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CA LIMOGES (ch. écon. soc.), 9 novembre 2023

Nature : Décision
Titre : CA LIMOGES (ch. écon. soc.), 9 novembre 2023
Pays : France
Juridiction : Limoges (CA), ch. écon. soc.
Demande : 22/00623
Date : 9/11/2023
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 4/08/2022
Référence bibliographique : 5889 (L. 221-3 C. consom.), 5947 (domaine, photocopieur), 7307 (dol juridique)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10426

CA LIMOGES (ch. écon. soc.), 9 novembre 2023 : RG n° 22/00623 

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « L'article L. 221-3 du code de la consommation dispose que les dispositions protectrices du consommateur sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels sous la condition que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci soit inférieur ou égal à cinq.

L'article liminaire du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 entrée en vigueur le 1er juillet 2016 et applicable en l'espèce, définit le professionnel comme étant toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel.

La SCM Kiné Sport Limoges Landouge est une société civile de moyens, laquelle est une structure juridique réservée aux professions libérales, dont l'objet est la fourniture de moyens en personnel ou matériel à ses membres, destinés à faciliter l'exercice de leur profession, mais cette société n'exerce pas elle-même cette activité libérale.

Selon ses statuts, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge a pour objet social la mise en commun de tous les matériels nécessaires en vue de faciliter l'exercice des activités professionnelles de ses associés exerçant dans les mêmes locaux une activité de masseur-kinésithérapeute et la location d'un photocopieur en vue de sa mise à disposition à ses associés, qui est de nature à leur faciliter leur activité de masseur-kinésithérapeute, a parfaitement répondu à son activité principale telle que définie par son objet social de sorte que ne lui sont pas applicables les dispositions du code de la consommation protectrices du consommateur, prévues à peine de nullité des contrats, qu'il s'agisse : - des articles L.111-1 et L.221-5 à L.221-7 portant sur des obligations d'information générale précontractuelle, - des articles L. 121-6 et L. 121-7 sanctionnant certaines pratiques commerciales agressives limitant la liberté de choix du consommateur, - de l'article L. 221-9 portant sur les obligations formelles de rédaction des contrats hors établissement, - de l'article L. 221-18 portant sur le droit à rétractation des contrats conclus hors établissement.

Le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la SCM Kiné Sport Limoges Landouge de sa demande sur ces fondements en nullité des contrats conclus avec la société Multiprint et, subséquemment, compte tenu de l'interdépendance des contrats, en caducité du contrat de location financière conclu avec la société BNP Paribas Lease Group. »

2/ « La SCM Kiné Sport Limoges ne peut donc être suivie en son affirmation qui consiste, en jouant sur les termes « évolution du matériel à partir de 21 mois » et « renouvellement du contrat », à soutenir qu'elle a été trompée sur la durée réelle et le coût de son engagement sur une durée de 63 mois moyennant des loyers trimestriels de 735 euros HT, ou qu'elle n'a pas été informée sur ces conditions de son engagement.

La SCM Kiné Sport Limoges Landouge reproche en seconde part à la société Multiprint, en s'appuyant sur les dispositions de l'article 1112-1 du code civil prévoyant que celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information, une réticence dolosive liée à un manquement à cette obligation précontractuelle d'information, mais encore et toujours en arguant d'un prétendu défaut d'information sur la durée de son engagement auquel il est ci-dessus répondu.

Le jugement dont appel sera donc également confirmé en ce qu'il a écarté ce moyen de nullité du contrat de location du matériel et, subséquemment, la caducité du contrat de location financière passé auprès de la société BNP Paribas Lease Group. »

 

COUR D’APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

ARRÊT DU 9 NOVEMBRE 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 22/00623. N° Portalis DBV6-V-B7G-BILTQ

Le neuf Novembre deux mille vingt trois la Chambre économique et sociale de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

 

ENTRE :

SCM KINE SPORT LIMOGES LANDOUGE

demeurant [Adresse 2], représentée par Maître Anthony ZBORALA, avocat au barreau de LIMOGES, APPELANTE d'une décision rendue le 4 JUILLET 2022 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE LIMOGES

 

ET :

