CA CAEN (1re ch. sect. civ. et com.), 8 novembre 2007
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1224
CA CAEN (1re ch. sect. civ. et com.), 8 novembre 2007 : RG n° 05/02821
Publication : Juris-Data n° 353439
Extrait : « Attendu que les appelants invoquent également l'article 27 de la loi du 1er février 1995, selon lequel toute prestation annexe non prévue au contrat de transport routier de marchandises qui cause un dommage engage la responsabilité de l'entreprise bénéficiaire de la prestation ; que la notion de prestation annexe doit être entendue par référence à la définition contenue à l'article 25 de la même loi ; que selon cette disposition, les prestations annexes sont les prestations autres que la conduite du véhicule, la préparation de celui-ci aux opérations de chargement et de déchargement et la mise en œuvre des matériels spécialisés attachés au véhicule ; qu'en l'espèce le déchargement de la marchandise dans une déchetterie par un relèvement mécanique de la benne relève des prestations ordinaires d'un transporteur et ne saurait être analysée en une prestation annexe au sens du présent texte ».
COUR D’APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE - SECTION CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 8 NOVEMBRE 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 05/02821.
ORIGINE : DÉCISION en date du 6 juillet 2005 du Tribunal de commerce de CAEN : RG n° 02/4195.
APPELANTES :
LA SARL TRANSPORTS SERIS FARBOS
[adresse], prise en la personne de son représentant légal,
LA SA GAN ASSURANCES IARD
[adresse], prise en la personne de son représentant légal,
représentées par la SCP TERRADE DARTOIS, avoués, assistées de Maître Valérie COHEN, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES :
La Société Coopérative AGRIAL
[adresse], prise en la personne de son représentant légal, représentée par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués, assistée de la SCP CRÉANCE, avocats au barreau de CAEN
LA SA LOGISCO
[adresse], prise en la personne de son représentant légal, représentée par la SCP GRAMMAGNAC-YGOUF BALAVOINE LEVASSEUR, avoués, assistée de Maître Xavier MORICE, avocat au barreau de CAEN
ASSIGNÉE EN APPEL PROVOQUÉ :
LA SOCIÉTÉ GROUPAMA TRANSPORTS
[adresse], prise en la personne de son représentant légal, représentée par la SCP PARROT LECHEVALLIER ROUSSEAU, avoués
[minute page 2]
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Madame HOLMAN, Conseiller, faisant fonction de Président, Madame BOISSEL DOMBREVAL, Conseiller, Mme VALLANSAN, Conseiller, rédacteur,
DÉBATS : A l'audience publique du 25 septembre 2007
GREFFIER : Mme LE GALL, greffier
ARRÊT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2007 et signé par Madame HOLMAN. Conseiller, faisant fonction de Président, et Mme LE GALL, Greffier
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement du tribunal de commerce de Caen du 6 juillet 2005 qui a débouté la SARL TRANSPORT SERIS FARBOS (TSF) et la société anonyme compagnie GAN ASSURANCES IARD de leurs demandes, les a condamnées solidairement à payer à la société Coopérative agricole et Agro alimentaire AGRIAL, la société anonyme LOGISCO et la société GROUPAMA TRANSPORT une somme de 1.200 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Vu l'appel de la société TSF et de la compagnie GAN et leurs conclusions du 30 août 2007 par lesquelles elles demandent à la Cour d'infirmer le jugement, de reconnaître les sociétés AGRIAL et LOGISCO responsables de leur préjudice et les condamner solidairement à payer les sommes de 9.834,87 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2001 à la société TSF et de 32.295,01 euros et les intérêts au taux légal à compter du 9 août 2001 à la Compagnie GAN, outre la somme de 2.500 euros chacune en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Vu les conclusions de la société LOGISCO du 14 septembre 2007 qui demande à la Cour de confirmer le jugement, à titre subsidiaire juger que la société GROUPAMA TRANSPORT devra la garantir de toutes les conséquences de son éventuelle condamnation, condamner tout succombant à lui payer une somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Vu les conclusions de la société AGRIAL du 25 septembre 2007 par lesquelles elle demande à la Cour de confirmer le jugement et condamner les appelants à lui payer une somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que par deux actes du 7 août 2001 qualifiés confirmation de sous-traitance, numérotés n° 71629.1 et 71629.2, la société LOGISCO, commissionnaire de transport, a confié à la société TSF le soin d'acheminer 2 tonnes de céréales en vrac de Pontorson (Manche) à Avanton (Vendée) pour le compte de la société AGRIAL ; que ce transport a fait l'objet de [minute page 3] deux lettres de voiture établies par la société TSF le 8 août 2001 ; que le 9 août, la livraison a été refusée à Avanton par la société AGRI-POITOU, destinataire de l'envoi ; que par télécopie du même jour, la société LOGISCO a demandé à la société TSF de vider les céréales à la déchetterie du Val Vert à Saint Georges à 5 km. d'Aventon ; que lors de ce déchargement, un camion et sa benne se sont renversés ; que le chauffeur de la société TSF, Monsieur X. a été blessé et le tracteur immatriculé XXX et la remorque YYY ont été endommagés ; que le 9 août 2001, la société TSF a demandé à la société AGRIAL de l'indemniser du préjudice subi ; que sur demande du GAN, assureur de la société TSF, une expertise amiable a chiffré le montant des dommages matériels à 9.834,87 euros pour la remorque et 32.295,01 euros pour le tracteur ; que le GAN a indemnisé la société TSF à concurrence de 31.577,01 euros ;
