CA FORT DE FRANCE (ch. civ.), 30 mai 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 1850
CA FORT DE FRANCE (ch. civ.), 30 mai 2008 : RG n° 07/00279 ; arrêt n° 08/332
Publication : Juris-Data n° 2008-368798
Extrait : « À la suite d'une opération de démarchage à domicile Madame X. a signé le 5 novembre 2004 avec la société MADININA STORE un bon de commande d'un garde corps avec pose et dépose de l'existant au prix de 4.600 euros. […] Le contrat de vente conclu le 5 novembre 2004 entre la SARL MADININA STORE et Madame X. indique expressément que cette vente est soumise aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la Consommation concernant les opérations de démarchage. »
COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 30 MAI 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/00279. Arrêt n° 08/332. Décision déférée à la Cour : Jugement au fond, du Tribunal d'Instance de FORT-DE-FRANCE, en date du 4 décembre 2006, enregistrée sous le n° 11-06-000070.
APPELANTE :
LA SARL MADININA STORE
prise en la personne de son représentant légal, [adresse], Représentée par Maître Dinah RIOUAL-ROSIER de la SELARL RIOUAL-ROSIER, avocat au barreau de FORT-DE-FRANCE
INTIMÉE :
Madame X.
[adresse], Représentée par Maître Roger BELHUMEUR 21, avocat au barreau de FORT DE France, (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007/XX du 29 mai 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de FORT DE FRANCE)
COMPOSITION DE LA COUR : Les parties ont été autorisées à déposer leur dossier conformément aux dispositions de l'article 779 alinéa 3 du Nouveau Code de Procédure Civile et les parties ont été informées en application de l'article 786-1 du nom des magistrats amenés à délibérer soit : Madame Luce BERNARD, Président de Chambre, Monsieur Yves BENHAMOU, Conseiller, Madame Annie MOLIERE, Conseiller [minute page 2] et de la date du délibéré au 4 avril 2008. L'arrêt a été rédigé par Monsieur Yves BENHAMOU, Conseiller rapporteur. Greffier, lors des débats, Madame Louisiane SOUNDOROM,
ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé, après prorogation à ce jour, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
À la suite d'une opération de démarchage à domicile Madame X. a signé le 5 novembre 2004 avec la société MADININA STORE un bon de commande d'un garde corps avec pose et dépose de l'existant au prix de 4.600 euros.
Le même jour selon offre préalable de crédit accessoire à ce contrat de vente elle s'est vu consentir par la Société Martiniquaise de Financement (SOMAFI) un crédit d'un montant de 4.600 euros remboursable en 38 mensualités de 170,38 euros.
Dans le cadre d'une procédure de déclaration au greffe initiée par Madame X. (la juridiction de proximité ayant été originellement saisie), le Tribunal d'instance de Fort de France par jugement en date du 4 décembre 2006 a :
- dit qu'il y avait lieu de se déclarer compétent pour connaître de la demande de Madame X.,
- déclaré irrecevable la demande d'annulation du contrat de prêt,
- annulé le contrat de vente conclu entre Madame X. et la SARL MADININA STORE,
- condamné en conséquence la SARL MADININA STORE à payer à Madame X. la somme de 4.600 euros,
- rejeté toutes les autres demandes des parties,
- condamné la SARL MADININA STORE aux entiers dépens.
[minute page 3] Au soutien de sa décision le premier juge relève que :
- s'agissant d'une vente dans le cadre d'une opération de démarchage, le bon de commande valant contrat de vente entre les parties ne précise pas les conditions d'exécution du contrat et notamment le délai de livraison du garde corps alors que ces mentions exigées à peine de nullité par l'article L. 121-23 du Code de la Consommation,
- ne sont pas mentionnés sur le bon de commande le taux nominal d'intérêts et le taux effectif global déterminés dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 du Code de la consommation alors que ces mentions sont elles aussi exigées à peine de nullité par l'article L. 121-23 précitée,
- il y a donc lieu de prononcer l'annulation du contrat de vente,
- s'agissant du contrat de prêt connexe à la vente, Madame X. n'ayant pas appelé en la cause le prêteur, des demandes afférentes à ce prêt son irrecevables.
Par déclaration au greffe de la Cour le 7 mars 2007 la société MADININA STORE a interjeté appel de cette décision
Dans des conclusions régulièrement signifiées à la partie adverse le 6 juillet 2007 l'appelante a demandé à la Cour de bien vouloir :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a annulé le contrat conclu entre Madame X. et la SARL MADININA STORE,
Par conséquent :
- déclarer le contrat conclu le 5 novembre 2004 entre les parties valable et créateur de droits,
- débouter Madame X. de toutes ses demandes dirigées contre l'appelante,
- la condamner aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Elle indique que :
- la sanction de l'omission de la mention du taux effectif global est en application des dispositions de l'article L. 313-2 du Code de la Consommation, une amende de 4.500 euros en aucun cas l'annulation du contrat,
- à défaut d'écrit fixant le taux d'intérêts conventionnel la sanction n'est pas la nullité de la stipulation d'intérêts mais l'application du taux légal,
- [minute page 4] le contrat conclu entre MADININA STORE et Mme X. est tout à fait valable,
- l'appelante a dépêché à plusieurs reprises M. Y. afin de résoudre le conflit né de l'exécution du chantier de Mme X. et a vainement proposé à celle-ci de remplacer quelques carreaux abîmés durant les travaux non pas de pose mais de dépose de l'existant de manière gracieuse,
- MADININA STORE a parfaitement rempli ses obligations lui incombant en qualité de professionnel,
- Mme X. a donné son consentement aux conditions générales qui prévoient notamment que les délais de livraison sont donnés à titre indicatif.
