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T. COM. MARSEILLE, 9 novembre 2004

Nature : Décision
Titre : T. COM. MARSEILLE, 9 novembre 2004
Pays : France
Juridiction : Marseille (TCom)
Demande : 2004/01507
Date : 9/11/2004
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Lamyline
Date de la demande : 11/03/2004
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1612

T. COM. MARSEILLE, 9 novembre 2004 : RG n° 2004/01507 et 2004/01508 

Publication : Lamyline ; Droit maritime français

 

Extrait : « Attendu que cette clause qui déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite, au sens des dispositions de l'article 48 du Nouveau Code de Procédure Civile, dans la mesure où Madame H. X., Madame K. X., Mademoiselle J. X., Monsieur I. X. et Mademoiselle F. X. n'ont pas la qualité de commerçant ; que de même, cette clause est réputée non écrite au sens des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, s'agissant d'une clause contenue dans un contrat conclu entre un professionnel ENTMV et des non-professionnels, les consorts X., au détriment desquels elle crée un déséquilibre significatif ».

 

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MARSEILLE

JUGEMENT DU 9 NOVEMBRE 2004

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 2004F01507.

Madame H. X.

[adresse], ComparaI.nt par Maître Martin BOMBACH du Cabinet BRETT, Avocat à Kehl am Rhein (Allemagne)

C/

ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV)

[adresse], Représentation en France, [adresse], ComparaI.nt par Maître Fabien d'HAUSSY Avocat au barreau de Marseille

 

ET

R.G. n° 2004F01508

Madame K. X.

[adresse],

Mademoiselle J. X.

[adresse],

Monsieur I. X.

[adresse],

Mademoiselle F. X.

[adresse],

[minute page 2] Comparant par Maître Martin BOMBACH du Cabinet BRETT, Avocat à Kehl am Rhein (Allemagne)

C/

ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV)

[adresse], Représentation en France : [adresse]. Comparant par Maître Fabien d'HAUSSY Avocat au barreau de Marseille

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Décision contradictoire et en premier ressort.

Débats, clôture des débats et mise en délibéré lors de l'audience publique du 14 septembre 2004 où siégeaient M. VINCENT, Président, M. SAMSON, M. DHOMBRES, Juges.

Prononcée à l'audience publique du 9 novembre 2004 où siégeaient M. VINCENT, Président, M. DHOMBRES, M. BERGMAN, Juges, assistés de Mme Yolande SANDOLO Greffier Audiencier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que par citation délivrée le 11 mars 2004, Madame H. X. a cité, devant le Tribunal de Commerce de Marseille l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) pour :

- l'entendre condamner à lui payer des dommages-intérêts suivants les articles 1142, 1146 et 1147 du Code Civil, d'un montant de 5.070 Euros,

subsidiairement,

- entendre donner droit à la demande de la demanderesse et entendre constater la résolution du contrat de voyage conclu entre les parties et condamner l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) à lui payer, suivant l'article 70 du décret du 31 décembre 1966, la somme de 5.070 Euros à titre de dommages-intérêts ;

subsidiairement,

- condamner l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) à lui payer une indemnité de 816 Euros sur la base de l'article 69 II du décret du 31 décembre 1966 ;

- entendre statuer sur les frais comme il appartiendra, notamment condamner l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS [minute page 3] (ENTMV) à lui payer la somme de 800 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre les dépens ;

- entendre déclarer le jugement exécutoire ;

Attendu que par citation en date du 11 mars 2004, Madame K. X., Mademoiselle J. X., Monsieur I. X. et Mademoiselle F. X. ont cité à comparaître l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) pour :

- l'entendre condamner à leur payer des dommages-intérêts suivants les articles 1142, 1146 et 1147 du Code Civil, d'un montant de 5.070 Euros,

subsidiairement,

- entendre donner droit à leur demande et entendre constater la résolution du contrat de voyage conclu entre les parties et condamner l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) à leur payer, suivant l'article 70 du décret du 31 décembre 1966, la somme de 5.070 Euros à titre de dommages-intérêts ;

- entendre statuer sur les frais comme il appartiendra, notamment condamner l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) à lui payer la somme de 800 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre les dépens ;

- entendre déclarer le jugement exécutoire ;

Attendu que par conclusions écrites oralement développées à la barre, l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) demande au tribunal de :

- la recevoir en ses écritures et les dire bien fondées,

in limine litis,

- dire et juger que le tribunal de commerce de Marseille est incompétent,

vu l'article 11 des conditions générales,

vu les dispositions de l'article 36 et suivants de la loi du 18 juin 1966,

- dire et juger que les demandeurs sont irrecevables en leur action,

- dire et juger que la Société ENTMV ne serait en aucune façon être tenue pour responsable du retard ;

- en conséquence, débouter les demandeurs de toutes leurs demandes, fins et prétentions,