Attendu que la société TSF, la Compagnie GAN IA et Monsieur X. ont assigné la société AGRIAL en sa qualité d'expéditeur et la société LOGISCO en sa qualité de commissionnaire pour les voir condamner à la réparation des préjudices subis par eux ; que la société LOGISCO a, par exploit du 26 février 2003, appelé en garantie son assureur, la société GROUPAMA TRANSPORT ; que le tribunal a joint les deux instances ; que Monsieur X. s'est désisté de sa demande ;
Sur la cause du dommage :
Attendu qu'il résulte du courrier adressé par l'expert du GAN à la compagnie GROUPAMA le 24 octobre 2001, que c'est en actionnant le levage de la benne afin de vider la semi-remorque que la benne s'est couchée sur le côté avec le tracteur ; que cette cause du dommage n'est pas contestée ; qu'en revanche est contestée l'affirmation de l'expert selon laquelle l'origine du dommage proviendrait de l'excès d'humidité des déchets de maïs compactés durant le voyage et qui se seraient collés sur le plancher de la benne, entraînant un déséquilibre de cette dernière ; que c'est à juste titre pour des motifs que la cour adopte que le tribunal a constaté que l'état d'humidité excessive n'était pas prouvé , et ce d'autant qu'un temps très court s'était écoulé depuis le chargement ;
Sur la responsabilité :
Attendu que selon l'article 3 du contrat type « général » applicable aux transports publics de marchandises homologué par le décret du 6 avril 1999, applicable au présent contrat, le donneur d'ordre doit fournir au transporteur par écrit ou par tout procédé en permettant la mémorisation l'indication de la nature de la marchandise, sa spécificité, le cas échéant les prestations annexes convenues ; que la société TSF soutient qu'elle n'a pas été informée de la nature précise et de l'état de la marchandise ;
Attendu que si dans les confirmations de sous-traitance, à la rubrique « marchandises » est bien indiqué faussement « blé vente », en revanche, à la rubrique particularités, il est indiqué : « collecte céréales. Attention charger des déchets de céréales très urgent » ; que dans les lettres de voiture émises par le transporteur lui même, il est indiqué comme nature de la marchandise « Déchet Maïs » ; qu'ainsi, le tribunal a justement jugé que la société TSF ne pouvait prétendre ne pas avoir été informée avec exactitude de la nature de la marchandise qu'elle devait livrer ; que si l'état de la marchandise qui a justifié le refus du [minute page 4] destinataire de prendre livraison pour état non conforme a pu rendre difficile le déchargement, un transporteur avisé devait connaître la manœuvre à effectuer pour décharger des déchets de maïs humides ;
Attendu que les appelants invoquent à l'appui de leur appel les dispositions de l'article 7-1 du contrat type général, selon lequel le déchargement pour les envois de plus de trois tonnes est exécuté par le destinataire sous sa responsabilité ; que cette disposition permet au transporteur de s'exonérer lorsque la marchandise a été endommagée au cours du déchargement ; que si l'activité de déchargement emporte un préjudice pour le transporteur, le destinataire en doit réparation ;
Attendu toutefois que la portée de cet article est limitée par les dispositions de l'article 7 du même contrat type selon lesquelles « il appartient au transporteur de mettre en œuvre les moyens techniques de transfert propres au véhicule. Il est responsable des dommages résultant de leur fait » ; qu'en l'espèce, en application de ce texte, le destinataire ne saurait être responsable des dommages causés par la manipulation des moyens de levage de la benne par le préposé du transporteur ;
Attendu que les appelants invoquent également l'article 27 de la loi du 1er février 1995, selon lequel toute prestation annexe non prévue au contrat de transport routier de marchandises qui cause un dommage engage la responsabilité de l'entreprise bénéficiaire de la prestation ; que la notion de prestation annexe doit être entendue par référence à la définition contenue à l'article 25 de la même loi ; que selon cette disposition, les prestations annexes sont les prestations autres que la conduite du véhicule, la préparation de celui-ci aux opérations de chargement et de déchargement et la mise en œuvre des matériels spécialisés attachés au véhicule ; qu'en l'espèce le déchargement de la marchandise dans une déchetterie par un relèvement mécanique de la benne relève des prestations ordinaires d'un transporteur et ne saurait être analysée en une prestation annexe au sens du présent texte ;
Attendu qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, l'entière responsabilité du dommage causé aux engins de la société TSF doit rester à la charge exclusive de cette dernière, et ainsi qu'il y a lieu de confirmer le jugement ;
Sur l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile :
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des sociétés LOGISCO, AGRIAL et GROUPAMA leurs frais irrépétibles, qui seront fixés en équité pour chacun à 1500 euros ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 5] PAR CES MOTIFS :
La Cour,
- Confirme le jugement ;
- Condamne solidairement la société TRANSPORT SERIS FARBOS et la société GAN ASSURANCES IARD à payer respectivement à la société coopérative agricole AGRIAL à la SA LOGISCO et à la société GROUPAMA TRANSPORT la somme de 1.500 euros chacune en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
- Condamne la société TRANSPORT SERIS FARBOS et la société GAN ASSURANCES IARD aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
N. LE GALL M. HOLMAN