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CASS. CIV. 2e, 17 février 2005

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 2e, 17 février 2005
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 2
Demande : 03-20684
Date : 17/02/2005
Nature de la décision : Rejet
Décision antérieure : CA RENNES (7e ch.), 15 octobre 2003
Numéro de la décision : 272
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1970

CASS. CIV. 2e, 17 février 2005 : pourvoi n° 03-20684 ; arrêt n° 272

 

Extrait : « attendu que manque en fait le grief qui reproche à la cour d'appel d'avoir retenu que, l'assuré n'étant ni un consommateur ni un non-professionnel, la clause litigieuse ne relevait pas de la réglementation spécifique des clauses abusives ; que le rejet de ce grief prive de tout fondement la demande de renvoi préjudiciel pour saisine de la Cour de justice des Communautés européennes ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 17 FÉVRIER 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 03-20684. Arrêt n° 272

DEMANDEUR à la cassation : Société AXA France IARD anciennement dénommée AXA assurances IARD, société anonyme

DÉFENDEUR à la cassation : Établissement français du sang et autres.

Président : M. DINTILHAC.

 

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

 

Sur le moyen unique :

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 octobre 2003), que M. X. a été contaminé, au cours des années 1983 et 1984, à l'occasion de transfusions sanguines, par le virus de l'hépatite C ; que cette contamination n'a été révélée qu'en 1996 lors d'examens médicaux ;

qu'en mai 2000, M. X. a assigné en responsabilité et indemnisation, devant le tribunal de grande instance, le Centre régional de transfusion sanguine de Rennes, aux droits duquel est venu l'Etablissement français du sang (EFS), ainsi que son assureur, la société Axa France IARD (Axa) ; que celle-ci a dénié sa garantie, au motif que le contrat résilié le 31 décembre 1989 comportait une clause stipulant la cessation de la garantie au 1er janvier 1995, soit à l'expiration d'un délai de 5 ans à compter de la résiliation du contrat d'assurance, et ce conformément à l'arrêté interministériel du 27 juin 1980 et son annexe pris en application de l'article L. 667 du Code de la santé publique ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu'Axa fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré non écrite la clause litigieuse au vu de l'arrêt du Conseil d'Etat, en date du 29 janvier 2000, déclarant illégale la clause-type prévue à l'annexe de l'arrêté du 27 juin 1980, de l'avoir déboutée de sa demande d'annulation de la convention d'assurance, et, en conséquence, de l'avoir condamnée à garantir l'EFS des condamnations mises à sa charge, alors, selon le moyen :

1°/ que la déclaration d'illégalité par la juridiction administrative d'une clause-type réglementaire autorisant l'assureur à subordonner sa garantie aux seuls sinistres ayant fait l'objet d'une réclamation portée à sa connaissance dans un certain délai à compter de la résiliation de la police, ne saurait, sans porter atteinte aux principes de respect des droits acquis et de sécurité juridique, priver rétroactivement d'efficacité la clause qui en est la reproduction, figurant dans un contrat passé et exécuté avant que le juge administratif ne déclare illégal l'arrêté sur la base duquel elle avait été stipulée ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 2 et 1134 du Code civil, ensemble les principes susvisés ;

2°/ que ne peut constituer une clause abusive ou illicite la clause figurant dans un contrat d'assurance conforme à une clause-type dont l'usage était expressément autorisé par un arrêté en vigueur au moment où ledit contrat a été conclu et a produit ses effets ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé derechef les textes susvisés, ensemble les articles 1er et suivants de la Directive 93/13 du 5 avril 1993 ;

3°/ que la clause limitant la garantie dans le temps de l'assureur de responsabilité (RC produits livrés) ayant nécessairement un caractère substantiel, puisque déterminant à la fois la durée des obligations et des engagements de l'assureur et, corrélativement, le montant des primes versées en contrepartie, viole les articles 1110 et 1131 du Code civil, ensemble l'article L. 113-8 du Code des assurances, la cour d'appel qui refuse de considérer que la nullité, à la suite de la déclaration de son illégalité survenue postérieurement à la souscription du contrat, de la clause-type réglementaire d'un contrat d'assurance autorisant l'assureur à subordonner sa garantie à l'existence d'une réclamation portée à sa connaissance dans un certain délai à compter de la résiliation du contrat n'avait pas pour effet d'entraîner la nullité de la garantie dans son ensemble ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu que l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que toute déclaration d'illégalité par le juge administratif, même prononcée dans le cadre d'une autre instance, s'impose au juge civil qui ne peut plus à l'avenir faire application du texte déclaré illégal ; que la cour d'appel en a exactement déduit, sans remettre en cause les droits acquis ou l'objectif de sécurité juridique, que ladite clause, en ce qu'elle tendait à réduire la durée de la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré, était génératrice d'une obligation sans cause et, comme telle, illicite et réputée non écrite ;

Et attendu que manque en fait le grief qui reproche à la cour d'appel d'avoir retenu que, l'assuré n'étant ni un consommateur ni un non-professionnel, la clause litigieuse ne relevait pas de la réglementation spécifique des clauses abusives ; que le rejet de ce grief prive de tout fondement la demande de renvoi préjudiciel pour saisine de la Cour de justice des Communautés européennes ;