SARL MULTIPRINT

placée en liquidation judiciaire selon jugement du Tribunal de Commerce de Lille Métropole du 25 juillet 2022 et publié au BODACC le 3 août 2022 (Bodacc A n°20220149)., demeurant [Adresse 4], défaillante

SA BNP PARIBAS LEASE GROUP

demeurant [Adresse 1], représentée par Maître Paul GERARDIN, avocat au barreau de LIMOGES

INTIMÉES

SCP B.T.S.G. En qualité de mandataire liquidateur de la SARL MULTI-PRINT

dont le siège social est [Adresse 4], placée en liquidation judiciaire selon jugement du Tribunal de Commerce de Lille Métropole du 25 juillet 2022 et publié au BODACC le 3 août 2022 (Bodacc A n°20220149). Assignée en intervention forcée par acte d'huissier en date du 17 octobre 2022., demeurant [Adresse 3], défaillante

PARTIE INTERVENANTE

 

Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 3 octobre 2023. L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, Madame Johanne PERRIER, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, magistrat rapporteur, assistée de Mme Sophie MAILLANT, Greffier, a tenu seule l'audience au cours de laquelle elle a été entendu en son rapport oral.

Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l'adoption de cette procédure.

Après quoi, Madame Johanne PERRIER, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 9 novembre 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

Au cours de ce délibéré, Madame Johanne PERRIER, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Valérie CHAUMOND, Conseiller et d'elle-même. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR :

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 19 février 2020, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge a régularisé auprès de la société Multiprint un bon de commande portant sur la location pour une durée irrévocable de 63 mois d'un copieur de marque Kyocera KEN 2540, portant la mention d'un coût locatif trimestriel de 735 euros HT, ainsi qu'un un contrat de maintenance pour ce matériel et un contrat « rachat/reprise » pour un montant de 4.900 euros HT.

Ce même jour, la SCM a régularisé auprès de la société BNP Paribas Lease Group un contrat de location financière de ce matériel pour une durée irrévocable de 63 mois moyennant des loyers trimestriels de 735 euros HT.

Le 12 mars 2020, le copieur a été livré au siège de la SCM Kiné Sport Limoges Landouge.

Par un courrier de mise en demeure du 18 juin 2020, dont la BNP a été rendue destinataire en copie, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge a entendu se prévaloir auprès de la société Multiprint de l'annulation ou de la nullité du contrat de fourniture du matériel et, subséquemment, du contrat de location financière en invoquant l'absence de remise de ces contrats avant l'expiration du délai de rétractation, ainsi que des manquements de la société Multiprint aux dispositions du code de la consommation portant sur le bon de commande.

Par actes séparés des 23 et 26 avril 2021, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge a fait assigner la société Multiprint et la société BNP Paribas Lease Grou devant le tribunal de commerce de Limoges aux fins de voir prononcer la nullité des contrats conclus avec la société Multiprint et celle subséquente du contrat de location finnacière.

Par un jugement du 4 juillet 2022, le tribunal de commerce de Limoges :

- a dit que la SCM Kiné Sport Limoges Landouge n'a pas la qualité de non-professionnel au sens du code de la consommation et lui a dit inapplicables les dispositions générales et particulières du code de la consommation ;

- a débouté la SCM Kiné Sport Limoges Landouge de l'ensemble de ses demandes ;

- a dit que la SCM Kiné Sport Limoges Landouge n'a pas satisfait aux obligations de paiement conclues avec la société BNP Paribas Lease Group ;

- a prononcé la résiliation du contrat de location conclu par acte du 19 février 2020 ;

- a condamné la SCM Kiné Sport Limoges Landouge à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 21.947,68 euros outre intérêts au taux légal à dater du présent jugement ;

- a condamné la SCM Kiné Sport Limoges Landouge à restituer à la société BNP Paribas Lease Group le copieur multifonction de marque KYOCERA de modèle KEN 2450, objet du contrat de location, dans les vingt-quatre heures de la demande qui lui en sera faite ;

- a condamné la SCM Kiné Sport Limoges Landouge à verser à la société Multiprint et à la société BNP Paribas Lease Group une indemnité de 2.000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Par un jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole du 25 juillet 2022, la société Multiprint a été placée en liquidation judiciaire, la SCP BTSG étant désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Le 4 août 2022, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge a relevé appel du jugement du tribunal de commerce de Limoges et le 17 octobre 2022 elle a appelé la SCP BTSG en intervention forcée.

