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CA LYON (3e ch. A), 16 novembre 2023

Nature : Décision
Titre : CA LYON (3e ch. A), 16 novembre 2023
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 3e ch.
Demande : 22/00829
Date : 16/11/2023
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 27/01/2022
Référence bibliographique : 5889 (L. 221-3 C. consom.), 5947 (domaine, photocopieur)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10527

CA LYON (3e ch. A), 16 novembre 2023 : RG n° 22/00829

Publication : Judilibre

 

Extraits : 1/ « La société Ferronnerie R. soutient que le délai de prescription court à compter du jour où le dommage se manifeste et que le contrat ne lui a pas été remis lorsqu'elle l'a signé.

Toutefois, si le contrat ne lui a pas été remis lors de sa signature le 27 mars 2015, c'est alors nécessairement à cette date qu'elle a eu connaissance de l'absence de remise des informations, ainsi que de l'absence de remise du formulaire de rétractation, comme le prévoit l'article L. 121-18-1 (ancien) du code de la consommation qu'elle invoque au soutien de sa demande de nullité. C'est donc bien à la date de signature du contrat que la prescription de l'action en nullité a commencé à courir, de sorte que la société Ferronnerie R. pouvait soulever la nullité du contrat jusqu'au 27 mars 2020.

Il résulte du jugement attaqué, en date du 2 novembre 2021, que la société Ferronnerie R., assignée le 12 septembre 2019, a sollicité la nullité du contrat devant le tribunal de commerce, même si le fondement était distinct de celui invoqué pour la première fois en cause d'appel. En effet, dans son dispositif, le jugement énonce : 'Déboute la société Ferronnerie R. de ses demandes principale et subsidiaire tendant à voir prononcer la nullité ainsi que la résolution de l'ensemble des contrats conclus'.

Ainsi, contrairement à ce que soutient la société Locam, la demande de nullité n'a pas été formée pour la première fois dans les écritures d'appel du 21 mars 2022, seul son fondement juridique est nouveau (ce qui est recevable, en application de l'article 565 du code de procédure civile). Il lui appartient donc d'établir que, devant les premiers juges, la société Ferronnerie R. a sollicité la nullité du contrat pour la première fois postérieurement au 27 mars 2020, date d'acquisition de la prescription, ce qu'elle ne fait pas. La fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de nullité du contrat sera donc rejetée. »

2/ « La société Ferronnerie R. peut donc valablement invoquer ce texte en qualité de professionnel, peu important qu'elle soit une personne morale.

De plus, la société Ferronnerie R. justifie que les contrats de location et de fourniture, signés à [Localité 8], l'ont été dans son propre établissement et non celui du professionnel qui l'a démarchée, et qu'au jour de la signature, elle employait moins de cinq salariés, quatre exactement, selon la liste des salariés de l'année 2015 (sa pièce n° 2).

Elle justifie également avoir une activité de « ferronnerie et automatisme ». Sa compétence professionnelle s'avère donc sans lien avec le fonctionnement d'un photocopieur comme avec les conditions de financement par location financière, de sorte que les contrats litigieux n'entrent pas dans le champ de son activité principale.

Les dispositions des articles L. 121-17 et L. 121-18 précités lui sont donc applicables et il est de jurisprudence constante que, lorsque les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation mentionnées à l'article L. 121-17, I, 2°, dudit code ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue.

Or, il résulte de l'examen du contrat de location comme du bon de commande, produits aux débats, que ceux-ci ne comportent pas les informations relatives au droit à rétractation (conditions, modalités, délais) et ne comprennent pas non plus de formulaire type de rétractation. Ces dispositions d'ordre public n'ayant pas été respectées, il y a lieu de prononcer la nullité des contrats et en conséquence, par infirmation du jugement entrepris, de débouter la société Locam de toutes ses demandes en paiement fondées sur l'application du contrat de location. La nullité du contrat, qui emporte son anéantissement rétroactif, a pour effet de replacer les parties dans la situation qui était la leur avant la signature de la convention