Attendu, enfin, qu'ayant souverainement relevé l'absence, lors de la formation du contrat, de toute erreur portant sur la substance des droits en cause, viciant le consentement de l'assureur, l'arrêt qui a exactement retenu que l'erreur ne pouvait être imputée à la déclaration d'illégalité, fût-elle intervenue postérieurement à la formation du contrat, a rejeté à bon droit la demande d'annulation de celui-ci ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'artilce 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Axa France IARD à payer la somme de 2 000 euros à l'Etablissement français du sang et la même somme à M. X. ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille cinq.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, avocat aux Conseils pour la SA AXA FRANCE IARD

 

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG responsable des dommages subis par M. Mxxxx, et d'avoir condamné in solidum l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG et la société AXA à payer à M. Mxxxx la somme de 12.200 Euros à titre de provision à valoir sur l'ensemble de son préjudice ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS, D'UNE PART, QUE "lorsque la loi donne à une autorité administrative compétence pour fixer les conditions d'exercice d'une profession ou d'une activité soumise à autorisation, à agrément ou à nomination par cette autorité, celle-ci peut, si la nature de la profession ou de l'activité l'exige, et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, inclure au nombre de ces conditions l'obligation d'assurance ; que le contrôle exercé par l'Etat sur les centres de transfusion sanguine lui permettait de réglementer l'exercice de leur activité en étendant au profit des receveurs l'obligation d'assurance qui n'était instituée par l'article L.667 du Code de la Santé Publique qu'au profit des donneurs ; qu'il y a donc lieu de rejeter le moyen de l'E.F.S. aux termes duquel l'assurance souscrite est une assurance non obligatoire ce qui rend nulle la clause de garantie subséquente ; que c'est par des motifs très pertinents que la Cour adopte que le premier juge a retenu la garantie de l'assureur ; qu'il sera simplement ajouté que le principe de non rétroactivité de la loi ne s'applique pas à l'arrêt rendu le 29 décembre 2000 par le Conseil d'Etat qui a déclaré illégal l'arrêté du 27 juin 2000 en ce que le dernier alinéa de l'article 4 de son annexe comporte une clause type limitant dans le temps la garantie des centres de transfusion sanguine et que l'erreur de droit alléguée résultant d'une nouvelle jurisprudence ne saurait être cause de nullité" ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1/. ALORS QUE la déclaration d'illégalité par la juridiction administrative d'une clause type réglementaire autorisant l'assureur à subordonner sa garantie aux seuls sinistres ayant fait l'objet d'une réclamation portée à sa connaissance dans un certain délai à compter de la résiliation de la police, ne saurait, sans porter atteinte aux principes de respect des droits acquis et de sécurité juridique, priver rétroactivement d'efficacité la clause qui en est la reproduction, figurant dans un contrat passé et exécuté avant que le juge administratif ne déclare illégal l'arrêté sur la base duquel elle avait été stipulée ; qu'en jugeant le contraire la Cour d'Appel a violé les articles 2 et 1134 du Code Civil, ensemble les principes susvisés ;

2/. ALORS, EN OUTRE, QUE ne peut constituer une clause abusive ou illicite la clause figurant dans un contrat d'assurance conforme à une clause type dont l'usage était expressément autorisé par un arrêté en vigueur au moment où ledit contrat a été conclu et a produit ses effets ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'Appel a violé derechef les textes susvisés, ensemble les articles 1 et suivants de la Directive 93/13 du 5 avril 1993 ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE "la société AXA soulève un dernier moyen ; elle prétend en effet que si la clause de réclamation devait être déclarée nulle, il y aurait alors lieu de prononcer la nullité du contrat en son entier au motif que les parties ont contracté sous l'empire d'une cause dont la fausseté leur a été révélée vingt ans après par l'arrêt du Conseil d'Etat et qu'il s'agit d'une erreur sur la substance même de leur engagement ; que l'Etablissement Français du Sang réplique à juste titre que l'erreur n'est cause de nullité des conventions que si elle porte sur la substance de la chose qui en est l'objet, que l'assureur ne démontre pas qu'il aurait refusé de contracter un engagement de garantie sans limitation de durée et que cet élément présentait pour lui un caractère déterminant alors qu'à l'époque de la formation du contrat, à laquelle il faut se placer, le virus de l'hépatite C n'était même pas identifié et la longueur de l'incubation était ignorée ; que la société AXA doit en conséquence de ce qui précède, garantir la responsabilité de l'Etablissement Français du Sang envers M. Mxxxx, receveur de produits sanguins contaminés, le dommage trouvant son origine dans une transfusion subie pendant la période de validité du contrat" ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

3/. ALORS QUE la clause limitant la garantie dans le temps de l'assureur de responsabilité (RC produits livrés) ayant nécessairement un caractère substantiel, puisque déterminant à la fois la durée des obligations et des engagements de l'assureur et, corrélativement, le montant des primes versées en contrepartie, viole les articles 1110 et 1131 du Code Civil, ensemble l'article L.113-8 du Code des Assurances, la Cour d'appel qui refuse de considérer que la nullité, à la suite de la déclaration de son illégalité survenue postérieurement à la souscription du contrat, de la clause type réglementaire d'un contrat d'assurance autorisant l'assureur à subordonner sa garantie à l'existence d'une réclamation portée à sa connaissance dans un certain délai à compter de la résiliation du contrat n'avait pas pour effet d'entraîner la nullité de la garantie dans son ensemble.