6149 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Clauses sur l’accès au juge - Clauses attributives de compétence - Compétence territoriale
- 5702 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Compétence - Compétence d’attribution
- 5985 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Contrôle judiciaire - Ordre logique des sanctions - Présentation générale
- 5990 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Lois et règlements - Clause non conformes
- 5993 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Lois et règlements - Conformité au régime légal : illustrations - Autres codes
- 6145 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Clauses sur l’accès au juge - Présentation générale
- 6146 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Clauses sur l’accès au juge - Clause compromissoire (arbitrage)
- 6147 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Clauses sur l’accès au juge - Modes alternatifs de règlement des litiges (conciliation, médiation)
- 6148 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Clauses sur l’accès au juge - Clauses attributives de compétence - Compétence d’attribution
- 6240 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par clause - Accès au juge
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6149 (12 août 2023)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CLAUSE
RESTRICTION DE L’ACCÈS AU JUGE - CLAUSES ATTRIBUTIVES DE COMPÉTENCE - COMPÉTENCE TERRITORIALE
Présentation. Les clauses attributives de compétence territoriale font partie des rares stipulations pour lesquelles la CJUE a pris, même momentanément, une position précise (A). Le problème se pose différemment selon que le contrat est interne (B) ou qu’il possède une dimension internationale (C).
A. DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE : DIRECTIVE DU 5 AVRIL 1993
Position initiale de la CJUE : clause abusive. Une clause attributive de juridiction, qui est insérée sans avoir fait l’objet d’une négociation individuelle dans un contrat conclu entre un consommateur et un professionnel et qui confère compétence exclusive au tribunal dans le ressort duquel est situé le siège du professionnel, doit être considérée comme abusive au sens de l’article 3 de la directive, dans la mesure où elle crée, en dépit de l’exigence de bonne foi, au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat. CJCE, 27 juin 2000,Océano Grupo Editorial : Aff. C-240/98à C-244/98 ; Rec. p. I-4941 ; Cerclab n° 4405 ; JCP éd. G 2001. II. 10513, note Carballo Fidalgo et Paisant ; Petites affiches 24 juillet 2001, note Hourdeau ; RTD civ. 2001. 878, obs. Mestre et Fages (arguments côté consommateur, point n° 22 : 1/ le tribunal peut être éloigné du domicile du consommateur, ce qui est susceptible de rendre sa comparution plus difficile ; 2/ pour les litiges de faible importance, ces frais de comparution peuvent dissuader le consommateur d’agir ; 3/ clause entrant dans la catégorie de celles ayant pour objet ou pour effet de supprimer ou d’entraver l’exercice d’actions en justice par le consommateur, point 1-q), de l’annexe de la directive - argument côté professionnel, point n° 23 : clause permettant au professionnel de regrouper l’ensemble du contentieux afférent à son activité professionnelle au tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège de celle-ci, ce qui tout à la fois facilite l’organisation de sa comparution et rend celle-ci moins onéreuse).
Position ultérieure de la CJUE : clause susceptible d’être abusive. Comp. pour une décision ultérieure maintenant la position de principe, mais prenant des distances quant à l’appréciation directe par la Cour du caractère abusif : s’il est vrai que la Cour, dans l’exercice de la compétence qui lui est conférée à l’article 234 CE, a interprété au point 22 de l’arrêt Océano Grupo Editorial et Salvat Editores, les critères généraux utilisés par le législateur communautaire pour définir la notion de clause abusive, elle ne saurait cependant se prononcer sur l’application de ces critères généraux à une clause particulière qui doit être examinée en fonction des circonstances propres au cas d’espèce et il appartient au juge de renvoi, à la lumière de ce qui précède, d’apprécier si une clause contractuelle peut être qualifiée d’abusive au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive. CJCE (4e ch.), 4 juin 2009, Pannon GSM Zrt : Aff. C-243/08 ; Rec. p. I-4713 ; Cerclab n° 4416 (points n° 42-43) - CJUE (grande ch.), 9 novembre 2010, VB Pénzügyi Lízing Zrt./ Ferenc Schneider. : Aff. C-137/08 ; Cerclab n° 4412 (clause attributive de compétence dans un prêt destiné à financer l’achat d’une voiture ; l’article 267 TFUE doit être interprété en ce sens que la compétence de la Cour porte sur l’interprétation de la notion de « clause abusive », visée à l’article 3, § 1, de la directive et à l’annexe de celle-ci, ainsi que sur les critères que le juge national peut ou doit appliquer lors de l’examen d’une clause contractuelle au regard des dispositions de la directive, étant entendu qu’il appartient audit juge de se prononcer, en tenant compte desdits critères, sur la qualification concrète d’une clause contractuelle particulière en fonction des circonstances propres au cas d’espèce ; N.B. l’arrêt reprend les arguments de l’arrêt Océano Grupo sur les éléments pouvant justifier le caractère abusif de la clause désignant la juridiction du siège du professionnel : difficulté et coût accru pour le consommateur, pouvant devenir dissuasif pour des petits litiges, contrairement au point 1-q) de l’annexe - point n° 54 - et centralisation de toutes les affaires pour le professionnel, qui lui permet de mieux organiser sa défense et d’en diminuer le coût).
Application dans le temps. Sur l’application dans le temps de la solution : la juridiction nationale est tenue, lorsqu’elle applique des dispositions de droit national antérieures ou postérieures à ladite directive, de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte et de la finalité de cette directive. L’exigence d’une interprétation conforme requiert en particulier que le juge national privilégie celle qui lui permettra de refuser d’office d’assumer une compétence qui lui est attribuée en vertu d’une clause abusive. CJCE, 27 juin 2000,Océano Grupo Editorial : Cerclab n° 4405 ; précité.
Office du juge. Sur l’obligation pour le juge de vérifier sa compétence territoriale : le juge national étant appelé à assurer l’effet utile de la protection voulue par les dispositions de la directive, le rôle qui lui est ainsi attribué par le droit communautaire ne se limite pas à la simple faculté de se prononcer sur la nature éventuellement abusive d’une clause contractuelle, mais comporte également l’obligation d’examiner d’office cette question, dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet, y compris lorsqu’il s’interroge sur sa propre compétence territoriale. CJCE (4e ch.), 4 juin 2009, Pannon GSM Zrt : Aff. C-243/08 ; Rec. p. I-4713 ; Cerclab n° 4416 ; précité (point n° 32).
B. CONTRATS INTERNES
Article 48 CPC. Aux termes de l’article 48 CPC, « toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée ».
En conséquence de ce texte, les clauses attributives de compétence territoriale dans un contrat relevant de l’art. 48 CPC sont illicites dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur ou un non commerçant. § N.B. Cette solution rend inapplicable la réserve présente dans l’arrêt précité de la CJCE du 27 juin 2000, réservant le cas des clauses faisant l’objet d’une négociation individuelle. Sous cet angle, le droit interne consacre donc un niveau de protection plus élevé. Le consommateur peut renoncer éventuellement au bénéfice de cette illicéité, mais cela ne peut se faire qu’après la conclusion du contrat et en toute connaissance de cause (en pratique, cette situation peut se présenter lorsqu’en fait le tribunal désigné par la clause est plus commode pour le consommateur).
N.B. Sur la situation dans le cadre de l’art. 35 de la loi du 10 janvier 1978 : une clause attributive de compétence entre indiscutablement dans le champ d'application de l’art. 35 de la loi du 10 janvier 1978, puisqu'elle concerne le choix imposé au consommateur de la juridiction amenée à statuer sur l'ensemble des points visés par ce texte s'ils sont l'objet du litige. CA Orléans (ch. civ. sect. 2), 21 mars 1995 : RG n° 93/001213 ; arrêt n° 437 ; Cerclab n° 2971, confirmant TGI Tours (1re ch.), 11 février 1993 : RG n° 3389/91 ; Cerclab n° 410 (clause touchant au règlement des litiges nés de l'exécution du contrat).
Ancien article 141-1 C. consom. Selon l’ancien art. L. 141-5 C. consom., créé par loi n° 2009-526 du 12 mai 2009, « le consommateur peut saisir à son choix, outre l'une des juridictions territorialement compétentes en vertu du code de procédure civile, la juridiction du lieu où il demeurait au moment de la conclusion du contrat ou de la survenance du fait dommageable ».
Article R. 631-3 C. consom. L’ordonnance du 14 mars 2016 a transféré le texte dans la partie règlementaire du Code de la consommation, dans le nouvel art. R. 631-3 C. consom. : « le consommateur peut saisir, soit l'une des juridictions territorialement compétentes en vertu du code de procédure civile, soit la juridiction du lieu où il demeurait au moment de la conclusion du contrat ou de la survenance du fait dommageable ».