Il résulte de la mise en demeure adressée par la société Locam à la société Ferronnerie R. le 6 décembre 2018, que les loyers ont été payées par cette dernière jusqu'au 30 mars 2018 inclus, les loyers échus et impayés étant ceux du 30 juin et du 30 septembre 2018. Ce sont donc douze échéances de 1.436,40 euros qui ont été réglées par la société Ferronnerie Rayal, soit la somme totale de 17.236,80 euros, montant non contesté par la société Locam. Il sera donc fait droit à la demande de restitution de cette somme formée par l'appelante, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision qui prononce la nullité du contrat et capitalisation des intérêts échus pour une année. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

TROISIÈME CHAMBRE A

ARRÊT DU 16 NOVEMBRE 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 22/00829. N° Portalis DBVX-V-B7G-OC3A. Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ÉTIENNE du 2 novembre 2021 : RG : 2019j1022.

 

APPELANTE :

SAS FERRONNERIE RAYNAL

immatriculée au RCS de MONTPELLIER sous le numéro XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 3], [Localité 8], Représentée par Maître Emilie RONCHARD, avocat au barreau de LYON, toque : 1739, postulant et par Maître Sophie ARNAUD, avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE

 

INTIMÉS :

M. Z. en qualité de liquidateur de la société INPS (anciennement dénommée COPYMANAGEMENT)

désigné par le jugement du Tribunal de commerce d'AIX-EN-PROVENCE du 14 juin 2018, [Adresse 2], [Localité 1], non représentée

SAS LOCAM

au capital de XXX €, immatriculée au RCS de SAINT-ÉTIENNE sous le numéro B YYY, agissant poursuites et diligences par son dirigeant domicilié ès qualité audit siège, [Adresse 7], [Localité 4], Représentée par Maître Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ÉTIENNE

Maître H. de la société BR ASSOCIES en qualité de liquidateur de la S.I.N. Solution Impression Numérique

désigné par le Tribunal de Commerce de TOULON, en date du 7 mai 2019, [Adresse 5], [Localité 6], non représentée

 

Date de clôture de l'instruction : 24 janvier 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 27 septembre 2023

Date de mise à disposition : 16 novembre 2023

Audience présidée par Viviane LE GALL, magistrate rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière.

Composition de la Cour lors du délibéré : - Patricia GONZALEZ, présidente - Aurore JULLIEN, conseillère - Viviane LE GALL, conseillère

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 27 mars 2015, la société Ferronnerie R. a conclu avec la société LOCAM - Location Automobiles et Matériels (la société Locam) un contrat de location portant sur deux photocopieurs fournis par la société INPS Groupe suivant bon de commande du même jour, prévoyant le versement d'un loyer trimestriel de 1.436,40 euros TTC payable pendant une période irrévocable de vingt-et-un trimestres.

Le 12 mai 2015, la société Ferronnerie R. a signé un procès-verbal de livraison et de conformité des deux photocopieurs.

La société Ferronnerie R. ayant cessé le paiement des loyers à compter du 30 septembre 2018, la société Locam, après l'avoir mise en demeure par lettre recommandée du 6 décembre 2018, l'a assignée en paiement le 12 septembre 2019, devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne.

Par ailleurs, la société INPS Groupe a été placée en liquidation judiciaire et M. Z. désigné en qualité de liquidateur judiciaire. La société SIN Solution impression numérique (la société SIN) a repris l'activité de la société INPS Groupe, puis a également été placée en liquidation judiciaire.

Par actes du 9 juin 2020, la société Ferronnerie R. a appelé en la cause M. Z., en qualité de liquidateur judiciaire de la société INPS Groupe, et la société BR Associés représentée par M. H. en qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la société SIN.