- condamner les demandeurs au paiement de la somme de 1.000 Euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Attendu qu'à la barre, Madame H. X., Madame K. X., Mademoiselle J. X., Monsieur I. X. et Mademoiselle F. X. précisent au tribunal que les conditions générales annexes invoquées par l'entreprise ENTMV ne sont pas connues d'eux et que la clause attributive de compétence dont se prévaut l'entreprise ENTMV est une clause abusive, comme la clause 11 relative à l'exclusion de responsabilité de l'entreprise ENTMV ;

Attendu que l'affaire a été mise en délibéré ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 4] SUR QUOI :

Attendu qu'il y a lieu de joindre les instances enrôlées sous les numéros 2004F01507 et 2004F01508 par application des dispositions de l'article 367 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

 

Rappel des faits :

Attendu que les requérants ont acquis un titre de transport pour un voyage aller-retour entre Marseille et Alger stipulant :

* date d'émission : 6 mars 2002,

* auto de longueur supérieure à 4,40 m,

* compartiment à 4 lits plus 1 fauteuil,

* voyage aller de Marseille à Alger sur le navire ENTMV AL DJAZAIR, départ : 23 mars 2002 à 12 h 00, arrivée à Alger : 24 mars 2002 à 14 h 00,

* voyage retour d'Alger à Marseille sur le navire SNCM LIBERTÉ, départ : 12 avril 2002 à 16 h 00, arrivée à Marseille : 13 avril 2002 à 14 h 00 ;

Attendu également que ledit titre de transport a été émis par la Société ENTMV sous le numéro 2BCNT23XX ;

Attendu que le voyage-retour n'a pu être effectué comme convenu, les requérants n'ayant pu embarquer que sur le navire ENTMV TIPASA du 13 avril 2002 à 18 h 30 pour arrivée à Marseille le lendemain à 20 h 00 ;

Attendu que le présent litige a déjà fait l'objet d'une première procédure enrôlée sous les numéros 2002F03446 et 2002F04545 par les requérants et dirigée à l'encontre de la SNCM ; que le Tribunal, constatant que le transporteur contractuel émetteur du titre de passage était l'ENTMV et non la SNCM, avait débouté les consorts X. de leurs demandes, fins et conclusions, leur demande étant irrecevable car mal dirigée ;

 

Sur la compétence du Tribunal de Commerce de Marseille :

Attendu que la défenderesse ENTMV verse aux débats ses conditions générales de transport qui stipulent dans les « DISPOSITIONS COMMUNES » au paragraphe « c » : « Le Tribunal compétent pour connaître des difficultés auxquelles l'exécution du présent contrat pourrait donner lieu est, même en cas d'appel en garantie ou de pluralité de défendeurs ou de connexité, le Tribunal de Commerce d'Alger. Le passager déclare accepter cette juridiction et s'interdit de poursuivre l'entreprise devant tout autre Tribunal. » ;

Attendu que cette clause qui déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite, au sens des dispositions de l'article 48 du Nouveau Code de Procédure Civile, dans la mesure où Madame H. X., Madame K. X., Mademoiselle J. X., Monsieur I. X. et Mademoiselle F. X. n'ont pas la qualité de commerçant ; que de même, cette clause est réputée non écrite au sens des dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation, s'agissant d'une clause contenue dans un contrat conclu entre un professionnel ENTMV et [minute page 5] des non-professionnels, les consorts X., au détriment desquels elle crée un déséquilibre significatif ;

Attendu que par ailleurs, la jurisprudence de la Cour de Cassation relatives l'article 43 du Nouveau Code de Procédure Civile indique que les personnes morales peuvent être assignées devant la juridiction dans le ressort de laquelle elles disposent d'une succursale ou d'une agence ayant le pouvoir de les représenter à l'égard des tiers ; que la pièce versée aux débats par l'ENTMV sur laquelle figurent ses conditions générales de transport est revêtue d'un timbre humide portant l'inscription suivante : ENTMV, [adresse Marseille], REPRÉSENTATION GÉNÉRALE POUR L'EUROPE ;

qu'en conséquence cette jurisprudence des succursales et gares principales doit être appliquée au cas d'espèce ;

Attendu au surplus que les dispositions de l'article 46 du Nouveau Code de Procédure Civile stipulent que le demandeur peut saisir la juridiction du lieu de la prestation de service ; que Marseille, étant le point de départ et de retour du transport contracté, peut être qualifié de lieu de la prestation de service ;

Attendu enfin que le décret n° 66-1078 du-31 décembre 1966 stipule en ses articles 54 et 73 que le tribunal compétent est celui du port d'embarquement ou du port de débarquement lorsqu'il est situé sur le territoire de la République Française ; que le Tribunal de céans est, compte tenu de tout ce qui précède, compétent pour statuer sur le présent litige ;

 

Sur la recevabilité de la demande :

Attendu que les articles 36 à 42 relatifs au transport de passagers, inclus dans la loi n° 66-420 sur l’« affrètement et transports maritimes » sont muets quand au droit à réparation des passagers ;

Attendu que l'article 11 des conditions générales de transport émises par l'ENTMV indique d'une part que : « Le Capitaine et l'entreprise ne répondent pas du retard ... ni de toutes les conséquences pouvant résulter ... de grèves totales ou partielles » ;