Commission des clauses abusives. La Commission des clauses abusives a régulièrement recommandé d’éliminer les clauses dérogeant aux règles légales de compétence territoriale ou d’attribution. V. pour l’expression générale de cette position dans la recommandation de synthèse : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ou combinaisons de clauses qui ont pour objet ou pour effet de déroger aux règles légales de compétence territoriale. Recomm. n° 91-02/21° : Cerclab n° 2160 (recommandation de synthèse).
Selon les recommandations, la Commission a visé, parfois cumulativement, le caractère illicite de ces clauses (contraires à l’article 48 CPC qui exclut la validité de ces clauses lorsqu’elles ne sont pas stipulées entre commerçants) ou/et leur caractère abusif. Ce caractère abusif est parfois fondé sur le fait que le maintien d’une clause illicite peut induire en erreur le consommateur quant à l’étendue de ses droits. V. pour l’expression claire de cette idée : les clauses dérogeant aux principes précédents (compétence territoriale, arbitrage, etc.) sont, pour la plupart, frappées de nullité ; cette nullité, souvent ignorée des non-professionnels ou consommateurs, ne constitue pas en elle-même une protection suffisante, et il convient d’interdire, comme abusives, l’insertion de telles clauses dans les contrats. Recomm. n° 79-02 : Cerclab n° 2143 (action en justice ; considérant n° 8).
Pour des recommandations qualifiant la clause d’illicite : Recomm. n° 84-01/A-12 : Cerclab n° 2174 (gaz liquéfié ; considérant n° 20 ; en vertu de l’article 48 CPC, cette attribution n’est valable qu’entre commerçants) - Recomm. n° 84-03/B-9°: Cerclab n° 2154 (hôtellerie de plein air - camping ; exposé des motifs visant uniquement les clauses attributives de compétence territoriale ; sol. implicite, la recommandation se contentant de préciser que la clause est contraire au CPC) - Recomm. n° 91-01/C : Cerclab n° 2159 (établissements d’enseignement ; considérant n° 12 : clause manifestement illicite) - Recomm. 94-04/B-11° : Cerclab n° 2162 (locations saisonnières) - Recomm. n° 94-05/2°-B : Cerclab n° 2210 (contrats séparés de garantie de véhicule d’occasion ; considérant : clauses illicites) - Recomm. 95-02/8° : Cerclab n° 2188 (logiciels ; considérant n° 12 : clauses désignant souvent les juridictions de Paris ; clause illicite, sol. implicite) - Recomm. n° 97-01/B-21 : Cerclab n° 2166 (télésurveillance ; considérant n° 25 ; clauses contraires aux prescriptions du CPC devant être « dénoncées » et donc plutôt illicites) - Recomm. n° 99-01/7° : Cerclab n° 2192 (dépôt-vente) - Recomm. n° 03-01/I-1° : Cerclab n° 2200 (fourniture d’accès Internet ; clause contraire au CPC ; clause attributive de compétence d’attribution qualifiée en revanche d’abusive) - Recomm. n° 07-02/14 : Cerclab n° 2204 (contrats de vente mobilière conclus sur Internet et de commerce électronique ; clauses prohibées par l’article 48 CPC).
Pour des recommandations qualifiant la clause d’abusive : Recomm.n° 80-01/7° : Cerclab n° 2144 (location d’emplacement publicitaire ; considérants 8 et 9) - Recomm. n° 80-04/II-15° : Cerclab n° 2147 (baux d’habitation ; clause abusive) - Recomm. n° 81-02/17 : Cerclab n° 2173 (contrat de construction de maison individuelle ; considérant n° 15) - Recomm. n° 97-02/1°, a : Cerclab n° 2190 (maintenance et entretien ; considérant n° 3).
Pour des recommandations qualifiant la clause d’illicite et abusive, dès lors qu’elle est maintenue dans un contrat conclu avec un consommateur ou un non-professionnel : Recomm.n° 79-02/5° : Cerclab n° 2143 (action en justice) - Recomm. n° 82-01/B-10° : Cerclab n° 2150 (transport terrestre de marchandise ; considérant n° 23 ; clause nulle et, implicitement, abusive, l’ignorance de cette nullité pouvant dissuader le consommateur d’agir) - Recomm. n° 82-02/B-16° : Cerclab n° 2151 (déménagement ; considérant n° 29 : clause nulle et, implicitement, abusive, l’ignorance de cette nullité pouvant dissuader le consommateur d’agir) - Recomm. n° 87-02/10° : Cerclab n° 2157 (agence matrimoniale) - Recomm. n° 91-04/II-7° : Cerclab n° 2185 (location mobilière ; considérant n° 20) - Recomm. n° 94-03/8° : Cerclab n° 2161 (séjours linguistiques) - Recomm. n° 94-05/1°-B : Cerclab n° 2210 (vente de voitures d’occasion et contrats de garantie ; clauses illégales et inopposables au consommateur, mais pouvant l’induire en erreur) - Recomm. n° 96-01/9° : Cerclab n° 2164 (syndic de copropriété) - Recomm. n° 02-02/C-35 : Cerclab n° 2198 (abonnement cinéma ; contrats donnant pour la plupart compétence exclusive au Tribunal de Grande Instance de Paris ; clauses illicites et, maintenues dans les contrats, abusives) - Recomm. n° 02-03/15 : Cerclab n° 2199 (assurance protection juridique ; considérant n° 15 ; clauses illicites et, maintenues dans les contrats, abusives) - Recomm. n° 04-01/15° : Cerclab n° 2167 (traitement contre les insectes xylophages ; clause illicite et abusive en raison de son maintien dans le contrat) - Recomm. n° 04-03/10 : Cerclab n° 2169 (prêt immobilier ; considérant n° 10 ; clauses illicites et, maintenues dans les contrats, abusives) - Recomm. n° 05-01/12° : Cerclab n° 2170 (camping et location d’emplacement de mobile-home ; considérant n° 12) - Recomm. 05-03/9° : Cerclab n° 2201 (auto-école ; caractère abusif résultant du maintien de la clause) - Recomm. n° 08-01/12 : Cerclab n° 2205 (voyages par internet ; clauses illicites et, maintenues dans les contrats, abusives) - Recomm. n° 08-03/C-17 : Cerclab n° 2207 (transport routier occasionnel ; les clauses attributives de compétence territoriale et d’attribution à un tribunal de commerce déterminé ou choisi par le transporteur sont illicites et, maintenues dans les contrats, abusives) - Recomm. n° 10-01/IV-31° : Cerclab n° 2208 (soutien scolaire ; clause illicite, contraire à l’art. 48 CPC et, maintenues dans le contrat, abusive) - Recomm. n° 10-02/16° : Cerclab n° 2209 (prévoyance obsèques ; clauses illicites et, maintenues dans les contrats, abusives) - Recom. n° 12-01/III-22° : Boccrf 18 mai 2012 ; Cerclab n° 4998 (contrats de services à la personne ; considérant n° 22 ; clauses attributives de compétence au tribunal de commerce ou au siège de l’entreprise, illicites comme contraires aux art. 42 s. CPC et à l’ancien art. L. 141-5 C. consom., et, maintenues dans les contrats, abusives) - Recomm. n° 17-02/55° : Cerclab n° 7456 (plate-forme de téléchargement, notamment de VOD ; clause désignant le tribunal du siège de l’entreprise, illicite en ce qu’elle contrevient aux art. 42 s. CPC et R. 631-3 C. consom., et abusive en raison de son maintien dans le contrat).
Dans le même sens, sans préciser la nature de la sanction : Recomm. n° 82-03 : Cerclab n° 2152 (installation de cuisine ; considérant n° 10) - Recomm. 95-01/9° : Cerclab n° 2163 (abonnement autoroutier).
Pour une présentation différente, fondée sur la violation des art. 46 CPC, 631-3 C. consom. et R. 212-2-7° C. consom., omettant curieusement l’art. 48 CPC : est présumée abusive en vertu de l’art. R. 212-2-7° C. consom., la clause attributive de compétence géographique à un tribunal déterminé, qui contrevient aux art. 46 CPC et R. 631-3 C. consom., alors qu’en limitant la compétence territoriale à une juridiction, quand l’exécution du contrat par la livraison du bien au domicile du consommateur ou non professionnel, peut être située sur l’ensemble du territoire français métropolitain et, au surplus, que l’objet du litige peut être d’un faible montant, cette stipulation a pour effet d’entraver l’action de ceux-ci. CCA (avis), 18 mai 2017 : avis n° 17-01 ; Cerclab n° 7152 (vente en ligne ou par téléphone de mobiliers d'ameublement ou d'équipements pour la maison). § N.B. la position de la Commission s’explique sans doute par l’affirmation préalable selon laquelle, dans une procédure d'avis, la Commission ne peut se prononcer que sur le caractère abusif d’une clause et non sur son éventuel caractère illicite. Cette position confine en l’espèce à l’absurde puisque, conformément à l’art. R. 212-2-7° C. consom. qui n’institue qu’une présomption simple, la Commission ajoute qu’« aucun élément n’apporte la preuve contraire à l'existence d'un abus », ce qui littéralement permettrait au professionnel de justifier une clause illicite contraire à l’art. 48 CPC !
