TI PUTEAUX, 26 avril 2005
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 117
TI PUTEAUX, 26 avril 2005 : RG n° 03/001906
Publication : Lamy « Transports »
Extrait : « Les conditions générales du contrat souscrit par les demandeurs contiennent un article qui dispose que « les actions en justice pour avarie, perte ou retard auxquelles peut donner lieu le contrat de déménagement doivent être intentées dans l'année qui suit la livraison du mobilier ». En l'espèce la livraison a eu lieu le 10 juillet 2002 et l'assignation introductive d'instance est en date du 4 décembre 2003. Les époux Y. ne peuvent réfuter l'application de cette stipulation en arguant de son caractère abusif, le court délai ayant été porté à leur connaissance par une mention lisible et explicite figurant dans les conditions générales du contrat en bas signées par les demandeurs et que cette clause est conforme à la recommandation nº 82-02 du 19 février 1982 de la commission des clauses abusives. Par ailleurs, la loi du 12 juin 2003 dispose en son article 26 que sont considérées comme des contrats de transport de marchandises, les opérations de transport effectuées dans le cadre d'un déménagement. Il en résulte que les règles régissant la prescription dans le contrat de transport sont applicables en l'espèce, le contrat de déménagement dont il s'agit s'analysant de par la loi comme un contrat de transport. Il en résulte que les sociétés défenderesses sont bien fondées à opposer aux demandeurs la prescription d'un an prévue à l'article L. 133-6 du code du commerce. »
TRIBUNAL D’INSTANCE DE PUTEAUX
JUGEMENT DU 26 AVRIL 2005
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° R.G. : 11-03-001906. Décision : contradictoire, en premier ressort.
DEMANDEUR(S) :
- Madame X. épouse Y.
[adresse], représenté (e) par Maître CHOISEZ Stéphane, avocat
- Monsieur Y.
[adresse], représenté (e) par Maître CHOISEZ Stéphane, avocat
DÉFENDEUR(S) :
- Société ADM TRANSPORT
[adresse], représenté (e) par Maître BARBIER Alain, avocat
- Société BELMARINE
[adresse], représenté (e) par Maître RENAUDIN Fabrice, avocat
- SA MARSH
[adresse], représenté (e) par Maître RENAUDIN Fabrice, avocat
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
I - EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte d'huissier du 4 décembre 2003, Madame X. épouse Y. et Monsieur Y. ont fait assigner devant ce Tribunal la société ADM TRANSPORT, la société BELMARINE et la société MARSH SA aux fins suivantes :
- condamner solidairement la société ADM et la compagnie BELMARINE à leur payer la somme de 2.650 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2002,
- condamner la société MARSH à leur payer la somme de 1.500 euros à titre de dommages intérêts,
- condamner l'ensemble des défendeurs à leur payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
A l'appui de leurs demandes, les époux Y. exposent que :
- suivant devis du 20 mars 2002 ils ont confié à la société ADM TRANSPORT le transport de leurs meubles,
- ils ont souscrit une assurance dommages proposée dans le cadre du transport,
- ils ont complété le 7 avril 2002 la déclaration de valeur d'un montant total de 76.225 euros,
- une première lettre de voiture a été établie concernant le transport des meubles au garde meubles et en Bretagne sans réserve,
- une seconde lettre de voiture a été établie le 10 juillet 2002 en ce qui concerne le transport de leurs meubles à Paris avec observations et sous réserve du contrôle au déballage de la vaisselle des verres et des tableaux,
- le 11 juillet 2002, le directeur de la société ADM a constaté l'ampleur des dégâts,
- le 12 juillet 2002, ils ont adressé à la société ADM un courrier précisant l'ensemble des dommages subis,
- le 13 septembre 2002, la société ADM leur a transmis une proposition de dédommagement rédigée par le Cabinet MARSH à hauteur de 350 euros,
- par courrier du 7 octobre 2002, la société ADM invitait la société MARSH à prendre en charge l'ensemble des réserves émises par les époux Y.,
- par courrier du 28 octobre 2002 la société la société MARSH indiquait au transporteur que les assureurs avaient tenu compte des réserves émises lors de l'établissement de la proposition d'indemnisation,
- Le 21 novembre 2002, la société ADM a informé la société MARSH de ce qu'elle reconnaissait les dégâts mentionnés dans la lettre de voiture du 9 juillet 2002,
- ils ont reçu une seconde proposition d'indemnisation à hauteur de 850 euros alors qu'ils estiment leur préjudice à 2.650 euros,
- le 5 mars 2003 leur assureur protection juridique a adressé au cabinet MARSH une mise en demeure de procéder à l'expertise des dommages afin d'obtenir l'indemnisation des demandeurs,
- ce courrier n'a pas eu de réponse,
- le 11 juillet 2003 ils ont mis en demeure le cabinet MARSH de les indemniser à hauteur de 2650 euros,
- cette mise en demeure a été réitérée par lettre du 27 août 2003,
- l'action n'est pas couverte par la prescription puisqu'il y a eu interruption et inversion par la reconnaissance de responsabilité de la société de transport,
- le cabinet MARSH est intervenu comme courtier mais n'a pas porté à leur connaissance les coordonnées exactes de la compagnie d'assurances.