Pour sa part Madame X. dans des conclusions régulièrement signifiées à la partie adverse le 11 septembre 2007 a demandé à la Cour de bien vouloir :
- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a :
* annulé le contrat conclu le 5 novembre 2004 entre la SARL MADININA STORE et Mme X.,
* condamné en conséquence la dite société à payer la somme de 4.600 euros,
- condamner l'appelante à lui payer la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure injustifiée ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle indique que :
- MADININA STORE reconnaît que les travaux n'ont pas été correctement exécutés en dépêchant M.M Z. et Y. mais estime qu’« il appartient à Mme X. de procéder à la réfection des emplacements (où il manque du carrelage) qui n'ont pas été créés par la société dans l'exécution de ses travaux mais par la dépose de l'existant. »
- l'appelante refuse de prendre en charge des carreaux qu'elle a cassés pendant les travaux qu'elle a effectués,
- le contrat de vente en violation des dispositions de l'article L. 121-23, 5 du Code de la Consommation exigeant ces mentions à peine de nullité du contrat, ne précise pas les modalités d'exécution, le délai de livraison des marchandises et les conditions d'exécution des prestations s'y rattachant,
- MADININA STORE a effectué le 9 juillet 2005 le dépôt de quatre éléments de balcon sur sa pelouse et n'est pas revenue depuis ; d'où la nullité du contrat de vente qui s'impose de plus fort car l'appelante reconnaît n'avoir pas fourni les prestations promises,
- [minute page 5] elle n'a pas pu à ce jour faire réaliser les travaux et a dû subir des prélèvements bancaires pendant des mois et effecteur de nombreuses démarches auprès de SOMAFI qui finalement a accepté d'arrêter les prélèvements ; elle est donc fondée à réclamer de justes dommages et intérêts à raison de l'appel injustifiée,
- la décision querellée devra donc être confirmée.
L'ordonnance de clôture de la présente procédure est intervenue le 13 décembre 2007.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION DE LA COUR :
- SUR LA DEMANDE D'ANNULATION DU CONTRAT DE VENTE :
- En droit :
L'article L. 121-21 du Code de la Consommation dispose dans son premier alinéa :
« Est soumis aux dispositions de la présente section quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage, au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande afin de lui proposer l'achat, la vente, la location, la location vente ou la location avec option d'achat de biens ou la fourniture de services ».
L'article L. 121-23 du même Code quant à lui dispose notamment :
« Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
1°/ Noms du fournisseur et du démarcheur ;
2°/ Adresse du fournisseur ;
3°/ Adresse du lieu de conclusion du contrat ;
4°/ Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;
5°/ Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens ou d'exécution de la prestation de services ;
6°/ Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1. »
[minute page 6]
- En fait :
Le contrat de vente conclu le 5 novembre 2004 entre la SARL MADININA STORE et Madame X. indique expressément que cette vente est soumise aux dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la Consommation concernant les opérations de démarchage.
Or force est de constater que ce contrat ne mentionne nullement les modalités d'exécution, le délai de livraison des marchandises et les conditions d'exécution des prestations s'y rattachant - mentions pourtant exigées à peine de nullité.
À défaut de tels mentions et les dispositions des articles L. 121-21 et suivants du Code de la Consommation ayant un caractère d'ordre public, il y a lieu de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a annulé le contrat de vente litigieux et condamné en conséquence la société MADININA STORE à restituer la somme de 4.600 euros.
- SUR LA DEMANDE INCIDENTE DE DOMMAGES ET INTÉRÊT DE L'INTIMÉE :
À défaut d'une expertise judiciaire parfaitement contradictoire, permettant à la Cour d'avoir un aperçu complet et objectif de la chronologie des relations contractuelles entre les parties et des travaux réalisés ainsi que des désordres les affectant, il n'est pas dûment établi que l'intimée a subi un préjudice distinct de celui réparé par l'annulation de la vente.
Par suite il y a lieu de débouter Madame X. de sa demande incidente de dommages et intérêts.
- SUR L'APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE :
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- SUR LES DÉPENS :
Il y lieu de condamner l'appelante qui succombe aux entiers dépens de l'instance d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
- [minute page 7] Confirme en toutes ses dispositions le jugement querellé rendu le 4 décembre 2006 par le Tribunal d'instance de Fort de France,
Y ajoutant :
- Déboute l'intimée de sa demande incidente de dommages et intérêts,
- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- Condamne l'appelante aux entiers dépens de l'instance d'appel, qui seront recouvrés conformément à la législation sur l'Aide Juridictionnelle.
Signé par Monsieur Yves BENHAMOU, Conseiller, par suite d'un empêchement du Président et par Madame Louisiane SOUNDOROM, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.