Par jugement réputé contradictoire du 2 novembre 2021, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :

- constaté l'interdépendance et l'indivisibilité des contrats liant d'une part la société Ferronnerie R. et la société INPS Groupe et d'autre part la société Ferronnerie R. et la société Locam, incluant un contrat de location financière,

- rejeté la demande de la société Ferronnerie R. aux fins de voir prononcer l'interdépendance des contrats conclus entre la société Ferronnerie R., la société SIN et la société Locam,

- constaté, faute de preuve apportée par la société Ferronnerie R., l'absence de manquements contractuels commis par les sociétés INPS Groupe et Locam,

- dit que la société Locam a exécuté ses engagements de bonne foi,

- dit qu'il ne peut se prononcer sur d'éventuels manquements et inexécutions contractuelles graves commises par la société SIN,

- débouté la société Ferronnerie R. de ses demandes principales et subsidiaires tendant à voir prononcer la nullité ainsi que la résolution de l'ensemble des contrats conclus entre la société Ferronnerie R. et les sociétés INPS Groupe et SIN,

- débouté la société Ferronnerie R. de sa demande de caducité du contrat la liant à la société Locam,

- débouté la société Ferronnerie R. de l'ensemble de ses autres demandes,

- condamné la société Ferronnerie R. à verser à la société Locam la somme de 10.563,75 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 décembre 2018 et 250 euros au titre de la clause pénale,

- condamné la société Ferronnerie R. à payer la somme de 200 euros à la société Locam au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens sont à la charge de la société Ferronnerie R.,

- écarté la demande d'exécution provisoire du jugement,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

La société Ferronnerie R. a interjeté appel par acte du 27 janvier 2022.

[*]

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 19 septembre 2022, fondées sur les articles L. 121-16-1 III et suivants et L. 121-1 et suivants du code de la consommation et les articles 1137 et suivants du code civil, la société Ferronnerie R. demande à la cour de :

- réformer la décision déférée en ce qu'elle :

a constaté faute preuve apportée par elle, l'absence de manquements contractuels commis par les sociétés INPS Groupe et Locam,

a dit que la société Locam a exécuté ses engagements de bonne foi,

l'a débouté de ses demandes principales et subsidiaire tendant à voir prononcer la nullité ainsi que la résolution de l'ensemble des contrats conclus entre elle et les sociétés INPS Groupe et SIN,

l'a débouté de sa demande de caducité du contrat la liant à la société Locam,

l'a débouté de l'ensemble de ses autres demandes,

l'a condamné à verser à la société Locam la somme de 10.563,75 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 décembre 2018 et 250 euros au titre de la clause pénale,

l'a condamné à payer la somme de 200 euros à la société Locam au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

a dit que les dépens sont à sa charge,

a écarté la demande d'exécution provisoire du jugement,

a débouté les parties du surplus de leurs demandes,

et statuant à nouveau,

- constater le désistement d'instance à l'égard de Me H., ès-qualités de liquidateur de la société SIN,

- débouter la société Locam de ses demandes, fins et prétentions,

- prononcer la nullité du contrat de location avec la société Locam et la nullité du contrat de fourniture de renouvellement et de maintenance avec la société INPS, des 27 mars 2015,

- condamner la société Locam au paiement de la somme de 17.236,80 euros au titre des loyers et frais perçus depuis cette date somme à parfaire au jour de la décision à intervenir, majorée du taux d'intérêt légal, à compter du 29 juillet 2019, date de la mise en demeure,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

à titre subsidiaire,

- prononcer la résiliation du contrat du 27 mars 2015, pour absence de cause, à la date du 12 mai 2015,

- prononcer la caducité du contrat de location interdépendant, à cette date,

- condamner la société Locam au paiement de la somme de 17.236,80 euros au titre des loyers perçus depuis cette date somme à parfaire au jour de la décision à intervenir, cette somme emportera majoration au taux d'intérêt légal à compter du 29 juillet 2019,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

en tout état de cause,

- débouter la société Locam de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la société Locam au paiement de la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure et aux entiers dépens, de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement.

[*]

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 21 juin 2022, fondées sur les articles 1134 et suivants, 1149 et 1165 anciens et 2224 du code civil et l'article préliminaire puis liminaire du code de la consommation, la société Locam demande à la cour de :

- juger non fondé l'appel de la société Ferronnerie R.,

- la débouter de toutes ses demandes comme pour partie irrecevables et toutes non fondées,

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a réduit à l'euro symbolique la clause pénale de 10 % sur les sommes dues,

- infirmer le jugement de ce chef et condamner la société Ferronnerie R. à lui payer à ce titre la somme complémentaire de 1.056,38 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure délivrée le 6 décembre 2018,

- condamner la même à lui régler une nouvelle indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Ferronnerie R. en tous les dépens d'instance comme d'appel.