La société ADM TRANSPORT conclut ainsi :
- constater la prescription de l'action des époux Y.,
- les débouter en conséquence de l'ensemble de leurs demandes,
à titre subsidiaire
- constater le défaut de prescription de l'action vis à vis de l'assureur la société BELMARINE condamner cette dernière à réparer aux époux Y. le montant des dégâts dont ils font état soit la somme de 2.650 euros,
à titre infiniment subsidiaire
- condamner la société BELMARINE à la relever et la garantir de toutes condamnations prononcées contre elle
- condamner solidairement les époux Y., la société BELAMARINE et le Cabinet MARSH à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La société ADM TRANSPORT soutient que :
- elle a exécuté pour le compte des demandeurs un contrat de transport le 10 juillet 2002,
- Le 11 juillet les époux Y. ont constaté des dégâts,
- compte tenu de la date d'assignation, la demande des époux est couverte par la prescription de l'article 108 du code du commerce qui prévoit que l'action doit être engagée dans l'année qui suit la livraison du mobilier,
- la reconnaissance du droit à indemnisation ne caractérise une interruption de prescription qu'à la condition qu'elle contienne une reconnaissance de l'intégralité du dommage et la promesse formelle de réparer,
- en l'absence de toute proposition d'indemnisation, il n'y a pas eu novation,
- la prescription est acquise au 3 décembre 2002, les époux Y. ont fait assigner le 4 décembre 2003,
- l'action est également prescrite sur le fondement des clauses du contrat,
- l'article L. 114-1 du code des assurances prévoit que toutes les actions dérivant du contrat d'assurances sont prescrites par deux ans à compter de l'évènement qui y donne naissance.
La société MARSH et la société BELMARINE concluent ainsi :
- déclarer irrecevable les demandes des époux Y. comme étant couvertes par la prescription,
subsidiairement
- déclarer irrecevables les demandes des époux Y. dirigées à leur encontre comme étant couvertes par la prescription, la reconnaissance de responsabilité ne leur étant pas opposable en tout état de cause mettre hors de cause la société MARSH,
- condamner les époux Y. au paiement de la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Les sociétés défenderesses font valoir que :
- la prescription est acquise sur le fondement de l'article 15 des conditions générales du contrat de transport,
- depuis la loi du 12 juin 2003, sont considérées comme des transports de marchandises les opérations de transport effectuées dans le cadre d'un déménagement,
- cette loi est d'application immédiate,
- la reconnaissance de responsabilité de la société ADM TRANSPORT ne vaut pas novation en l'absence de reconnaissance de l'intégralité du préjudice,
- cette reconnaissance ne leur est pas opposable,
- les époux Y. ne justifient nullement leur demande en dommages intérêts entre la faute reprochée à la société MARSH et le préjudice subi par eux,
- le nom de l'assureur figurait sur les courriers ainsi que le numéro de police.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
II - MOTIFS DU JUGEMENT :
Les conditions générales du contrat souscrit par les demandeurs contiennent un article qui dispose que « les actions en justice pour avarie, perte ou retard auxquelles peut donner lieu le contrat de déménagement doivent être intentées dans l'année qui suit la livraison du mobilier ».
En l'espèce la livraison a eu lieu le 10 juillet 2002 et l'assignation introductive d'instance est en date du 4 décembre 2003.
Les époux Y. ne peuvent réfuter l'application de cette stipulation en arguant de son caractère abusif, le court délai ayant été porté à leur connaissance par une mention lisible et explicite figurant dans les conditions générales du contrat en bas signées par les demandeurs et que cette clause est conforme à la recommandation nº 82-02 du 19 février 1982 de la commission des clauses abusives.