Juges du fond : clauses illicites. V. par exemple : TGI Aix-en-Provence (1re ch.), 7 mai 1992 : RG n° 21-91 ; Cerclab n° 708 (la clause étant illicite et réputée non écrite, il n’y a pas lieu de rechercher si elle revêt un caractère abusif), confirmé par CA Aix-en-Provence (1re ch. A), 18 septembre 1995 : RG n° 92-12582 ; arrêt n° 509 ; Cerclab n° 761 ; Juris-Data n° 1995-044756 ; Contr. conc. consom. 1995, n° 190, obs. Raymond (adoption de motifs) - TI Marennes, 13 mars 2003 : RG n° 11-02-000234 ; jugt n° 49 ; Site CCA ; Cerclab n° 3092 - TGI Paris (1re ch. soc.), 6 décembre 2005 : RG n° 05/10504 ; Juris-Data n° 2005-287178 ; Cerclab n° 3085 (clause réputée non écrite) - CA Lyon (3e ch. civ.), 22 janvier 2004 : RG n° 02/04224 ; arrêt n° 334 ; Cerclab n° 766 (l’enseignement de la conduite des véhicules à moteur étant une activité civile, le bailleur financier, à défaut de tout élément, n’est pas fondée à opposer au locataire la clause attributive de compétence figurant au contrat de location, cette clause devant être réputée non écrite en vertu des dispositions de l’art. 48 CPC) - TGI Grenoble (4e ch.), 8 juillet 2009 : RG n° 05/2253 ; jugt n° 164 ; Cerclab n° 4166 (convention de compte bancaire ; clause illicite imposant la compétence des tribunaux du siège social de la banque, contraire à l'art. 48 CPC ; clause supprimée dans la suite de la procédure) - CA Grenoble (2e ch. civ.), 3 septembre 2013 : RG n° 12/02451 ; Cerclab n° 4540 (l’art. 48 CPC ne permet pas une clause attributive de compétence territoriale dans un contrat opposable à une personne non commerçante, ce qui est le cas d’une commune), sur appel de TGI Gap (JME), 16 mai 2012 : RG n° 11/00194 ; Dnd.
Dans le même sens (clause illicite) pour un non-professionnel, non-commerçant : TGI Grenoble (4e ch. civ.), 27 octobre 2008 : RG n° 07/03705 ; Cerclab n° 4256 (clause attributive de compétence territoriale au TGI de Grenoble illicite, dès lors qu'il n'est aucunement précisé dans le contrat de syndic que celui n’a vocation à régir que des copropriétés situées dans le ressort de cette juridiction, cette généralité excluant que la clause ne soit qu’un rappel de la compétence habituelle), confirmé par CA Grenoble (1re ch. civ.), 13 janvier 2014 : RG n° 08/04572 ; Cerclab n° 4669 (confirmation dans le dispositif).
Rappr. pour une clause déclarée nulle : TGI Paris (5e ch. 1re sect.), 19 septembre 1994 : RG n° 72275/93 ; Cerclab n° 1025 (la référence à une clause attributive de compétence aux tribunaux de la Seine, si elle est nulle entre non-commerçants, n’entraîne pas la nullité du contrat), sur appel CA Paris (15e ch. B), 3 mai 1996 : RG n° 94/26810 ; Cerclab n° 1281 ; Juris-Data n° 1996-021119 ; D. 1996. Somm. 326, obs. Delebecque (clause non discutée en appel).
Juges du fond : clauses abusives. V. par exemple : CA Lyon (6e ch.), 28 novembre 1991 : RG n° 90/01154 ; Cerclab n° 1152 (clause contraire à la recommandation de la Commission des clauses abusives du 15 mai 1980 sur les locations d’emplacement publicitaire et donc réputée non écrite) - CA Lyon (1re ch.), 21 septembre 1995 : RG n° 93/03524 ; Cerclab n° 1151 (clause consacrant des dérogations substantielles dont le non-professionnel pouvait sous estimer l’importance), confirmant TGI Lyon (1re ch.), 21 avril 1993 : RG n° 92/10778 ; Cerclab n° 1089 (clause abusive, pouvant dissuader le consommateur d’intenter une action qui lui paraîtrait nécessairement coûteuse en raison de l’éloignement ; rejet de l’argument du professionnel tiré de l’adage « nul n’est censé ignorer la loi » qui n’a d’autre objet que d’interdire de prendre prétexte de son ignorance pour éluder l’application de la règle, alors que c’est précisément pour protéger le consommateur de sa méconnaissance de la loi et de ses droits qu’ont été prises l’ensemble des mesures le protégeant, notamment les lois de 1978 et 1988) - TI Angoulême, 26 novembre 2003 : RG n° 11-03-000046 ; jugt n° 800/2003 ; Cerclab n° 2762 (clause abusive d'attribution de compétence au Tribunal de commerce de Marseille ce qui est de nature à entraver l'exercice du droit d'action ou de défense en justice par le consommateur), sur appel CA Bordeaux (1re ch. B), 20 juin 2006 : RG n° 04/00873 ; Juris-Data n° 308443 ; Cerclab n° 1023 (clause non examinée). § La clause qui réserve à la juridiction parisienne la connaissance des litiges opposant la société à ses utilisateurs étant contraire à l’art. 46 CPC, elle ne peut qu'être regardée comme abusive, en vertu de l'ancien art. R. 132-2-10° [R. 212-2-10°] C. consom. en ce qu’elle entrave l'exercice de l'action en justice du consommateur, privé du droit de saisir la juridiction territorialement compétente. TI Lorient, 19 mai 2011 : RG n° 11-11-000266 ; Cerclab n° 7033 (jugement estimant toutefois que le consommateur n’a aucun intérêt à la faire juger non écrite puisque le professionnel n’a pas invoqué cette clause).
Rappr. TI Avignon, 9 janvier 1981 : RG n° 146/80 et 168/80 ; jugt n° 5 ; Cerclab n° 30 (clause manifestement léonine, procurant un avantage excessif et ne respectant pas la justice et l’équivalence contractuelle), sur appel CA Nîmes (2e ch.), 15 décembre 1983 : RG n° 81-812 ; arrêt n° 666 ; Cerclab n° 1078 (clause non discutée).
Juges du fond : clause abusives et illicites. Pour une justification très motivée de la double sanction : le caractère illicite d’une clause attributive de compétence territoriale en ce qu'elle figure dans les contrats proposés aux clients non commerçants va de pair avec son caractère abusif à l'égard d'une telle clientèle ; le professionnel en tire un avantage excessif puisqu'il spécule sur la méconnaissance présumée des règles de procédure civile par ses clients non commerçants pour espérer qu'ils renoncent à engager un procès loin de leur domicile. CA Orléans (ch. civ. sect. 2), 21 mars 1995 : RG n° 93/001213 ; arrêt n° 437 ; Cerclab n° 2971 (le caractère particulièrement dissuasif de cette clause et le caractère vraiment excessif qu'en retire le professionnel sont d'autant plus réels qu'en matière de location de voiture le montant du litige sera faible et que la distance séparant le domicile du locataire du siège social du franchisé sera importante puisque le client sera même parfois étranger ou aura laissé la voiture, à l'issue du contrat, à l'agence proche de son domicile très éloignée souvent de celle où il aura loué le véhicule ; N.B. la clause était d’autant plus contestable en l’espèce que le tribunal n’était pas clairement déterminée : « ressort exclusif des juridictions siégeant au lieu du siège social du franchisé B . France »), confirmant TGI Tours (1re ch.), 11 février 1993 : RG n° 3389/91 ; Cerclab n° 410 (le caractère illégal de la clause n'est pas exclusif de son caractère abusif qui résulte au contraire de la mention délibérée d'une clause attributive de compétence critiquable dans un contrat remis à un non-professionnel, de nature à dissuader le consommateur d'agir en justice devant un Tribunal éloigné de plusieurs centaines de kilomètres du lieu de livraison).