[*]

Maître H., de la SCP BR Associés, ès-qualités de liquidateur de la société SIN, à qui la déclaration d'appel a été signifiée à domicile par acte du 25 mars 2022, n'a pas constitué avocat.

Maître Z., ès-qualités de liquidateur de la société INPS, à qui la déclaration d'appel a été signifiée à domicile par acte du 25 mars 2022, n'a pas constitué avocat.

[*]

La procédure a été clôturée par ordonnance du 24 janvier 2023, les débats étant fixés au 27 septembre 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la confirmation des chefs du jugement non critiqués :

Les chefs du jugement suivants, dévolus à la cour par la déclaration d'appel, ne sont pas critiqués par les parties qui n'en sollicitent pas la réformation dans leurs écritures :

« - constate l'interdépendance et l'indivisibilité des contrats liant d'une part la société Ferronnerie R. et la société INPS Groupe et d'autre part la société Ferronnerie R. et la société Locam, incluant un contrat de location financière,

- rejette la demande de la société Ferronnerie R. aux fins de voir prononcer l'interdépendance des contrats conclus entre la société Ferronnerie R., la société SIN et la société Locam,

- dit qu'il ne peut se prononcer sur d'éventuels manquements et inexécutions contractuelles graves commises par la société SIN. »

Ces chefs du jugement seront donc confirmés.

 

Sur le désistement d'instance :

La société Ferronnerie R. indique ne plus former aucune demande contre la société SIN et son liquidateur Maître H., et se désister à leur égard.

Il convient donc de constater son désistement d'instance à l'égard de la société BR Associés, représentée par M. H., prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société SIN Solution impression numérique.

 

Sur la nullité du contrat :

La société Ferronnerie R. fait valoir que :

- les dispositions du code de la consommation, en particulier l'article L. 121-16-1, III, lui sont applicables en ce que le contrat a été conclu hors établissement, qu'elle employait moins de cinq salariés et que l'objet du contrat n'entrait pas dans le champ de son activité principale ; les contrats conclus avec les sociétés INPS Groupe et Locam ne comportent pas les mentions obligatoires et ne disposent pas d'un formulaire de rétractation ;

- le contrat de location est également nul en ce que la société Locam n'établit pas avoir réglé la facture du fournisseur, conformément à l'article 1er de ses conditions générales de location ;

- la société INPS Groupe a commis des pratiques commerciales trompeuses au sens de l'article L. 121-1 du code de la consommation, pour l'amener à signer les contrats litigieux, justifiant l'annulation des contrats ;

- les contrats doivent donc être annulés et la société Locam condamnée à restituer les loyers versés depuis le 28 mai 2015, soit la somme de 17.236,80 euros ;

Elle précise, en réponse aux conclusions de la société Locam, que son action en nullité n'est pas prescrite car son argumentation est développée en défense, pour faire échec à la demande en paiement de la société Locam ; qu'au jour de la signature des contrats, elle n'avait pas connaissance des droits lui permettant d'exercer l'action en nullité, d'autant que les contrats ne lui ont pas été remis lorsqu'elle les a signés ; que le point de départ se situe au jour où le dommage se manifeste.

La société Locam fait valoir que :

- la demande d'annulation du contrat de location, formulée pour la première fois par conclusions d'appel notifiées le 21 mars 2022, se heurte à la prescription de l'article 2224 du code civil, étant précisé que le contrat de location financière a été conclu entre les parties le 27 mars 2015 et a connu un commencement d'exécution puisque l'appelante a réglé pas moins de treize loyers trimestriels ; que cette demande ne peut pas davantage être formulée par voie d'exception dès lors que le contrat a reçu un début d'exécution ;

- la société Ferronnerie R. n'est pas fondée à invoquer les dispositions du code de la consommation en ce que sont exclues de ces dispositions les personnes morales ; que les dispositions applicables aux personnes morales pour les contrats conclus hors établissement sont entrées en vigueur postérieurement à la signature des contrats litigieux.