Attendu que par conclusions écrites oralement développées à la barre, l'ENTMV explique : « Il ressort du même billet de passage que le transport retour Alger/Marseille prévu pour le 12 avril 2002 devait être effectué par le navire LIBERTÉ appartenant à la SNCM et sur lequel devait voyager la famille X. Mais suite à un mouvement de grève du service de Douane en France, le navire LIBERTÉ de la SNCM n'a pu effectuer le transport. »

Attendu que si le transporteur n'est pas contractuellement responsable du retard en cas de grève, le Tribunal considère néanmoins qu'il doit justifier la réalité de ladite grève ; qu'à l'appui de ses dires, l'entreprise ENTMV verse aux débats plusieurs articles de presse relatifs à des mouvements ayant retardé le navire LIBERTÉ au départ de Marseille :

* le 9 octobre 2001 donc sans rapport avec la cause alléguée du présent litige ;

* [minute page 6] le 9 avril 2002 soit trois jours avant la rotation concernée, pour un retard de trois heures seulement ;

Attendu que les fait rapportés ne sauraient constituer un cas de grève contractuellement exonératoire de la responsabilité du transporteur ; qu'il n'y a donc pas matière à appliquer les dispositions de l'article 11 des conditions générales de transport émises par l'ENTMV ;

Attendu au surplus que la demanderesse excipe d'un jugement rendu par le tribunal d'instance de Marseille le 12 novembre 1999 qui ne saurait s'appliquer au cas d'espèce puisqu'il s'agissait d'un passager qui n'a pu embarquer sur un navire à grande vitesse mais seulement sur un ferry au départ le même jour ;

Attendu en conséquence de tout ce qui précède que la demande des consorts X. est recevable ;

 

Sur le fond :

Attendu que, outre une prétendue grève dont elle ne justifie pas la réalité, l'ENTMV allègue de conditions météorologiques qu'elle ne justifie pas davantage ; qu'en conséquence il y a lieu d'appliquer les dispositions des articles 69 et 70 du décret du 31 décembre 1966 en condamnant l'ENTMV à rembourser aux consorts X. la moitié du prix du billet soit la somme de 936 Euros et en faisant droit à leur demande de dommages et intérêts ;

 

Sur le quantum :

Attendu que les demandeurs sollicitent des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi à hauteur de 5.070 Euros ; qu'il ressort des conclusions écrites oralement développées à la barre que l'indemnité de 120 Euros reçue par les requérants correspond à un déclassement ; que si les demandeurs ne justifient pas du montant de leur demande, il n'en demeure pas moins que le transporteur maritime doit être au moins condamné à les indemniser des frais de bouche et d'hébergement qu'entraîne un retard de 26 heures et que le Tribunal estime à 100 Euros par passager soit 500 Euros au total ;

Attendu qu'en l'état de ce qui précède, il y a lieu de faire droit pour partie à la demande de Madame H. X., Madame K. X., Mademoiselle J. X., Monsieur I. X. et Mademoiselle F. X. et de condamner l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) à leur payer les sommes de 936 Euros et 500 Euros en réparation des préjudices subis, soit au total 1.436 Euros à titre de dommages-intérêts, outre les dépens des instances enrôlées sous les numéros 2004F01507 et 2004F01508 ;

Attendu qu'en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, il échet d'allouer à Madame H. X., Madame K. X., Mademoiselle J. X., Monsieur I. X. et Mademoiselle F. X. la somme de 800 Euros au titre des frais irrépétibles occasionnés par la présente procédure ;

[minute page 7] Attendu que l'exécution provisoire s'avérant nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, il échet de l'ordonner, excepté toutefois en ce qui concerne les condamnations prononcées au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et au titre des dépens ;

Attendu qu'il échet de rejeter tout surplus des demandes comme non fondé, ni justifié ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL DE COMMERCE DE MARSEILLE,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Advenant l'audience de ce jour

Joint les instances enrôlées sous les numéros 2004F01507 et 2004F01508 par application des dispositions de l'article 367 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Se déclare territorialement compétent ;

Condamne l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) à payer à Madame H. X., Madame K. X., Mademoiselle J. X., Monsieur I. X. et Mademoiselle F. X. la somme totale de 1.436 Euros (mille quatre cent trente-six Euros) à titre de dommages-intérêts et celle de 800 Euros (huit cents Euros) au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Condamne l'ENTREPRISE NATIONALE DE TRANSPORT MARITIME DE VOYAGEURS (ENTMV) aux dépens toutes taxes comprises des instances enrôlées sons les numéros 2004F01508 et 2004E01508 ;

Ordonne l'exécution provisoire des dispositions du présent jugement, excepté en ce qui concerne les condamnations prononcées au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et au titre des dépens ;

Rejette pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement ;

Ainsi jugé et prononcé en audience publique du TRIBUNAL DE COMMERCE DE MARSEILLE, le 9 novembre 2004 ;

LE GREFFIER AUDIENCIER           LE PRÉSIDENT