V. par exemple : CA Versailles (3e ch.), 2 juin 1994 : pourvoi n° 4925/93 ; arrêt n° 398 ; Cerclab n° 1753 ; BID 1995, n° 6, p. 19 (clause illicite, contraire aux textes, et abusive, dès lors que sa rédaction générale ne fait aucune distinction entre les cocontractants, et que l’immense majorité des clients ignorent cette nullité à leur égard, ce qui peut les inciter à saisir une juridiction commerciale incompétente et bien souvent lointaine de leur domicile), confirmant TGI Versailles (1re ch. 1re sect.), 10 février 1993 : RG n° 92/01286 ; Cerclab n° 1702 (clause illicite et abusive) - CA Toulouse (2e ch.), 6 décembre 1995 : RG n° 4197/93 ; arrêt n° 664 ; Juris-Data n° 1995-052910 ; Cerclab n° 843 ; D. 1996. IR. 87 ; RJDA 1996/6, n° 840 (clause généralement illégale et en même temps abusive, en ce qu’elle apporte une dérogation aux règles normales de compétence dont le consommateur peut sous-estimer l’importance, et en ce qu’elle apporte un avantage excessif au professionnel, en dissuadant le consommateur d’agir devant le juge civil, puisque le contrat ne s’adresse presqu’exclusivement qu’à des particuliers) - TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 16 mars 1999 : RG n° inconnu ; Site CCA ; Cerclab n° 4023 ; D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729 (caractère abusif et illicite de la clause attribuant compétence au Tribunal de commerce de Paris ; opérateur proposant de se mettre en conformité en mentionnantque « conformément aux dispositions de l’art. 48 du NCPC, dès lors que le Contrat est souscrit par un abonné ayant contracté en qualité de commerçant… ») - TGI Nancy (2e ch. civ.), 4 juin 2004 : RG n° 03/02000 ; jugt n° 623 ; Cerclab n° 1442 (clause illicite, contraire à l’art. 46 CPC, et abusive dès lors qu’avec la stipulation concomitante d’une clause limitative de responsabilité elle est de nature à dissuader ou décourager le consommateur à exercer son droit naturel et essentiel d’agir en justice assurant au professionnel un avantage financier et psychologique ; clause au surplus illisible) - T. com. Marseille, 9 novembre 2004 : RG n° 2004/01507 et 2004/01508 ; Cerclab n° 1612 ; Lamyline ; Droit maritime français (clause abusive et illicite) - CA Rennes (1re ch. B), 28 janvier 2005 : RG n° 04/01969 ; arrêt n° 70 ; Cerclab n° 1786 ; Juris-Data n° 2005-270029 (clause illicite, comme contraire aux art. 46 et 48 CPC et à la loi n° 92-645 du 13 juillet 1992, ainsi qu’à son décret d’application n° 94-490 du 15 juin 1994, abusive en ce qu’elle dissuade les consommateurs de toute action en justice et de nature à indure en erreur au sens de l’ancien art. L. 121-1 C. consom.), confirmant TI Rennes, 24 février 2004 : RG n° 11-03-001131 (clause contraire au décret n° 94-490 du 15 juin 1994 pris en application de la loi du 13 juillet 1992) - TGI Saint-Brieuc (réf.), 18 août 2005 : RG n° 05/00227 ; ord. n° 235/05 ; Cerclab n° 400 (clause illicite, contraire aux art. 46 et 48 CPC, et abusive, en ce qu’elle décourage le consommateur d’agir en justice compte tenu de l’éloignement géographique du tribunal qu’elle désigne, contrairement au poing q) de l’annexe à l’ancien art. L. 132-1 C. consom., et qui induit le consommateur en erreur sur le tribunal effectivement compétent, au regard de l’ancien art. L. 121-1 C. consom.) - CA Rennes (1re ch. B), 6 octobre 2006 : RG n° 05/06442 ; arrêt n° 613 ; Cerclab n° 1778 ; Juris-Data n° 2006-317055 (clauses supprimée avant l’assignation, mais déclarée illicite, abusive et de nature à induire en erreur), confirmant sur ce point TGI Saint-Brieuc (réf.), 18 août 2005 : Dnd.
V. cep. pour une décision ancienne refusant de prendre en compte cette asymétrie d’information : une clause attributive de compétence (territoriale et d’attribution), valable entre commerçants, est nulle lorsqu’elle est opposée à non commerçant ; le professionnel ne pouvant se prévaloir d’une telle clause à l’encontre de l’acheteur non commerçant à laquelle elle n’est pas opposable, rejet de la demande de suppression de la clause par une association de consommateurs, faute d’intérêt à faire supprimer une telle clause qui n’a aucune incidence sur l’acheteur. TGI Grenoble (3e ch), 1er décembre 1994 : RG n° 94/1096 ; jugt n° 473 ; Cerclab n° 3151.
Clause distinguant explicitement les commerçants et les non-commerçants. N’est pas abusive la clause attributive de compétence d’attribution et territoriale (tribunal de commerce du lieu de la prise de commande) qui comporte in fine la mention selon laquelle « le présent art. n’est cependant pas applicable à l’égard de l’acheteur non commerçant ». CA Dijon, (1re ch. 1re sect.), 30 mars 1993 : RG n° 00000924/92 ; arrêt n° 556 ; Cerclab n° 616 (texte rédigé et présenté de façon telle qu’il ne peut induire en erreur un consommateur moyen, normalement vigilant, qui entreprendrait de le lire), infirmant TGI Dijon (1re ch. civ.), 25 novembre 1991 : RG n° 2996/90 ; Site CCA ; Cerclab n° 1044 (arg. 1/ le bon de commande s’adresse principalement, s’agissant de salons en cuir, à des cocontractants non commerçants lesquels à la lecture du paragraphe ci-dessus énoncé se décourageront d’envisager de soumettre leur litige au Juge civil de leur domicile ; arg. 2/ la formule est jugée brève et n’indique pas la juridiction compétente).
Comp. CA Angers (ch. com.), 24 février 2009 : RG n° 07/02296 ; arrêt n° 49 ; site CCA ; Cerclab n° 2884 (clause attributive de compétence applicable à tous les litiges pouvant naître entre la banque et un client commerçant pour une raison quelconque ; clause illicite au regard de l’art. 48 CPC, dès lors que la circonstance que le titulaire du compte soit commerçant n'implique pas qu'il ait nécessairement contracté en qualité de commerçant pour son activité commerciale ; clause supprimée dans les versions ultérieures), confirmant TGI Laval, 22 octobre 2007 : RG n° 06/00173 ; jugt n° 07/755 ; Cerclab n° 4181 (idem, l’art. 48 CPC exige que toutes les parties aient contracté en qualité de commerçant, c'est à dire pour les besoins de l'exercice leur activité professionnelle).
Clauses trompant le consommateur sur ses droits. Est abusive la clause qui induit le consommateur sur l’étendue de ses droits quant aux tribunaux compétents et au droit applicable en ce que sa rédaction donne à penser que la compétence de principe est celle des tribunaux de l’Angleterre et du Pays de Galles, sauf dispositions contraires des textes législatifs et conventionnels. TGI Paris (1/4 soc.), 31 janvier 2012 : RG n° 09/08186 ; site CCA ; Cerclab n° 4163 (N.B. 1 la clause prévoyait cette compétence et l’application du droit anglais en précisant au préalable qu’elle ne jouait que « sauf dispositions contraires de la Convention ou de toute disposition légale ou réglementaire ou exigence applicable » ; N.B. 2 le jugement a posé en principe que le contrat conclu en France par un consommateur français est soumis au droit français).
Clauses évoquant de façon incomplète les règles légales. N’est pas abusive la clause qui ne mentionne par les dispositions de l'ancien art. L. 141-5 C. consom. élargissant le droit d'option du consommateur quant à la juridiction compétente, qui n'a pas pour effet de restreindre le droit du consommateur, dès lors que la clause litigieuse rappelle que les litiges devront être portés devant les tribunaux compétents tels que définis par le nouveau code de procédure civile. CA Poitiers (1re ch. civ.), 18 mars 2016 : RG n° 14/03685 et n° 15/03431 ; Cerclab n° 5563 (texte du Code de procédure civile rappelant l’existence de dispositions spéciales).
Clauses évoquant de façon imprécise les restrictions légales. Est abusive la clause attribuant compétence au tribunal du siège social du loueur, en dépit de la mention « dans la mesure où la loi le permet », dès lors que cette stipulation va nécessairement tromper le consommateur non averti qui hésitera à engager des frais pour plaider loin de son domicile. CA Grenoble (1re ch. civ.), 11 juin 2001 : RG n° 99/04486 ; arrêt n° 403 ; Cerclab n° 3116 ; Juris-Data n° 2001-171268, confirmant TGI Grenoble (6e ch.), 16 septembre 1999 : RG 98/00991 ; jugt n° 343 ; Cerclab n° 3159 (définition du siège social restant floue et ne distinguant pas entre les agences en franchise et celles constituant des établissements du loueur). § V. aussi : TGI Lyon (1re ch.), 21 avril 1993 : RG n° 92/10778 ; Cerclab n° 1089 (clause abusive, qui n’est pas légalisée par la réserve de l’application des dispositions légales applicables en matière de compétence territoriale, dès lors que cette stipulation est contredite par la clause suivante qui prévoit l’attribution expresse d’une compétence exclusive aux juridictions parisiennes), confirmé par CA Lyon (1re ch.), 21 septembre 1995 : RG n° 93/03524 ; Cerclab n° 1151 (argument non examiné).
