CA RENNES (1re ch. B), 4 juillet 2003
CERCLAB - DOCUMENT N° 1793
CA RENNES (1re ch. B), 4 juillet 2003 : RG n° 02/04189 ; arrêt n° 570
Publication : Juris-Data n° 224014
Extrait « Que la commission des clauses abusives dans sa recommandation n°96-02 dénonce comme étant rédigés de manière quasi illisible les contrats qui, soit en raison de la taille des caractères soit en raison d'une impression claire sur fond pâle, ne permettent pas au consommateur d'avoir une lecture simple des clauses qu'il signe ; Considérant que c'est juste titre que le tribunal a sur cette base retenu par une motivation que la Cour fait sienne que la clause litigieuse était rédigée de manière illisible, ce qui rendait totalement illusoire l'avertissement précédant la signature du locataire au recto de la convention donné ces termes « lire attentivement les conditions générales au dos » ; Que la clause sera donc réputée non écrite ».
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
PREMIERE CHAMBRE B
ARRÊT DU 4 JUILLET 2003
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 02/04189. Arrêt n° 570.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur PIPERAUD, Président de Chambre, Madame Ghislaine SILLARD, Conseiller, Monsieur Jean-Malo BOHUON conseiller.
GREFFIER : Danielle DELAMOTTE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS : A l'audience publique du 23 Mai 2003
ARRÊT : Contradictoire, prononcé par Monsieur PIPERAUD, Président de Chambre, à l'audience publique du 04 juillet 2003, date indiquée l'issue des débats.
APPELANTE :
SARL BLEDER SERVICE PLUS
[adresse] représentée par la SCP GUILLOU et RENAUDIN, avoués assistée de Maître LE COLLETER, avocat
INTIMÉ :
Monsieur X.
[adresse] représenté par Maître Jean-Loup BOURGES, avoué assisté de Maître Jean Michel BELLAT, avocat
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Faits et procédure :
Par jugement du 27 mai 2002, le tribunal de Grande Instance de RENNES a :
- débouté la société BLEDER-SERVICE PLUS de sa demande en paiement des frais de remise en état du véhicule, des frais de remorquage, d'immobilisation et d'expertise,
- condamné Monsieur X. à lui payer la somme de 102,77 euros montant de la location non réglé avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 octobre 2000,
- ordonné l'exécution provisoire de ce chef,
- rejeté la demande de dommages et intérêts de la société BLEDER SERVICE PLUS,
- condamné la société BLEDER SERVICE PLUS à payer à Monsieur X. la somme de 1.220 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Appelante, la société BLEDER SERVICE PLUS demande à la Cour :
- à titre principal, de condamner Monsieur X. à lui verser la somme de 7.460,82 euros (48.939,77 francs) en réparation du préjudice matériel subi, ladite somme avec intérêts de droit à compter du 26 octobre 2000 sur le fondement de l'article 1134 du code civil,
- à titre subsidiaire, de condamner Monsieur X. à lui verser la somme de 7.460,82 euros (48.939,77 francs) en réparation du préjudice matériel subi, ladite somme avec intérêts de droit à compter du 26 octobre 2000 sur le fondement des articles 1732 et suivants du code civil,
- en tout état de cause, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur X. à lui payer la somme de 102,77 euros au titre de la location du véhicule (avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 26 octobre 2000),
- de condamner Monsieur X. à lui verser la somme de 3.048,98 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,
- de le condamner à lui payer la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.
[minute page 3] Monsieur X. demande à la Cour :
vu l'article 1134 du code civil, vu la recommandation n° 96-02 de la commission des clauses abusives, vu l'article L. 133-2 du code de la consommation, vu les articles 1156 et 1162 du code civil,
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société BLEDER SERVICE PLUS de sa demande en paiement des frais de remise en état du véhicule, des frais de remorquage d'immobilisation et d'expertise et a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par elle,
- de lui décerner acte de ce qu'il s'en rapporte quant au paiement de la somme de 102,77 euros correspondant aux frais de location du véhicule,
- à titre subsidiaire, de débouter la société BLEDER SERVICE PLUS de toutes ses demandes, fins et conclusions fondées sur l'article 1732 du code civil,
- de la débouter de toutes ses autres demandes, fins et conclusions,
- à titre infiniment plus subsidiaire, de lui décerner acte de ce qu'il ne saurait être tenu au paiement d'une somme supérieure à 609,80 euros montant de la caution contractuellement prévue entre les parties,
- de débouter la société BLEDER SERVICE PLUS de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- de la condamner au paiement de la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.