Par ailleurs, la loi du 12 juin 2003 dispose en son article 26 que sont considérées comme des contrats de transport de marchandises, les opérations de transport effectuées dans le cadre d'un déménagement.
Il en résulte que les règles régissant la prescription dans le contrat de transport sont applicables en l'espèce, le contrat de déménagement dont il s'agit s'analysant de par la loi comme un contrat de transport.
Il en résulte que les sociétés défenderesses sont bien fondées à opposer aux demandeurs la prescription d'un an prévue à l'article L. 133-6 du code du commerce.
Les époux Y. font valoir que leurs diverses réclamation valent interruption de prescription et que la reconnaissance de responsabilité de la société ADM TRANSPORT vaut novation.
Aux termes de l'article 2248 du code civil « la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur ou le possesseur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ».
En l'espèce les époux Y. ont transmis à la société ADM TRANSPORT une lettre de protestation, la société ADM TRANSPORT a sollicité des devis et factures pour les transmettre à la compagnie d'assurances. Ceci n'est pas constitutif de la reconnaissance par le débiteur du droit contre lequel il prescrit.
Par lettre du 2 décembre 2002, la société ADM TRANSPORT a déclaré « reconnaître que les dégâts mentionnés dans les courriers recommandés de Monsieur Y. des 12 juillet et 12 août 2002 ont bien été occasionnés par la société ADM TRANSPORT. »
La novation supposant l'accord de volonté des deux parties tant sur le principe de la responsabilité que sur le montant du dommage, la substitution de la prescription de droit commun à la courte prescription de l'article L. 133-6 du code du commerce est soumise à la double exigence d'une reconnaissance de responsabilité et d'un engagement à réparer le dommage émanant du débiteur de l'obligation, la seule reconnaissance de responsabilité sans offre d'indemnisation étant insuffisante par application de l'article 2248 du code civil...
En l'espèce, la société ADM TRANSPORT a fait une déclaration de reconnaissance de responsabilité dans son courrier du 2 décembre 2002 sans faire la moindre offre d'indemnisation du dommage, sans même faire la moindre allusion au quantum du dommage en cause.
Il résulte de ce qui précède qu'en assignant par acte d'huissier du 4 décembre 2003 les sociétés ADM TRANSPORT et la société BELMARINE, assureur au titre du contrat de transport de X.ises dont la livraison a été effectuée le 10 juillet 2002, les époux Y. ont agi tardivement, leur action étant couverte par la prescription prévue à la fois par l'article 15 des conditions générales du contrat que par l'article L. 133-6 du code du commerce.
Leur action sera en conséquence déclarée irrecevable.
Les époux Y. sollicitent par ailleurs la condamnation de la société MARSH à leur payer la somme de 2.500 euros à titre de dommages intérêts au motif que par son attitude celle ci a retardé leur indemnisation.
Les demandeurs se contentent d'affirmer que l'attitude du cabinet MARSH a été telle qu'elle a retardé leur indemnisation sans verser la moindre pièce à l'appui de leur allégation, les pièces de la procédure établissant que celle ci a correspondu avec les parties au litige, a répondu aux diverses demandes.
Les époux Y. dont l'action est déclarée irrecevable comme étant couverte par la prescription ne font donc pas la preuve entre la faute reprochée à la société MARSH et le retard de l'indemnisation. Ils seront déboutés de leur demande en dommages intérêts.
Succombant en principal, Monsieur et Madame Y. seront déboutés de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser les frais irrépétibles à la charge des sociétés défenderesses. Les éléments de la cause permettent de fixer à 800 euros la somme que les époux Y. seront condamnés à payer à chacune des sociétés défenderesses soit la société ADM TRANSPORT, la société MARSH et la société BELMARINE.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort
Déclare irrecevable la demande en paiement de Monsieur et Madame Y. dirigée à l'encontre de la société ADM TRANSPORT et la société BELMARINE, comme étant prescrite ;
Déboute Monsieur et Madame Y. du surplus de leurs demandes ;
Condamne Monsieur et Madame Y. à payer la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à chacune des sociétés suivantes : société ADM TRANSPORT, société BELMARINE et société MARSH.
Laisses les dépens à la charge de Monsieur et Madame Y.
Président
Edmée BONGRAND.