Groupe de contrats. Pour une hypothèse particulière où le contrat de location financière comportait une clause attributive de compétence devant la juridiction du siège du bailleur, alors que le contrat de télésurveillance n’en comportait pas et se contentait de rappeler les règles protégeant le consommateur : le contrat de télésurveillance étant le contrat principal, le locataure peut demander l’application de la règle générale. CA Lyon (3e ch.), 1er août 2001 : RG n° 1999/07987 ; arrêt n° 3329 ; Legifrance ; Cerclab n° 1145 ; Lamyline (arrêt rendu sans référence aux clauses abusives), sur appel de T. com.Saint-Étienne, 19 octobre 1999 : Dnd.
Cas du juge des référés. Rappr. entre professionnels : le juge des « référés » compétent territorialement est celui appartenant à la juridiction qualifiée pour se prononcer sur le fond ; une clause attributive de juridiction étant inopposable à la partie qui saisit le juge des référés, celle-ci peut toujours saisir de sa demande le juge du lieu où les mesures doivent être prises ou exécutées, peu important que l'urgence soit ou non caractérisée. CA Rouen (ch. urg.), 19 janvier 2016 : RG n° 15/02473 ; Cerclab n° 5496 ; Juris-Data n° 2016-001899 (absence d’application de la clause attributive de compétence territoriale inscrite dans les conditions générales d'achat et renvoi à l’option des art. 42 et 46 CPC), sur appel de T. com. Le Havre (réf.), 6 mai 2015 : Dnd .
Constatation de la suppression. Pour une décision constatant la suppression en cours de procédure d’une clause relative à la compétence territoriale. TI Grenoble, 28 juin 2012 : RG n° 11-09-000872 ; site CCA ; Cerclab n° 4109.
Présentation des clauses licites. N.B. Depuis l’adoption d’une définition étroite des consommateurs et des non-professionnels, aucune clause ne peut être licite dans un contrat interne, mais la question pouvait éventuellement se poser pour un commerçant concluant un contrat sans lien direct avec son activité. § Pour une illustration : est conforme aux exigences de présentation entre commerçants de l’art. 48 CPC, la clause attributive de compétence territoriale, annoncée dans le sommaire de la convention dont toutes les pages ont été paraphées, qui figure en haut de la dernière page de la convention, juste au-dessus de la signature des deux parties qui y ont apposé leurs timbres humides et qui est le seul article inscrit sur cette page et le dernier du contrat. CA Aix-en-Provence (8e ch. A), 19 octobre 2017 : RG n° 17/08999 ; arrêt n° 2017/403 ; Cerclab n° 7101 ; Juris-Data n° 2017-025522 (intitulé au surplus en gras et en gros caractères, espacé du contenu de l'article lui-même qui est rédigé de manière parfaitement lisible), sur appel de T. com. Aix-en-Provence, 18 avril 2017 : RG n° 2016007959 ; Dnd. § N'est pas spécifiée de manière très apparente dans le contrat et n’est donc pas conforme aux exigences de l’art. 48 CPC, la clause attributive de compétence territoriale d’un contrat d’assurance, dès lors que celle-ci se trouve à la page 34 sur 38, au terme de la lecture complexe des 33 pages qui précèdent, au milieu des multiples autres dispositions, le fait qu’elle soit précédée d'un titre ne constituant pas un élément distinctif puisque chaque clause du contrat est également titrée. CA Pau (1re ch.), 7 décembre 2021 : RG n° 21/02383 ; arrêt n° 21/04458 ; Cerclab n° 9305 (assurance d’un navire par un marin-pêcheur ; arrêt notant aussi que la police de caractère n'est pas plus apparente que le reste des conditions générales ; clause réputée non écrite), sur appel de TJ Bayonne (JME), J, 24 juin 2021 : RG n° 21/00029 ; Dnd. § V. aussi : CA Montpellier (2e ch.), 23 janvier 2018 : RG n° 15/09762 ; Cerclab n° 7401 (clause conforme à l'art. 48 CPC en ce qu’elle est entièrement reprise en gros caractères dans un article des conditions générales), sur appel de T. com. Montpellier, 9 novembre 2015 : RG n° 2015003479 ; Dnd - CA Lyon (3e ch. A), 7 juillet 2022 : RG n° 19/05085 ; Cerclab n° 9712 (opposabilité à une commerçante, fleuriste, de la clause attributive de compétence, clairement visible et détachée des autres conditions générales, du fait d’un encart grisé, d’une police différente et de caractères gras), sur appel de T. com. Saint-Étienne, 25 juin 2019 : RG n° 2016j941 ; Dnd - CA Lyon (3e ch. A), 27 octobre 2022 : RG n° 19/08431 ; Cerclab n° 9913 (efficacité de la clause attributive de compétence à l’égard d’un commerçant, qui figure en haut de page du contrat de location sous l'indication « article 17 : Attribution de compétence - Droit applicable », dans un encart grisé qui ressort clairement et distinctement à la simple lecture de la première page, ce d'autant que le paragraphe est imprimé dans une police de caractères distincte qui le différencie des autres mentions figurant sur cette page ; peu importe que le tribunal ne soit pas désigné, dès lors que le siège social du bailleur est aisément identifiable), sur appel de T. com. Saint-Étienne, 22 octobre 2019 : Dnd.
V. aussi : la clause d'attribution de compétence au profit du tribunal de grande instance dans le ressort duquel le défendeur (emprunteur-consommateur) a élu domicile ne déroge pas aux règles de compétence territoriale, de sorte que la banque soutient en vain qu'elle doit être réputée non écrite sur le fondement de l'art. 48 CPC. CA Aix-en-Provence (ch. 3-4), 28 mars 2019 : RG n° 17/00180 ; arrêt n° 2019/105 ; Cerclab n° 7746 ; Juris-Data n° 2019-012250 (prêt personnel ; l’emprunteur ayant, dans l'acte de prêt, élu domicile en principauté de Monaco et étant toujours domicilié en territoire monégasque au jour où il a été assigné par la banque, il y a lieu de déclarer le tribunal de grande instance de Marseille incompétent au profit de la juridiction monégasque), sur appel de TGI Marseille, 28 novembre 2016 : RG n° 15/09033 ; Dnd.
C. CONTRATS INTERNATIONAUX
1. DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE
Règlement n° 1215-2012. Le règlement (UE) n° 1215-2012 du 12 décembre 2012 est entré en vigueur le 10 janvier 2014. Il abroge le règlement (UE) n° 44-2001 du 22 décembre 2000. Les articles 17 à 19 concernant le consommateur correspondent aux anciens articles 15 à 17.
L’article 18, points 1 et 2, de ce texte précise, dans le domaine défini par l’article 17, les deux solutions essentielles applicables : « 1. L’action intentée par un consommateur contre l’autre partie au contrat peut être portée soit devant les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est domiciliée cette partie, soit, quel que soit le domicile de l’autre partie, devant la juridiction du lieu où le consommateur est domicilié. 2. L’action intentée contre le consommateur par l’autre partie au contrat ne peut être portée que devant les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est domicilié le consommateur. »
Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions : 1) postérieures à la naissance du différend ; 2) qui permettent au consommateur de saisir d’autres juridictions que celles indiquées à la présente section ; ou 3) qui, passées entre le consommateur et son cocontractant ayant, au moment de la conclusion du contrat, leur domicile ou leur résidence habituelle dans un même État membre, attribuent compétence aux juridictions de cet État membre, sauf si la loi de celui-ci interdit de telles conventions. § N.B. Après vérification, il existe une différence de rédaction avec le règlement n° 44-2001 : le « ou » séparant le 1e et le 2e a disparu. La modification pourrait être lourde de conséquences car, au lieu de prévoir trois situations au choix, la condition 1) devrait être toujours remplie et la seconde condition relèverait soit du 2), soit du 3). Il est permis de se demander si cette seconde interprétation est vraiment conforme au texte, chaque aliéna par le cas visé semblant se suffire à lui-même.
Pour une allusion à ces textes : une convention attributive de compétence serait sans effet, si elle était contraire aux dispositions de l’article 15 de la Convention de Bruxelles (ou 17 du Règlement n° 44/2001). CA Lyon (1re ch. civ.), 27 septembre 2007 : RG n° 07/01262 ; Cerclab n° 3906, sur appel de TGI Villefranche-sur-Saône, 10 janvier 2007 : Dnd.