* * *

Aux termes de ses écritures du 14 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge demande à la cour d'infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

* à titre principal :

- de prononcer la nullité du contrat conclu avec la société Multiprint à la date du 18 juin 2020 pour manquements aux dispositions du code de la consommation ;

- de prononcer la nullité du contrat conclu avec BNP Paribas Lease Group pour manquements aux dispositions du code de la consommation ;

- de prononcer, en tant que besoin et subsidiairement, la caducité subséquente du contrat passé avec la BNP Paribas Lease Group ;

* à titre subsidiaire :

- de prononcer la nullité du contrat conclu avec la société Multiprint pour dol ;

- de prononcer la nullité du contrat de location conclu avec BNP Paribas Lease Group le 19 février 2020 pour dol ;

- prononcer, en tant que besoin et subsidiairement, la caducité subséquente du contrat BNP Paribas Lease Group ;

* en tout état de cause :

- de condamner la société BNP Paribas Lease Group à lui restituer les sommes versées au titre du contrat de location financière, assorties des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2020, date de la mise en demeure ;

- de condamner la même à récupérer le matériel objet du contrat du 19 février 2020, en l'état et à ses frais à l'adresse de l'entreprise de la SCM ;

- de condamner la société BNP Paribas Lease Group à lui verser la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral ;

- de condamner la société BNP Paribas Lease Group à lui verser la somme de 4. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir :

- que les dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement issues de l'articles L. 221-3 de ce code doivent trouver application, puisque l'objet du contrat ne rentre pas dans le champ de l'activité principale de la SCM qui exerce une activité de masseur kinésithérapeute avec moins de cinq salariés ;

- que les contrats litigieux sont nuls en raison des nombreux manquements aux dispositions du code de la consommation, soit un manquement à l'obligation d'information précontractuelle, l'absence de prix unitaire TTC sur le bon de commande, de désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts, de la date ou du délai dans lequel le professionnel s'engage à livrer le bien ou aux règles relatives à la faculté de renonciation ;

- que le contrat conclu avec la BNP Paribas Lease Group est caduc au regard de son interdépendance avec le contrat Multiprint et de la nullité de celui-ci, la société BNP Paribas Lease Group ayant eu une parfaite connaissance de l'existence de l'opération d'ensemble ;

- subsidiairement, que la nullité des contrats est encourue pour dol compte tenu des pratiques commerciales particulièrement trompeuses de la société Multiprint qui a obtenu son consentement par des mensonges et des manœuvres dolosives, ainsi que par des dissimulations intentionnelles, le contrat BNP Paribas Lease Group étant nul au regard de la qualité de tiers de connivence de la société;

- que la nullité des contrats peut également trouver son fondement dans les pratiques commerciales agressives dont la société Multiprint a fait preuve ;

- qu'en tout état de cause et indépendamment de l'annulation du contrat, elle est fondée à obtenir réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité contractuelle ;

- que la société BNP Paribas Lease Group ne pouvait ignorer les différentes non conformités du bon de commande en ce qu'elle en a nécessairement eu copie et accepté de financer des contrats nuls en pleine connaissance de cause, ayant dès lors commis des fautes la privant de tout droit à restitution des fonds versés au titre de contrats de location-financière.

[*]

Aux termes de ses écritures du 10 janvier 2023, la société BNP Paribas Lease Group demande à la cour :

* sur les demandes de la SCM Kiné Sport Limoges Landouge

- de juger les dispositions des articles L. 221-5 à 7, L. 221-8 à 10 et L. 221-18 à 28 du code de la consommation inapplicables au présent litige ;

- de juger les articles L. 121-6 et 7 du code de la consommation inapplicables au présent litige ;

- de juger les articles L. 111-1 et R. 111-1 du code de la consommation inapplicables au présent litige ;

- de juger que la SCM Kiné Sport Limoges Landouge ne justifie nullement de fautes contractuelles par elle commises ;

