CA AMIENS (1re ch. 2e sect.), 6 décembre 2007
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1239
CA AMIENS (1re ch. 2e sect.), 6 décembre 2007 : RG n° 05/05056 ; arrêt n° 525
Publication : Juris-Data n° 356712
Extrait : « Attendu que la forclusion de l'article de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au présent litige n'est pas opposable au consorts X. Y. dans la mesure où le moyen tiré du caractère abusif d'une clause dès lors réputée non écrite peut être soulevé d'office par le juge, la cour soulevant ce moyen en tant que de besoin ;
Attendu qu'aux termes de l'offre de crédit, la société MEDIATIS a consenti un « montant de découvert maximum à l'ouverture du compte » de 20.000 francs en précisant que le « montant du découvert maximum global pouvant être autorisé » était de 140.000 francs ; qu'il était stipulé que « sauf accord préalable de MEDIATIS le montant du financement ne devra, en aucun cas, conduire à un dépassement du montant maximum du découvert autorisé » et que « l'accord de MEDIATIS pour une augmentation à (la) demande (de l'emprunteur) du plafond du découvert autorisé au terme de la présente offre, résultera de la mise à disposition » du découvert ;
Attendu que ces clauses qui permettent à la société MEDIATIS d'augmenter le crédit consenti sans présenter de nouvelle offre informant exactement le débiteur des conditions du nouveau crédit et notamment des charges de remboursement à venir et sans lui offrir une possibilité de rétractation, créent un déséquilibre significatif à son détriment et constituent des clauses abusives réputées non écrites, aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ».
COUR D’APPEL D’AMIENS
PREMIÈRE CHAMBRE DEUXIÈME SECTION
ARRÊT DU 6 DÉCEMBRE 2007
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 05/05056. APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL D'INSTANCE D'ABBEVILLE du 23 septembre 2005.
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE :
SA MEDIATIS
[adresse], Représentée par la SCP LE ROY, avoué à la Cour et plaidant par Maître KEYSER, substituant Maître Xavier D'HELLENCOURT, avocats au barreau d'AMIENS
ET :
INTIMÉS :
Monsieur X.
[adresse], Représenté par la SCP TETELIN MARGUET ET DE SURIREY, avoués à la Cour et ayant pour avocat la SCP BERTRANDIE-GODREUIL du barreau d'AMIENS - Bénéficiaire d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2006/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AMIENS
Madame Y.
Représentée par la SCP JACQUES LEMAL ET AURELIE GUYOT, avoués à la Cour et ayant pour avocat la SCP DE V1LLENEUVE-CREPIN du barreau d'AMIENS - Bénéficiaire d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2005/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AMIENS
[minute page 2]
ASSOCIATION TUTÉLAIRE DE LA SOMME, en qualité de curateur d'Etat de M. X.,
[adresse], Assignée à personne habilitée suivant exploit de Maître MAY Huissier de Justice à AMIENS en date du 4 juillet 2006 à la requête de la SA MEDIATIS. Représentée par la SCP TETELIN MARGUET ET DE SURIREY, avoués à la Cour et ayant pour avocat la SCP BERTRANDIE-GODREUIL du barreau d'AMIENS
DÉBATS : A l'audience publique du 28 septembre 2007 devant Mme SCHOENDOERFFER, Président, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 786 du nouveau Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 22 novembre 2007.
GREFFIER : Mme HAMDANE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Mme Le Président en a rendu compte à la Cour composée de : Mme SCHOENDOERFFER, Président, M. FLORENTIN et Mme CORBEL, Conseillers, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
Les parties ont été informées par courrier motivé de la prorogation du délibéré au 6 décembre 2007 pour prononcé de l'arrêt par mise à disposition au greffe.
PRONONCÉ PUBLIQUEMENT Le 6 décembre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile ; Mme SCHOENDOERFFER, Président, a signé la minute avec Mme HAMDANE, Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DÉCISION :
La cour statue sur l'appel interjeté par la société MEDIATIS d'un jugement rendu, le 23 septembre 2005, par le tribunal d'instance d'Abbeville, dans un litige l'opposant à M. [minute page 3] X., à l'Association tutélaire de la Somme, agissant en qualité de curateur d'État de M. X. et à Mme Y.
* * *
Aux termes d'une offre préalable acceptée le 14 novembre 1999, la société MEDIATIS a consenti à M. X. une ouverture de crédit utilisable par fractions et assortie d'une carte de crédit pour un découvert autorisé de 20.000 francs soit 3.048,98 €.
Se prévalant de la déchéance du terme intervenue le 12 août 2004, la société MEDIATIS a fait assigner les époux M. X. et Mme Y., par acte d'huissier du 24 mai 2005, afin d'obtenir leur condamnation au paiement des sommes de :
- 8.252,20 avec intérêts au taux de 15,37 % sur 7.756,22 € à compter du 13 août 2004 jusqu'à parfait paiement,
- 765 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
- 765 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par jugement rendu le 23 septembre 2005, le tribunal d'instance d'Abbeville a :
- dit irrecevable pour cause de forclusion l'action engagée par la société MEDIATIS
- laissé les dépens à la charge de cette société.
* * *
La société MEDIATIS a interjeté appel de cette décision le 8 novembre 2005.