Exigence de prévisibilité. Il résulte du considérant 11 du règlement du Conseil n° 44/2001/(CE) du 22 décembre 2000 que les règles de compétence doivent présenter un haut degré de prévisibilité ; cassation, au visa de ce texte et de l’art. 23 du règlement du Conseil n° 44/2001/(CE) du 22 décembre 2000, de l’arrêt admettant l’application d’une clause attributive de compétence stipulant « chaque fois que les lois françaises le permettent, les contestations au sujet des présentes sont soumises au tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg. Toutefois, la banque se réserve la faculté de déroger à cette attribution de juridiction si elle le considère comme opportun », alors que la cour avait constaté que la clause litigieuse ne contenait aucun renvoi à une règle de compétence en vigueur dans un Etat membre ni aucun élément objectif suffisamment précis pour identifier la juridiction qui pourrait être saisie, de sorte qu’elle ne répondait pas à l’objectif de prévisibilité. Cass. civ. 1re, 3 octobre 2018 : pourvoi n° 17-21309 ; arrêt n° 910 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 7674, cassant CA Montpellier (1re ch. D), 20 avril 2017 : RG n° 15/06311 ; Cerclab n° 6818 (prêt immobilier consenti par une banque étrangère à une SCI pour financer une opération de promotion immobilière au Vénézuela ; la circonstance qu'une seule des parties, en l'occurrence la banque, se soit réservé, de manière optionnelle, la faculté de déroger à l'attribution de juridiction prévue par le contrat ne saurait conférer à la clause attributive de juridiction un caractère potestatif excluant sa prise en compte, alors qu'il apparaît qu'à défaut de suivre la compétence volontaire instituée par les parties, la banque ne pouvait que se référer à l'article 5.1 du Règlement n° 44-2001, dispositions s'imposant dès lors que cette partie écartait la juridiction contractuellement choisie, répondant ainsi à l'objectif de prévisibilité devant être poursuivi par la clause litigieuse), sur renvoi de Cass. civ. 1re, 8 juillet 2015 : pourvoi n° 14-14942 ; arrêt n° 803 ; Cerclab n° 5217 (cassation purement procédurale sur la recevabilité de conclusions tardives), cassant CA Aix-en-Provence, 24 octobre 2013, sur appel de TGI Grasse (Jme), 16 septembre 2011 : RG n° 09/02593 ; Dnd.
Interprétation étroite de la notion de consommateur. Il ressort avec constance notamment des directives n° 93/13/CE relative aux clauses abusives, n° 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales et 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs - cette dernière ayant fait l'objet d'une transposition en droit français par la loi du 17 mars 2014 - qu’« est considérée comme un consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ». La CJCE, interprétant la notion de consommateur sous l'empire du précédent Règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000, a estimé, d'une part, qu'elle devait être entendue strictement dès lors qu'elle permet de déroger au principe de la compétence de la juridiction du lieu du domicile du défendeur et, d'autre part, que pour sa détermination, il y avait lieu de se référer à la position de la personne dans un contrat déterminé, en rapport avec la nature et la finalité de celui-ci. CA Paris (pôle 5 ch. 6), 9 décembre 2016 : RG n° 16/13848 ; Cerclab n° 6647 ; Juris-Data n° 2016-027095, sur appel de TGI Meaux (Jme), 6 juin 2016 : RG n° 15/01889 ; Dnd.
Pour la charge de la preuve dans le cadre de l’application du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000 : il appartient à l’emprunteur de démontrer que les conditions de la dérogation à la règle de compétence de principe prévue à la section 4 du Règlement au profit des consommateurs sont remplies. CA Paris (pôle 5 ch. 6), 9 décembre 2016 : RG n° 16/13848 ; Cerclab n° 6647 ; Juris-Data n° 2016-027095 (ouverture de crédit en compte de 6 millions d’euros ; preuve non rapportée en l’espèce), sur appel de TGI Meaux (Jme), 6 juin 2016 : RG n° 15/01889 ; Dnd.
Si les besoins de la gestion d'un patrimoine immobilier même important pourraient constituer des actes de consommation destinés à les mettre en valeur de manière usuelle et indépendamment de l'exercice de toute activité professionnelle, tel n’est pas le cas d’un projet de construction de riads au Maroc en vue de leur revente ou d'un établissement d'accueil de personne âgées de cent lits en vue de sa revente ou de son exploitation. CA Paris (pôle 5 ch. 6), 9 décembre 2016 : RG n° 16/13848 ; Cerclab n° 6647 ; Juris-Data n° 2016-027095 (ouverture de crédit en compte de 6 millions d’euros ; preuve pesant sur les emprunteurs pour écarter l’application des règles normales de compétence dans le cadre du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000), sur appel de TGI Meaux (Jme), 6 juin 2016 : RG n° 15/01889 ; Dnd.
Clauses inopposables. Un contrat d’assurance voyage conclu par une société luxembourgeoise, en tant que preneur d'assurance auprès d’une société d’assurances luxembourgeoise, désigne comme assuré la personne désignée sur le document de voyage/confirmation délivré par le preneur d'assurance et précise que toute contestation née à l'occasion du présent contrat entre le preneur d'assurance et/ou l'assuré d'une part et l’assureur d'autre part sera de la compétence exclusive des tribunaux du Grand-Duché de Luxembourg ; cette clause attributive de compétence, stipulée conformément à l'article 13.3) du Règlement CE n° 44/2001, est inopposable au client assuré, bénéficiaire a posteriori d'un contrat prédéterminé dont les clauses n'étaient plus négociables. CA Metz (1re ch. civ.), 15 novembre 2016 : RG n° 15/01379 ; arrêt n° 16/00466 ; Cerclab n° 6540, sur appel de TGI Metz (Jme), 26 février 2015 : Dnd (assurance voyage pour un séjour conclu avec un opérateur luxembourgeois).
Clauses non abusives. Absence de caractère abusif d’une clause attributive de juridiction au profit d’un tribunal étranger, dans le cadre d’un contrat de gestion de portefeuilles de valeurs mobilières conclu entre un ressortissant marocain et la filiale française d’une société spécialisée dans ce genre de contrats, sans qu’il soit utile de statuer sur le caractère international du litige. CA Paris (15e ch. B), 10 mars 2005 : RG n° 04/16757 ; Cerclab n° 845 ; Juris-Data n° 2005-278706 sur appel de TGI Paris (9e ch. 2e sect. - JME), 2 décembre 2003 : RG n° 03/01271 ; Cerclab n° 3079 (clause appliquée). § N’est ni abusive, ni léonine, la clause d’un contrat international de crédit qui laisse au prêteur étranger la possibilité de renoncer à la clause attributive de juridiction au Luxembourg, dès lors qu’elle a été convenue entre professionnels avisés, devant notaire et qu’elle n’ouvre jamais à la banque que la possibilité de choisir l’application des règles de droit interne connues de l’emprunteur. CA Aix-en-Provence (8e ch. C), 24 octobre 2013 : RG n° 11/16324 ; arrêt n° 2013/423 ; Cerclab n° 4501 (N.B. l’arrêt estime auparavant que le contrat a été conclu en qualité de professionnel), sur appel de TGI Grasse (JME), 16 septembre 2011 : RG n° 09/02593 ; Dnd, cassé pour des raisons procédurales par Cass. civ. 1re, 8 juillet 2015 : pourvoi n° 14-14942 ; arrêt n° 803 ; Cerclab n° 5217 (cassation au visa des art. 16 et 783 CPC, pour ne s’être pas prononcé sur des conclusions sollicitant la révocation de l’ordonnance de clôture). § N’est ni illicite, ni abusive la clause qui stipule, lorsque le client n’a pas son domicile sur le territoire de l’un des Etats membres de l’Union Européenne, que les litiges seront de la compétence exclusive des tribunaux compétents en matière civile du ressort juridictionnel de l’agence détenant le compte, qui est conforme à l’art. 23.1 du règlement CE du Conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000, et qui n’est pas contraire à l’art. L. 141-5 C. consom., qui ne fait qu’offrir au consommateur un droit d’option s’agissant du choix de la juridiction territorialement compétente sans imposer à celui-ci une règle de compétence territoriale exclusive en matière de litiges de consommation et qui renvoie d’ailleurs aux règles du code de procédure civile pour déterminer la juridiction territorialement compétente. CA Paris (pôle 5 ch. 6), 9 février 2018 : RG n° 16/03064 ; Cerclab n° 7433 (clause n° 52), confirmant TGI Paris, 8 décembre 2015 : RG n° 14/00309 ; Dnd. § Refus de considérer que la clause attributive de compétence désignant les juridictions libanaises est abusive, aux motifs qu’elle « contraint un particulier souhaitant agir à l'encontre de sa banque étrangère à ne pouvoir saisir qu'une juridiction située à plus de 4.000 km de son domicile », alors que les époux demandeur ont bien parcouru cette distance pour conclure le contrat d’ouverture d’un compte joint auprès d’une libanaise à Beyrouth. CA Orléans (ch. urg.), 6 juillet 2022 : RG n° 22/00819 ; arrêt n° 268/22 ; Cerclab n° 9727 (absence d’application de l’art. R. 631-3 C. consom., la banque libanaise ne disposant d'aucun établissement en France, ni de succursale, et n’ayant pas dirigé son activité vers la France au sens de l'article 17 du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012, alors que le contrat ne contient aucun prêt en euros et que les époux sont des libanais disposant d’un domicile au Liban), sur appel de TJ Blois, 10 mars 2022 : RG n° 21/03019, jugt n° 22/00176 ; Dnd.
