- infirmer la décision rendue par le tribunal de commerce ;

- débouter les sociétés Locam et Axecibles de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- prononcer la nullité des contrats conclus avec les sociétés Axecibles et Locam pour défaut de cause et d'effet vis-à-vis de Mme X. ;

- condamner chacune des sociétés Locam et Axecibles à payer à Mme X. la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

[*]

Par conclusions notifiées par voie électronique le 16 septembre 2022, la société Axecibles demande à la cour de :

A titre principal

- débouter Mme X. de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre de la société Axecibles ;

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la société Axecibles de sa demande de dommages et intérêts d'un montant de 3.000 euros dirigée contre Mme X. ;

A titre d'appel incident et ajoutant au jugement

- condamner Mme X. au paiement de la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

A titre complémentaire

- condamner Mme X. à verser à la société Axecibles la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;

- condamner Mme X. aux entiers frais et dépens.

[*]

Par conclusions notifiées par voie électronique le 28 octobre 2022, la société Locam demande à la cour de :

- débouter Mme X. de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

- condamner Mme X. aux entiers dépens de l'instance ;

- condamner Mme X. à payer à la société Locam la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

[*]

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions précitées des parties pour l'exposé de leurs moyens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 21 mars 2023.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1. Sur la demande en nullité des contrats :

Mme X. sollicite la nullité des contrats précités par application des dispositions du code civil (1.1) et du code de la consommation (1.2).

1.1 Sur la nullité au titre des dispositions du code civil :

Au visa imprécis des articles 1178 et suivants du code civil, Mme X. sollicite la nullité des contrats conclus avec les sociétés Axecibles et Locam. Elle soutient que la nullité est encourue au double motif qu'elle n'aurait pas personnellement consenti aux contrats et qu'elle n'en tirerait aucune contrepartie, dès lors que M. Y. X. en serait le seul souscripteur et bénéficiaire.

Il convient de rappeler qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1154 du code civil, lorsque le représentant agit dans la limite de ses pouvoirs au nom et pour le compte du représenté, celui-ci est seul tenu de l'engagement ainsi contracté.

En l'espèce, il résulte des pièces produites que Mme X. a donné pouvoir à M. Y. X. de signer les contrats litigieux en son nom et pour son compte, l'intéressé y figurant en qualité de représentant de la galerie exploitée par Mme X.

Il s'ensuit que Mme X. est seule tenue des contrats litigieux, conclus en son nom et pour son compte par M. Y. X. Contrairement à ce qu'elle soutient, elle en constitue le véritable bénéficiaire, le site internet créé par la société Axecibles, dont il n'est pas contesté qu'il fonctionne, profitant à la galerie qu'elle exploite personnellement.

Il y a donc lieu de rejeter la demande en nullité fondée sur les dispositions du code civil, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef.

 

1.2 Sur la nullité au titre des dispositions du code de la consommation :

Au visa de l'article L. 242-1 du code de la consommation, Mme X. invoque la nullité du contrat souscrit auprès de la société Axecibles, accessoirement de celui souscrit auprès de la société Locam, au motif qu'un tel contrat n'est assorti d'aucun formulaire de rétractation.

Il convient de rappeler qu'aux termes de l'article L. 221-9 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, le contrat conclu hors établissement est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5, à peine de nullité édictée à l'article L. 242-1.

Il convient également de rappeler qu'aux termes de l'article L. 221-3 du code de la consommation, les dispositions de l'article L. 221-9 sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels, dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.

En l'espèce, la société Axecibles ne conteste pas avoir conclu avec Mme X. un contrat hors établissement.

Il apparaît que l'objet d'un tel contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale de Mme X., dès lors que celle-ci dirige une galerie d'art, une telle activité étant manifestement sans rapport avec l'objet du contrat litigieux, relatif à la création d'un site internet, sa mise à jour, son hébergement et son référencement.

Encore faut-il, pour que Mme X. soit éligible aux règles propres aux contrats conclus hors établissement, qu'elle démontre employer un nombre de salariés inférieur ou égal à cinq. Or l'existence d'un tel effectif n'est pas démontrée ni même alléguée, de sorte qu'elle sera nécessairement déboutée de sa demande en nullité fondée sur les dispositions du code de la consommation, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef par substitution de motifs.

 

2. Sur la demande en paiement :

Aux termes de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L'article 18.1 du contrat de location stipule que la convention peut être résiliée de plein droit par le loueur huit jours après une mise en demeure restée infructueuse, en cas notamment de non-paiement à échéance d'un seul terme de loyer.

L'article 18.3 stipule quant à lui que, suite à une résiliation, le locataire devra verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d'une clause pénale de 10 % et des intérêts de retard, ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat majorée d'une clause pénale de 10 % sans préjudice de tous dommages-intérêts que le locataire pourrait devoir au loueur du fait de la résiliation.

En application de ces stipulations contractuelles et au regard du décompte produit, dont le détail n'est pas contesté, il y a lieu, par confirmation de la décision entreprise, de condamner Mme X. à payer à la société Locam la somme de 37.296 euros au titre des loyers impayés et à échoir, une telle somme étant majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure délivrée le 6 août 2019. En application des mêmes stipulations, il y a également lieu de condamner Mme X. à payer à la société Locam la somme de 3.729,20 euros au titre de la clause pénale, la demande de confirmation de ce chef étant accueillie.

 

3. Sur la demande de dommages et intérêts :

L'exercice d'une action en justice constitue un droit et seule la preuve d'une faute le faisant dégénérer en abus justifie d'allouer des dommages et intérêts au défendeur à l'action établissant un préjudice consécutif.

En l'espèce, la société Axecibles n'établit pas que l'action de Mme X. aurait dégénéré en abus, de sorte qu'elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef.

 

4. Sur les dépens et les frais irrépétibles :

L'issue du litige justifie de confirmer la décision entreprise du chef des dépens et des frais irrépétibles. Le même motif commande de condamner Mme X. aux dépens d'appel et de la condamner à payer à chacune des sociétés Locam et Axecibles la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, tandis qu'elle sera elle-même déboutée de sa propre demande formée à ce titre.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Mme X. à payer à chacune des sociétés Locam et Axecibles la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

La déboute de sa demande formée au même titre ;

La condamne aux dépens d'appel.

Le greffier                                         P/le président

Marlène Tocco                                 Nadia Cordier