- de juger que la caducité du contrat conclu avec elle par la SCM Kiné Sport Limoges Landouge ne saurait être encourue, faute pour cette dernière de connaître l'existence de l'opération d'ensemble ;

- en conséquence, de confirmer la décision attaquée en ce qu'elle a dit et jugé inapplicables les dispositions générales et particulières du code de la consommation et débouté la SCM Kiné Sport Limoges Landouge de l'ensemble de ses demandes ;

* sur sa demande reconventionnelle :

- de juger que la SCM Kiné Sport Limoges Landouge n'a pas satisfait aux obligations de paiement conclues avec elle ;

- de prononcer en conséquence la résiliation du contrat de location conclu par acte sous seing privé en date du 19 février 2020 et de condamner la SCM Kiné Sport Limoges Landouge à lui payer la somme de 21.947,68 euros, outre intérêts au taux légal à dater de la présente demande, et la condamner enfin à lui restituer le copieur multifonction de marque KYOCERA de modèle KEN 2450, objet du contrat de location en date du 19 février 2020 ;

- en conséquence, de débouter purement et simplement la SCM Kiné Sport Limoges Landouge de son appel, sur ce point, dès lors, de confirmer la décision entreprise ;

* y ajoutant :

- d'assortir l'obligation de restitution du copieur multifonction d'une astreinte de 50 euros par jour de retard courant à l'expiration d'un délai de huitaine à dater de la signification de l'arrêt à intervenir ;

* en toutes hypothèses, de confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a condamné la SCM Kiné Sport Limoges Landouge à verser à la société BNP Paribas Lease Group une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance et y ajoutant, de condamner la SCM Kiné Sport Limoges Landouge, voire la société Multiprint, à lui payer une indemnité pour frais irrépétibles d'appel de 5.000 euros, outre intérêts au taux légal à dater de l'arrêt à intervenir, ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure d'appel, le bénéfice de distraction étant accordé à Maître GERARDIN, avocat, pour les sommes dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Elle fait valoir :

- que les dispositions du code de la consommation ne peuvent trouver application, puisque l'activité de la SCM a pour vocation la mise en commun de tous les moyens matériels nécessaires en vue de faciliter l'exercice des activités professionnelles des associés ;

- que la nullité des contrats n'est pas non plus encourue au regard d'un prétendu dol, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge n'apportant aucun élément à l'appui de ses affirmations ;

- en tout état de cause, que l'indivisibilité et l'interdépendance des contrats ne peuvent lui être opposées aux fins de voir prononcer la caducité, du location financière en raison de l'ignorance qu'elle avait de l'existence d'une opération d'ensemble ;

- en cas de débouté de la SCM, elle devra être condamnée au paiement des sommes dues au titre de la résiliation du contrat fondée sur le non respect de ses obligations contractuelles de paiement.

[*]

Bien que régulièrement assignée, la SCP BTSG, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Multiprint, n'a pas constitué avocat. Elle s'est vue signifier les conclusions de la SCM Kiné Sport Limoges Landouge et de la société BNP Paribas Lease Group respectivement le 17 octobre 2022 et le 13 janvier 2023.

L'arrêt qui suit sera donc réputé contradictoire.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

Il est produit aux débats les quatre contrats que la SCM Kiné Sport Limoges a conclus le 19 février 2020 par l'intermédiaire de la société Multiprint, hors établissement, soit :

- la demande de location pour une durée irrévocable de soixante trois mois moyennant des loyers trimestriels de 735 euros HT d'un copieur multifonctions de marque Kyocera à lui fournir par la société Multiprint ;

- le contrat de location financière passé aux mêmes conditions de durée avec la société BNP Paribas Lease Group, prévoyant la fourniture de ce matériel par la société Multiprint et le paiement du premier loyer trimestriel le 15 avril 2020 ;

- le contrat de maintenance de ce matériel passé avec la société Multiprint pour toute la durée de sa location ;

- un contrat dit de rachat/reprise prévoyant son rachat par la société Multiprint au prix de 4.900 euros HT selon l'évolution du matériel repris à partir de 21 mois.

Le matériel concerné a été livré à la SCM Kiné Sport Limoges Landouge le 12 mars 2020.