La clause attributive de juridiction convenue entre les parties s'impose donc à celles-ci en vertu, dont Les dispositions du règlement Bruxelles 1 bis priment sur les règles de droit interne français, ce qui rend inopérant la référence à l’art. 48 CPC ; surabondamment, si en droit interne Français, la licéité d'une clause attributive de juridiction n'est admise que dans les relations entre commerçants en application de ce texte, la jurisprudence considère que les clauses prorogeant la compétence internationale sont en principe licites, lorsqu'il s'agit d'un litige international, sauf lorsque cette clause fait échec à la compétence territoriale impérative d'une juridiction française ; or, il n'existe pas en matière de droit de la consommation de règle générale de compétence territoriale impérative susceptible de neutraliser par principe une clause d'attribution de juridiction. CA Lyon (6e ch.), 4 novembre 2021 : RG n° 21/02328 ; Cerclab n° 9235 (contrat d’architecte d'intérieur pour l’aménagement d’un logement lyonnais d’une ressortissante américaine), sur appel de TJ Lyon (JME), 18 mars 2021 : RG n° 18/12544 ; Dnd. § La clause qui donne compétence exclusive aux tribunaux de Lyon n'est pas présumée abusive en application de l'art. R. 212-1-10° C. consom., dès lors qu'elle n'oblige pas la consommatrice à saisir exclusivement une juridiction d'arbitrage non couverte par des dispositions légales ou à passer exclusivement par un mode alternatif de règlement des litiges, et elle n’a pas pour objet de créer à son détriment un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties, étant observé que chacune des parties aura à supporter des frais supplémentaires d'avocat et de traduction en raison du caractère international du litige. Même arrêt.
Clauses abusives. Le règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 prévoit en son article 15 qu'en matière de contrat conclu par un consommateur (quand il ne s'agit pas de vente à tempérament d'objets mobiliers ou corporels ou de prêt à tempérament ou d'une autre opération de crédit liés au financement d'une vente de tels objets), lorsque le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l'État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités, lorsque le cocontractant du consommateur n'est pas domicilié sur le territoire d'un État membre, mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, il est considéré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet État ; l'article 16 de ce règlement prévoit que l'action intentée par un consommateur contre l'autre partie au contrat peut être portée soit devant les tribunaux de l'État membre sur le territoire duquel est domiciliée cette partie, soit devant le tribunal du lieu où le consommateur est domicilié et que l'action intentée contre le consommateur par l'autre partie au contrat ne peut être portée que devant les tribunaux de l'État membre sur le territoire duquel est domicilié le consommateur. CA Paris (pôle 2 ch. 2), 12 février 2016 : RG n° 15/08624 ; arrêt n° 2016-58 ; Cerclab n° 5505 ; Juris-Data n° 2016-002888, confirmant TGI Paris (4e ch. sect. 2), 5 mars 2015 : RG n° 12/12401 ; Cerclab n° 5383 ; Juris-Data n° 2015-010234 (rejet de l'exception d'incompétence soulevée par Facebook en l'état de la compétence du tribunal de grande instance de Paris résultant des dispositions de l'art. 4 du règlement n° 44/2000 du 22 décembre 2000, de l'art. 46 CPC et de l'ancien art. L. 141-5 C. consom.). § Le titulaire d’un compte Facebook, sans caractère professionnel, est donc en droit, par application des art. 15 et 16 du règlement précité, de saisir le tribunal de son lieu de domicile, situé à Paris, pour solliciter la réactivation de son compte ; le juge de la mise en état du TGI de Paris était dès lors compétent pour statuer sur la licéité de la clause attributive de compétence. CA Paris (pôle 2 ch. 2), 12 février 2016 : précité, confirmant TGI Paris (4e ch. sect. 2), 5 mars 2015 : précité.
L’ancien art. R. 132-2-10° [R. 212-2-10°] C. consom. présume abusives les clauses ayant pour objet de « supprimer ou entraver l'exercice d'actions en justice ou des voies de recours par le consommateur » ; la clause du contrat de service Facebook qui prévoit la compétence d’une juridiction californienne, en obligeant le souscripteur, en cas de conflit avec la société, à saisir une juridiction particulièrement lointaine et à engager des frais sans aucune proportion avec l'enjeu économique du contrat, souscrit pour des besoins personnels ou familiaux, est, compte tenu des difficultés pratiques et du coût d'accès aux juridictions californiennes, de nature à dissuader le consommateur d'exercer toute action devant les juridictions concernant l'application du contrat et à le priver de tout recours à l'encontre de la société Facebook Inc ; à l'inverse, cette dernière a une agence en France et dispose de ressources financières et humaines qui lui permettent d'assurer sans difficulté sa représentation et sa défense devant les juridictions françaises ; il en résulte que cette clause attributive de compétence a pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et qu'elle a également pour effet de créer une entrave sérieuse pour un utilisateur français à l'exercice de son action en justice, ce qui justifie de la déclarer abusive et réputée non écrite. CA Paris (pôle 2 ch. 2), 12 février 2016 : précité, confirmant TGI Paris (4e ch. sect. 2), 5 mars 2015 : précité (motifs similaires).
La clause des conditions d’utilisation de l’exploitant qui attribue compétence, dans l’éventualité d’un litige l’opposant l’utilisateur, aux juridictions californiennes, dont l’éloignement est de nature à dissuader l’utilisateur, en raison des difficultés pratiques et du coût relatifs à leur accès, d'exercer toute action et de le priver de fait de tout recours de nature judiciaire à l'encontre du fournisseur de réseau social et elle est donc illicite en ce qu'elle prive l’utilisateur de la protection assurées par les dispositions prises par un Etat membre de l'Union européenne en application de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs et présumée abusive par application de l’art. R. 132-2-10°, devenu R. 212-2-10° C. consom. TGI Paris (1/4 social), 7 août 2018 : RG n° 14/07300 ; Cerclab n° 8251 ; Juris-Data n° 2018-014706 (réseau social Twitter ; A.22.5 – clause n° 12B des conditions d’utilisation).
Consommateur défaillant sans domicile connu. Le règlement n° 44/2001 ne contient pas de disposition spécifique qui définisse expressément la compétence juridictionnelle dans le cas d’une action contre un consommateur dont le domicile est inconnu (point n° 38). Aux termes de l’art. 16 § 2 de ce règlement, l’action intentée contre le consommateur par l’autre partie au contrat ne peut être portée que devant les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel est domicilié le consommateur (point n° 39). Lorsqu’un juge national est appelé à connaître d’une telle action, il doit, tout d’abord, vérifier si le consommateur défendeur est domicilié sur le territoire de son État membre en appliquant, conformément à l’art. 59 § 1, son propre droit (point n° 40). Ensuite, si, le juge parvient à la conclusion que le défendeur au principal n’a pas de domicile sur le territoire de son État membre, il doit alors vérifier si ce dernier est domicilié dans un autre État membre en appliquant, à cette fin, conformément à l’art. 59 § 2, le droit de cet autre État membre (point n° 41). Enfin, si le juge national, d’une part, ne parvient toujours pas à identifier le lieu où est domicilié le consommateur et, d’autre part, ne dispose pas non plus d’indices probants lui permettant de conclure que celui-ci est effectivement domicilié en dehors du territoire de l’Union, hypothèse dans laquelle l’art. 4 du règlement n° 44/2001 trouverait à s’appliquer, l’art. 16 § 2 peut, dans un tel cas, être interprété en ce sens que, la règle de la compétence des juridictions de l’État membre sur le territoire duquel se trouve le domicile du consommateur puisse viser le dernier domicile connu du consommateur (point n° 42). CJUE (1re ch.), 17 novembre 2011, Hypoteční banka a.s./Udo Mike Lindner : Aff. C-327/10 ; Cerclab n° 4415. § Dans une situation telle que celle de l’espèce, où un consommateur partie à un contrat de prêt immobilier de longue durée, assorti d’une obligation d’informer le cocontractant de tout changement d’adresse, a renoncé à son domicile avant l’introduction d’une action à son encontre pour violation de ses obligations contractuelles, les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel se trouve le dernier domicile connu du consommateur sont compétents, au titre de l’art. 16 § 2, du règlement 44/2001, pour connaître de cette action lorsqu’ils ne parviennent pas à déterminer, en application de l’art. 59 du même règlement, le domicile actuel du défendeur et qu’ils ne disposent pas non plus d’indices probants leur permettant de conclure que celui-ci est effectivement domicilié en dehors du territoire de l’Union européenne. CJUE (1re ch.), 17 novembre 2011 : précité (arg. 1/, point n° 44 : solution conforme à l’objectif, poursuivi par le règlement n° 44/2001, de renforcer la protection juridique des personnes établies dans l’Union, en permettant à la fois au demandeur d’identifier facilement la juridiction qu’il peut saisir et au défendeur de prévoir raisonnablement celle devant laquelle il peut être attrait ; arg. 2/, point n° 45 : solution évitant un déni de justice et la privation du demandeur de son droit d’agir en justice ; arg. 3/ équilibre respecté notamment dans le cas de l’espèce où le consommateur avait une obligation d’informer son cocontractant de tout changement d’adresse). § N.B. Compte tenu de ces éléments, la Cour estime qu’il n’est pas nécessaire de répondre à une autre question concernant le caractère abusif dans ce cas d’une clause attributive de juridiction.