Sur ce,

- La prescription de la demande de nullité

Selon l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce, le contrat litigieux a été signé le 27 mars 2015 et exécuté par les parties pendant plus de deux ans, la société Ferronnerie R. ayant réglé les loyers jusqu'en septembre 2018. La société Locam a assigné celle-ci en paiement le 12 septembre 2019.

La société Ferronnerie R. soutient que le délai de prescription court à compter du jour où le dommage se manifeste et que le contrat ne lui a pas été remis lorsqu'elle l'a signé.

Toutefois, si le contrat ne lui a pas été remis lors de sa signature le 27 mars 2015, c'est alors nécessairement à cette date qu'elle a eu connaissance de l'absence de remise des informations, ainsi que de l'absence de remise du formulaire de rétractation, comme le prévoit l'article L. 121-18-1 (ancien) du code de la consommation qu'elle invoque au soutien de sa demande de nullité.

C'est donc bien à la date de signature du contrat que la prescription de l'action en nullité a commencé à courir, de sorte que la société Ferronnerie R. pouvait soulever la nullité du contrat jusqu'au 27 mars 2020.

Il résulte du jugement attaqué, en date du 2 novembre 2021, que la société Ferronnerie R., assignée le 12 septembre 2019, a sollicité la nullité du contrat devant le tribunal de commerce, même si le fondement était distinct de celui invoqué pour la première fois en cause d'appel. En effet, dans son dispositif, le jugement énonce : 'Déboute la société Ferronnerie R. de ses demandes principale et subsidiaire tendant à voir prononcer la nullité ainsi que la résolution de l'ensemble des contrats conclus'.

Ainsi, contrairement à ce que soutient la société Locam, la demande de nullité n'a pas été formée pour la première fois dans les écritures d'appel du 21 mars 2022, seul son fondement juridique est nouveau (ce qui est recevable, en application de l'article 565 du code de procédure civile). Il lui appartient donc d'établir que, devant les premiers juges, la société Ferronnerie R. a sollicité la nullité du contrat pour la première fois postérieurement au 27 mars 2020, date d'acquisition de la prescription, ce qu'elle ne fait pas.

La fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de nullité du contrat sera donc rejetée.

 

- La nullité du contrat sur le fondement du code de la consommation

Selon l'article L. 121-16-1, III, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 et antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, « Les sous-sections 2, 3, 6 et 7, applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. »

L'article L. 121-17 figurant à la sous-section 2 du même code visée à l'article précité, dans sa rédaction issue de la loi du 17 mars 2014, dispose :

« I.-Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° (...)

5° (...)

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

II.-Si le professionnel n'a pas respecté ses obligations d'information concernant les frais supplémentaires mentionnés au I de l'article L. 113-3-1 et au 3° du I du présent article, le consommateur n'est pas tenu au paiement de ces frais.

III.-La charge de la preuve concernant le respect des obligations d'information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel. »

Enfin, l'article L. 121-18 figurant à la sous-section 3 visée à l'article précité, dans sa rédaction issue de la loi d u17 mars 2014, dispose :

« Dans le cas d'un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l'accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues au I de l'article L. 121-17. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible ».

L'article L. 121-16-1, III, précité s'applique aux personnes physiques comme aux personnes morales. En effet, l'article 2 de la directive 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, dont procède l'article L. 121-16-1, III, du code de la consommation, définit le professionnel comme étant toute personne physique ou morale […] qui agit […] aux fins qui entrent dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale […]. Le considérant 13 de cette même directive indique par ailleurs que Les Etats membres peuvent décider d'étendre l'application des règles de la présente directive à des personnes morales ou physiques qui ne sont pas des consommateurs au sens de la présente directive, comme les […] petites et moyennes entreprises. Interprété à la lumière de la directive précitée, l'article L. 121-16-1, III, apparaît donc applicable aux professionnels ayant la personnalité morale.