 

Sur la demande de la SCM Kiné Sport Limoges Landouge en nullité des contrats pour manquement de la société Multiprint aux dispositions du code de la consommation :

L'article L. 221-3 du code de la consommation dispose que les dispositions protectrices du consommateur sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels sous la condition que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci soit inférieur ou égal à cinq.

L'article liminaire du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 entrée en vigueur le 1er juillet 2016 et applicable en l'espèce, définit le professionnel comme étant toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel.

La SCM Kiné Sport Limoges Landouge est une société civile de moyens, laquelle est une structure juridique réservée aux professions libérales, dont l'objet est la fourniture de moyens en personnel ou matériel à ses membres, destinés à faciliter l'exercice de leur profession, mais cette société n'exerce pas elle-même cette activité libérale.

Selon ses statuts, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge a pour objet social la mise en commun de tous les matériels nécessaires en vue de faciliter l'exercice des activités professionnelles de ses associés exerçant dans les mêmes locaux une activité de masseur-kinésithérapeute et la location d'un photocopieur en vue de sa mise à disposition à ses associés, qui est de nature à leur faciliter leur activité de masseur-kinésithérapeute, a parfaitement répondu à son activité principale telle que définie par son objet social de sorte que ne lui sont pas applicables les dispositions du code de la consommation protectrices du consommateur, prévues à peine de nullité des contrats, qu'il s'agisse :

- des articles L.111-1 et L.221-5 à L.221-7 portant sur des obligations d'information générale précontractuelle,

- des articles L. 121-6 et L. 121-7 sanctionnant certaines pratiques commerciales agressives limitant la liberté de choix du consommateur,

- de l'article L. 221-9 portant sur les obligations formelles de rédaction des contrats hors établissement,

- de l'article L. 221-18 portant sur le droit à rétractation des contrats conclus hors établissement.

Le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la SCM Kiné Sport Limoges Landouge de sa demande sur ces fondements en nullité des contrats conclus avec la société Multiprint et, subséquemment, compte tenu de l'interdépendance des contrats, en caducité du contrat de location financière conclu avec la société BNP Paribas Lease Group.

 

Sur la demande de la SCM Kiné Sport Limoges Landouge en nullité des contrats pour dol :

Aux termes de l'article 1137 du code civil, constitue un dol le fait pour un cocontractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manœuvres, des mensonges ou par la dissimulation intentionnelle d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie et l'article 1139 du même code l'erreur résultant d'un dol est toujours excusable et est une cause de nullité alors même qu'elle porterait sur la valeur de la prestation.

En l'espèce, la SCM Kiné Sport Limoges Landouge soutient en première part qu'elle a été trompée sur la durée réelle et le coût de son engagement ; que, lors de son démarchage par un commercial de la société Multiprint, ce dernier lui a promis qu'elle pourrait mettre fin au contrat de maintenance de l'appareil et au contrat de location financière passé avec la société BNP Paribas Lease Group au terme d'un délai de 21 mois, avec une reprise du matériel au prix de 4.900 euros HT, cette indication étant, selon elle, corroborée par les termes du contrat de rachat/reprise qui aurait été passé dans les termes suivants « Évolution du matériel au bout de 21 mois - Au renouvellement du contrat, pour matériel équivalent, coût équivalent », le terme employé de « renouvellement » supposant une rupture d'engagement au terme de 21 mois.

Elle avance que la promesse lui a été ainsi faite d'une opération n'entraînant pratiquement aucun coût pour elle puisque la reprise du matériel était prévue pour un prix couvrant à quelques 15 euros par mois celui de 21 mois de location financière, mais avec pour contrepartie qu'elle accepte d'être référencée auprès des futurs clients de la société Multiprint et que l'idée de la société Multiprint était le cas échéant de faire perdurer un tel partenariat sur une durée de 63 mois, avec à chaque terme de 21 mois, la délivrance d' un nouveau matériel et la reprise de l'ancien au prix de 4.900 euros.