2. CONVENTION DE LUGANO
Validité de la clause (art. 17). En vertu de l’art. 17 de la Convention de Lugano du 16 septembre 1988, si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État contractant, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État contractant pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou ces tribunaux sont seuls compétents ; cassation de l’arrêt déclarant la juridiction suisse compétente, en application de l’art. 42 CPC, alinéa 1er, aux motifs que le seul élément d’extranéité par rapport au droit français était la résidence en Suisse de l’une des parties pour en déduire que la convention n’était pas applicable, alors que, même s’il s’agissait d’une clause attributive de juridiction conclue entre non commerçants, l’art. 17 de la Convention de Lugano était applicable dès lors qu’une des parties était domiciliée en Suisse. Cass. civ. 1re, 30 janvier 2013 : pourvoi n° 11-24723 ; Cerclab n° 4288 (cession de créance ; visa des art. 2 et 17 de la convention), cassant CA Paris, 18 mai 2011 : Dnd, sur appel de TGI Paris (JME), 12 mars 2010 : Dnd, et sur renvoi CA Versailles, 28 novembre 2013 : Dnd, cassé sur un autre point par Cass. civ. 1re, 28 mai 2015 : pourvoi n° 14-12363 ; arrêt n° 572 ; Cerclab n° 6674 (ayant énoncé, à bon droit, que l’art. 17 de la Convention de Lugano reconnaît la validité d’une clause attributive de juridiction aux seules conditions que l’une des parties au moins soit domiciliée dans un État signataire et que la juridiction désignée soit celle d’un Etat contractant, la cour d’appel, qui n’avait pas à procéder à une recherche que ces énonciations rendaient inutile, selon le moyen un élément supplémentaire d’extranéité, a légalement justifié sa décision en retenant la validité de la clause attributive de compétence litigieuse), sur renvoi CA Rouen (ch. civ. com.), 21 décembre 2016 : RG n° 15/03920 ; Cerclab n° 6670 (arrêt reprenant la même solution), pourvoi rejeté par Cass. civ. 1re, 14 mars 2018 : pourvoi n° 17-10320 ; arrêt n° 287 ; Cerclab n° 7500 (par ces seuls motifs, dont elle a justement déduit, sans qu’il y ait lieu de saisir la CJUE d’une question préjudicielle, que cette cession de créance n’étant pas étrangère à son activité professionnelle, M. X. ne pouvait invoquer, pour écarter la clause attributive de compétence conventionnelle, les dispositions protectrices du consommateur de l’article 13 de la Convention de Lugano du 16 septembre 1988, la cour d’appel a légalement justifié sa décision).
V. dans le même sens, admettant la validité de la clause, stipulée dans des formes respectant la convention : CA Colmar (1re ch. civ. sect. A), 8 novembre 2017 : RG n° 16/02404 ; Cerclab n° 7122 (crédit souscrit auprès d’une banque suisse ; la solution vaut même si le contrat a été conclu par un intermédiaire français, ce représentant ne pouvant passer pour une succursale ou une agence de la banque du seul fait du mandat qu'il a reçu pour procéder à la signature des actes authentiques), sur appel de TGI Mulhouse (JME), 28 avril 2016 : Dnd.
N'est pas contraire à l'objectif de prévisibilité que doivent présenter les règles de compétence au regard de l'article 23 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007, la clause qui se borne à renvoyer aux règles de compétence de droit commun selon la loi suisse, les juridictions éventuellement amenées à se saisir d'un litige opposant les parties à l'occasion de l'exécution, de l'interprétation ou de la validité du contrat, étant identifiables. Cass. civ. 1re, 28 septembre 2022 : pourvoi n° 21-13686 ; arrêt n° 684 ; Cerclab n° 9936 (action de consommateurs contestant le caractère abusif de clauses contenues dans un emprunt auprès d’une banque suisse ; clause invoquée par la banque en défense), rejetant le pourvoi contre CA Aix-en-Provence (ch. 3-3), 14 janvier 2021 : Dnd.
Limites pour un consommateur (art. 13 et 14). Dès lors qu’un ressortissant suisse, qui présente son activité professionnelle comme consistant en la gestion de son patrimoine à travers des opérations industrielles portant sur les sociétés dans lesquelles il détient des participations, a acquis d’une banque française une créance dans une opération qui n’est pas étrangère à son activité professionnelle, ne peut se prévaloir du bénéfice des dispositions des articles 13 et 14 de la convention de Lugano qui permettent au consommateur d'invoquer la compétence territoriale du lieu de son domicile. CA Rouen (ch. civ. com.), 21 décembre 2016 : RG n° 15/03920 ; Cerclab n° 6670 (application de la clause attributive de compétence au TGI de Paris ; arguments justifiant la solution : 1/ un bien meuble incorporel, ne peut être considérée comme un bien meuble corporel au sens de l'article 13 de la convention de Lugano ; 2/ la créance cédée était garantie par le nantissement qu'il avait consenti sur les actions qu'il détenait dans la société OED finance et le cessionnaire s'est rapproché de la banque pour acheter la créance ainsi garantie ; 3/ la cession de créance est liée à la gestion du patrimoine et met en cause une société dans laquelle il détient une participation majoritaire ; N.B. sur la notion de consommateur, V. le texte de l’arrêt), sur renvoi de Cass. civ. 1re, 28 mai 2015 : pourvoi n° 14-12363 ; arrêt n° 572 ; Cerclab n° 6674 (cassation de l’arrêt ayant écarté l’art. 14 de la Convention de Lugano sans aucune analyse des éléments de la cause), cassant CA Versailles, 28 novembre 2013 : Dnd.
Comp. : caractère illicite au regard de l’art. R. 111-2 C. consom. des clauses relatives à la loi applicable et à la juridiction compétente en ce qu’elles ne donnent pas une information claire au consommateur, alors que l'exploitant de la plateforme est une société de droit américain. TGI Paris, 17 octobre 2019 : RG n° 16/01008 ; Cerclab n° 8253 ; Juris-Data n° 2019-018156 (plateforme internet de distribution en ligne de contenus numériques de jeux vidéo, logiciels, films, séries).
V. aussi pour une décision ayant validé globalement une clause sur la loi applicable et la clause attributive de compétence, aux motifs qu’elle laissait le justiciable français, résidant sur le territoire français, de demeurer parfaitement libre de s'adresser aux seules juridictions françaises et de relever de ses seules lois nationales. TGI Paris, 12 février 2019 : RG n° 14/07224 ; Cerclab n° 8252 ; Juris-Data n° 2019-003111 (2-y ; CGU n° 38). § N.B. Le jugement ne semble pas avoir analysé correctement la clause (sauf à considérer qu’il l’a interprétée dans un sens non abusif et illicite, dans l’intérêt du consommateur), qui de façon assez perverse stipulait que « si la justice de votre pays ne vous autorise pas à vous pourvoir devant les tribunaux du comté de Santa Clara, Californie, États-Unis, les litiges relevant des présentes seront portés devant les tribunaux compétents de votre lieu de résidence » mais que dans le cas contraire, toute action en justice relèvera exclusivement de ceux-ci, alors que, si le droit français n’interdit nullement au consommateur de saisir une juridiction étrangère, il ne saurait être déduit de cette possibilité l’impossibilité de saisir la juridiction française en application des textes du code de la consommation.