La société Ferronnerie R. peut donc valablement invoquer ce texte en qualité de professionnel, peu important qu'elle soit une personne morale.

De plus, la société Ferronnerie R. justifie que les contrats de location et de fourniture, signés à [Localité 8], l'ont été dans son propre établissement et non celui du professionnel qui l'a démarchée, et qu'au jour de la signature, elle employait moins de cinq salariés, quatre exactement, selon la liste des salariés de l'année 2015 (sa pièce n° 2).

Elle justifie également avoir une activité de « ferronnerie et automatisme ». Sa compétence professionnelle s'avère donc sans lien avec le fonctionnement d'un photocopieur comme avec les conditions de financement par location financière, de sorte que les contrats litigieux n'entrent pas dans le champ de son activité principale.

Les dispositions des articles L. 121-17 et L. 121-18 précités lui sont donc applicables et il est de jurisprudence constante que, lorsque les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation mentionnées à l'article L. 121-17, I, 2°, dudit code ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue.

Or, il résulte de l'examen du contrat de location comme du bon de commande, produits aux débats, que ceux-ci ne comportent pas les informations relatives au droit à rétractation (conditions, modalités, délais) et ne comprennent pas non plus de formulaire type de rétractation.

Ces dispositions d'ordre public n'ayant pas été respectées, il y a lieu de prononcer la nullité des contrats et en conséquence, par infirmation du jugement entrepris, de débouter la société Locam de toutes ses demandes en paiement fondées sur l'application du contrat de location.

La nullité du contrat, qui emporte son anéantissement rétroactif, a pour effet de replacer les parties dans la situation qui était la leur avant la signature de la convention.

Il résulte de la mise en demeure adressée par la société Locam à la société Ferronnerie R. le 6 décembre 2018, que les loyers ont été payées par cette dernière jusqu'au 30 mars 2018 inclus, les loyers échus et impayés étant ceux du 30 juin et du 30 septembre 2018. Ce sont donc douze échéances de 1.436,40 euros qui ont été réglées par la société Ferronnerie Rayal, soit la somme totale de 17.236,80 euros, montant non contesté par la société Locam. Il sera donc fait droit à la demande de restitution de cette somme formée par l'appelante, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision qui prononce la nullité du contrat et capitalisation des intérêts échus pour une année.

 

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La société Locam succombant à l'instance, elle sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel. Il convient donc de la débouter de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner au même titre, à payer à la société Ferronerie R. la somme de 1.500 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire,

Constate le désistement d'instance de la société Ferronnerie R. à l'égard de la société BR Associés, représentée par M. H., prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société SIN Solution impression numérique ;

Confirme le jugement en ce qu'il :

- constate l'interdépendance et l'indivisibilité des contrats liant d'une part la société Ferronnerie R. et la société INPS Groupe et d'autre part la société Ferronnerie R. et la société Locam, incluant un contrat de location financière ;

- rejette la demande de la société Ferronnerie R. aux fins de voir prononcer l'interdépendance des contrats conclus entre la société Ferronnerie R., la société SIN et la société Locam ;

- dit qu'il ne peut se prononcer sur d'éventuels manquements et inexécutions contractuelles graves commises par la société SIN.

L'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau,

Déclare recevable comme non prescrite la demande de nullité des contrats formée par la société Ferronnerie R. ;

Prononce la nullité des contrats de location et de fourniture en date du 25 mars 2015 conclus par la société Ferronnerie R. avec la société LOCAM - Location Automobiles Matériels pour le premier, et la société INPS Groupe pour le second ;

Condamne la société LOCAM - Location Automobiles Matériels à restituer à la société Ferronnerie R. la somme de 17.236,80 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision et capitalisation des intérêts échus pour une année ;

Condamne la société LOCAM - Location Automobiles Matériels aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne la société LOCAM - Location Automobiles Matériels à payer à la société Ferronnerie R. la somme de 1.500 euros (mille-cinq-cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE                             LA PRÉSIDENTE