Par ses dernières écritures signifiées le 20 mars 2007, elle demande à la cour d'infirmer le jugement et de :
- condamner solidairement les époux X. à lui payer la somme de 7.756,22 € en principal avec intérêts au taux de 15,37 % à compter du 13 août 2004 et pour le surplus à compter de l'exploit introductif d'instance,
- les condamner sous la même solidarité à lui payer la somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'a supporter les entiers dépens.
* * *
Mme Y., par ses dernières conclusions signifiées le 18 janvier 2007, demande à la cour de :
à titre principal,
- dire abusive la clause figurant au contrat permettant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre,
- [minute page 4] confirmer en toutes ses dispositions le jugement,
- dire la société MEDIATIS irrecevable en ses demandes,
à titre subsidiaire,
- constater qu'elle n'a pas signé l'offre de prêt du 14 novembre 1999,
- débouter la société MEDIATIS de toutes ses demandes à son encontre,
à titre infiniment subsidiaire
- dire qu'elle pourra s'acquitter de sa dette en 23 versements mensuels de 20 €, le solde de la créance étant payable le 24ème mois,
- réduire le taux des intérêts au taux d'intérêt légal,
- réduire la clause pénale à 1 €,
- condamner la société MEDIATIS à lui payer la somme de 1.500 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner la société MEDIATIS à lui payer la somme de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'a supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.
* * *
M. X. et l'Association tutélaire de la Somme, agissant en qualité de curateur d'État de M. X. en vertu d'un jugement du juge des tutelles du tribunal d'instance d'Abbeville en date du 15 mai 2006, par leurs dernières conclusions signifiées le 20 mars 2007 demandent à la cour de :
à titre principal,
- dire la société MEDIATIS irrecevable en ses demandes, la forclusion étant acquise,
à titre subsidiaire,
- constater que Mme Y. est tenue solidairement au remboursement de la créance,
- faire application des dispositions de l'article 1244-1 du Code civil et accorder à M. X. les plus larges délais pour s'acquitter de sa dette,
- condamner la société MEDIATIS aux entiers dépens de première instance et d'appel.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
CECI EXPOSÉ, LA COUR,
Attendu que la société MEDIATIS fait valoir que les intimés sont forclos à soulever le moyen tiré du dépassement du découvert autorisé dès lors que le dépassement serait intervenu dès le mois de juillet 2000 ;
[minute page 5] Attendu qu'à titre subsidiaire, elle fait valoir qu'aux termes de l'offre de crédit les époux X. pouvaient bénéficier d'un découvert maximum autorisé de 140.000 francs, que le découvert qui leur était autorisé a été porté à 25.000 francs dès le mois de juillet 2001 et qu'en toute hypothèse, le dépassement du découvert autorisé ne constitue pas un incident de paiement et une défaillance de l'emprunteur ; qu'enfin la sanction du défaut de mise à disposition des fonds au-delà du découvert autorisé est la seule déchéance des intérêts contractuels, compte tenu de la mention apportée par la loi du 28 janvier 2005 à l'article L. 311-9 du Code de la consommation ;
Attendu que la forclusion de l'article de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au présent litige n'est pas opposable au consorts X. Y. dans la mesure où le moyen tiré du caractère abusif d'une clause dès lors réputée non écrite peut être soulevé d'office par le juge, la cour soulevant ce moyen en tant que de besoin ;
Attendu qu'aux termes de l'offre de crédit, la société MEDIATIS a consenti un « montant de découvert maximum à l'ouverture du compte » de 20.000 francs en précisant que le « montant du découvert maximum global pouvant être autorisé » était de 140.000 francs ; qu'il était stipulé que « sauf accord préalable de MEDIATIS le montant du financement ne devra, en aucun cas, conduire à un dépassement du montant maximum du découvert autorisé » et que « l'accord de MEDIATIS pour une augmentation à (la) demande (de l'emprunteur) du plafond du découvert autorisé au terme de la présente offre, résultera de la mise à disposition » du découvert ;
Attendu que ces clauses qui permettent à la société MEDIATIS d'augmenter le crédit consenti sans présenter de nouvelle offre informant exactement le débiteur des conditions du nouveau crédit et notamment des charges de remboursement à venir et sans lui offrir une possibilité de rétractation, créent un déséquilibre significatif à son détriment et constituent des clauses abusives réputées non écrites, aux termes de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ;
Attendu que, conformément à la règle selon laquelle le point de départ d'un délai à l'expiration duquel une action ne peut plus s'exercer se situe à la date de l'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit reconstituante et assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, comme en l'espèce, à compter du dépassement du découvert autorisé ou en l'absence de dépassement, et compte tenu des termes du contrat à compter de toute échéance impayée non régularisée ;
Attendu qu'il convient de constater qu'en l'espèce, dès le mois de juillet 2000, le montant du découvert autorisé qui s'élevait à 20 000 francs soit 3 048,98 E était dépassé, ce qui donnait naissance à l'action de la société MEDIATIS, conformément à l'article 6 de l'offre préalable ;
Attendu que le 24 mars 2005, date de l'assignation, l'action de la société MEDIATIS était donc prescrite, quelle que soit la sanction prévue à l'article L.311-33 du Code de la consommation que [minute page 6] pouvait, par ailleurs, se voir opposer la société MEDIATIS si elle avait agi dans un délai utile ;
Attendu que le jugement sera donc confirmé ;
Attendu que la société MEDIATIS a pu se méprendre sur ses droits sans faute de sa part ; que Mme Y. sera donc déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
Attendu que l'équité commande de ne pas prononcer de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne la société MEDIATIS aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,