La Cour renvoie aux dernières conclusions des parties en date du 28 mars 2003 pour Monsieur X. et du 3 avril 2003 pour la société BLEDER SERVICE PLUS s'agissant des moyens et arguments avancés à l'appui de leurs prétentions.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Considérant qu'il résulte des pièces versées que Monsieur X. a loué le 13 janvier 2000 auprès de la société BLEDER SERVICE PLUS en son agence de RENNES un véhicule utilitaire Renault MASTER 110 immatriculé […] suivant contrat initial n°6229 pour un montant de 674,15 francs TTC (102,77 euros) ;
Que Monsieur X. a pris livraison du véhicule le 14 janvier et l'a restitué le 15 janvier 2001 ; qu'il a refusé de prendre en charge les dégâts occasionnés à l'avant droit du véhicule suite au choc consécutif à un dérapage sur une plaque de verglas ;
[minute page 4] Considérant que la société BLEDER SERVICE PLUS se prévaut des conditions générales du contrat et plus particulièrement des articles 7-b-1 et 7-b-2 ;
Qu'aux termes de celles-ci, les dégâts occasionnés au véhicule sont à la charge du locataire dans la mesure où aucun autre véhicule est impliqué, ce qui est le cas en l'espèce ;
Que cependant Monsieur X. excipe de l'inopposabilité de cette clause, estimant que le loueur ne fait pas la démonstration qu'il ait informé le consommateur des conditions générales de la location ; que de plus, au visa de l'article L. 133-2 du code de la consommation les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non professionnels doivent être présentées et libellées de façon précise et compréhensible ;
Que la commission des clauses abusives dans sa recommandation n°96-02 dénonce comme étant rédigés de manière quasi illisible les contrats qui, soit en raison de la taille des caractères soit en raison d'une impression claire sur fond pâle, ne permettent pas au consommateur d'avoir une lecture simple des clauses qu'il signe ;
Considérant que c'est juste titre que le tribunal a sur cette base retenu par une motivation que la Cour fait sienne que la clause litigieuse était rédigée de manière illisible, ce qui rendait totalement illusoire l'avertissement précédant la signature du locataire au recto de la convention donné ces termes « lire attentivement les conditions générales au dos » ;
Que la clause sera donc réputée non écrite ;
Que subsidiairement la société BLEDER SERVICE PLUS s'estime fondée à invoquer les dispositions de l'article 1732 du code civil ;
Que Monsieur X. soutient que cet article serait inapplicable compte tenu des dispositions d'ordre public du code de la consommation qui s'imposent dans les relations contractuelles entre professionnels et consommateurs, à l'exclusion des dispositions de droit commun, et qu'intégré dans le code civil sous la section des règles communes aux baux des maisons et des biens ruraux, il ne saurait dès lors régler les relations entre les parties ;
Mais considérant que ledit article a vocation s'appliquer également aux relations entre loueurs et locataires de véhicules automobiles et que si en application de l'article 1134 du code civil les dispositions contractuelles tiennent effectivement lieu de loi entre les parties, il résulte de l'article 1135 du même code que les conventions obligent non seulement ce qui y exprimé mais encore à toutes les [minute page 5] suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature ;
Et que c'est enfin vainement que Monsieur X. prétend, au visa des articles 1156 et 1162 du code civil, qu'il ne serait tenu qu'au paiement d'une somme de 4.000 francs alors qu'il a décliné l'offre contractuelle présentée sous la rubrique « assurances + RFP 4.000 francs » (RFP = rachat de franchise partiel) ;
Qu'il sera donc condamné à verser la somme de 7.460,82 euros représentant les frais de remise en état du véhicule, de remorquage, d'immobilisation et d'expertise assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 octobre 2000 outre la somme de 102,77 euros au titre de là location du véhicule dont le juge a estimé avec raison qu'elle était due ;
Que le jugement sera réformé en conséquence ;
Que la société BLEDER SERVICE PLUS qui est à l'origine du litige en ayant mis son cocontractant dans l'impossibilité d'apprécier la portée de ses engagements sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour résistance injustifiée ; qu'eu égard à l'équité, elle sera également déboutée de sa demande formée au titre des frais irrépétibles ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur X. à payer à société BLEDER SERVICE PLUS la somme de 102,77 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 octobre 2000,
LE RÉFORMANT pour le surplus ;
CONDAMNE également Monsieur X. à payer à société BLEDER SERVICE PLUS la somme de 7.460,82 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 octobre 2000 ;
DÉBOUTE la société BLEDER SERVICE PLUS de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
DIT n'y avoir lieu à indemnité de procédure ;
CONDAMNE Monsieur X. aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.