Toutefois, tant la demande de location du photocopieur à fournir par la société Multiprint que le contrat de location financière passé auprès de la société BNP Paribas Lease Group, qu'elle a signés en précisant son n° Siren XXX, ont été conclus, dans des termes ne prêtant à aucune confusion, pour une durée irrévocable de 63 mois moyennant des loyers trimestriels de 735 euros HT et l'offre de reprise du matériel par la société Multiprint au prix de 4.900 euros a uniquement prévu, sauf le cas où la SCM Kiné Sport Limoges Landouge souhaitait en rester propriétaire au terme des 63 mois, que cette offre était conclue sous la double condition de l'évolution du matériel, non au bout de 21 mois mais à partir de 21 mois, soit en fonction de son état de fonctionnement après 21 mois et plus d'utilisation, étant observé que c'est la société Multiprint qui en assurait la maintenance, et du renouvellement d'un contrat de location identique auprès d'elle.

Enfin, c'est sans en apporter le moindre commencement de preuve, qu'elle se prévaut dans ses écritures d'une présentation commerciale qui aurait mentionné un engagement limité à 21 mois, ou d'une promesse de partenariat de la société Multiprint lui assurant la remise au cours de 63 mois de location de trois chèques de 4.900 euros.

La SCM Kiné Sport Limoges ne peut donc être suivie en son affirmation qui consiste, en jouant sur les termes « évolution du matériel à partir de 21 mois » et « renouvellement du contrat », à soutenir qu'elle a été trompée sur la durée réelle et le coût de son engagement sur une durée de 63 mois moyennant des loyers trimestriels de 735 euros HT, ou qu'elle n'a pas été informée sur ces conditions de son engagement.

La SCM Kiné Sport Limoges Landouge reproche en seconde part à la société Multiprint, en s'appuyant sur les dispositions de l'article 1112-1 du code civil prévoyant que celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information, une réticence dolosive liée à un manquement à cette obligation précontractuelle d'information, mais encore et toujours en arguant d'un prétendu défaut d'information sur la durée de son engagement auquel il est ci-dessus répondu.

Le jugement dont appel sera donc également confirmé en ce qu'il a écarté ce moyen de nullité du contrat de location du matériel et, subséquemment, la caducité du contrat de location financière passé auprès de la société BNP Paribas Lease Group.

 

Sur les autres demandes :

La SCM Kiné Sport Limoges Landouge ne fait valoir aucun autre moyen lui permettant de remettre en cause les chefs du jugement critiqué l'ayant déboutée de ses demandes en réparation de préjudices et en paiement de dommages et intérêts, ayant prononcé la résiliation du contrat de location financière et l'ayant condamnée à payer à la société BNP Paribas Lease Group la somme de 21.947,68 euros outre intérêts au taux légal à dater du jugement, ainsi qu'à restituer à la société BNP Paribas Lease Group le copieur multifonction de marque KYOCERA de modèle KEN 2450, objet du contrat de location, dans les vingt-quatre heures de la demande qui lui en sera faite.

Le jugement dont appel sera également confirmé de ces chefs.

Il convient, en y ajoutant, de dire que la restitution du matériel devra intervenir, passé le délai de quinzaine, sous une astreinte de 50 euros par jour de retard.

La demande formée en première instance par la société Multiprint sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile n'a pas été reprise en cause d'appel par son mandataire liquidateur, la SCP BTSG, et il n'y a donc pas lieu à statuer de ce chef.

La SCM Kiné Sport Limoges Landouge succombe en son appel et doit en supporter les entiers dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile par maître Gérardin, avocat.

L'équité ne commande pas de la condamner à verser à la société BNP Paribas Lease Group, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, une somme complémentaire à celle allouée par le premier juge.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Limoges en date du 04 juillet 2022, sauf en ce qu'il a condamné la SCM Kiné Sport Limoges Landouge à verser à la société Multiprint la somme de 2.000 e sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveu de ce chef, constate qu'en l'absence de demande formée par son mandataire liquidateur, la SCP BTSG, il n'y a pas lieu à statuer de ce chef ;

Y ajoutant,

Dit que l'obligation de SCM Kiné Sport Limoges Landouge à restitution du matériel est assortie, passée le délai de quinze jours, d'une astreinte de 50 euros par jour de retard ;

Condamne la SCM Kiné Sport Limoges Landouge aux dépens de l'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile par maître Gérardin, avocat

LE GREFFIER,                                           LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT.                                   Pierre-Louis PUGNET.